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pilule

Publié à 17:04 par fandeloup Tags : société cadre vie moi bonne monde france enfants saint nuit
pilule

La pilule contre le chagrin d’amour arrive en France

 Anne, dévastée par son divorce difficile, se remet grâce au Propranolol, un cachet qui atténue ses émotions.

Le chercheur canadien qui a mis au point cette très sérieuse thérapie est en train de former des médecins en France. A chaque rayon de soleil, Anne remonte le long du fleuve Saint-Laurent, à Montréal, s’enivrant d’air frais, elle dont le souffle fut coupé pendant des mois. C’était lors de sa descente aux enfers.

« Aujourd’hui, je vais bien, d’une manière inespérée par rapport à ce que j’ai vécu », s’enthousiasme celle qui fut « dévastée », dit-elle, par un divorce dont la procédure est toujours en cours. Un chagrin d’amour, un chagrin d’estime, qui l’a submergée physiquement et moralement. Et dont cette Française de 55 ans, installée au Québec depuis cinq ans, a été guérie grâce à… un petit comprimé. Son nom : le Propranolol.

Son surnom : « pilule de l’oubli ».

Un médicament, associé à une thérapie très encadrée, que les victimes des attentats, notamment de ceux du 13 novembre 2015 à Paris, connaissent bien. Dans le cadre d’un essai clinique unique au monde, 360 d’entre elles, souffrant de stress post-traumatique, ont suivi ce protocole innovant.

Il a la capacité, non pas de détruire un souvenir mais d’en atténuer l’intensité négative. « Ce médoc m’a sauvé la vie », nous avait confié Max, 55 ans, lorsque nous l’avions rencontré en novembre 2017.

Ce Parisien, qui a accompagné jusqu’à son dernier souffle une des victimes des attentats du 13 Novembre (il était au café A la Bonne Bière) a été le premier patient à intégrer l’essai clinique Paris Mémoire vive, mené par l’Assistance publique-Hôpitaux de Paris. Soigner les cœurs brisés Face aux résultats prometteurs, le psychiatre et chercheur canadien Alain Brunet a élargi sa thérapie à la rupture amoureuse.

Encadré par un psychologue ou un psychiatre, le patient prend un comprimé et écrit son souvenir traumatique. Une heure plus tard, il lit son récit. La pilule, un bêtabloquant, fait effet. Elle interfère au moment où le souvenir passe de la mémoire de court à long terme en lui faisant perdre de son intensité. Le traumatisme reste mais devient un souvenir, certes mauvais, mais vivable. « Le chagrin d’amour, cela a l’air léger.

Et pour cause, il ne présente pas de menace vitale. Mais si certaines personnes réagissent bien, pour d’autres, le sol se dérobe sous leurs pieds. Il peut alors engendrer un trouble de l’adaptation, au même titre que le stress post-traumatique. Ce sont des pensées répétitives, une envie dévorante de pleurer, des nausées, de la détresse. C’est à ces patients que la thérapie s’adresse », décrypte le professeur Brunet.

Nous l’annonçons, il forme depuis janvier des médecins français qui vont, comme lui l’a fait avec Anne à Montréal, soigner les cœurs brisés de l’Hexagone. «Pour moi, c’était la thérapie des soldats en Afghanistan»

Anne a épousé celui qui deviendra le papa de ses trois enfants en 1991. Elle l’a précédé de quelques mois dans leur projet commun d’expatriation au Canada. Lui, finalement, ne déménagera pas.

« Un matin, j’apprends que je suis en train de divorcer depuis quatre mois. 25 ans qui se terminent ainsi », nous confie-t-elle. Son divorce, elle le vit alors comme « une claque de première catégorie » et perd confiance en elle. « Le jour, je gardais mon côté rationnel mais la nuit, je faisais sans cesse des cauchemars horribles. La fatigue s’accumulait, je limitais mes sorties au strict minimum, je sursautais. J’étais comme sidérée », détaille-t-elle.

Un jour, elle se rend à l’hôpital de Montréal où le diagnostic de stress post-traumatique est posé. Elle intègre le dispositif d’Alain Brunet.

« C’était un peu dingue car pour moi, c’était la thérapie des soldats en Afghanistan ! Je me suis dit, c’est sérieux, académique, tente, tu n’as rien à perdre ». Gagné : en sept séances intenses, parfois très difficiles, puis seize semaines de stabilisation, elle remonte la pente. « La blessure reste, note-t-elle, mais son impact est moins fort. Je ne rumine plus, j’avance », explique-t-elle. Anne le concède, il est très difficile de « parler rupture ».

Si elle le fait aujourd’hui, « c’est parce que j’ai compris qu’il n’y a pas de honte à souffrir d’une séparation. J’espère que d’autres oseront demander de l’aide. »