Grippe A : on a voulu vacciner son mari mort
Grippe H1N1. Cette retraitée du Sud-Est toulousain a reçu un bon de vaccin pour son mari, mort depuis 2000. Une erreur qui ne serait pas isolée.
Josette montre la lettre et le questionnaire qu'elle a reçus, invitant son mari, mort depuis dix ans, à aller se vacciner au gymnase de Ramonville. Photo DDM, Thierry Bordas.
Josette montre la lettre et le questionnaire qu'elle a reçus, invitant son mari, mort depuis dix ans, à aller se vacciner au gymnase de Ramonville. Photo DDM, Thierry Bordas.
Josette, une retraitée du Sud-Est toulousain a reçu il y a une quinzaine de jours un bon de vaccination contre la grippe H1N1pour son mari, mort le 7 décembre 2000, il y a près de dix ans.
« Ça m'a blessée quand j'ai reçu ce courrier », raconte la retraitée, qui sort d'une longue maladie et d'une hospitalisation de six mois suite à un accident qui la rend handicapée.
« J'étais furieuse. J'ai trouvé ça un peu gros qu'on se trompe ainsi. C'est comme lorsqu'on envoie aux morts leur carte d'électeur, je ne comprends pas que les listings ne soient pas à jour et je trouve que c'est de l'argent gaspillé », s'indigne la septuagénaire.
La retraitée ne comprend pas comment une telle erreur a pu se produire. « J'ai envoyé le certificat de décès de mon mari à tous les services concernés, à la caisse de retraite, à la Sécu, à sa mutuelle, la Mutuelle nationale territoriale (MNT), dont il dépendait car il était ancien employé de la Ville de Toulouse ».
« Mon mari était éboueur, il a exercé son métier jusqu'à sa retraite à l'âge de 60 ans, en 1993, et il est mort sept ans après de la maladie de Charcot (maladie génétique rare - NDLR). Quelques jours avant sa mort, en décembre 2000, on a demandé un rendez-vous au centre antidouleur, on lui a donné pour le 27 avril 2001… Quand Sarkozy a eu son malaise vagal, on lui a dégagé un étage à l'hôpital… Il y a deux médecines, une pour les riches et une pour les pauvres, comme nous ».
Josette avoue « n'avoir qu'un CAP », mais elle s'est toujours battue : « Vous savez, notre vie, on se l'est gagnée comme on dit ; notre petite maison, c'est mon mari qui l'a construite aux deux tiers, de ses mains, après son travail. Alors quand on voit un tel gâchis… »
La retraitée a reçu en fait deux courriers incitant son mari à se faire vacciner, signés de la ministre Roselyne Bachelot-Narquin. Le lieu est bien indiqué : au gymnase place Karben à Ramonville. L'en-tête émane de la MNT à Paris.
Le bureau départemental de la mutuelle, contacté par nos soins, confirme : le fichier de son mari signale bien la fin de droits au 8 décembre 2000. Il semblerait que les fichiers de la MNT aient été transmis sans garde-fous, au niveau national, devant l'empressement du ministère. D'où de nombreuses erreurs (lire ci-contre). Josette a reçu aussi un bon pour elle. Mais elle, qui se fait vacciner régulièrement contre la grippe depuis 2004, ne se fera pas vacciner contre la grippe H1N1.
Comment c'est possible
Comment a-t-on pu envoyer un courrier à une personne décédée depuis près de dix ans, dont le décès a bien été enregistré régulièrement dans le fichier local de la mutuelle de santé dont il dépendait ? Le bureau haut-garonnais de la MNT, la mutuelle dont le siège parisien figure en en-tête du courrier signé par la ministre de la Santé, le confirme : le mari de Josette est bien radié de ses fichiers au lendemain de la date de son décès, le 8 décembre 2000. L'erreur provient de l'échelon national. Au siège parisien de MNT, une responsable du service Santé l'avoue : « On a envoyé au ministère, à sa demande, les fichiers des adhérents en longue maladie, pris en charge à 100 %, prioritaires pour la vaccination. Les consignes ministérielles étaient claires : ratisser large et faire vite. Les fichiers sont partis bruts sans être analysés. On a eu beaucoup de retours. C'est très déplaisant pour les familles, on est désolés, il y a eu de gros loupés. Des familles nous ont dits : « Vous vaccinez les morts, maintenant ? Adressez-vous au paradis ! ». On envoie un courrier d'explication et d'excuses, suite à ces erreurs, aux personnes qui se manifestent. Une quinzaine de lettres sont en attente ». Mais on parle de 5 000 fichiers erronés (dont quelques destinataires décédés) sur 25 000 dans toute la France.
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