Années 50 -
Romain Gary
"Lorsque j’entreprends un roman, c’est pour courir là où je ne suis pas, pour aller voir ce qui se passe chez les autres, pour me quitter, pour me réincarner" Roamin Gary
En 1956, le prix Goncourt est décerné à Romain Gary pour "Les racines du ciel".Gary, qui après guerre a entamé une carrière diplomatique est en Bolivie. Il raconte : "A La Paz, on m’a prévenu que j’avais…le Nobel. [...] Entre les horloges de la Paz et celle de Paris, il y a un décalage de cinq heures…Je vais dans mon bureau. Deux minutes après, le correspondant de l’United Press, un Espagnol, entre et me saute au cou : "Monsieur l’Ambassadeur, je vous félicite. Vous avez le prix Nobel !". Puis il tire de sa poche un télégramme en anglais daté de la veille : "Question ambassadeur de France à la Paz pour premier prix concours. Prendre déclaration"…Juste à ce moment-là, la porte s’ouvrit de nouveau. Une brassée de 25 télégrammes arrivait de Paris" Gary comprend enfin qu’il a le Goncourt. (in Portrait interview de Paul Guth, "Le Figaro littéraire" du 22 décembre 1956).
Dans cette deuxième décennie des années 50, les conflits africains sont omniprésents sur la scène internationale : revendications anticolonialistes de l'Afrique du Nord, révolte des Mau Mau , apartheid, pan-islamisme égyptien. L' Afrique apparait comme le continent des possibles ".. il y avait là comme dans chaque paysage africain, une place immense à prendre, une place illimitée et qui semble toujours suggérer quelque formidable désertion. Cela évoque irrésistiblement l'idée de quelque bête préhistorique à sa mesure aujourd'hui disparue, mais dont tout cet espace vide prit réclamer le retour"
Romain Gary et sa femme Jean Seberg en 1961 sur le tournage des "oiseaux vont mourir au Pérou"
"Un Français, Morel, entreprend en Afrique une campagne pour la défense des éléphants, menacés de tous les côtés par les lois dites "inexorables" du progrès.Lors de la Conférence pour la Protection de la Faune (Congo, Bukavu, 1953) constate elle-même qu'il serait vain de vouloir imposer au public le respect de la nature uniquement par les méthodes légales", Morel ne craint pas de recourir aux armes. Aidé par quelques compagnons convaincus comme lui que le respect de la nature n'est pas incompatible avec les exigences du progrès, il prend le maquis contre la barbarie et la cruauté sous toutes ses formes, cependant que de tous les côtés des conspirateurs habiles essayent d'utiliser sa magnifique obsession et son apparente naïveté à leurs propres fins. Ridiculisé ou haï, accusé de préférer les bêtes aux hommes, traité de misanthrope et de nihiliste, trahi par les uns, aidé par quelques autres, exploité par un apprenti dictateur, et par des agitateurs politiques, le "Français fou" continue envers et contre tout à défendre les éléphants au risque de sa vie. Face à la haine raciale et religieuse, à la démagogie nationaliste, Morel poursuit sa campagne pour la protection de la nature, pour le respect de ce qu'il appelle "la marge humaine", quels que soient les systèmes, les doctrines et les idéologies de rencontre. D'aventure en aventure, d'avatar en avatar, il triomphe avec une tranquille confiance de toutes les déceptions et de toutes les ruses, persuadé que les hommes sont assez généreux pour accepter de s'encombrer des éléphants dans leur difficile marche en avant, et de ne pas céder à la tentation du totalitaire sans marge, de la fin qui justifie les moyens et du rendement absolu. Et peu à peu, une complicité souriante et amicale se forme autour de celui qui "ne sait pas désespérer" et de ces géants menacés, et des volontaires de tous les pays, de toutes les races et de toutes les opinions se rangent autour de cet aventurier de l'humain." (Romain Gary, Les racines du ciel, quatrième de couverture, édition de 1956.)"
Pour Gary Morel, résistant contre la tentation de l’abandon et du désespoir, combat seul contre l’extermination des éléphants, affirmant ainsi sa nature humaine contre ce qui cherche à la nier : le totalitarisme la petitesse et l’adversité."L'islam appelle cela "les racines du ciel", pour les indiens du Mexique, c'est l'arbre de vie" qui les pousse les uns vers les autres à tomber à genoux et à lever les yeux en frappant leur poitrine tourmentée. Un besoin de protection auquel les obstinés comme Morel cherchent à échapper par des pétitions, de comités de lutte et des syndicats de défense..." Les racines du ciel.
Les racines du ciel, film de John Huston - 1958 - Trevor Howard, Errol Flynn
Morel, à l'engagement contre le colonialisme et au combat nationaliste préfère limiter son action à la défense de la faune africaine,ce que lui reprocheront ses compagnons. Romain Gary a toujours affiché une grande méfiance face "à tous les géniaux pères des peuples". Il précise dans son avant propos "je tiens a dire ceci : mon livre traite du problème, essentiel pour nous, de la protection de la nature [...] Je ne vois guère comment on saurait laisser la responsabilité de cette oeuvre généreuse à ceux qui puisent leur force politique aux sources primitives de la haine raciale et religieuse et de la mystique tribale". Mais peu à peu le combat de Morel va être instrumentalisé par les partisans de l'indépendance, il finira par l'accepter considérant que Waîtari le leader indépendantiste veut l'indépendance pour que "les africains prennent eux mêmes en mains la protection de la nature, puisque malgré touts nos conférences nous n'y sommes pas parvenus..." A la fin Morel est quasiment l'otage des indépendantistes, qui décide même de l'exécuter, pour faire d'un personnage devenu encombrant un héros de l'indépendance. Mais Youssef le jeune militant chargé de l'exécution se prend d'amitié pour Morel et ils disparaissent tous deux dans la forêt.
Mais si Gary se méfie des mouvements nationalistes,cela ne l'empêche pas de dénoncer le système colonial. Toute sa vie, écrivent Paul Audi et Jean-François Hangoüet, dans le Cahier de l'Herne consacré à Romain Gary, Gary se sera battu pour préserver tout ce qui, dans l’homme, échappe aux définitions que peuvent en donner les idéomaniaques de toutes provenances et de toutes obédiences".
Raphael Matta , surveillant de la réserve de Bouna - 1958
Raphaêl Matta, le double réel de Morel
Un jour qu'il visitait le zoo de Vincennes, il apprit que 600 espèces de mammifères étaient en voie de disparition.Raphael Matta était alors agé de 30 ans et travaille dans une société d'import-export à Paris. Il renonce a sa vie parisienne pour prendre un travail de surveillant de la réserve de Bouna a 400 km de l'équateur en Côte d'Ivoire.
Accompagné par sa femme Christiana, qui a Paris s'occupe de mode,Matta s'installe dans dans la réserve. Maigre, brun le regard perçant, il va vivre plus de 5 ans en pays lobi au milieu des bêtes
Les Lobis, de farouches chasseurs, l'appelle "Kongo Massa",le Maître de la brousse. Mais pour eux hippopotames et antilopes sont source de viande, les dépouilles sont revendus comme trophée aux chasseurs, et les africains achètent très cher les organes sexuels des éléphants pour leur rites de fertilité.
Matta dispose seulement d'un second, Sogli, et de quatre gardes pour couvrir tout le territoire de la réserve.L'administration est plutôt encline à tolérer le braconnage des Lobis. Un nouveau comptage en 1958 révèle la disparition de 40 éléphants sur les 100 que comptaient la réserve deux ans plus tôt, Matta devient de plus en plus fanatique, il confisque les armes dans les villages, envoi des lettres incendiaires à ses supérieurs signées Raphael Matta député des éléphants devant le Parlement Mondial, se disant prêt à monter sur l'échafaud pour que vivent les éléphants. "Je suis tout-puissant parce que ma foi montera au-dessus des montagnes." ajoute-t-il
Des Dioulas s'étant plaint à Matta d'un tort infligé par les Lobis,Matta se rendit immédiatement au village, accompagné par son second et quelques gardes noirs. Il arrive en pleine cérémonie d'initiation des jeunes guerriers, une cérémonie interdite aux étrangers. Les jeunes guerriers crient à la trahison Matta doit s'enfuir, son escorte n'interviendra pas.
Il sera retrouvé mort, la tête fracassée et le corps lardé de flèches empoisonnées le 16 janvier 1959
Raphael Matta , surveillant de la réserve de Bouna avec ses enfants - 1958
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Romain Gary
Romain Gary, de son vrai nom Roman Kacew(il a utilisé aussi les pseudonymes de Fosco Sinibaldi, Shatan Bogat et Emile Ajar) est né Né le 8 mai 1914 à Wilna, à l’époque ville russe appartenant à l’empire tsariste. Il se définissait lui-même comme "un cosaque un peu tartare mâtiné de juif." En 1928, sa mère décide de l'emmener à Nice, en France. Romain Gary racontera plus tard, dans "La promesse de l'aube", cette adolescence niçoise. En 1940 il sert dans les Forces aériennes françaises libres autour du général de Gaulle.
“De Gaulle c’était la faiblesse qui dit non à la force,c’était l’homme tout seul, dans sa faiblesse absolue, à Londres, disait non aux plus grandes puissances du monde, non à l’écrasement, non à la capitulation. C’était la situation même de l’homme, la condition même de l’homme, et ce refus de capituler, c’est à peu près la seule dignité à laquelle nous pouvons prétendre”. Romain Gary. Il termine la guerre comme compagnon de la Libération et commandeur de la Légion d'honneur.
Après guerre , il entame une carrière de diplomate.À ce titre, il séjourne en Bulgarie, en Suisse, à New York (aux Nations Unies, 1952-54), en Bolivie, puis en qualité de Consul général de France à Los Angeles de 1957 à 1961, date à laquelle il se met en congé du ministère des Affaires étrangères.
En 1961 il adapte au cinéma son livre"Les oiseaux vont mourir Pérou", il réalisera un second film en en 1972 "Kill".
Il fut l'époux de l'écrivain britannique Lesley Blanch et de l'actrice américaine Jean Seberg,dont il divorça. Un peu plus d'un an après le suicide de celle-ci en septembre 1979, il se donne la mort en se tirant une balle dans la bouche laissant ce dernier mot : "Je me suis bien amusé. Au revoir et merci".
Personnage aux multiples facettes, aux identités insaisissablesil a publié 31 ouvrages de son vivant, plus un après a mort. Il est le seul écrivain a avoir obtenu deux fois le prix Goncourt à l’issue d’une supercherie littéraire. Le second prix ayant été obtenu sous le pseudonyme d’Emile Ajar, sous lequel il a écrit quatre livres, en en faisant endosser la paternité à son petit neveu Paul Pavlowitch.
Les Racines du ciel
The Roots of Heaven
John Huston - 1958
Avec Errol Flynn, Juliette Gréco, Trevor Howard, Eddie Albert, Orson Welles...
On peut se demander pourquoi Huston, chasseur acharné, fervent de la tauromachieadapta le roman écologique de Gary. Juliette Gréco dans "Jujube" note "Peter Viertel a écrit sur Huston un petit livre, Le Chasseur blanc. C’est malgré tout à lui que l’on a demandé de mettre en scène Les Racines du ciel. Étrange situation que celle du chasseur qui doit mettre en images l’histoire d’un homme qui se bat pour la protection de l’espèce animale, contre l’extermination de la faune africaine et spécialement celle des éléphants… Il reste si peu de ces pauvres et splendides animaux traqués par les assassins mondains et fortunés que l’on est obligé d’envoyer une troisième équipe à leur recherche, bien loin des lieux du tournage. Ils grèveront de tout leur poids le budget, et cela ne sera que justice"
Entièrement filmé en Afrique équatoriale française, le film connut un tournage difficile : la dysentrie frappe l'équipe à l'exception d'Errol Flynn et de John Huston, saouls la plupart du temps. C'est le dernier film d'Errol Flynn et sans doute pas le meilleur de Huston empêtré dans une distribution hétéroclite et un scénario trop bavard..
"De tous les auteurs de bande dessinée que j'ai pu rencontrer, Peyo était le meilleur raconteur d'histoires." Y. Delporte
"Johan et Pirlouit"est une bande dessinée réalisée par Pierre Culliford dit Peyo. Cette bande parue pour la première fois en 1946 dans le journal belge "La dernière heure" elle se nomme alors "Johan". En 1950, elle est publiée dans Le Soir, puis dans Spirou . C'est là que la série trouve sa formule définitive : de blond Johan devient brun et en 1954 dans "Le lutin du bois aux roches" il rencontre un comparse facétieux : Pirlouit, râleur, paresseux et goinfre qui devient son compagnon d’épopée. '"Johan et Pirlouit" devient l'une des séries les plus populaires du journal.
Johan et Pirlouit évoluent dans le quotidien d'un moyen-agepittoresque. Johan, page puis chevalier, et Pirlouit, monté sur son inséparable biquette, viennent à la rescousse de la veuve et de l'orphelin victimes de seigneurs plus fourbes les uns que les autres. Leurs aventures s’orientent rapidement vers un univers fantastique de grimoires, de lutins et de forêts mystérieuses, d'enchanteurs et de sorciers.
Johan et Pirlouit - 1954 - 1957 - 1960
Johan et Pirlouit "Le serment des vikings" - 1957
C’est dans l'épisode des aventures de Johan et Pirlouit "La flûte à six trous", prépublié dans Le Journal de Spirou en 1958 et dont le nom en album devient "La flûte à six Schtroumpfs" (1960) que Johan et Pirlouit croisent la route d'une peuplade de lutins bleus à bonnets blancs vivant dans un village de champignons, perdu au mileu d'un pays nommé le Pays Maudit, et parlant le langage schtroumpf
Thierry Cullford, le fils de Peyo raconte :«On était à table. Mon père voulait demander le sel à Franquin mais ne trouvait pas ses mots. Alors il a dit "passe-moi le schtroumpf" ! Franquin lui a répondu "le voilà ton schtroumpf", et ils ont parlé schtroumpf pendant tout le repas. En rentrant, mon père s'est dit qu'il allait appeler ainsi un personnage, et qu'en plus il parlerait schtroumpf. Le succès a été immédiat. Il a reçu énormément de courrier lui demandant de continuer." Et pour la couleur bleue "la légende veut que, ne voulant pas que la peau du bonhomme soit rose comme celle des humains, il a pris un crayon bleu qui traînait sur sa table à dessin".
Johan et Pirlouit retrouveront les schtroumpfs dans les albums"La guerre des 7 fontaines" (1961) "Le pays maudit" (1964) et "Le sortilège de Maltrochu" (1972).
Johan et Pirlouit "Le pays maudit" - 1964
Dès 1959, Yvan Delporte, rédacteur en chef de "Spirou",demande à Peyo un mini récit avec pour vedettes les Schtroumpfs. Le succès des "Schtroumpfs Noirs" fut tel que d'autres mini-récits suivirent immédiatement et que par la suite Peyo redessine ces mini récits pour en faire des albums. Progressivement les différences physiques et de caractère (schtroumpf à lunette, farceur, costaud, etc.) entre stroumpfs apparaissent. Le succès devient mondial.
Les aventures de "Johan et Pirlouit" gardent aujourd'hui une fraîcheur étonnanteavec leur Moyen Age des contes et des légendes raconté avec fantaisie et humour. Le dernier album réalisé par Peyo lui-même est Le Sortilège de Maltrochu en 1972. Vampirisé par le succès des Schtroumpfs, Peyo,ne trouvera plus de temps à consacrer à la réalisation de nouveaux albums de Johan et Pirlouit. Après son décès, la série est reprise per le dessinateur Alain Maury et les scénaristes Yvan Delporte, Thierry Culliford, Luc Parthoens. Une serie de dessins animés a été produite par Hanna-Barbera Productions en 1982.
Johan et Pirlouit
Johan et Pirlouit "Les sire de Montrésor" - 1960
Peyo et sa caricature
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Pierre Culliford dit Peyo
Peyo (Pierre Culliford, 1928-1992) d'abord assistant projectionnistedans une salle de cinéma, il passe quelques mois à l'Académie des Beaux-Arts de Bruxelles. En 1945 “gouacheur” dans un studio de dessins animés il fait la rencontre de Franquin, Morris et Eddy Paape. Il s'essaie au dessin publicitaire puis publie des bande dessinée dans des quotidiens belges "La Dernière Heure et "Le Soir". En 1947 il créé "Johan et pirlouit", en 1958 Les Schtroumpfs et en 1960 "Benoit Brisefer" (sur les décors de Will ) un petit garçon à la force herculéenne, ami de Madame Adolphine, qui perd sa force quand il est enrhumé.
Le succès phénoménal des Schtroumpfs amène Peyoà créer son studio et à s'entourer d'une équipe : Walthéry, Roger Leloup, Lucien De Gieter, de Marc Wasterlain, de Derib, d'Albert Blesteau et de Benn,..
Au début des années 80 les Schtroumpfs sont un succès mondial: produits dérivés, dessins animés, les Schtroumpfs envahissent la planète.
En 1989, Peyo fonde sa société d'édition :Cartoon Création qui lance le magazine Schtroumpfs. En 1992, Cartoon Création cesse son activité d'éditeur et les Editions du Lombard prennent la relève, c'est là que naitra la derniere aventure des Schtroumps de la main de Peyo "Le Schtroumpf Financier".
Peyo est victime d'un arrêt cardiaque le 24 décembre 1992.C'est son fils Thierry qui assure la continuité de son œuvre.
Benoit Brisefer
Benoît Brisefer est un jeune garçon doté d'une force Herculéenne : il peut soulever les charges les plus lourdes (bétonneuse, armoire, voiture, rocher de plusieurs tonnes...), sauter très haut, courir très vite. Sa particularité est de perdre sa force lorsqu'il s'enrhume. Il vit à ViveJoie-La-Grande. Il n'aime pas la violence et les gens qui se battent. Sa force le met parfois dans de drôles de situations il casse presque toujours les jouets de ses amis. Il est ami avec madame Adolphine, une vieille femme, qui est à la fois un personnage humain, une vieille dame aimable, et un robot, ayant servi à son insu de modéle à un inventeur, mais en raison d'un accident dans la fabrication l'Adolphine robot est une personnage peu recommandable, chef de gang. Benoit a aussi un oncle : Placide, membre du Service Auxiliaire de Protection des Personnalités Étrangères, un "gorille". Comme la plupart des adultes, Placide ne croit pas à la force extraordinaire de son neveu.
La bande a été créée par Peyo mais a été reprise par plusieurs dessinateurs et scénaristes.
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Pirlouit fait de la pub pour Omo
La première édition du Docteur Jivago -
Le docteur Jivago, roman interdit de Boris Pasternak
Docteur Jivago - Omar Shariff, julie Christie dans le film de David Lean
"De l'immense majorité d'entre nous, on exige une duplicité constante, érigée en système." Boris Pasternak
"En raison de la signification attachée à votre prix par la société dans laquelle je vis,je dois renoncer à la récompense imméritée qui m'a été accordée. Ne prenez pas en offense mon refus volontaire" écrit en français Boris Pasternak dans le télégramme qu'il envoie, le 28 octobre 1958 à l'Académie Royale de Suèdepour refuser le prix Nobel qui vient de lui ëêtreattribué. De 1946 à 1950, le nom de Pasternak fit partie de la liste finale des candidats au Nobel, mais c'est le roman "Docteur Jivago", paru en 1957, qui emporte la décision du Comité du Nobel.
Avec la reprise de la terreur stalinienne en 1946, Pasternak, âgé de 56 ans, perd toute illusion sur le régime soviétiqueet s'attelle à ce roman en partie autobiographique. Il rencontre dans les bureaux du "Monde nouveau" Olga Ivinskaïa,âgée de 22 ans. C'est le coup de foudre, elle sera son modèle pour le personnage de Lara. En 1949 le KGB qui veut faire pression sur Pasternak arrête OLga et l'expédie dans un camp, enceinte, elle perd le bébé. Elle est libérée à la mort de Staline et reprend sa vie auprès de Pasternak. Après la publication du roman elle est de nouveau expédiée au goulag pour quatre ans. Unique roman du poète russe, "Le Docteur Jivago" est achevé en 1955.
Boris Pasternak (3eme a partir de gauche) Congrès des écrivains soviétiques 1934
"Le Docteur Jivago" est une fresque historique des "années terribles de la Russie",retraçant les bouleversements qu’ont connus la Russie, puis la nouvelle Union soviétique, entre 1906 et 1929, mais c'est aussi un roman d'amour, l’histoire d’un trio. Une jeune femme, Lara, d’origine bourgeoise mais pauvre, épouse Pavel Antipov, fils d’ouvrier. Celui ci devient en 1917 un révolutionnaire impitoyable. Lara mobilisée lors de la première Guerre mondiale fait la connaissance Iouri Jivago, médecin et poète, ils se retrouveront à plusieurs reprises durant ces années troublées, mais devront se séparer. Jivago en mourra.
À travers l'histoire d'un amour impossible, Pasternak rend compte du conflit qui s’est joué au sein de la révolution bolcheviqueentre deux conceptions. Celle incarnée par Pavel Antipov prêt à sacrifier sentiments et la vie d’autrui aux intérêts supérieurs de l’histoire et celle de Iouri Jivago qui refuse de sacrifier des hommes au nom d’idéaux qui, une fois incarnés dans l’histoire, s’identifient aux puissances du mal. Le révolutionnaire ne sait répondre au mal que par le mal. L' abandon fataliste de Jivago à la vie n'est pas démission, mais l'acceptation d'une mission prophétique qui implique le sacrifice de soi-même.
C'est, en arrière-fond la Russie stalinienne qui se profileavec la grandeur de ses débuts et la violence glacée des années staliniennes : purges, exécutions sommaires et mensonge institutionnalisé. "Il a été l'âme et la conscience de l'une de ces curiosités rarissimes: le visage et la voix d'une grande tempête russe, unique et extraordinaire [...] Il a pris la responsabilité d'une débauche de sang et de destruction comme le monde n'en avait encore jamais vu." écrira Pasternak de Staline après la mort de celui-ci.
Boris Pasternak et Akhmatova (poete russe) dans les années 40
Boris Pasternak (au second rang) avec des soldats soviétiques en 1943
"De l'immense majorité d'entre nous, on exige une duplicité constante, érigée en système.On ne peut pas, sans nuire à sa santé, manifester jour après jour le contraire de ce qu'on ressent réellement, se faire crucifier pour ce qu'on n'aime pas, se réjouir de ce qui vous apporte le malheur " (Le Docteur Jivago, XV, 7).
"Il y a longtemps que je n’avais lu un ouvrage vraiment russe, apparenté à la littérature d’un Tolstoï, d’un Tchekhov, d’un Dostoïevski.Le Docteur Jivago relève incontestablement de cette dimension supérieure. [...] Voilà pourquoi il m’importe peu de savoir si Le Docteur Jivago est un roman, un tableau de mœurs sur la première moitié du XXe siècle, ou Dieu sait quoi. Il y a beaucoup d’idées exprimées par Vedeniapine, Lara et Jivago lui-même, sur lesquelles j’ai envie de méditer, et elles vivent en moi indépendamment du roman, de même que le trouble intérieur qu’elles soulèvent." Lettre de Varlam Chalamov à Boris Pasternak
Boris Pasternak début 1956, adresse le manuscrit du "Docteur Jivago"à trois revues soviétiques (Literatournaïa Moskva, Znamia et Novy Mir) et, en même temps le fait passer à l'éditeur communiste italien Giangiacomo Feltrinelli.
"J'ai transmis un exemplaire à une maison d'édition communiste italienneet j'attendais la parution du livre censuré à Moscou, écrivait Pasternak dans une lettre au bureau de l'Union des écrivains soviétiques. J'étais prêt à corriger tous les passages inacceptables...".
Boris Pasternak avec Olga Ivinskaia et sa fille , Irina, en 1959
Dans le rapport du département de la culture du comité central sur «un roman inédit de B. Pasternak» en aout 1956 "Le Docteur Jivago" est qualifié de «calomnie haineuse» contre la révolution soviétique. Les autorités soviétiques somment Pasternak d’écrire Feltrinelli de lui retourner son manuscrit. « Lettre rédigée au Comité central sous menace de mort. » notera Pasternak en marge. Mais Feltrilleni prévenu qu'il ne doit tenir compte d'aucune lettre écrite en russe ne bouge pas et malgré les pressions, en novembre 1957, la toute première édition du "Docteur Jivago" parait chez l’éditeur italien . Le monopole du Parti sur la production littéraire soviétique est brisé. Des 1958 Collins, à Londres, et Gallimard, à Paris publie le roman en anglais et en français.
En octobre 1958, le Nobel de littérature lui est attribué,dans un premier temps Pasternak accepte de se rendre le 10 décembre à la réception de son prix. Nikita Khrouchtchev fou furieux lança une campagne de presse déchainée contre l'écrivain. Le Comité central déclare que le geste de l'Académie Royale suédoise est une manifestation d'hostilité à l'égard de l'U.R.S.S.
Le poète Alexandre Tvardovski, rédacteur en chef du mensuel le Monde nouveau écrit : «Une fin sans gloire attend aussi le Judas ressuscité, le Dr Jivago, et son auteur, qui aura pour lui le mépris du peuple.»
Pasternak, déjà malade, renonce à se rendre à Stockholm,et écrit à Khrouchtchev : « Le départ hors des frontières de ma patrie équivaudrait pour moi à la mort, et c’est pourquoi je vous prie de ne pas prendre à mon égard cette mesure extrême. » En novembre 1958 , la Pravda publie une lettre de Pasternak dans laquelle il dit regretter que son roman ait été perçu comme une attaque contre la révolution d'octobre et les fondements du système soviétique.
Leonard Bernstein et sa femme Felicia Montealegre avec Boris Pasternak, Moscou 1959
Pasternak est exclu de l'union des écrivains."L'attitude de Pasternak, membre de l'Union des écrivains de l'U.R.S.S. Il est devenu une arme de la propagande bourgeoise [...]. Il a rompu les derniers liens avec le pays et son peuple. [...] Considérant sa trahison à l'égard du peuple soviétique, du socialisme et du progrès, Le présidium retire à Boris Pasternak la qualité d'écrivain soviétique [...]." En janvier 1959, il écrit le poème "Prix Nobel" dont voici la première strophe : "Ils m'ont traqué et pris au piège -Chez moi, ils m'ont fait prisonnier. - La meute hargneuse m'assiège. - Pourtant, je sais la liberté". Après deux infarctus, Boris Pasternak meurt d’un cancer des poumons le 30 mai 1960.
Vladimir Nabokov , lui, détestait "Le docteur Jivago", il soupçonnait même que "[...] Les Soviets dénonçaient hypocritement le roman de Pasternak (dans le but de faire monter les ventes à l'étranger, pour en empocher les profits, et pour consacrer ceux-ci à financer leur propagande) [...] Tout Russe sensé peut constater immédiatement que ce livre est un livre pro-bolchevique et historiquement faux, ne serait-ce que parce qu'il passe sous silence la révolution libérale du printemps 1917 ; en plus, le bon docteur accepte avec une joie délirante le coup d'État bolchevique qui intervient sept mois plus tard - tout cela est entièrement conforme à la ligne du parti. Mais laissons de côté la politique, ce livre est une chose pathétique, il est maladroit, trivial, mélodramatique, avec des situations éculées, des avocats lascifs, des jeunes filles invraisemblables, et des coïncidences banales. [...] Oui, j'ai applaudi à son prix Nobel à cause de ses vers. Dans Le Docteur Jivago, pourtant, sa prose n'est pas à la hauteur de sa poésie."
"Le docteur Jivago" n'a pu être publiée en URSS qu' en 1988,grâce à la politique de "glasnot" de Mikhaïl Gorbatchev.
Krouchtchev et sa femme à la Maison Blanche avec Eisenhower et sa femme en 1959
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A. A. Murashko Portrait de Boris Pasternak 1917
Boris Pasternak
Boris Pasternak naît en 1890 à Moscou, sa mère est pianiste,son père peintre (Leonid Ossipovitch Pasternak, 1862-1945). Il étudie la philosophie à Moscou et fait un sejour en Allemagne à l'Université de Marburg. Il fait paraitre en 1914 son premier recueils de poesie, "Un jumeau dans les nuées", mais c'est seulement en 1922 qu'il accède à la célébrité avec la publication de "Ma sœur la vie". Il fait un bout de chemin avec Maïakovski et le groupe LEF, dont les adhérents veulent mettre une esthétique d'avant-garde au service de la révolution. Rebuté par leur dogmatisme il s'en sépare rapidement.
Boris Pasternak, sa femme , Evgeniia Pasternak, et leur fils 1924
Va commencer alors une période difficile ou il est dénoncé comme idéaliste et individualiste.En 1934 il est neammoins admis dans dans la nouvelle Union des écrivains soviétiques. En 1935 Staline l'envoie à Paris au Congrès international des écrivains pour la défense de la culture. En 1936 Malraux et Gide lui rendent visite à Moscou. La terreur stalinienne des années 1936-1938 le réduit au silence. Pasternak se consacre alors exclusivement a des traductions de Shakespeare, Keats, Shelley ou Verlaine. Il echappe ainsi au goulag.
En 1945 il entreprend "Le docteur Jivago"qui est publié en 1956 en Italie.A partir de 1947 il entretient une relation amoureuse passionnée avec Olga Ivinskaïa. Aprés avoir été obligé de refuser le prix Nobel il meurt en 1960 à Pérédelkino.
Funérailles de Boris Pasternak 1960
1945 : La guerre est terminée, on veut croIre au bonheur, les naissances augmentent et les temps sont appelés à changer. Les industries du spectacle prennent une importance nouvelle. Hollywood fait rêver et de nouvelles sonorités apparaissent. Dès 1947 aux États-Unis, la firme Columbia teste avec succès la gravure microsillon, en optant pour le 33 tours de 30 cm de diamètre, pressé dans une matière platisque. Sa concurrente la firme RCA elle, opte pour le format du 45 tours de 17 cm. C' est ce format que la jeunesse des années 50/60 plébiscitera, assurant au disque un succès sans précédent. L’enregistrement et la reproduction du son ont accompli de singuliers progrès. Les tourne-disques, électrophones et autres Teppaz entrent dans les foyers sous l’oeil bienveillant des enfants qui grandissent.
En 1951, le 45 tours comporte 2 titres, les producteurs ont gardé l'habitude de limiter la durée des chansons à 3 minutes, contrainte imposée par le 78 tours 25 cm, dont la durée n' éxcédait pas ces 3 minutes par face. Or le 45 tours offrait la possibilité de graver près de 7 minutes de durée par face, les fabricants français vont en tirer partie en plaçant 2 titres par côté, du moins dans la production de variétés. La firme Pathé-Marconi lance ce nouveau format en novembre 1953, présenté en pochette en de carton mat qui laissera ensuite sa place aux pochettes glacées. Sur le marché français ce format "EP" (extended play) supplantera durablement le 45 tours à deux titres.
Dans les années 50, quand le rock explose, et le marché derrière lui, ce sont des titres, des chansons qui marchent. Leurs vecteurs principaux sont la radio et le juke-box, et leur support idéal est le 45 tours, cet objet convoité dans la vitrine, jeté souvent après la saison ou jalousement conservé par les collectionneurs, le 30 centimètres étant, lui, destiné à réunir sur un même support les chansons sorties quelques mois plus tôt. Il faudra attendre les Beatles pour que le 30 cm s’émancipe et devienne un espace de création à part entière. La particularité du 45 tours à 4 titres, c' est son trou central d'un diamètre de 38 mm, conçu à l' origine pour les électrophones à changeur automatique. Ce support ayant comme inconvénient d'exiger une intervention manuelle fréquente, ce qui est un handicap par exemple dans les surprise-parties, les constructeurs d' électrophones ont donc imaginé un système avec lequel on peut empiler de six à dix 45 tours sur l' axe, ne néccessitant une intervention manuelle que lorsque la pile de disques a été jouée.
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Teppaz Présence 1957
Le Teppaz
Marcel Teppaz (né en 1908 et mort en 1964) crée en 1931 une entreprise d'assemblage de matériels radio et amplificateurs à Lyon avec trois compagnons. En 1937, il lance une nouvelle affaire d'amplificateurs et 30 personnes s'installent dans des locaux plus vastes à la Croix-Rousse. Ce sera ensuite l'aventure fantastique du tourne-disque qu'il invente en 1941, puis de l'électrophone en 1946 (dont le modèle "Oscar" qui fut vendu à des millions d'exemplaires).
De 1955 à 1957, " Présence ", valise proposée en quatre coloris, fait un tabac. 500 000 jeunes l'adoptent et la transportent sur leurs surprise-parties. Les modèles et les coloris se multiplient jusqu'à l'électrophone à piles en 1959. On le retrouve sur les bateaux, en camping, en pique-nique...
Jusqu'en 1968, le Teppaz vit son âge d'or :les formes plaisent, les coloris, jusqu'à 25, sont variés. Il est maniable, il ne pèse que 5 à 6 Kilos et c'est un modèle suivi.
111 pays furent conquis par le "Teppaz portable", ce qui valut à son auteur l'Oscar de la meilleure entreprise française à l'exportation en 1962.
Tepaz Oscar
Spoutnik 1
" Lorsque Spoutnik fut envoyé en orbite autour de la Terre, cela voulait non seulement dire que l'URSS avait un avantage technologique mais qu'elle n'avait plus besoin d'avion pour envoyer ses bombes atomiques sur les villes du "monde libre"
Le 4 octobre 1957, une fusée Semiorka décollait d'une base militaire soviétique qui ne s'appelait pas encore Baïkonour, emportant sous sa coiffe Spoutnik 1.Sphère de 58 cm de diamètre et de quelque 83 kg il tourne autour de la Terre en 97 minutes, la sphère est remplie de gaz neutre (azote), équipée d'un émetteur (à lampes !) et d'une batterie lui assurant 21 jours d'autonomie. Le système de communication était capable de transmettre la pression et la température de l'azote afin de vérifier les principes de pressurisation et de thermorégulation utilisés. L'étude de ces signaux devait également permettre d'étudier la propagation des ondes dans l'atmosphère. Les deux émetteurs étaient suffisamment puissants pour permettre à des amateurs de capter le "bip-bip" du satellite un peu partout dans le monde. L'étude de la trajectoire du satellite devait fournir des informations sur la densité de la haute atmosphère et sur la forme exacte de la Terre. Les appareils électriques du satellite ont fonctionné pendant trois semaines après le lancement, ensuite la trajectoire a été surveillée de manière optique. Il se désintègre dans l'athmosphère, 92 jours après son lancement le 4 janvier 1958.
Enregistrement du bip de Spoutnik
Des écoliers soviétiques à l'écoute de Spoutnik - A New York en 1958 La foule devant un magasin qui retransmet le bip-bip de Spoutnik.
Lancé le 3 novembre 1957, Spoutnik 2, un satellite de 500 kg a emmené dans l'espace le premier être vivant, la chienne Laïka. Il avait la forme d'un cône de 4 m de hauteur avec une base de 2 m de diamètre. Il était constitué de différents compartiments pour les appareils électriques, d'une capsule sphérique identique à celle de Spoutnik-1, ainsi que d'une cabine pressurisée, prévue pour accueillir la chienne Laïka. Cette cabine était équipée de capteurs pour mesurer la température et la pression ambiante, ainsi que pour surveiller la pression sanguine, la respiration et les battements du cœur du chien. Une caméra permettait également de surveiller l'animal depuis la Terre. Dans la capsule sphérique, se trouvaient un émetteur radio et deux spectromètres pour mesurer les rayons X et ultraviolets émis par le Soleil. Le satellite ne s'était pas détaché de sa fusée porteuse provoquant une défaillance du système de régulation de température, ce qui causa la mort de Laika, environ 7 heures après le lancement.
L'URSS lança en tout dix satellites Spoutnik. Le dernier Spoutnik-10 fut lancé le 25 mars 1961 depuis Baïkonour, c'est le cinquième et dernier vol test pour le programme Vostok (vols habités). Cet engin transportait un mannequin et la chienne Zvezdochka. Le retour, après 101 minutes de vol et 17 révolutions orbitales, fut un succès.Le premier vol habité par un être humain eut lieu le 12 avril 1961 avec le vol orbital de Youri Gagarine.
Spoutnik 2 et la chienne Laika
Les politiques et les militaires soviétiques voulaient des missiles intercontinentaux dans le cadre de leur confrontation avec l'Occident et réaliser un exploit dans le domaine scientifique qui leur permettrait de doubler les États-Unis qui avaient entrepris des tests en vue de lancer un satellite dans le cadre de l'Année géophysique internationale de 1957-1958.
Les États-Unis furent sous le choc lors de l'annonce de cette nouvelle qui remettait en cause leur prédominance dans le domaine scientifique et les militaires américains furent atterrés car les radars leur avaient appris — ils turent alors cette information — qu'outre le satellite, la fusée porteuse avait mis en orbite son corps central, soit une dizaine de tonnes, masse largement suffisante pour l'emport d'arme nucléaire pouvant frapper le continent américain. Cette fusée porteuse était d'ailleurs parfaitement visible à l'oeil nu, contrairement à Spoutnik 1 qui nécessitait des moyens optiques puissants pour être observé. À l'époque, les États-Unis auraient eu besoin de plusieurs heures pour mettre en place une attaque nucléaire contre l'URSS tandis que celle-ci avec des missiles aurait pu le faire en 30 minutes, rendant impssible toute réplique de la part des États-Unis.
Le retard des États-Unis dans le domaine de l'aérospatiale date de la fin de la deuxième guerre mondiale. L'Allemagne nazie avait tentée avec plus ou moins de succès de développer des missiles (le V-2 étant le plus connu). Les États-Unis et l'Angleterre ne crurent pas à la possibilité des vols spatiaux.
Ce défi à leur sécurité mais aussi à leur amour propre conduisit les États-Unis à relever le gant, ouvrant ainsi la conquête de l'espace.
Spoutnik 3 et la chienne Zvezdochka de la mission Spoutnik 10
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À pied, à cheval et en spoutnik
Comédie réalisée par Jean Dréville sortie en 1958. Avec Noël-Noël Denise Grey Sophie Daumier Darry Cowl Misha Auer
A la suite d'un accident de voiture, M. Martin a perdu la mémoire. Sur les conseils du médecin, sa femme l'emmène à la campagne, sans journaux ni radio.Un container parachuté atterrit, sans qu'il le voit, dans son jardin. Son chien Friquet lui apparaît peu après, sous l'œil dubitatif de Marie, sa femme de ménage, celle-ci sachant que le chien a disparu deux ans auparavant... Il a receuilli en fait Fédor tout juste débarqué d'un Spoutnik. M. Martin est peiné de voir Friquet refuser d'abord toute nourriture, mais il s'aperçoit ensuite que l'animal mange lorsqu'il entend retentir une sonnerie. Des fonctionnaires de la Préfecture alertés par l'ambassade soviétique vont chez M. Martin pour reprendre le chien en lui expliquant l'histoire du spoutnik. Il accepte de rendre le chien à ses maîtres et va même en Russie l'accompagner. Il s'attarde dans ses adieux à l'animal alors que celui-ci doit repartir dans la fusée du professeur Papov et se retrouve embarqué dans l'aventure. Papov malade, c'est Martin qui dirige la fusée et, après avoir été vers la lune, il retournera enfin sur la terre où il sera admiré et fêté et repartira à la campagne y vivre tranquillement avec Madame Martin et le chien.
A la fin des années 50 ARTIMA, une maison d'édition installée à Tourcoing proposaient des BD en noir et blanc: western, espionnage, guerre, sport, piraterie, jungle ou science-fiction. Chaque fascicule à la couverture très colorée était consacré à un genre précis et proposait un ou plusieurs récits complets ou à suivre. Une bonne trentaine de titres rivalisaient pour capter l'attention des jeunes lecteurs : Ardan, Atome Kid, Audax, Aventures Film, Aventures Fiction, Dynamic, Eclair, Flash, Fulgor, Hardy, Météor, Olympic, Ouragan, Panda, Sidéral, Spoutnik, Tarou, Tempest, Téméraire, Vengeur, Vigor,...
Lomo Sputnik "L'appareil le plus moche jamais construit" objectifs minables, ergonomie iimprobable, viseur inutilisable. Mais il fait de la photo en relief !Les russes sont parmi les derniers à avoir cru à la photographie stéréo populaire au point de sortir en grande série des appareils spécifiques. Le Lomo "Sputnik" date du début des années 60. Il s'agit d'un reflex utilisant de la pellicule 120 pour obtenir deux négatifs 6 x 6 cm.
Un scooter ? non une Vespa
"Vacances romaines" 1953, Gregory Peck, Audrey Hepburn, la Vespa
"A votre bonheur, il ne manque que la Vespa"
A l’issue de la guerre, Enrico Piaggio doit relancer son’entreprise. Il n’a plus le droit de construire des aéronefs. Il se dit qu’à l’issue de ces années terribles, tout le monde n’a qu’une envie, se déplacer… il veut produire un deux roues qui serait accessible au plus grand nombre.Un premier modèle est créé, le MP5, surnommé Paperino (nom de Donald Duck en Italie), mais le prototype ne plaît pas à Enrico Piaggio. Le projet est alors confié à Corradino d'Ascanio qui conçoit l'engin un véhicule avec coque porteuse et boîte de vitesse sur le guidon, moteur sur la roue arrière. Les roues sont fixées latéralement (comme pour les trains d'atterrisage des avions) ; la fourche devient un simple bras, ce qui facilite notamment le changement de la chambre à air et du pneumatique. Le mot Vespa signifie " guêpe" en italien, nom choisi par Enrico Piaggio lui-même en découvrant le prototype du modèle, a cause de son moteur, un 98 cm3, au bourdonnement caractéristique.
"Rabbit" de Fuji - MP5 "Paperino" de Piaggo 1946
MP6 de Piaggo 1946 - D'Ascanio, Fangio et la Vespa
Au mois d'avril 1946 les 15 premiers exemplaires sortent de l'usine de Pontedera.Soit six mois après la sortie au Japon du "Rabbit" de Fuji qui peut revendiquer le titre de premier scooter produit. Le succès de la Vespa est un phénomène unique. A la fin de 1949, 35 000 exemplaires étaient déjà produits. En 1953, le réseau compte 10 000 points de vente à travers le monde, y compris en Asie et en Amérique. En 1950, la Vespa est construite en Allemagne, puis au Royaume-Uni et en France (La différence avec le modèle italien se trouve dans la position du phare qui se trouve placé sur le guidon en France tandis qu'il se trouve placé sur le garde-boue en Italie). . En Espagne, la production débute en 1953 à Madrid. Des usines sont construites en Inde (à Bombay) et au Brésil. La marque s'implante également aux États-Unis. La Vespa, immortalisée dans une centaine de films, le modèle 125cc "Cambio Flessibile" s'octroya même le troisième rôle dans "Vacances romaines". Les correspondants étrangers décrivent l'Italie comme "le Pays de la Vespa.
En 1948 dans le sillage du succès de la Vespa débute la construction de l'Ape lequel a, durant la période du redressement de l'Italie, a joué son rôle dans l'amélioration de l'économie.
Vespa Ape
Si la Vespa est unique, c'est parce qu'elle est un phénomène social. La Vespa est venue à point nommé réaliser les désirs des Italiens, on reconnaissait à ce véhicule original et sympathique des qualités très précieuses et typiquement italiennes : son prix d'achat était peu élevé, son entretien économique, elle était très pratique et s'adaptait à toutes les situations. "A votre bonheur, il ne manque que la Vespa" proclamait Piaggio. Ouvriers, cadres, marchands, fonctionnaires et stars de cinéma s'affichent en Vespa. La machine avec son tablier, qui protège le conducteur de la pluie et des projections, et lui assure une tenue impeccable à l’arrivée, a été étudiée pour être confortable, c’est là aussi une des clefs du succès de la vespa : les femmes peuvent les piloter, même en robe. Succés obtenu a coup de puissance financière et de savoir faire marketing malgré somme toute des solutions techniques peu innovantes, et une réputation de casse-gueule vite établie.
En effet grace à un marketing avisé, tout en étant un produit populaire, la Vespa devint dans l'esprit de tous synonyme de chic.Acquérir une Vespa, c'était opter pour l'élégance. Piaggo sut très tot associer la Vespa à une célèbrité (de John Wayne jusqu'à Helmut Kohl). Le journal "Fortune" la comptait déjà en 1961, parmi les 100 créations classiques du 20ème siècles. Ce qui caractérisait la Vespa, c'était ses formes fluides son apparence dépourvue de sophistication, la simplicité et l'évidence de ses lignes. La vespamania est soigneusement entretenue par des rallyes et sorties de clubs, d’avantageuses conditions commerciales accordées au clergé italien ou d’exploits sportifs. La silhouette de l’engin est popularisée par le cinéma et les premières images de télévision. Avec Gregory Peck et Audrey Hepburn dans "Vacances romaines", elle devient " in ".
Vespa véhicule des stars : Vittorio Gassman, Louis Armstrong, Jean-Paul Belmondo
Et dernier coup de génie marketing Piaggio lance à partir de 1951 la série des calendriersqui remportent aussitôt un grand succès. La Vespa constitue un précieux miroir des époques et des modes qu'elle a traversées, comme le style "dolce vita"ou plus tard les mods . La Vespa est entré dans l'histoire comme un "mythe", une façon d'être, de penser et de s'exprimer elle a été, au cours des décennies, l'interprète de la société dans laquelle elle évolue. Dans le monde entier, la Vespa est le produit typiquement italien, synonyme de liberté, de mobilité et de convivialité. 60 ans après sa naissance, la Vespa a été produite à 16 millions d’exemplaires à travers une centaine de modèles.
Cinémascope le grand spectacle des fifties
"Nous voulons que le public puisse dire qu'il n'existe pas de mauvais films en Cinémascope, de même qu'il peut dire qu'il n'existe pas de mauvaises Cadillac" Spyros Skouras - 20th Century-Fox
Dans le "studio system" hollywoodien classique des années 40les principaux studios sont au nombre de huit, les "major companies" : MGM, Paramount, Warner, Fox ,RKO et les trois "minors" : Universal, Columbia et United Artists. Comédiens, réalisateurs, scénaristes, techniciens sont liés au studio par contrat; Le studio contrôle la production mais aussi la distribution et l'exploitation. Les "majors" possèdent aussi des chaînes de salles de cinéma.
1950 ouvre pour Hollywood le règne de la suspicionavec la généralisation de la chasse aux sorcières de MacCarthy, une période qui verra aussi l'effritement progressif du monopole des grands studios avec la loi antitrust, le divorce entre distribution et exploitation et l'irruption de la télévision. Un total changement de contexte auquel doit faire face le "studio system" hollywoodien.
En 1951 la fréquentation des salles de cinéma est en chute :90 millions de spectateur en 1948, 46 millions quelques années plus tard. Les producteurs s'inquiètent, les studios cherchent les moyens de ramener les gens dans les salles de cinéma. Hollywood va se lancer dans l'expérimentation de nouvelles technologies : renaissance du film en couleurs, essai de film en relief, son stéréophonique et films large écran, techniques visant à démarquer les produits cinématographiques du loisir télévisuel. L'essor des drive-in à la sortie des villes américaines participe de ce même souci, en offrant aux adolescents un espace hors de vue des parents, moyennant l'abandon de l'écran télévisé.
Fred Waller - Système de projection Cinerama
Le 30 septembre 1952 au Broadway Theatre de New-York on projette"This is Cinerama". premier film utilisant le procédé baptisé Cinerama, il restera deux ans à l'affiche. Cette technique, conçue par Fred Waller, utilise les prises de vues de trois caméras synchronisées. Le film est projeté sur un écran "extra large" en arc de cercle de 146° par trois projecteurs. Le son est assuré par un autre film 35mm portant 7 pistes magnétiques.
Le Cinérama imposait des contraintes très lourdes,techniquement et financièrement, tant au tournage qu'à la projection : prise de vues avec trois caméras, trois projecteurs synchronisés dans la salle et trois cabines de projections distinctes, mixage du son en direct par un ingénieur du son. De plus le système n'est pas sans défauts : recoupements imparfaits entre les trois images, dédoublement... il nécessite la modification des salles (avec diminution du nombre de places utiles, l'image étant distordue au delà d'un périmètre précis).
Dix films seulement on été tournés en cinérama, dont huit sont en fait des documentaires destinés à démontrer les possibilités du système, et deux seulement des fictions "How the West Was Won" (La Conquête de l'Ouest, 1962), et "The Wonderful World of the Brothers Grimm" (Les Merveilleux contes de Grimm, 1962).
Malgré sa diffusion très limitée et ses inconvénients, ce procédé remporta un énorme succèsauprès des spectateurs et il fut l'étincelle qui déclencha la guerre des écrans larges à Hollywood dans les années 50.
Spyros Skouras et Henri Chrétien
Devant le succès du Cinéramaauprès des spectateurs les dirigeants de la Fox, Spyros Skouras et Darryl F. Zanuck se persuadent que le seul moyen de conserver des spectateurs est de leur offrir un spectacle que le petit écran ne peut leur donner. Zanuck lance ses ingénieurs dans la recherche d'un procédé qui tout en accroissant les effets de profondeur à l'écran, et l'enveloppement du spectateur ne reprendrait pas les contraintes techniques du Cinérama ni la nécessité de l'utilisation de lunettes polarisées du cinéma en relief expérimenté à la même époque.
Henri Chrétien (1879-1956), un chercheur français avait mis au point dès 1925 un système optique à objectif anamorphique l'Hypergonar.L'objectif "comprime" l'image sur la pellicule et restitue sa "vraie" dimension, par effet inverse à la projection, permettant ainsi une image panoramique sans toucher au format 35 mm de la pellicule. Claude Autant-Lara avait tourné un moyen-métrage en 1927 utilisant ce procédé, "Construire un feu" d'après une nouvelle de Jack London. Le film est terminé en 1930 mais le procédé rencontre l'hostilité des exploitants de salle te l'affaire n'aura pas de suite... en France. Il est repris en 1952 par la 20th Century-Fox qui rachète les droits d'utilisation du procédé ainsi que les objectifs existants, et les ingénieurs du studio mettent au point à l'aide de ce brevet le procédé Cinémascope.
Matériel promotionnel de la Fox pour The Robe en Cinemascope
Roxy Theater, le premier cinéma à projeter un film en Cinemascope - Ne"w-York 1953
"The robe" (La Tunique - Henry Koster) dont le tournage avait commencé, est arrêté pour être repris en Cinemascope.Le tournage fut techniquement assez difficile, la Fox ne dispose que de trois objectifs qui par ailleurs ne sont pas adaptés au matériel utilisé entrainant des problèmes de vignettage de perte de luminosité et des problèmes de mise au point." Le procédé en lui-même présente aussi des inconvénients : avec un rapport d'anamorphose de 2 l'image projetée couvre une surface d'écran double de celle qui serait obtenue en l'absence d'anamorphose elle est donc deux fois moins nette et deux fois moins lumineuse.
La première projection publique a eu lieu le 16 septembre 1953au Roxy, à New York. C'est un immense succès.qui rapportera au total près de 36 millions de dollars aux États-Unis
Zanuck annonce que tous les films produits par le studio le seront désormais en Cinemascopeet en couleurs ajoutant "a ce stade du développement du Cinemascope nous devons sélectionner uniquement les scénarios qui soulignent clairement les ingrédients utiles non seulement pour l'histoire mais également pour l'exploitation du scope" Spyros Skouras déclare : "Nous voulons que le public puisse dire qu'il n'existe pas de mauvais films en Cinémascope, de même qu'il peut dire qu'il n'existe pas de mauvaises Cadillac". Le procédé originel de la Fox comportait l'écran large, l'anamorphose de l'image, un son stéréophonique 4 pistes magnétiques et un écran particulier (miracle screen). Devant les réticences des exploitants face aux coûts des investissements nécessaires seuls demeurèrent l'anamorphose et l'écran large.
En 1953, aux États-Unis, cinq films sortent en Cinémascope :trois sont produits par la Fox ("La tunique" (The Robe), "Comment épouser un millionnaire"(How to Marry a Millionaire de Jean Negulesco avec Marilyn Monroe), "Tempête sous la mer" ( Beneath the 12-Mile Reef de Robert D Webb) ,un par la Metro Goldwyn Meyer ("Les chevaliers de la table ronde " Knights of the Round Table de Richard Thorpe), un par Warner Bros ("la poursuite dura 7 jours" The Command de David Butler)
La 20th Century Fox organise la présentation du Cinémascope au Tout Paris du cinéma et de la pressele 18 juin 1953 au Rex, c'est également au Rex, en même temps qu' au Normandie que "La tunique" commencera sa carrière le 4 décembre 1953, avec en première partie le premier film français tourné en Cinémascope, un court métrage documentaire de Marcel Ichac "Nouveaux Horizons"
L'adoption de ce procédé entraine pour les salles de cinéma des travaux coûteux, rapidement réalisées aux États-Unis, puis pratiquement imposées aux salles européennes, ce qui amènera d’ailleurs en France quelques polémiques anti-américaines. Fin 1955, plus de 25 000 salles dans le monde sont équipées pour projeter en Cinémascope. D'autres techniques concurrentes verront le jour comme la Vistavision, le Warnerscope, le Superscope mais sans connaître le succès du Cinemascope.
The Robe auc Chinese Thater de Los Angeles en 1953
Vertigo en Vistavision - Alfred Hitchcock 1958
En 1954, environ une quarantaine de films sont tournésen format "wide screen" et en 1955, plus de 100, dont le deuxième film de Lang avec la MGM, "Les contrebandiers de Moonfleet" tourné en Cinémascope malgré les réticences du réalisateur qui n'aimait pas ce format "bon seulement pour les serpents et les enterrements" et "La Main au collet" (To Catch a Thief) d'Alfred Hitchcock tourné avec un procédé concurrent le Vistavision (Contrairement aux systèmes habituels, le défilement de prises de vues se faisait horizontalement) mis au point par la Pramount pour "Noël Blanc" (White Christmas) de Michal Curtiz en 1954. Il tournera "Vertigo" en 1958 avec ce même procédé, qui a aussi a son palmarès "Les dix commandements" (Cecil B. D Mile - 1956)
En 1955 pour augmenter la définition de l’image la Fox développa le CinémaScope 55,qui consistait à tourner sur une pellicule négative 55 mm (sur 8 perforations), puis à tirer les copies sur positif 35 mm après réduction optique.
Le Cinemascope n'est pratiquement plus utilisé depuis 1965.
"Les dix commandements" - Charlton Heston - 1956