- Où sont les hommes ? demanda poliment le petit prince.
La fleur, un jour, en avait vu passer une caravane.
- Les hommes ? Il en existe, je crois, six ou sept. Je les ai aperçus il y a des années. Mais on ne sait jamais où les trouver.
Le vent les promène. Ils manquent de racines, ça les gêne beaucoup.
Antoine de Saint-Exupéry, Le Petit Prince, 1946, New York
Sabot de Vénus - Cette fleur magnifique est nommée, sabot de Vénus ; c’est une plante protégée qui appartient à une des familles les plus représentées en nombre, celle des Orchidées. Sabot de Vénus est son nom commun ou vernaculaire, Cypripedium calceolus L. son nom scientifique composé d’un nom de genre Cypripedium et d’un nom d’espèce : calceolus, L. étant l’abréviation de l’auteur qui l’a décrite : Linné.
- Christian Dumas
Pour le grand public, la science est souvent considérée comme austère et la fleur semble un des moyens de résoudre l’équation d’un certain bonheur scientifique ;
équation avec plusieurs termes : un peu d’art, de poésie et d’histoire des sciences, et quelques données scientifiques pour montrer en quoi elle constitue un système biologique unique.
Unique parce qu’elle a réuni dans une même trilogie : botaniste, poète et généticien.
Unique aussi par ses modes singuliers de floraison et de reproduction.
Enfin, n’oublions pas que sans fleur, il n’y a ni graine, ni fruit et que plus des trois quarts de nos productions agricoles sont issues du bon fonctionnement de la sexualité des fleurs.
La dénomination des fleurs
Pourquoi le nom de Rosier des chiens (Rosa canina) pour l’églantier ?Selon Pline, sa racine guérissait de l’hydrophobie induite par la rage.
D’autres espèces portent aussi le nom générique populaire de Rose : la Rose de Noël, la Rose d’Inde, la Rose trémière, celle de Jérico, ou même la Rose des sables.
Rose trémière - Karsten Dörre
Tous ces noms génériques entraînent des confusions alors que les espèces dénommées sont très différentes. Aussi, des règles de dénomination ont-elles été définies par Carl Linné dont on a célébré le tricentenaire de la naissance en 2007.
Avant Linné, on donnait aux plantes leur nom populaire, traduit en latin, la langue scientifique de l’époque, qu’accompagnaient de longues descriptions souvent empruntées aux anciens. En instituant une nomenclature binaire, toute plante se trouve désignée par deux noms latins, celui de genre, souvent tiré du système de Piton de Tournefort, suivi du nom d’espèce. Ainsi, une longue description est remplacée par une diagnose brève et précise.
La réputation de Linné fut telle qu’il fut nommé au siècle deslumières le « prince des botanistes ». Si 9.000 espèces étaient connues à la fin de sa vie, aujourd’hui, il y a environ 300.000 espèces de plantes à fleurs connues ; la liste augmente encore alors que paradoxalement, il ne reste pratiquement plus de botanistes professionnels et que nous n’en formons plus !
Une trilogie remarquable : Le poète, le botaniste et le généticien
Goethe, le célèbre poète et philosophe, l’auteur des « Souffrances du jeune Werther », était très inspiré par le traité de philosophie botanique de Linné qui était, selon ses propres écrits, son sujet d’étude quotidien.
Il observa attentivement les plantes, les fleurs en particulier, et interpréta la transformation progressive des pièces d’un type, par exemple les sépales, en pièce d’un autre type, les pétales, ou encore les pétales en étamines, etc...
La tulipe permet une bonne illustration de ce propos. Ici une variété avec 6 tépales, nom donné aux organes du périanthe lorsqu’on ne peut pas distinguer pétales et sépales
Il décrivit également la nature foliacée du style et dupistil. Pour lui, l’organe type du végétal était la feuille. Il décrivit ainsi « la métamorphose des plantes » dans une célèbre théorie publiée en 1790. L’essai de Goethe reçu un accueil glacial de la plupart des botanistes. « Personne, écrivit-il, ne voulait comprendre l’union intime de la poésie et de la science ». L’observation de Goethe, longtemps restée anecdotique, revint sur le devant de la scène deux siècles plus tard avec les travaux de plusieurs équipes et l’utilisation de l’Arabette des dames, Arabidopsis thaliana, espèce modèle en biologie du développement.
..... une autre variété horticole dite double avec de nombreux pétales. - Christian Dumas
La plupart des transformations visibles chez les différents mutants floraux décrits impliquent des mutations homéotiques. De telles mutations ne sont pas sans rappeler celles observées précédemment chez la Mouche Drosophile chez laquelle, par exemple, une antenne peut être remplacée par une patte.
Les travaux sur les gènes homéotiques ont valu à leurs auteurs un prix Nobel en 1995. Il aura fallu attendre deux siècles pour que des chercheurs réexaminent la question soulevée par Goethe en exploitant une série de mutants où l'identité des organes produits par le méristème floral est modifiée.
....un pétale, en train de se transformer en étamine, illustrant une transformation homéotique. - Christian Dumas
Trois groupes de gènes dits A, B et C sont impliqués dans ces mutations homéotiques.
Dans un article publié en 1991, The war of the whorls (La guerre des verticilles), allusion au fameux livre de H.G. Wells, La guerre des Mondes, Coen et Meyerowitz supposent la présence de trois types de régulateurs : les gènes "A", "B" et "C".
En appliquant des règles simples la plante utilise ces trois types pour obtenir les différents organes :
-- (1) Si "A" est seul présent, le verticille produit des sépales ;
-- (2) si "A" et "B" sont présents ensemble, le verticille produit des pétales ;
-- (3) si "B" et "C" sont présents ensemble, le verticille produit des étamines ;
-- (4) si "C" est seul présent, le verticille produit des carpelles ;
-- (5) "A" et "B" s’inhibent mutuellement et ne peuvent donc jamais fonctionner ensemble. En jouant avec ces cinq règles de base, les plantes ont généré toutes sortes de fleurs.
Mais comme souvent en science, la réalité est plus complexe et depuis, d'autres règles se sont ajoutées à ces principes de base.
On a notamment identifié des gènes "D" impliqués dans la formation des ovules.
. Et en 2000, la découverte et l’analyse de nouveaux mutants entraînant une perte des fonctions A, B et C permirent de montrer que les gènes correspondants représentent une autre classe de gènes homéotiques, nommés E.
Ainsi, pour faire un pétale, il est nécessaire d’avoir la combinaison A+B+E; pour une étamine: B+C+E et enfin pour un carpelle C+E. Un quatrième mutant analysé plus récemment, SEP4, permet même de revenir chez le quadruple mutant au niveau basal, c’est-à-dire au stade feuille, point central de la théorie de Goethe. Cela pourrait argumenter selon une chanson célèbre « que le poète a dit la vérité» !
Ce qui détermine une plante à fleurs
Pourquoi le corps des plantes peut-il évoluer tout au long de la vie, en produisant de nouveaux organes, alors que le corps de la plupart des animaux reste quasiment identique de la naissance à la mort, à un facteur de taille près ?
Certains pensaient que chaque être vivant, végétal ou animal, était préformé dans l’embryon. Ainsi, selon les défenseurs de cette théorie de la « préformation », les spermatozoïdes humains contenaient en leur tête un homme miniature, l’« homunculus ».
L’ovule permettait à l’homunculus de se nourrir dans le ventre de la femme et de grandir. D’autres penchaient plutôt en faveur d’une construction au fur et à mesure des êtres vivants, c’est la théorie de « l’épigenèse ». Le dilemme entre les défenseurs de ces deux théories ne fut résolu qu’en 1759 avec les travaux de l’allemand Wolff. En observant au microscope les stades très précoces du développement du poulet, il remarqua que certaines parties de l'animal : bec, pattes, cœur et vaisseaux sanguins, étaient absentes chez l’embryon.
De même, chez le bourgeon de Châtaignier, il observa la formation progressive des feuilles et l’apparition, au fur et à mesure, des vaisseaux et des pétioles. La théorie de la préformation était donc enterrée, mais la question n’était pas pour autant résolue. Comment et à partir de quoi se forme un individu adulte ? C’est plus tard, le suisse von Nägeli qui observa les divisions des cellules apicales qui semblaient être à l’origine des organes et tissus. Il les dénomma méristèmes du grec « merizein », se diviser.
L'intégration des facteurs environnementaux par la plante (photopériode, température, par exemple) se fait en partie au niveau du méristème végétatif et joue un rôle crucial pour l'adaptation de la croissance à l'environnement.
Châtaignier
Le méristème est composé, chez A. thaliana, de centaines de cellules qui se divisent, grandissent et le quittent pour former des organes. Malgré ce comportement extrêmement dynamique, c’est une structure très stable qui subsiste pendant de longues périodes avec un centre composé d’une vingtaine de cellules souches, parmi une centaine de cellules au stade végétatif ; lors de la mise à fleur, le méristème s’accroît, forme un dôme composé alors de plusieurs centaines de cellules.
Toute une série de gènes contrôle le maintien de la taille et de l’activité de la zone cellules souches. Le méristème subit un cycle et passe par les stades suivants : végétatif, inflorescentiel et enfin floral. À l’aide de mutants affectés dans la mise à fleur, plusieurs voies de signalisation de l’induction florale ont été, en partie, disséquées génétiquement chez Arabidopsis. La première met en jeu la longueur du jour et le gène CO. La seconde, ou voie autonome, met en jeu notamment FLC. La troisième, implique la température. Existe t-il une hormone de floraison ou florigène ? Ce concept a été proposé par Chailakhyan en 1936.
L’aptitude à fleurir se transmet en effet par greffe d’une espèce apte à fleurir à une espèce inapte ; il s ‘agit de la transmission à distance d’une substance inconnue qu’il a dénommé florigène. Resté pendant plus de 70 ans un concept physiologique plutôt qu’une entité chimique, la génétique d’Arabidopsis a permis de faire progresser les connaissance sur cette hypothétique hormone.
Un transcrit FT (Flowering Time), se formerait dans la feuille ; la protéine FT, florigène proparte, se déplace avec la sève élaborée à la vitesse de 1,2 à 3,5 mm-1.h ; vitesse plus lente que celle du saccharose (50 à 100 cm-1.h. Pour l’instant, il y a plusieurs preuves expérimentales du mouvement de cette protéine de la feuille jusqu’au méristème premiers pas vers la validation de ce concept.
Fleurs et sexualité
La découverte d’une sexualité chez les plantes a bouleversé la botanique.S’appuyant sur la découverte de Camerarius, Linné, que certains nommaient aussi le second Adam, décide d’utiliser le sexe comme principe classificateur, notamment le nombre d’étamines.
La démonstration du lien entre fleur et sexualité à l’aide d’expériences de castration a été réalisée, par le médecin et botaniste allemand Rudoph Camerarius, pour la première fois en 1694, chez le Ricin (Ricinus communis L., famille des Euphorbiacées), où fleurs mâles et femelles sont séparées. Il démontra ainsi que l’étamine correspondait au sexe mâle et le pistil au sexe femelle. Pour obtenir des fruits et des graines, les deux sexes étaient nécessaires
Il opposait les plantes à mariages publics, celles portant des fleurs et des sexes visibles, aux plantes à mariages clandestins, comme les mousses et les fougères où les sexes ne sont pas apparents. Sa classification rapidement adoptée en Europe fit grand scandale à l’époque où il comparait l’étamine au pénis et le stigmate à la vulve; il lui fut reproché un esprit de luxure et son système sexuel considéré comme lubrique fut condamné par nombre de ses contemporains.
Amborella trichopoda, espèce considérée comme la plus primitive des plantes à fleurs actuelles. Arbustive et dioïque, elle est endémique de Nouvelle Calédonie ; c’est l’espèce unique d’un genre unique de la famille des Amborellacées
Néanmoins, Linné fut l’un des premiers à souligner l’importance de la reproduction sexuée chez les végétaux. La classification moderne bénéficie des avancées de la biologie moléculaire ; celle-ci , couplée à l’informatique, a remis en cause la classique distinction entre mono- et dicotylédones et mis en évidence trois grandes catégories : les Dicotylédones primitives comme Amborella (voir photo ci-dessus), les Monocotylédones (comme les graminées), et les Eudicotylédones (comme Arabidopsis) (travaux du consortium APG, Angiosperm Phylogeny Group , publiés depuis 1997).
Sexualité : les handicaps évolutifs des plantes à fleurs
Plusieurs handicaps majeurs auraient dû conduire à leur disparition :
-- 1) elles sont fixées par leurs racines et ne peuvent donc choisir leur partenaire sexuel ;
-- 2) les fleurs sont souvent hermaphrodites, plus de 90% des espèces ;
-- 3) le pollen émis tombe essentiellement dans un rayon de moins de quatre mètres à partir de sa source, l’étamine ;
- 4) il n’y a pas de tabou sexuel.
Et pourtant, depuis 130 millions d’années, les plantes à fleurs se sont développées et ont colonisé pratiquement tous les milieux et toutes les latitudes. Cette réussite serait liée à la mise en place, au cours de leur évolution, des systèmes d’incompatibilité. Dans le cas étudié, le Chou fourrager (famille des Brassicacées), un locus génétique simple S, pluriallélique, où le même allèle est présent côté femelle et côté mâle est responsable de la réaction d’incompatibilité, réaction qui entraîne le rejet de l’autopollen et qui favorise le développement de l’allopollen, tout en évitant des pollinisations incongrues, c’est-à-dire entre espèces différentes.
La réponse d’auto-incompatibilité (AI) dépend de l’interaction entre un ligand S (petite protéine de 6 KDa riche en cystéine) et un récepteur stigmatique SRK, type sérine thréonine kinase. La fixation du ligand sur le récepteur induit une dimérisation de SRK et l’autophosphorylation de son domaine cytoplasmique.
Une thioredoxine inhiberait l’action de SRK. Une fois activé, le domaine kinase assurerait la transmission du signal par une cascade de phosphorylation/déphosphorylation de cibles cytoplasmiques conduisant à la réaction d’AI. Récemment, un gène modificateur MLPK a été caractérisé codant une protéine kinase qui, lorsqu’elle est mutée, rend le système compatible ; MPLK agirait vraisemblablement en se complexant avec SRK. D’autres gènes régulateurs modifient la force d’expression de l’AI. Cela conduit actuellement à un modèle complexe d’interactions moléculaires dont une partie des acteurs a été bien caractérisée.
Les étapes de la pollinisation et de la fécondation
Lepollen, (voir photo ci-dessous), partenaire mâle, renferme deuxgamètes ou la cellule qui les génère ; c’est un organisme adapté à la dissémination et à la survie.
La paroi d’un grain pollen observée au microscope électronique montre sa complexité et la présence de composés impliqués dans la reconnaissance pollen–pistil.
Pour cette raison, sa teneur en eau est faible et son métabolisme nul. Pour reprendre son activité, il doit se réhydrater à la surface d’un pistil compatible : le stigmate. Il pousse alors un tube ; on dit qu’il germe, et assure ainsi le transfert des gamètes au sac embryonnaire, (voir photo ci-dessous).
Représentation schématique de la complexité de l’organisation de l’ovaire, ovule et sac embryonnaire d’un pistil.
À la fin du 19ème siècle, Brongniart puis Brown décrivirent l’entrée du tube pollinique dans l’ovule à travers le micropyle et la formation subséquente de l’embryon dans le sac embryonnaire. Ce travail résolut en partie l’énigme du contact pollen-ovule. En démontrant ce contact physique entre l’ovule et le pollen, ils élevèrent la fécondation des plantes au même niveau que celle des animaux, chez qui la nécessité d’un contact physique entre ovule et sperme commençait à être acceptée.
Pollen de sycca
Récemment, l’analyse de mutants affectés dans la fécondation a permis de mettre en évidence plusieurs systèmes de signalisation entre tube pollinique et sac embryonnaire, signalisation permettant le guidage du tube vers le micropyle. Strasburger décrivit la première fécondation chez les fleurs en 1878 ; quelques années plus tard, S. Nawashin et L. Guignard décrivirent la double fécondation chez le lis (1898, 1899).
Reconstitution semi diagrammatique en 3D, à l’aide de coupes sériées, de la fusion noyau mâle et noyau femelle, au cours d’une fécondation in vitro réalisée chez le maïs. En bleu intense, le noyau femelle ; en bleu clair, le noyau mâle ; en jaune, les plastes ; en violet, le réseau mitochondrial.
Dans les années 1990, la première fécondation in vitro chez les plantes a été réussie et a mis en évidence un flux cacique à l’origine de l’activation de l’oosphère et de la formation ultérieure de l’embryon. Un avantage de ce système était la possibilité de contrôler le site d’adhésion gamète mâle-gamète femelle et de suivre par des techniques appropriées, électrochimiques en particulier, la capacitation de l’oosphère (photo c-dessus). Une telle approche est impossible chez les autres systèmes biologiques animaux ou chez les algues.
Mais cette approche est réductionniste : ce qui est vu in vitro ne correspond peut-être pas à ce qui existe in vivo. D’où l’intérêt des approches actuelles, notamment à l’aide de mutants qui permettent de sérier les étapes de la fécondation et de caractériser les gènes responsables, donc les mécanismes intimes en jeu. Ainsi, un signal positif issu de la cellule-œuf entraîne la prolifération de l’albumen. C’est la caractérisation d’un mutant affecté dans une cycline CDC2 avec un effet paternel qui serait en cause. Chez ce mutant, le pollen est viable et un seul gamète est fonctionnel, seule la fécondation de l’oosphère a lieu.
En conclusion, il faut aujourd’hui être capable d’intégrer toute une série d’approches allant d’une simple observation botanique à l’analyse moléculaire la plus sophistiquée. La botanique d’antan est aujourd’hui devenue une biologie très intégrative.
OUAAAAAAAAAAAAAAAAAA..COMME C EST BEAU TOUTES CES FLEURS.
http://POMMEREINETTE.centerblog.net
Oh là là!!!ça a l'air très technique!!!Bonsoir ma Mimi,tu vas bien??Pas trop froid...J'ai passé ma journée à faire des pupitres d'écolier,j'en avais 4 et je les ai tous vendu...Donc j'en refais...Je vais me coucher de bonne heure,je sens la fatigue qui me gagne....Je te souhaite une bonne nuit ...Plein de gros bisous...A demain ma Mimi...
http://minisreveries.centerblog.net
oh mon Dieu pourquoi aussi tant de fleurs dans la nature si je pouvais aussi etre une fleur j'aurai tant d'admirateur
http://rhode.centerblog.net
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