Histoire
Fertilité et stérilité dans l’Egypte ancienne
Comme à toute époque et dans toutes les civilisations, les couples de l’Egypte ancienne ont comme priorité d’engendrer des enfants et surtout de les maintenir en vie. A cette époque, la mortalité enfantine est très élevée dans toutes les couches sociales.
C’est pourquoi, dès cette époque, des traités médicaux, tel le « papyrus Ebers », rédigé vers 1 500 avant notre ère, s'efforcent de les aider dans cette entreprise.
Fertilité et stérilité font l’objet d’études médicales mais Les médecins n'interviennent pas, sauf dans quelques cas extrêmes, qui dépassent de toute façon leurs compétences. Incantations et potions, le tout agrémenté de magie, sont le plus couramment pratiqué pour aider mère et enfant à survivre.
De maigres connaissances médicales
Le « papyrus Ebers » (du nom de l'égyptologue allemand qui a acquis le document au XIXe siècle) est un excellent aperçu des connaissances médicales de l'époque. II consacre plusieurs chapitres à la naissance et aux maladies des bébés, questions très importantes pour les Égyptiens.
Les remèdes proposés pour soigner les enfants accordent souvent une large place à la magie, seul recours possible lorsque la médecine ne peut rien, ce qui est le cas le plus fréquent.
Hiéroglyphe symbolisant une femme en train d'accoucher (London, British Museum).
Divers ouvrages médicaux, composés entre 2000 et 1200 avant notre ère, complètent les informations du papyrus Ebers en ce qui concerne les nouveau-nés.
Assez paradoxalement, les médecins égyptiens sont des pionniers dans certains domaines médicaux comme l'ophtalmologie ou l'anatomie. La pharmacopée égyptienne contient au moins 700 potions essentiellement végétales. Certains minéraux sont réduits en poudre et avaler avec de l'eau ou du thé.
Un processus de reproduction mal connu
Bien sûr, les Égyptiens établissent le lien entre sexualité et procréation. Cependant, ils n'ont pas de connaissances approfondies sur le processus de reproduction.
Ils n’ignorent pas le rôle des spermatozoïdes mais sans comprendre l’alchimie nécessaire à la procréation.
Ils considèrent que la semence masculine provient de la moelle des os et qu'elle provoque la formation du squelette de l'enfant dans le ventre de la femme; la chair serait quant à elle due à la mère.
Les remèdes contre la stérilité
La stérilité du couple est un phénomène qui inquiète beaucoup les Égyptiens. Par ignorance et tradition, elle est très généralement attribuée à l'épouse.
Les papyrus contiennent de nombreuses recettes permettant d'établir si la femme peut concevoir ou non.
Ainsi, il est recommandé de « Verser des melons d'eau mêlés à du lait d'une femme ayant mis au monde un garçon dans le vagin de la femme. Si elle vomit, elle enfantera. Si elle a des vents, elle n'enfantera pas ».
Accouchement, instruments chirurgicaux sur un bas-relief de Köm Ombo
La stérilité, décelée par ces méthodes qui nous paraissent aujourd’hui absurdes, est considérée comme une fatalité.
De fait, aucun traitement médical n’est préconisé.
Certains tests, plus élaborés mais guère plus fiables, offrent de déterminer le sexe de l'enfant en même temps que la capacité de procréation de la femme
« Que la femme arrose de son urine l'orge et le froment dans deux bourses comme on en a pour les dattes et les gâteaux, tous les jours. Si l'une des deux sortes germe, elle enfantera. Si c'est l'orge, ce sera un garçon, si c'est le froment, ce sera une fille. Si rien ne germe, elle n'enfantera pas. »
L’accouchement
Quand la grossesse arrive à son terme, la future mère fait appeler les sages-femmes. La patiente s'accroupit sur le sol ou sur deux tas de briques parallèles qui font office de siège d'accouchement.
L'une des sages-femmes tient l'accouchée par-derrière, l'autre, assise par-devant, se prépare à recevoir l'enfant. Pour calmer la douleur et l'inquiétude de leur patiente, elles lui font boire de la bière.
Le papyrus Ebers, dans sa partie consacrée à l'accouchement, donne une vingtaine de recettes pour le faciliter ou l'accélérer, mais il s'agit surtout de lotions et de massages. Lorsque l'enfant sort du ventre maternel, les sages-femmes coupent le cordon ombilical et lavent le petit corps.
Le bébé doit souvent son nom aux paroles prononcées par la mère pendant la venue au monde : « Le garçon que je désirais », « La jolie fille nous a rejoints ». En cas de complications, la mère et l'enfant ont très peu de chances de survivre.
L'espoir est également très mince pour l'être fragile né avant terme ; hormis des incantations, il n'y a rien à faire. Et même quand l'accouchement s'est bien déroulé, le nouveau-né n'est pas assuré de vivre très longtemps, les risques d'infection et de maladie étant très élevés.
Les Egyptiens vénéraient de nombreux dieux dont certains veillaient particulièrement sur les mères et leurs bébés.
Thouéris possédait la tête et le corps d’un hippopotame. Debout, elle s’appuie sur le nœud magique « ankh », symbole de vie.
Elle préside à l’accouchement et symbolise la fécondité.
Statue de Thouéris à Memphis.
Hathor, qui avait la forme d’une vache, veillait également à la fertilité et à la naissance. Les femmes portaient des amulettes provenant de son sanctuaire pour éviter les accouchements trop longs et trop pénibles.
Citons également Min, dieu de la reproduction et de la fertilité. Ce dieu de l’énergie virile est généralement représenté debout en érection, le bras droit levé tenant un fouet.
Vivre ou mourir
Le papyrus Ebers indique des recettes pour déterminer aussitôt après la naissance si le nourrisson vivra ou non : « Un autre moyen de prévoir si un enfant vivra le jour de sa venue au monde. S'il dit nii, cela signifie qu'il vivra. S'il dit mebi, cela veut dire qu'il mourra », ou encore : « Si l'on entend un gémissement, cela signifie qu'il mourra. S'il baisse son visage, c'est aussi signe qu'il mourra. »
L'enfant qui franchit ces premiers écueils est allaité par sa mère pendant trois ans. Les femmes riches ou suffisamment aisées qui ne veulent ou ne peuvent alimenter leur progéniture ont recours à des nourrices.
Femmes portant leurs enfants sur le dos ou les épaules (bas relief de la tombe du vice-roi Harembhab à Bîbân el-Mulûk, XIVe sicèle avant notre ère, Leyden, Musée Egyptien).
Les mères pauvres qui n'ont pas de lait font boire à leur bébé du lait de vache. Auparavant, elles auront sans doute essayé de stimuler la lactation à l'aide de remèdes identiques à ceux que propose le papyrus Ebers.
Ce sont soit des potions à base d'ingrédients aussi curieux qu'une épine dorsale de silure cuite avec de l'huile, soit des incantations, certainement pas moins efficaces que le breuvage précédent.
Le document donne également la composition de pommades pour soigner les seins. Toux et difficultés urinaires sont les seules maladies infantiles, avec celle nommée baa et non identifiée, évoquées par les papyrus.
Contre la toux, le papyrus Ebers préconise de faire boire à l'enfant des dattes écrasées, mélangées avec du lait. Contre la rétention d'urine, il conseille de faire cuire un vieux grimoire dans de l'huile puis d'enduire le ventre du bébé avec cette lotion.
Dans les cas désespérés, on fait absorber à l'enfant une souris cuite, désossée de préférence. Lorsque les os de l'animal sont conservés, on les enferme dans un tissu et on les suspend autour du cou du malade et on attend.
Ce type de remède, qui ne doit plus rien à la médecine mais appartient au domaine de la magie, n'a certes pas fait baisser le taux de mortalité infantile considérable de l'Égypte antique. Les amulettes protectrices, innombrables, n'y sont pas davantage parvenues.
"La pharmacopée égyptienne contient au moins 700 potions essentiellement végétales. Certains minéraux sont réduits en poudre et avaler avec de l'eau ou du thé." CORRECTION: "et avalés...."
Ecrire un commentaire