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Date de création : 27.11.2008
Dernière mise à jour : 08.02.2013
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Les départements-(histoire)- Allier - 03 -

Publié à 17:31 par acoeuretacris Tags : Départements
Les départements-(histoire)- Allier - 03 -

 

(Région Auvergne)

Le département de l'Allier est formé de la presque totalité de l'ancien Bourbonnais. Le territoire de cette province était primitivement occupé par les Éduens, les Arvernes et les Bituriges. Sur la demande des Éduens, alliés de César, celui-ci y établit, sous leur protection, une partie des Boïens, qui, sortis de la Germanie, avaient, en envahissant la Gaule avec les Helvètes, fourni au conquérant un prétexte pour se mêler des affaires du pays, et qui, domptés par lui, avaient mérité par leur courage l'estime du vainqueur. Cette colonie s'établit entre la Loire et l'Allier, entre le pays des Éduens et celui des Arvernes, et fonda une ville appelée Gergovia Boïorum.

La cité nouvelle devint en quelques années assez importante. Lors de la grande insurrection gauloise contre César, elle assista à une lutte acharnée et sanglante entre Vercingétorix et les Romains. Sous la domination impériale, le pays appartint moitié à la première Aquitaine, moitié à la première Lyonnaise. Dernier témoin des efforts de la nationalité gauloise contre César, il garda longtemps un esprit d'indépendance qui se manifesta par de fréquentes insurrections. La révolte du Boïen Maricus sous Vitellius, celle des Bagaudes au IIIe siècle de notre ère appelèrent sur cette malheureuse contrée de nouveaux désastres. À l'époque des invasions barbares, elle fit partie de l'empire des Wisigoths et ne fut soumise aux Francs qu'en 759, sous Pépin le Bref.

Le Bourbonnais étant le berceau de la maison royale de Bourbon, la flatterie n'a pas manqué d'assigner une antique origine à la famille qui y dominait, celle des sires de Bourbon. Les uns la font remonter jusqu'à Clovis, d'autres seulement jusqu'à Charlemagne ; mais l'histoire ne trouve rien d'authentique sur cette maison avant le règne de Charles le Simple. En 913, ce prince donne à Aymar ou Adhémar quelques fiefs sur les bords de l'Allier ; les successeurs prennent presque tous le nom d'Archambault, qui resta attaché à la ville de Bourbon l'Archambault. Leur histoire est celle de presque tous les seigneurs contemporains. En guerre avec leurs voisins, ils s'abandonnent à toutes les violences du temps, se faisant absoudre par les moines qu'ils comblent de présents ; mais comme ceux-ci étaient plus avides encore que les sires de Bourbon n'étaient généreux, ces barons tentent parfois de leur reprendre les donations arrachées à leurs prédécesseurs ou usurpées sans aucun titre ; de là des querelles perpétuelles entre le clergé et les seigneurs. L'une de ces querelles fut terminée par le pape Urbain II en faveur de la maison de Bourbon.

En 1115, sous le règne de Louis le Gros, Aymon II envahit le domaine de son neveu, orphelin et encore enfant, et usurpe le titre de baron de Bourbon. La mère de l'enfant porte plainte auprès du roi de France, qui se trouvait alors à Bourges. Celui-ci somme Aymon de comparaître devant lui ; Aymon refuse et s'enferme dans le château de Germigny. Louis le Gros vient l'assiéger, donne plusieurs assauts inutiles et convertit le siège en blocus. Forcé par la famine, Aymon est contraint de se rendre et condamné par une cour de justice à restituer à son neveu les domaines dont il s'était emparé ; mais l'enfant étant mort dans l'intervalle, l'arrêt ne fut point exécuté, et Aymon devint le légitime possesseur de la baronnie de Bourbon.

Son fils, Archambault VI, part avec Louis le Jeune pour la Palestine. Pour avoir de l'argent, il s'adresse aux moines de Souvigny, comblés de biens par ses prédécesseurs, et qui semblaient ne pouvoir refuser de contribuer à une si sainte entreprise ; ils refusent pourtant et ne lui accordent la somme demandée qu'après avoir reçu des garanties, non seulement du sire de Bourbon, mais de sa femme, Agnès de Savoie, et d'une trentaine de gentilshommes du pays.

Vers la fin du XIIe siècle, la ligne masculine de la famille de Bourbon s'éteignit ; la fille d'Archambault VII, Mahault, épouse Guy de Dampierre, seigneur de Saint-Dizier, en Champagne, et lui apporte en dot l'héritage de ses pères. Leur fils, Archambault VIII, fut un des favoris du roi Louis VIII. Il le suivit à la croisade contre les Albigeois et s'y distingua par sa bravoure et son habileté. C'est par lui que fut racontée au chroniqueur, qui nous l'a transmise une anecdote souvent citée, et qui témoigne tout à la fois et de la chasteté du roi de France et de la familiarité dont Archambault jouissait auprès du roi.

Louis VIII était tombé malade à Montpensier ; les médecins lui déclarent que son tempérament robuste et sanguin ne peut s'accommoder de la fidélité absolue qu'il garde à la reine absente. Pendant son sommeil, on introduit dans sa chambre une belle jeune fille ; le roi en se réveillant la voit, lui parle avec douceur, et après avoir fait appeler Archambault, auquel il attribuait ce piège tendu à sa chasteté, il lui ordonne de reconduire la jeune fille chez ses parents, ajoutant que mieux valait mourir que de se sauver par un péché mortel. En mourant, Louis recommanda son fils au connétable Matthieu de Montmorency et au sire de Bourbon.

Ce fils devait être saint Louis. Archambault lui fut fidèle, il combattit bravement à côté de lui à la bataille de Taillebour et y fut blessé ; il mourut quelques mois après des suites de ses blessures. Son règne avait été marqué par un agrandissement considérable de ses domaines, par des fondations pieuses et de grandes libéralités envers le clergé, et par la concession de chartes, de franchises aux communes, qui s'établissaient alors par toute la France. Son fils, Archambault IX, suivit saint Louis à sa première croisade et augmenta encore la puissance de sa famille, qui allait pourtant s'éteindre dans sa personne. Il mourat pendant la croisade dans l'île de Chypre. Il laissait deux filles, dont l'une, Agnès, héritière du Bourbonnais, épousa en secondes noces Robert d'Artois, neveu de saint Louis. Elle avait une fille de son premier mariage ; cette fille, son unique héritière, épousa un des fils de saint Louis, Robert, comte de Clermont. De ce mariage sortit la maison royale de Bourbon. Le Bourbonnais appartint depuis cette, époque à la maison royale de France.

Le premier prince de cette race, Robert, à l'âge de vingt ans, reçut dans un tournoi un coup à la tête ; on craignit longtemps pour ses jours. Il guérit, mais il resta imbécile toute sa vie ; il languit dans une perpétuelle enfance jusqu'à l'âge de cinquante neuf ans. Il mourut à Paris en 1317.

Louis Ier, son fils, gouvernait déjà depuis longtemps les domaines de son père. Il se signala dans les guerres de Flandre, et notamment à la bataille désastreuse de Courtrai, où il sauva les restes de l'armée française. Sous Charles le Bel, le Bourbonnais fut érigé en duché-pairie en faveur de Louis Ier. Ce prince, qui avait si brillamment contribué à la splendeur de sa maison et en avait augmenté les domaines du comté de la Marche et d'une partie de la Limagne d'Auvergne, mourut en 1341.

Pierre Ier, son fils, lui succéda. Blessé à la bataille de Crécy, il fut tué à celle de Poitiers en combattant bravement auprès du roi Jean Il. Il avait besoin de cette mort glorieuse pour effacer le souvenir des intrigues auxquelles il s'était livré avec Charles le Mauvais, roi de Navarre, le mauvais génie de la France à cette époque. Son frère, Jacques, qui avait obtenu l'épée de connétable, fut blessé et pris à la bataille de Poitiers.

Pierre Ier, fastueux et magnifique, avait contracté beaucoup de dettes, et l'embarras de ses affaires n'avait pas peu contribué à l'engager dans sa triste complicité avec Charles le Mauvais. Louis II, son fils, probe et loyal, se hâta d'engager ses biens pour couvrir les dettes qui avaient failli être si fatales à l'honneur de son père et de sa maison. Les créanciers du feu duc avaient eu recours à la puissance ecclésiastique et avaient fait excommunier Pierre Ier ; son cadavre même était resté en gage dans l'église de Poitiers. Son fils alla l'y chercher lui-même, après avoir obtenu de la cour de Rome révocation de l'excommunication lancée contre lui. La France était alors bien malheureuse ; livrée par la trahison, déchirée par les factions, désolée par la guerre étrangère, elle fut encore en proie aux horreurs de la Jacquerie, aux fureurs des paysans soulevés contre les nobles par la misère et l'oppression.

Dans ce siècle de crimes et de misères, Louis s'efforça de rester toujours loyal et de guérir les maux de son pays. Il se dévoua au service du dauphin (depuis Charles V), alla en Angleterre négocier la mise en liberté du roi Jean et fut un des otages qui le remplacèrent à Londres. Les retards que l'on mit à exécuter toutes les clauses du traité de Brétigny firent durer huit ans sa captivité, qui, du reste, n'eut rien de rude. Il vécut à la cour d'Angleterre, libre. sur parole, au milieu des fêtes et des plaisirs ; on l'y appelait le roi d'honneur et de liesse. Il obtint de parcourir l'Angleterre ; mais le roi Édouard ne voulait point le laisser retourner en France.

En vain les vassaux du duc s'étaient cotisés pour réunir 1 000 000 de florins, dont Louis s'était rendu pleige, c'est-à-dire dont il s'était porté garant, pour la liberté du roi de France. La somme avait été remise au roi d'Angleterre ; mais celui-ci alléguait toujours de nouveaux prétextes pour le retenir. « Enfin, dit M. Béraud (Histoire des ducs de Bourbon), la neuvième année de sa captivité allait commencer, lorsqu'une intrigue de cour vint lui rendre cette liberté qu'il n'avait pu obtenir par le payement de son cautionnement. Édouard avait pour ministre et pour favori Guillaume Wicam, qu'il avait élevé à la dignité de grand chancelier ; il lui destinait l'évêché de Winchester, qui vaquait par la mort du cardinal de Winchester ; mais il ne pouvait obtenir les bulles du pape Urbain V pour mettre Wicam en possession du riche bénéfice ; il eut recours au duc de Bourbon, dont le crédit auprès du pontife était connu ; il lui promit la liberté pour prix du service qu'il en attendait ; il l'assura qu'il lui serait bien courtois à la prison. Le duc écrivit à la cour de Rome, et il en reçut un bref par lequel elle le laissa maître de disposer de l'évêché. Bourbon ne le remit au roi d'Angleterre qu'après lui avoir fait signer l'acte de sa délivrance, pour lequel Édouard trouva encore moyen de lui faire payer 20 000 livres. Il fut à peine libre, qu'il se hâta de se rendre dans le Bourbonnais, dont les habitants venaient de fournir encore une somme de 140 000 livres, montant des obligations qu'il avait contractées pendant son séjour à Londres. »

Louis trouva la province dévastée, épuisée ; l'anarchie morale y répondait, comme dans toute la France, au déplorable état de l'agriculture et du commerce. Cette vaillante chevalerie française, si glorieuse au temps des croisades, s'était peu à peu corrompue, affaiblie ; la noblesse, après avoir fui honteusement à Poitiers, était l'objet des railleries du peuple et des bourgeois, qui commençaient à sentir leur force et à perdre le respect que leurs maîtres ne savaient plus leur imposer ; la vieille organisation féodale avait perdu son prestige, qu'elle ne devait guère reconquérir, et le temps n'était pas loin où une pauvre fille du peuple, Jehanne la bonne Lorraine, allait donner l'exemple du patriotisme et du courage à ces barons et chevaliers, oublieux des antiques traditions.

Louis de Bourbon tenta de ressusciter dans le cœur de ses barons les sentiments d'autrefois et voulut fonder un ordre de chevalerie. Après avoir réuni ses anciens compagnons d'armes, il les traita magnifiquement pendant trois jours, puis leur donna rendez-vous à Moulins pour le premier jour de l'année 1369. Au jour dit, il leur déclara son projet, leur distribua les insignes du nouvel ordre, dont la devise était ce joyeux mot : ESPÉRANCE entendit la messe avec eux et les exhorta à défendre Dieu, la patrie et les dames.

« Je prie à tous ceux de l'ordre, s'écria-t-il, qu'ils veuillent honorer dames et demoiselles et ne souffrir en ouïr dire du mal ; car ceux qui mal en disent sont petits de leur honneur et disent d'une dame qui ne se peut revancher ce qu'ils n'oseroient pas dire d'un homme ; dont plus en auroit leur honte ; et des femmes, après Dieu, vient en partie de l'honneur en ce monde ; il faut aussi que ceux qui portent cet ordre ne soient jongleurs et médisants l'un de l'autre, qui est une laide chose à tout gentilhomme, mais portent foi l'un à l'autre comme il appartient à tout honneur et chevalerie. Mes amis, à travers mon écu d'or est une bande où il y a écrit : Allen, c'est-à-dire : Allons tous ensemble au service de Dieu, et soyons tous un en la défense de nos pays, et là où nous pourrons trouver et quêter honneur par fait de chevalerie. Et pour ce, mes frères, je vous ai dit ce que signifie l'ordre de l'écu d'or, lequel un chacun à qui je l'ai baillé le doit jurer et promettre de le tenir, et moi le premier. »

Il jura et reçut le serment de ses compagnons. Alors le seigneur de Vichy, prenant la parole au nom de tous les chevaliers : « Notre très redouté seigneur, lui dit-il, voyez ici votre chevalerie qui vous remercie très humblement du bel ordre et grands dons que leur avez donnés ; lesquels ne vous savent que donner en ce jour, fors qu'ils vous offrent leurs corps et leurs biens ; qu'il vous plaise les recevoir à cettuy premier jour de l'an, nonobstant qu'ils y sont obligés ; mais leur cœur est ferme et leur volonté est pareille. » - « Je reçois, s'écria le duc ému, je reçois aujourd'hui les plus belles étrennes que seigneur puisse. recevoir, quand je reçois le cœur de si nobles chevaliers. »

Mais, comme une apparition anticipée de l'esprit positif des temps modernes au milieu de cette scène chevaleresque, entrait dans la salle maître Huguenin Chauveau, justicier sévère, procureur général du duc, lequel apportait à Louis un registre où étaient relatés les forfaits et désobéissances de plusieurs seigneurs pendant l'absence du duc ; il réclamait justice ; et pour quelques-uns il y allait de la vie. « Maître Huguenin, dit le duc, avez-vous tenu, aussi registre des services qu'ils m'ont rendus ? » Et, prenant le rapport, il le jeta dans la grande cheminée, où flamboyait un feu de janvier. Le passé et l'avenir s'étaient rencontrés dans cette scène singulière, l'un avec ses élans faciles vers le bien comme vers le mal, l'autre avec cet esprit de froide justice, auquel un moment d'enthousiasme ne fait pas oublier si aisément les maux soufferts et les crimes commis.

Louis, surnommé le Grand ou le Bon, et qui a mérité au moins le second de ces titres, ne se borna pas à conférer ces insignes de chevalerie à ses barons ; il voulut qu'ils les honorassent par leur valeur et les mena contre les Anglais. Cette guerre endetta encore son duché ; mais le devoir le retint auprès de Bertrand Du Guesclin, son frère d'armes et son ami. Une trêve étant survenue, il en profita pour courir à de nouvelles aventures et avec cent chevaliers passa en Espagne, où Henri de Transtamare l'appelait à une croisade contre les Sarrasins.

Mais celui-ci ayant voulu lui faire combattre les Portugais au lieu des infidèles, le duc refusa et, repassant les Pyrénées sans avoir tiré l'épée, revint guerroyer contre les Anglais. Tuteur du jeune roi Charles VI, de moitié avec le duc de Bourgogne, il s'acquitta de son devoir avec loyauté, fit deux croisades en Afrique seul avec quelques centaines de chevaliers. Cet homme, qui, par sa valeur chevaleresque et son esprit d'aventure, appartenait aux temps anciens, n'en sut pas moins par des alliances et d'heureuses acquisitions augmenter considérablement les domaines de sa maison. Il réunit au Bourbonnais le Forez, une partie de l'Auvergne, le Beaujolais et la principauté de Dombes. Mêlé aux querelles sanglantes qui désolèrent le règne de l'insensé Charles VI, il prit parti pour le duc d'Orléans contre le duc de Bourgogne, Jean sans Peur. Celui-ci envahit le Bourbonnais et se rendit maître de quelques villes ; mais Louis, alors âgé de plus de soixante-dix ans, lève une armée et chasse les Bourguignons. Il mourut peu de temps après à Montluçon.

Le fils du duc Louis, Jean Ier, débauché et prodigue, n'avait hérité que de son courage. Fait prisonnier à la bataille d'Azincourt, il mourut à Londres après dix-huit ans de captivité. Il avait, pour se racheter, souscrit à un traité honteux, qui donnait aux Anglais les meilleures places de l'Auvergne et du Bourbonnais. Son fils, Charles ler, qui gouvernait ses Etats, et ses vassaux refusèrent d'exécuter un pareil traité ; mais ils lui envoyèrent une rançon de cent mille écus, que les Anglais acceptèrent, sans se dessaisir de leur prisonnier. Sous le gouvernement de Jean Ier, qui tenait pour le duc d'Orléans, le Bourbonnais avait été exposé aux plus affreuses dévastations, commises par le parti contraire.

Le nouveau duc Charles Ier rendit de grands services au jeune roi Charles VII, alors fugitif, l'accueillit et combattit pour lui reconquérir son royaume, auprès de Xaintrailles et de Dunois. Mais, plus tard, le duc de Bourbon excita contre Charles VII son propre fils (depuis Louis XI) et l'entraîna dans une ligue armée contre son père. Charles VII vint lui-même en Bourbonnais à la tête d'une armée pour y chercher le dauphin, qui y avait trouvé un refuge. Toutes les villes qui lui résistèrent furent impitoyablement pillées. Cependant le roi pardonna aux chefs de la rébellion et donna même sa fille Jeanne en mariage au fils du duc de Bourbon, lequel succéda à son père en 1456 sous le nom de Jean II.

Ce prince imita son père dans son esprit de révolte contre l'autorité royale ; mais Louis XI le gagna par d'habiles concessions, et, sous la minorité de Charles VIII, Jean II reçut l'épée de connétable. Il n'en prit pas moins part à la ridicule levée de boucliers du duc d'Orléans (depuis Louis XII) contre la régente. Il mourut en 1487. Son frère, Pierre II, était le mari de la régente même, Anne de Beaujeu. Sous son gouvernement, ou plutôt sous celui de sa femme, le Bourbonnais jouit d'un calme et d'une prospérité ininterrompus. Le pays s'enrichit et répara ses anciens désastres. Pierre Il mourut en 1503. En lui s'éteignit la branche aînée de la maison de Bourbon, qui possédait le duché depuis Robert, fils de saint Louis.

Le riche héritage échut à l'arrière-petit-fils du duc Jean Ier de Bourbon, Charles de Montpensier, qui épousa la fille du dernier duc, sa cousine, laide et contrefaite, mais qui lui apportait en dot la puissance et la richesse. Ce jeune homme est celui qui devint depuis si tristement célèbre sous le nom du connétable de Bourbon. Magnifique, intrépide, il éblouit par son faste et étonna par son courage. La part qu'il prit aux guerres d'Italie lui donna la renommée d'un grand homme de guerre. Il reçut l'épée de connétable et commanda l'avant-garde à Marignan.

Mais, par son orgueil, il avait excité la colère du roi François Ier, et celui-ci, étant venu à Moulins pour tenir le fils du duc sur les fonts du baptême, fut blessé de la splendeur des fêtes que lui offrit son vassal. « Un roi de France n'en sauroit faire autant » dit-il avec amertume ; et, refusant de l'indemniser des dépenses qu'il avait faites à son service, il lui retira ses traitements et ses pensions. Le connétable n'en suivit pas moins le roi à la défense de la Champagne, qu'avait envahie l'armée de Charles-Quint. Mais le roi ayant donné au duc d'Alençon le commandement de l'avant-garde, qui appartenait. de droit au connétable, celui-ci se retira à Moulins, une fois la campagne finie. Son fils venait de mourir ; sa femme mourut peu de temps après en lui faisant donation de ses biens, précaution qui semblait inutile, puisque, le connétable n'eût-il pas été le gendre du dernier duc de Bourbon, l'héritage de cette famille lui devait encore revenir comme chef de la maison de Montpensier.

Mais Charles s'était fait une ennemie implacable, Louise de Savoie, mère du roi, dont il avait repoussé, dit-on, les amoureuses avances. Cette femme excita contre lui le roi son fils, et, au mépris de toute justice, on suscita contre le droit évident du duc les subtilités de la chicane et les arguties des avocats. Le séquestre fut mis sur l'héritage. Dès lors le connétable ne garda plus de mesure. Il prêta l'oreille aux propositions que Charles-Quint lui faisait faire, le sachant tenté de trahir son pays par haine contre le roi. L'empereur lui offrait la main d'une de ses sœurs, deux cent mille écus de dot et un royaume créé dans le midi de la France démembrée.

A ce prix, Bourbon vendit son honneur et son pays. François Ier averti de ce marché au moment de partir pour l'Italie, l'invita à le suivre. Bourbon feignit d'être malade pour se dispenser d'obéir. Le roi lui-même vint à Moulins ; il s'approcha du lit du connétable et eut avec lui une entrevue secrète. François Ier lui parla avec douceur, ne lui dissimulant pas qu'il avait été prévenu des tentatives de corruption dont le connétable avait été l'objet. Celui-ci prétendit qu'il les avait repoussées, et que la maladie seule l'empêchait de suivre le roi immédiatement ; qu'au reste, il le rejoindrait aussitôt que ses forces le lui permettraient. François Ier le quitta en laissant auprès de lui un de ses gentilshommes, Warty, chargé d'espionner le connétable. Bourbon partit en effet quelques jours après, se faisant porter en litière ; mais, arrivé à Lapalisse, il apprend que le roi est instruit de tout ; dès lors il ne songe plus qu'à fuir. Il feint de se sentir plus malade le mal fait des progrès rapides ; Bourbon réunit autour de lui ses gentilshommes, leur commande de se lamenter sur son sort et fait appeler Warty.

Celui-ci arrivé, le connétable lui dit d'une voix mourante d'aller trouver le roi, de lui faire savoir sa position désespérée et de lui exprimer ses amers regrets de ne pouvoir lui rendre de nouveaux services. Warty part ; Bourbon monte à cheval, arrive à Chantelle, place forte, où il réunit aussitôt tous les éléments d'une vigoureuse résistance. Le roi, prévenu, envoie contre le duc le maréchal de Chabannes avec des troupes. Alors, désespérant de tenir dans Chantelle contre un siège en règle, Bourbon, accompagné d'un seul gentilhomme, Pompérant, se décide à fuir et à quitter la France. Après des dangers et des aventures de toutes sortes, les deux fugitifs atteignirent la frontière de Savoie d'où le duc se rendit en Italie, où il se mit à la tête des troupes de Charles-Quint.

Le reste de son histoire est trop connu pour être rapporté ici. On sait ses déceptions à la cour de Charles-Quint, les mépris à peine dissimulés que trouva partout ce traître, le mal qu'il rit à son pays et les sévères paroles que lui adressa Bayard mourant : « Monsieur, dit le loyal chevalier au duc qui s'apitoyait sur son sort, il n'y a point de pitié en moi, car je meurs en homme de bien ; mais j'ai pitié de vous voir servir contre votre prince et votre patrie et votre serment Bourbon fut tué en escaladant les murs de Rome à la tête des soldats allemands. »

Ses biens avaient été confisqués et réunis à la couronne en 1531. Depuis ils en furent détachés, pour former divers apanages, jusqu'en 1622. À cette époque, ils entrèrent dans la maison de Condé qui les conserva jusqu'à la Révolution. Ils y apportèrent encore la trahison. Le grand Condé imita le connétable en combattant contre la France ; mais il sut réparer sa faute et par son repentir et par des victoires sur les ennemis de son pays. Le Bourbonnais, depuis le grand connétable, n'a plus d'histoire qui lui soit propre, et, si le titre de duc de Bourbon reparaît encore dans l'histoire sous Louis XV et depuis, les annales de la province se confondent avec celles de la France.

Le département de l'Allier n'a pas eu à souffrir de l'invasion allemande (guerre de 1870-1871).