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Date de création : 24.08.2008
Dernière mise à jour : 04.08.2023
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phoque

phoque

Qui veut la peau des phoques de la Baie de Somme?

 La présence des phoques sur la côte d'Opale divise défenseurs et pourfendeurs de cette espèce protégée.

Abattus, décapités : depuis janvier, cinq spécimens sont morts de façon suspecte. La traque des coupables est lancée. Il faut fermer un oeil, plisser l'autre et braver le contre-jour pour enfin les apercevoir. Dans l'oculaire de la longue-vue, ils apparaissent au loin, sur un banc de sable.

Les phoques de la baie de Somme. Couchés sur le flanc, avachis, moustaches au vent et nageoires en éventail. Ils digèrent à marée basse quand l'océan laisse derrière lui une odeur de fange iodée.

A 300 mètres de là, Laurence Renaudin règle la mire et veille sur la sieste. Bénévole au sein de l'association Picardie Nature, elle prête aux touristes ses jumelles télescopiques sur la pointe du Hourdel, cette langue sablonneuse donnant à la Picardie un air de bout du monde.

Tous les jours, sa mission est la même : surveiller, sensibiliser, expliquer aux touristes l'intérêt de protéger le phoque. C'est que la période des naissances a débuté. Il ne faudrait pas qu'un nouveau-né soit séparé de sa mère à cause d'un curieux. Ou, pire, qu'un animal soit de nouveau visé par un braconnier.

Cinq cadavres sur les plages

"Vous voulez parler des phoques morts, s'enquiert un promeneur du coin. Alors attention à ce que vous racontez. Ici, c'est tranquille d'habitude. Avec cette affaire, on monte les gens les uns contre les autres."

L'affaire, justement : cinq cadavres d'animaux retrouvés depuis janvier sur quatre plages, entre Le Touquet et Gravelines. Deux d'entre eux étaient criblés de plombs.

Deux autres décapités et démembrés. Pas de témoins, peu d'indices. Une première enquête a été classée sans suite par le parquet de Saint-Omer. Une deuxième est toujours en cours concernant les bêtes retrouvées au Touquet, mais le parquet de Boulogne-sur-Mer patine.

Une chose est sûre, deux des bêtes ont été abattues en pleine mer, assure Jacky Karpouzopoulos. En tant que président de la Coordination mammalogique du nord de la France, il est l'un des premiers à avoir examiné les cadavres. Deux phoques avaient l'oesophage et l'estomac remplis de poissons quand ils ont été autopsiés. "Ils étaient en train de chasser.

Vous mangez rarement du poisson quand vous êtes couché sur le sable. Ça ne peut être qu'une action produite en mer." Les animaux ont-ils été pris dans des filets avant d'être rejetés par-dessus bord ? C'est l'une des hypothèses avancées.

Le premier, bagué, s'appelait Tamise. Il aurait été étourdi par un coup avant de couler à pic, noyé. Le deuxième aurait directement essuyé des coups de feu, selon le rapport médico-légal.

Le cas de Dax, jeune phoque lui aussi suivi par les scientifiques, est moins énigmatique. Il a été abattu au fusil à Oye-Plage, plus au nord. A bout portant. "Il faisait face à son agresseur et avait la tête légèrement relevée." Quant aux deux derniers cadavres, putréfiés, sans tête ni nageoires, ils gardent leur part de mystère. Impossible à ce jour d'évacuer la piste d'une mort naturelle. Les membres en décomposition n'étant pas sectionnés de façon franche. Des bénévoles de l'association Picardie Nature observent les phoques depuis la pointe du Hourdel, le 15 juin.

Des bénévoles de l'association Picardie Nature observent les phoques depuis la pointe du Hourdel, le 15 juin.Eric Benard / L'Express Pour faire avancer ce Cluedo maritime, l'association Sea Shepherd a mis le paquet : 10 000 euros de récompense contre toute info. "On a eu des signalements de silhouettes, des noms de bateaux, mais rien de probant", regrette Lamya Essemlali, présidente de l'antenne française de l'association à l'origine de ce "wanted" alléchant. A l'heure actuelle, on a surtout des gens qui nous disent qu'ils seront attentifs. Ça a eu l'intérêt d'alerter l'opinion." Les dunes ont désormais des yeux et la suspicion est partout. Dans les discussions, on évoque l'acte d'un "taré", de chasseurs excités de la gâchette. Mais les plus gros soupçons se portent sur les pêcheurs du coin. "On nous présente comme des tueurs sanguinaires"

En 2013, déjà, l'un d'eux avait écopé de deux mois de prison avec sursis pour avoir égorgé un phoque. "Une incitation à recommencer", dénonce Sea Shepherd. Depuis, le climat ne s'est pas apaisé. Les uns veulent protéger la faune. Les autres voient d'un très mauvais oeil la présence de mammifères qui leur voleraient leurs poissons. Entre les deux s'est creusée une fosse des Mariannes de l'incompréhension.

Il y a cinq ans, un collectif de défense contre la prolifération de ces animaux a même vu le jour. Il réunit 3 000 personnes derrière Fabrice Gosselin, pêcheur à pied de la côte d'Opale. "On est victime de ce qu'on appelle l'écologie traumatique, peste le président dans sa barbe blanchie par les embruns. Cette façon de nous stigmatiser, de nous présenter comme des tueurs sanguinaires, c'est grave. On n'a jamais demandé de les éradiquer !

Ce qu'on veut, c'est une régulation." Comme pour le loup dans les Alpes, en somme. Rien à faire. Pour Sea Shepherd, l'existence même de ce collectif crée un climat délétère. Voire une incitation à la haine. Chercheur en écologie littorale, Thierry Ruellet se rappelle ce matin où un provocateur a tapé à la porte de son labo, il y a quelques années. "Il a ouvert son coffre, il en avait tiré deux. C'était pour dire : 'Il paraît que tu aimes les phoques, tiens regarde.' C'était typiquement un con." "Ce collectif véhicule l'idée que ce sont des goinfres qui vident l'océan et qu'il faut autoriser les tirs", s'emporte Lamya Essemlali, rappelant au passage qu'on parle là d'un animal protégé.

"Ces saloperies bouffent tout" Sur le pourtour de la Manche, de la baie de Somme à la frontière belge, deux espèces venues du nord ont ainsi pris leurs quartiers. 402 phoques gris et 709 veaux marins selon le dernier comptage, en 2017. Dans la majorité des sites, les recensements soulignent une augmentation des effectifs. La loi interdit leur destruction, leur capture et tout "dérangement volontaire". Ce dernier point est le plus ambigu. Pour les associations, il n'est pas tolérable d'approcher un phoque à moins de 300 mètres.

Or, dans les faits, les rencontres impromptues sont fréquentes, surtout quand les marins déroulent leurs filets. "Ces saloperies bouffent tout et font des trous dans les mailles", peste Christophe Brisville, pêcheur à la petite semaine au Hourdel. A 37 ans, il parle comme un ancêtre à qui on a volé une partie de sa jeunesse. Bras croisés, c'est du menton qu'il désigne son ancien spot préféré pour traquer le mulet.

"Mais il n'y en a plus un seul." Même constat à un vol de cormoran de là, à Stella-Plage. Fabrice Gosselin donne rendez-vous au petit matin pour une partie de pêche à marée montante. L'homme prête une paire de bottes, il sait recevoir. Deux fois par semaine, il gare son Berlingo, lâche son chien Mozart - Momo - et tend sa ligne depuis le rivage. Vent d'ouest et ciel flamand, pas de doute, "c'est un temps à faire du bar, ça". Avec Jean-Jacques, un ami, ils sont encore les seuls sur l'immense étendue de sable.

"Cinq, six ans en arrière, on était une trentaine. C'est fini. Nous, on est là par passion, parce que ça vide la tête. C'est tout." Trois heures plus tard, il est temps de rentrer, sans le moindre poisson dans le panier. Et ne mettez pas en doute leur savoir-faire. Les deux sexagénaires sont nés ici, une canne à la main, quand les phoques n'étaient pas leurs concurrents. Légendes de port en port Dans la région, on fantasme d'ailleurs beaucoup sur la capacité de ces bêtes à se servir dans le garde-manger. "Vous savez que ça mange 40 kilos de poisson par jour !" s'indigne un promeneur du Touquet. Pas vraiment. Pour mettre fin aux idées reçues, une équipe de scientifiques a rédigé un rapport de référence, baptisé "Eco phoque".

Du factuel, rien de plus. Il évoque une consommation moyenne de 4 kilos par jour et par tête de pipe, soit un total de 1 500 tonnes par an pour l'ensemble. Un chiffre à mettre en balance avec les 35 000 tonnes débarquées chaque année par les chalutiers français sur le port de Boulogne-sur-Mer. "Beaucoup de gens sont très loin des réalités", ajoute Thierry Ruellet, coauteur du rapport. Il vise notamment un public non averti. "Les gens qui ont des résidences secondaires, par exemple, imaginent ce que le phoque peut causer aux pêcheurs. Ils véhiculent de fausses idées." Fabrice Gosselin (en noir) taquine le bar à Stella-Plage (Pas-de-Calais).

Mais ça ne mord pas.Fabrice Gosselin (en noir) taquine le bar à Stella-Plage (Pas-de-Calais). Mais ça ne mord pas.Eric Benard Et ainsi circulent quelques légendes de port en port. Ici, on évoque des phoques attaquant les chiens et "bouffant" les tadornes de Belon, un canard de la région. Là, on parle d'un risque de pandémie, d'un virus transmissible à l'homme - il existe une virose, mais le risque sanitaire pour l'homme est quasi inexistant... Reste la question de la raréfaction de la ressource. N'y a-t-il vraiment plus assez de poissons pour tout le monde ? Les écolos ne le croient pas et usent d'un argument qui hérissera leurs adversaires : "S'il y a des phoques, c'est qu'il y a encore du poisson." Leur présence serait la preuve de la bonne santé de l'écosystème et d'une chaîne alimentaire aux mailles solides. "Les premiers à dégager quand il y a moins de poissons, ce sont les prédateurs", ajoute Lamya Essemlali.

Alors, c'est vrai, il n'y en a sans doute plus autant qu'auparavant. Mais se focaliser sur le phoque, c'est oublier d'autres menaces, peut-être plus importantes : "L'érosion côtière, l'élévation de la température de l'eau, les dragages qui mettent en émulsion des métaux lourds emprisonnés dans les sédiments, la pêche électrique des Néerlandais", égrène Jacky Karpouzopoulos. Folles théories Pour Thierry Ruellet, la fronde des pêcheurs germerait ailleurs : "En fait, ce qui les embête le plus, c'est d'être poursuivis parce qu'un phoque a approché leur bateau." Si les textes étaient appliqués à la lettre, les tribunaux seraient remplis de marins, incapables de respecter la distance de 300 mètres. Car, depuis la côte, certains protecteurs des animaux, un brin zélés, les observent aux jumelles.

"J'en connais un qui s'est retrouvé avec un animal dans ses filets, raconte le scientifique, navré. En toute bonne foi, il a essayé de libérer cette pauvre bête, mais il ne dispose pas des autorisations ad hoc pour le faire. Il se trouve que certains ont été assez cons pour le poursuivre. Il y a un problème de discernement." D'où le climat délétère que l'on connaît. Certains pêcheurs se sentent traqués, voire menacés. Ils dénoncent la "professionnalisation" des défenseurs des animaux qui ont fait de leur combat un gagne-pain. Chez les antiphoques, on en est persuadé, "les écolos font tout pour sanctuariser la zone. Ils veulent foutre l'humain dehors et sont prêts à tout pour cela". Même à mettre en scène les massacres ? C'est la folle théorie que défendent de nombreux locaux. Les associatifs auraient publié de fausses photos de cadavres pour porter le discrédit sur les pêcheurs et les chasseurs, trop influents à leur goût. Foutaises, répond-on dans le camp d'en face.

L'homme y a encore toute sa place, d'autant qu'il a fait du phoque un business. Des figurines de phoques dans un magasin du Hourdel, dans la Somme.Des figurines de phoques dans un magasin du Hourdel, dans la Somme.RS Macron, le voisin du Touquet En baie de Somme, l'activité phare est désormais la balade au plus près des bestiaux, à pied, en calèche, ou en kayak. En fin de visite, on pousse forcément la porte d'un magasin de souvenirs. On y découvre toute une gamme de produits dérivés allant du mug au set de table, en passant par la boule à neige spéciale phoque. Au Crotoy, l'un des villages de la baie, la demande d'activités relatives aux mammifères a quadruplé en dix ans. Certains hameaux se transforment et voient fleurir les pancartes "à louer". D'autres sont bousculés par le ballet des cars de touristes tout droit venus de Belgique ou d'Allemagne. Seul sur sa plage, Fabrice Gosselin n'est pas d'humeur à disserter sur les bienfaits de l'écotourisme.

Oui, la région profite de la popularité de l'animal. Mais qui évalue la perte du secteur de la pêche de plaisance ? "Beaucoup vendent leur bateau, des magasins d'articles de pêche mettent la clef sous la porte, tonne le loup de mer. Et je ne parle pas des gens qui vendaient ou faisaient plaisir à leur famille avec le poisson. J'en connais qui survivent avec 600 euros de pension par mois. La pêche, c'est une activité vivrière !" Depuis cinq ans, il a déjà été reçu par plusieurs ministres (Frédéric Cuvillier, Alain Vidalies, Nicolas Hulot). Sans suite. Alors il compte prochainement taper un cran plus haut, à la porte d'un voisin touquettois nommé Emmanuel Macron. "Tiens, savez-vous qu'il adore la sole ?" S'il en va de l'appétit du président...