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Date de création : 27.11.2008
Dernière mise à jour :
08.02.2013
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(Région Haute-Normandie)
Le territoire qui forme aujourd'hui le département de l'Eure était habité, au temps de Jules César, par deux peuples de la Gaule celtique : les Aulerci Eburovices, groupés autour de la ville qui est devenue Évreux, et les Velocasses, répandus dans la contrée appelée depuis Vexin. Le Vexin se trouva divisé en deux parties après la cession, faite par Charles le Simple au chef normand Rollon, de l'ancienne Neustrie, en 911 ; le Vexin normand a été réuni en 1790 au département de l'Eure ; il forme l'arrondissement des Andelys. Les Aulerques (Aulerci) et les Vélocasses (Velocasses) prirent part aux guerres contre César. Clovis, le premier, pénétra jusque dans cette province et la rangea sous sa domination. Parmi ses successeurs, Dagobert et Clotaire III résidèrent quelquefois au château d'Étrépagny.
Pendant la période mérovingienne, la foi chrétienne se développa sur le territoire des Aulerci et des Vélocasses, et les évêques d'Évreux acquirent une grande importance. Au nombre des abbayes fondées à cette époque dans le diocèse d'Évreux, on distingue celle de Saint-Taurin, qui s'éleva probablement vers la fin du Vile siècle, sur le bord du grand chemin, en dehors de la ville, à l'emplacement qu'occupait le tombeau du premier évêque d'Évreux, dont le corps fut levé et déposé dans un reliquaire. Quelques années plus tard s'éleva le monastère de la Croix-Saint-Leufroy.
On rapporte qu'en l'année 674 saint Adrien, évêque de Rouen, étant parti de cette ville pour aller, dit la légende, rendre compte au roi de quelques affaires dont il avait été chargé, passa par le territoire d'Évreux. Alors accablé par l'âge et les infirmités, il ne pouvait plus monter à cheval, et il voyageait dans une litière traînée par deux mulets ; de temps en temps, il s'arrêtait dans les divers pays qu'il parcourait et instruisait les populations accourues pour recevoir sa bénédiction. Il était parvenu près de la rivière d'Eure, dans un village du nom de Nadud, en un lieu où deux chemins se coupaient en forme de croix ; les mulets s'arrêtèrent tout court et refusèrent d'aller plus avant, quoiqu'il n'y eût aucun obstacle et que le chemin fût beau.
Le saint, plein d'étonnement, descendit et pria ; à peine avait-il commencé d'élever ses yeux vers le ciel, qu'il vit une croix toute brillante de lumière et qu'il sentit son esprit éclairé d'une céleste inspiration qui lui apprit que Dieu avait choisi ce lieu pour être la retraite d'un grand nombre de solitaires. Aussitôt il commanda qu'on lui apportât de quoi faire une croix, et, à défaut d'autre bois, il brisa en deux l'aiguillon dont un paysan se servait pour exciter ses bœufs, éleva un tertre de gazon et y plaça la croix avec de saintes reliques. Bientôt le lieu consacré devint le théâtre de prodiges ; pendant la nuit, une colonne de feu y répandait une clarté miraculeuse, et des malades étaient guéris par le contact de la croix plantée par le saint.
Une chapelle fut élevée pour perpétuer la mémoire de ces prodiges, et, quelque temps après, saint Leufroy y fonda un monastère dont il fut le premier supérieur, et qu'il illustra par ses vertus. Ainsi, pieuse et dévouée à l'Église -tomme le reste de la Neustrie, la contrée dont nous nous occupons vivait paisible ; toute son histoire se résumait dans la succession de ses évêques, respectés de tous, et dans les prodiges sans nombre que les, rares monuments de cette époque nous ont légués ; elle avait mérité le nom de nouvelle Thébaïde, quand le calme dont elle jouissait fut troublé par les invasions normandes du Ville et du IXe siècle ; ce furent surtout les parties septentrionales de la Gaule et les villes situées sur le cours des fleuves qui eurent à souffrir des incursions de ces terribles pirates ce' département, que traversent la Seine et l'Eure, fut plus que tout autre maltraité par les barbares.
En l'année 844, Rouen et son diocèse, dont faisaient partie les villes de Gisors, des Andelys, d'Étrépagny et tout ce qui, dans le département de l'Eure, est situé sur la rive droite de la Seine, furent saccagés. Le diocèse d'Évreux ne fut pas épargné non plus par le fléau. Guntbert était alors évêque de cette ville ; il assista avec son métropolitain Gombault, qui prenait pour la première fois le titre 'd'archevêque, à deux conciles tenus à Paris en 847 et 853, pour prévenir le retour des barbares du Nord. Charles le Chauve éleva une forteresse à Pont-de-l'Arche l'année suivante (854) et fit jeter un pont sur la Seine pour barrer le passage à leurs barques.
Cependant ils reparurent en 870, puis en 876. Cette fois, ils étaient conduits par le chef qui établit définitivement dans la Neustrie la domination normande. Le Scandinave' Roll ou Rollon, chassé par un roi danois des États qu'avait possédés son père, se mit à la tête d'une émigration de ses compatriotes, aborda en France en 876, ravagea pendant quelques années les côtes de la Bretagne et de la Neustrie, puis remonta la Seine, pilla sur son passage Jumièges, Rouen, Pont-de-l'Arche, où il battit l'armée du roi Charles le Chauve, commandée par le duc Renault ; puis il vint assiéger Paris.
Ce fut pendant la durée du siège qu'il dirigea vers Évreux une expédition dans laquelle il se rendit maître de cette ville (892). Déjà Rouen était en son pouvoir ; cette ville et son archevêque avaient mieux aimé se soumettre aux Normands et leur payer un tribu t que d'être sans cesse exposés à leurs pillages ; des négociations furent ouvertes, par l'intermédiaire de l'archevêque Francon, entre le chef barbare et le roi Charles le Simple pour traiter de la cession de toute la province. Le Carlovingien ne sacrifiait rien de sa puissance effective en abandonnant une contrée où son autorité avait cessé d'être reconnue, et, en échange de cet abandon, il acquérait un allié et protégeait toute la Gaule contre les invasions de nouveaux Normands, puisque les compagnons de Rollon étaient intéressés à défendre leur conquête. Le chef normand promit d'épouser Giselle, fille du roi de France, se convertit au christianisme et obtint toute la partie de la Neustrie qui s'étend au nord de la Seine, depuis les rivières d'Epte et d'Andelle, et, au midi de ce fleuve, tous les pays situés entre la Bretagne, le Maine et l'Océan.
Ce fut en 911 que ce traité fut signé dans la ville de Saint-Clair-sur-Epte. Le pirate, devenu maître d'une des plus riches provinces de la France, se montra, par sa sagesse, digne de sa fortune ; il releva les cités que lui-même avait détruites avant de devenir maître de la contrée ; Évreux fut de ne nombre ; il se fit sincèrement chrétien et enrichit les églises de donations nombreuses. Cependant il ne put empêcher que ses anciens compagnons qui avaient reçu avec lui le baptême ne s'emparassent des abbayes et des évêchés ; peut-être même favorisa-t-il ce nouveau clergé pour placer toute la Neustrie plus directement sous son influence ; de grands désordres résultèrent de cette nouvelle organisation.
Guillaume Longue-Épée, fils de Rollon, lui succéda. Passionné pour les exercices de la chasse, il fit construire au milieu de la forêt de Lyons un pavillon qui devint, depuis, le château de Lyons et le rendez-vous de chasse du duc de France Hugues le Grand, de Hébert, comte de Senlis ; de Herbert, comte de Vermandois, et de Guillaume, comte de Poitou. Richard, âgé seulement de dix ans, succéda, en 944, à Guillaume Longue-Épée, et, en 947, il eut avec le roi Louis IV une entrevue à Saint-Clair-sur-Epte.
Les deux princes conclurent un traité par lequel le Vexin normand, qui jusqu'alors avait appartenu aux ducs de Normandie comme province séparée, fut réuni au duché. Hugues le Grand ; duc de France, profita de la minorité de Richard pour lui enlever le comté d'Évreux ; Louis d'Outre-Mer voulut à son toué essayer de reconquérir tout le duché de Normandie et commença par s'emparer d'Évreux, sous prétexte de restituer au jeune duc cette portion de ses États ; puis il se saisit de sa personne et le fit transporter à Laon ; le comte de Senlis, vassal de Hugues, enleva Richard. Le duc de France usa de cet avantage pour faire épouser au duc normand sa fille Emma, et ce mariage fut célébré dans la cathédrale de la ville d'Évreux, qui s'était délivrée du joug des Français.
Après Louis IV, son fils Lothaire fit de nouvelles entreprises sur les États normands ; il vint assiéger Évreux, s'en empara et donna cette ville à Thibaud, comte de Chartres, l'un des seigneurs qui lui étaient restés fidèles ; mais Richard ne. tarda pas à la recouvrer. Richard rebâtit Évreux, releva ses églises, qui avaient été détruites dans les précédentes irruptions, et la donna, avec le titre de comté, à son fils naturel Robert, et 989. Ce même Robert obtint de son père l'archevêché de Rouen, en même temps que le comté d'Évreux.
Philippe-Auguste enleva ce comté, en 1193, au comte Amaury III, pour le donner à Jean sans Terre, alors son allié, avec la ville d'Évreux ; ce prince, comptant regagner, par une horrible perfidie, les bonnes grâces des Anglais, invita à un festin les officiers de la garnison française, les fit massacrer et passa au fil de l'épée tous les soldats. Le roi de France, en ce moment occupé au siège de Verneuil, s'empressa d'accourir, reprit la ville et la mit en cendres, puis il conquit presque tout le reste du comté. Amaury fit, en 1200, à Philippe, une cession complète de ses possessions ; le comté d'Évreux fut de la sorte réuni à la couronne.
Il en fut détaché environ un siècle après (1307) par Philippe le Bel en faveur de Louis, fils de Philippe le Hardi. Le nouveau comte servit fidèlement son frère et se distingua dans la guerre contre les Flamands. Plein de sagesse, il pensait qu'un prince n'est grand qu'à la condition de rester soumis à Dieu, au roi et aux lois. Il eut pour successeur, en 1319, son fils Philippe, qui mérita le surnom de Bon ou de Sage. Ce comte avait épousé la princesse Jeanne, fille unique du roi Louis le Hutin et qui prétendait par son père au royaume de Navarre et au comté de Champagne et de Brie. Cette princesse obtint seulement, en 1328, la Navarre, qui passa, en 1349, à son fils, Charles le Mauvais, déjà comte d'Évreux depuis 1343.
La vie agitée de ce prince se passa presque tout entière en dehors de son comté, et la bataille de Cocherel, qu'il perdit le 16 mai 1364, est le seul fait important qui se soit passé sous lui dans le pays d'Évreux. Charles V confisqua, en 1378, les possessions de Charles le Mauvais en Normandie ; mais le roi Charles VI restitua au fils du roi de Navarre, Charles II le Noble, le comté d'Évreux ; ce prince le rétrocéda au roi, en échange d'une rente de 12 000 livres à tenir en duché-pairie avec le titre de Nemours.
Sous ce règne désastreux de Charles VI, les Anglais, victorieux à Azincourt (1415), se répandirent par toute la France et reprirent la Normandie. Après la mort de ce roi, le dauphin Charles VII, dépossédé, en vertu du traité de Troyes, s'efforça inutilement de repousser cette grande invasion anglaise jusqu'au moment où Jeanne d'Arc lui prêta son merveilleux secours ; ses troupes furent battues à Verneuil, par le duc de Bedford, en 1424. Mais lorsque le siège d'Orléans eut été levé, les Français obtinrent des succès presque aussi constants que l'avaient été jusque-là leurs revers.
La Normandie fut cependant l'une des dernières provinces que perdirent les Anglais ; ils ne furent chassés d'Évreux qu'en 1441. La fin du règne de Charles VII et les règnes suivants ramenèrent, avec le calme, un peu de prospérité jusqu'à l'époque de la Ligue. La paix ne fut troublée momentanément que sous Louis XI, par le soulèvement de quelques villes dans la guerre du Bien public. Lorsque la Réforme de Calvin s'introduisit en Normandie, le diocèse d'Évreux dut à la sagesse de ses prélats d'être préservé de l'hérésie.
L'évêque Ambroise Le Veneur visitait souvent, pendant la nuit, les villes et les villages de son diocèse pour voir si l'erreur ne s'y produisait pas. Son successeur, Claude de Saintes, eut la prudence de consentir à réformer le Bréviaire, le Rituel et le Missel d'Évreux, où se trouvaient plusieurs préceptes indignes de la sainteté de la religion. Mais ce pasteur pieux et savant exagéra son zèle religieux au moment où Henri IV fut appelé au trône par la mort de Henri III en 1589 et engagea Évreux dans là ligue contre le roi protestant. Tous les bourgeois s'unirent à' l'évêque ; ils s'armèrent et s'emparèrent du château d'Harcourt en 1590 ; celui de Neubourg fut également emporté, la ville de Conches fut saccagée ; mais Breteuil se défendit courageusement, et le maréchal de Biron vint sommer Évreux de se rendre.
Après quelques pourparlers et un peu d'hésitation, les habitants ouvrirent leurs portes, et l'évêque s'enfuit à Louviers (janvier 1591). Henri IV ne tarda pas à venir en personne dans le comté d'Évreux ; il y gagna sur Mayenne la bataille d'Ivry (1591), s'empara de Louviers, fit prisonnier l'évêque d'Évreux et le transféra au château de Caen, puis à Crèvecoeur, près de Lisieux. Dans les premières années du XVIe siècle, Henri IV visita, avec Marie de Médicis, la plupart des villes de Normandie et, entre autres, Évreux. Le calme se rétablit dans le diocèse, et il ne fut plus troublé que par quelques soulèvements qui eurent lieu en 1649, à l'époque de la Fronde. Le duc de Longueville, gouverneur de Normandie, se révolta et entraîna dans sa rébellion les villes de son gouvernement. François d'Harcourt, marquis de Beuvron, lieutenant général du roi en Normandie, vint mettre le siège devant Évreux ; les bourgeois résistèrent pendant une année environ ; l'emprisonnement des princes de Condé et de Conti et du duc de Longueville (1650) leur fit déposer les armes ; l'évêque, qui s'était déclaré contre la Fronde, rentra dans la ville, et le diocèse jouit d'une longue paix jusqu'en 1789.
Le département de l'Eure, formé en 1790, accueillit avec faveur la Révolution jusqu'au moment où les girondins furent renversés par la Montagne. A ce moment, une armée fédéraliste s'organisa et fut conduite jusqu'à Vernon par le général Wimpfen et le marquis de Puisaye. Le général républicain Schérer eut l'avantage en diverses rencontres ; la guerre se reporta dans la Bretagne et dans la Vendée, et depuis ce temps jusqu'à nos jours la paix ne fut plus troublée dans le département de l'Eure jusqu'à la funeste guerre de 1870-1871.
Lorsque Metz eut succombé et qu'elle eut été livrée plutôt que défendue par le maréchal Bazaine, les troupes du prince Frédéric-Charles, après avoir envahi la Flandre et la Picardie, entrèrent en Normandie ; l'arrondissement des Andelys, situé sur la rive droite de la Seine, fut un des premiers pays normands occupés par les Allemands ; mais ce ne fut pas sans résistance. Le 30 novembre 1870, le général Briand leur livra même un combat heureux et les délogea d'Étrépagny ; mais il fut rappelé sur un autre point par des ordres supérieurs ; l'ennemi revint en force, reprit ses positions et continua sa marche sur Rouen. Évreux fut occupé par l'ennemi, mais il n'eut pas à subir de violences ; et lorsque les Allemands eurent évacué le département, ils lui avaient fait subir une perte de 10 516 053 fr. 90, en réquisitions, impôts, amendes et dommages.