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Date de création : 27.11.2008
Dernière mise à jour :
08.02.2013
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Henri IV
Arrivé le soir du 13 avril 1598 à Nantes, le roi Henri IV signe le 30 avril suivant un ensemble de textes connus dans l'Histoire sous le nom d'«Édit de Nantes».
Ce texte marque la fin des guerres de religion entre catholiques et protestants français. Il vise à «l'établissement d'une bonne paix et tranquille repos» selon les propres mots du roi. C'est la première fois qu'est officialisée dans un même État, en Europe, la coexistence de protestants et de catholiques.
L'Édit de Nantes demeure, dans la mémoire collective, le symbole de la tolérance entre des confessions autrefois rivales et désormais prêtes à accepter la religion de l'adversaire... Déjà dans les années précédentes, au plus fort des guerres de religion, des municipalités françaises avaient conclu des «édits de pacification» entre leurs concitoyens des deux confessions ; c'est ainsi que l'on pouvait vivre en paix dans ces villes tandis que l'on s'étripait dans les villes voisines !
Certains historiens ont placé l'Édit de Nantes aux origines de la laïcité française. S'il met un terme aux guerres civiles qui ont ensanglanté la France pendant près de trois décennies, cet édit de pacification ne fait qu'établir une coexistence entre la majorité catholique et la minorité protestante, disciple de Jean Calvin. Dans le préambule de l'Édit, le roi Henri IV défend d'ailleurs l'idée d'unité religieuse du royaume : encore impossible, elle est remise à plus tard.
Ce qu'on appelle l'Édit de Nantes est en fait un ensemble de quatre textes : l'Édit général (signé le 30 avril 1598), les articles secrets et particuliers (30 avril ou 2 mai 1598), le brevet des pasteurs (3 avril 1598) et le brevet des garnisons (30 avril 1598).
À ces textes, il faut ajouter l'Édit signé par Henri IV à Fontainebleau le 15 avril 1599, pour le royaume de Navarre (royaume en fait limité au Béarn), car Henri IV, ne l'oublions pas, est roi de Navarre avant que d'être roi de France. Les deux couronnes ne seront réunies que sous le règne de son fils Louis XIII. En attendant, il faut une législation spécifique pour le Béarn, où, à la différence de la France, les protestants tiennent le haut du pavé depuis les mesures prises en leur faveur par Jeanne d'Albret, mère d'Henri IV.
Tous ces textes sont le fruit d'une longue négociation entre les protestants et leur ancien chef, Henri IV... Ils sont signés en catimini et tenus secrets pendant de longs mois, jusqu'à leur ratification par les Parlements, tant est grande la crainte du roi qu'ils ne soient rejetés par l'opinion.
Celle-ci, sur le moment, est beaucoup plus sensible à la conclusion de la paix avec les Espagnols, par le traité de Vervins.
Henri IV, successeur légitime de son cousin Henri III, a abjuré définitivement la religion réformée en 1593 et ainsi pu obtenir de se faire sacrer à Chartres en 1594. Mais l'année suivante, il a dû déclarer la guerre aux Espagnols, qui, après avoir soutenu les Ligueurs, catholiques intransigeants, avaient pris goût à l'occupation de la France.
Soucieux de consolider la paix, à l'intérieur comme à l'extérieur, le roi envoie dans un premier temps auprès du pape Clément VIII deux plénipotentiaires ecclésiastiques, Jacques du Perron et l'abbé d'Ossat, pour le convaincre de donner son absolution au roi en échange de l'acceptation par celui-ci des décisions du concile de Trente et du rétablissement du catholicisme dans ses droits au Béarn.
Henri IV négocie par ailleurs avec les représentants des protestants, assemblés à Saumur au printemps 1596, les termes d'un nouveau et définitif Édit de tolérance, après ceux dont les guerres de religion ont été émaillés.
Le roi, qui a appris à connaître et estimer les réformés du temps où il combattait à leurs côtés, comprend mieux que quiconque la vanité de l'unité religieuse et la nécessité de poser les bases d'une nouvelle coexistence confessionnelle sous l'égide d'un même roi.
Mais voilà que le 11 mars 1597, les Espagnols s'emparent par traîtrise de la ville d'Amiens, dont les bourgeois avaient refusé la protection de l'armée royale. Face au danger, Henri IV demande du renfort aux réformés. Ces derniers se font désirer, croyant par là obtenir des conditions plus favorables à la conclusion du futur édit. Le roi ne cède pas. Les réformés comprennent le danger que leur attitude fait courir au royaume et se résignent à signer enfin un accord.
L'Édit général, avec 92 articles généraux et 56 articles particuliers, dits «secrets», est en premier lieu un texte de pacification. Celle-ci passe par une amnistie générale, autrement dit l'oubli de toutes les offenses (le mot amnistie dérive d'une racine grecque qui signifie oubli).
L'article I énonce : «Premièrement, que la mémoire de toutes choses passées d'une part et d'autre, depuis le commencement du mois de mars 1585 jusqu'à notre avènement à la couronne et durant les autres troubles précédents et à leur occasion, demeurera éteinte et assoupie, comme de chose non advenue. Et ne sera loisible ni permis à nos procureurs généraux, ni autres personnes quelconques, publiques ni privées, en quelque temps, ni pour quelque occasion que ce soit, en faire mention, procès ou poursuite en aucunes cours ou juridictions que ce soit».
Concernant la coexistence religieuse entre catholiques et protestants, l'Édit reprend pour l'essentiel des dispositions contenues dans les édits de paix de religion antérieurs : édit d'Amboise, 1563 ; édit de Saint-Germain, 1570 ; édit de Poitiers, 1577.
Il rétablit le culte catholique dans l'ensemble du royaume. Il octroie par ailleurs six «libertés» à la minorité protestante, laquelle représente moins de 10% des vingt millions de Français :
- selon certaines conditions, des lieux de culte particuliers dans une ville par bailliage (sauf Paris),
- l'admission des protestants dans les écoles,
- le droit pour eux d'exercer des fonctions publiques,
- le droit de tenir des assemblées,
- le droit de tenir une centaine de places de sûreté, dont La Rochelle, pendant huit ans,
- des tribunaux spéciaux où sont jugées en appel les affaires où les protestants sont partie prenante : les Chambres de l'Édit ou Chambres mi-parties.
Reste le plus difficile : faire enregistrer les textes par les parlementaires, farouchement opposés aux protestants. Le roi reçoit les parlementaires et déclare les recevoir non en roi mais «vêtu comme un père de famille, en pourpoint, pour parler à ses enfants». Derrière la bonhomie se cache la fermeté car il ajoute : «Je couperai la racine à toutes factions, à toutes prédications séditieuses, et je ferai raccourcir tous ceux qui les susciteront !» ...
Le 25 février 1599, l'Édit général et les articles particuliers sont donc enregistrés par le Parlement de Paris. Celui-ci modifie sur plusieurs points le texte qui peut ainsi entrer en application. Les sept parlements de province enregistrent l'Édit dans les mois qui suivent.
Mal accepté par ses contemporains et bien que solennellement déclaré «perpétuel et irrévocable», l'Édit de Nantes sera progressivement écorné tout au long du siècle suivant, jusqu'à sa révocation complète par le roi Louis XIV, petit-fils d'Henri IV, en 1685, moins d'un siècle après sa signature. L'Édit de Nantes sera révoqué par son petit-fils, Louis XIV, moins d'un siècle plus tard, pour le plus grand dommage du royaume...