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Date de création : 13.04.2009
Dernière mise à jour : 15.10.2017
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Conte de Madame d'Aulnoy

Conte de Madame d'Aulnoy

L'oiseau Bleu - Illustration de Vittorio Accornero

 

 

Elle chercha elle-même partout ; et venant à la paillasse, qu’elle fit vider, elle y trouva une si grande quantité de diamants, de perles, de rubis, d’émeraudes et de topazes, qu’elle ne savait d’où cela venait. Elle avait résolu de mettre en quelque lieu des papiers pour perdre la princesse ; dans le temps qu’on n’y prenait pas garde, elle en cacha dans la cheminée : mais par bonheur l’Oiseau Bleu était perché au-dessus, qui voyait mieux qu’un lynx, et qui écoutait tout. Il s’écria : « Prends garde à toi, Florine, voilà ton ennemie qui veut te faire une trahison. »

Cette voix si peu attendue épouvanta à tel point la reine, qu’elle n’osa faire ce qu’elle avait médité. « Vous voyez, madame, dit la princesse, que les esprits qui volent en l’air me sont favorables.

- Je crois, dit la reine outrée de colère, que les démons s’intéressent pour vous ; mais malgré eux votre père saura se faire justice.

- Plût au Ciel, s’écria Florine, n’avoir à craindre que la fureur de mon père ! Mais la vôtre, madame, est plus terrible. » 

Que n’étiez-vous là, belle princesse, pour soulager cet Oiseau royal ? Mais elle serait morte, si elle l’avait vu dans un état si déplorable. Il ne voulait prendre aucun soin de sa vie, persuadé que c’était Florine qui lui avait fait jouer ce mauvais tour. « Ah ! barbare, disait-il douloureusement, est-ce ainsi que tu paies la passion la plus pure et la plus tendre qui sera jamais ? Si tu voulais ma mort, que ne me la demandais-tu toi-même ? Elle m’aurait été chère de ta main. Je venais te trouver avec tant d’amour et de confiance ! Je souffrais pour toi, et je souffrais sans me plaindre ! Quoi ! tu m’as sacrifié à la plus cruelle des femmes !

Elle était notre ennemie commune ; tu viens de faire ta paix à mes dépens. C’est toi, Florine, c’est toi qui me poignardes ! Tu as emprunté la main de Truitonne, et tu l’as conduite jusque dans mon sein ! » Ces funestes idées l’accablèrent à un tel point qu’il résolut de mourir.

Mais son ami l’enchanteur, qui avait vu revenir chez lui les grenouilles volantes avec le chariot sans que le roi parût, se mit si en peine de ce qui pouvait lui être arrivé, qu’il parcourut huit fois toute la terre pour le chercher, sans qu’il lui fût possible de le trouver. Il faisait son neuvième tour, lorsqu’il passa dans le bois où il était, et, suivant les règles qu’il s’était prescrites, il sonna du cor assez longtemps, et puis il cria cinq fois de toute sa force : « Roi Charmant, roi Charmant, où êtes-vous ? »

Le roi reconnut la voix de son meilleur ami :

« Approchez, lui dit-il, de cet arbre, et voyez le malheureux roi que vous chérissez, noyé dans son sang. »

L’enchanteur, tout surpris, regardait de tous côtés sans rien voir : « Je suis Oiseau Bleu », dit le roi d’une voix faible et languissante. À ces mots, l’enchanteur le trouva sans peine dans son petit nid. Un autre que lui aurait été étonné plus qu’il ne le fut ; mais il n’ignorait aucun tour de l’art nécromancien : il ne lui en coûta que quelques paroles pour arrêter le sang qui coulait encore ; et avec des herbes qu’il trouva dans le bois, et sur lesquelles il dit deux mots de grimoire, il guérit le roi aussi parfaitement que s’il n’avait pas été blessé.