JOURNEE MONDIALE ou INTERNATIONALE

Une détérioration des conditions de vie ...

                                                                                                                                                                                                                                                                                                               Imaginez un instant que vous ayez partiellement perdu l’usage de votre bras droit suite à un grave accident ou un AVC. Dans un pays comme le nôtre, privilégié par rapport à une grande partie de la planète, vous auriez vraisemblablement suivi des séances de rééducation. Dans votre malheur, l’accès à des services de réadaptation de qualité vous aura permis de compenser en partie la perte fonctionnelle de votre bras et de limiter les conséquences en termes de handicap pour votre vie sociale et professionnelle.

Les raisons de l’exclusion des personnes handicapées sont nombreuses : préjugés, manque d’accès à l’information… Tous ces phénomènes ont un impact fort. Mais l’impossibilité d’accéder à la santé et aux soins de rééducation représente le premier basculement vers la discrimination.

Or, l’insuffisance de services de réadaptation est une réalité récurrente dans la majorité des pays dans lesquels nous, Handicap International, intervenons. Associé au non accès à des services de santé, ce manque est lourd de conséquences humaines, sociales et économiques. Il constitue un frein au développement.

Car le fait de ne pouvoir atteindre et conserver un maximum d’autonomie freine ou empêche la participation à la société. Cette détérioration des conditions de vie touche la personne et son entourage, prenant, dans certains pays, un tour dramatique.

Des services perçus comme un luxe :

Un milliard de personnes dans le monde vit avec un handicap, 80% d’entre elles dans des pays pauvres ou en voie de développement. Nous connaissons déjà les difficultés auxquelles les personnes handicapées font face dans nos pays dits riches, elles sont sans commune mesure avec la spirale de l’exclusion dans laquelle elles sont emportées en République démocratique du Congo, au Timor Oriental ou au Pakistan, pour ne citer que quelques exemples.

Dans les pays les plus pauvres, le personnel compétent en matière de réadaptation manque parfois cruellement.

Au moment du tremblement de terre du 12 janvier 2010, Haïti ne comptait qu’un kinésithérapeute et un ergothérapeute. Il a fallu former du personnel. L’absence de matériel est aussi malheureusement la règle et ajoute du handicap au handicap. Ne pas bénéficier de béquilles, de fauteuils roulants, de prothèses, d’orthèses, etc., confine la personne à l’isolement économique, social et familial.

Suite au séisme d’octobre 2005, à Battagram, dans le nord du Pakistan, un jeune homme amputé des deux jambes ayant pu être appareillé, a ainsi repris son travail de routier et a évité le sort souvent réservé aux "doubles amputés" : la mendicité.

Les structures de réadaptation, quand elles existent, restent rares, avec un maillage géographique largement insuffisant. Leur déconnexion avec les systèmes de santé sont un obstacle à la possibilité d’accompagner les personnes de façon efficace et cohérente.

En réalité, ces services restent encore trop souvent perçus comme un luxe, alors qu’ils sont une condition essentielle pour réduire l’impact à long terme, sur les personnes elles-mêmes et sur la société dans son ensemble, de l’exclusion liée au handicap.

4 fois plus de risque d'être mal soigné :

Par ailleurs, les barrières de toutes sortes posées aux personnes handicapées pour accéder comme les autres aux services de santé viennent se superposer aux manques en termes de réadaptation avec un impact énorme sur la qualité de vie : barrières physiques ou financières, mais aussi liées à un manque de formation et de connaissances.

Par réflexe, le personnel médical d’un centre de soins estimera trop souvent qu’une personne handicapée doit être prise en charge par un spécialiste et la renverra chez elle, alors que 80% de ses besoins de santé sont identiques aux besoins généraux de la population. Au final, selon l’OMS, une personne handicapée à 4 fois plus de risques d’être mal soignée dans les systèmes de soins.

                                                                                                                                                                                                                                                                                                          Les enjeux pour l’avenir sont pourtant de taille : l’augmentation des maladies non transmissibles (cancer, maladie cardio-vasculaire, etc.) et le vieillissement de la population, accroissent les besoins en réadaptation, y compris dans les pays en développement. Il est temps que des progrès décisifs soient réalisés dans la mise en place de services permettant d’alléger le poids de la dépendance, et ce, partout dans le monde.

Vers l'égalité des droits :

La Convention relative aux droits des personnes handicapées entrée en vigueur en 2008 établit l’obligation pour les États parties d’organiser, de renforcer et de développer des services de réadaptation et affirme le rôle que jouent ces services dans la pleine participation des personnes handicapées à la société.

En mai 2014, la 67ème Assemblée mondiale de la Santé a adopté un Plan d’action pour le Handicap qui pose le renforcement  et le développement de services de réadaptation comme un de ses trois objectifs majeurs.

Ces deux textes représentent une opportunité pour changer les choses. En tant qu’acteurs issus de la société civile et travaillant au plus près des personnes handicapées, nous devons continuer à plaider pour que les services de réadaptation ne soient plus considérés comme un luxe, et montrer à quel point leur mise en place peut faire une différence énorme.

En 2015, seront redéfinis les "Objectifs du millénaire pour le Développement", initiés en 2000 par les Nations unies pour lutter contre la pauvreté et la mortalité infantile dans le monde. Ce rendez-vous sera un moment crucial pour inscrire la pleine participation des personnes handicapées à l’agenda officiel des efforts pour le développement, de l’ensemble de la communauté internationale. 

Rompre le cercle vicieux de la pauvreté, du handicap et de l’exclusion constitue une étape préalable indispensable vers l’égalité des droits pour les personnes handicapées.