La Cité interdite (sinogramme simplifié: 满城尽带黄金甲; sinogramme traditionnel: 滿城盡帶黃金甲; Hanyu pinyin: Mǎnchéng Jìndài Huángjīnjiǎ) (Man cheng jin dai huang jin jia) est un film hongkongais réalisé par Zhang Yimou, sorti en 2007.
Chine, xe siècle, dynastie Tang. De retour à la Cité interdite après une longue absence, l'empereur découvre qu'un complot se trame au cœur même de son palais. Les dangereuses alliances et les manipulations des conspirateurs n'ont qu'un seul but : prendre le pouvoir du plus grand royaume au monde. La trahison viendra de l'intérieur : une rébellion menée par l'impératrice elle-même.
Détails de l'intrigue
L’intrigue est fondée sur le drame L'orage (雷雨, hanyu pinyin : Lei Yu) de Cao Yu écrit en 1934, mais est transposée à la cour impériale de la dynastie Tang postérieurs en 928, lors de la période des Cinq Dynasties et des Dix Royaumes. L’empereur Ping est un homme d’humble origine et à la forte ambition, monté sur le trône à partir du rang modeste de capitaine. Il a abandonné sa première femme pour épouser la princesse de Liang, aujourd’hui son impératrice Phoenix (Fenghuang en chinois). L’empereur n’aime pas sa seconde femme, il met son humeur aigre sur le compte de la maladie et l’oblige à prendre un traitement qu’il a concocté lui-même toutes les deux heures depuis dix ans. Elle et le prince héritier Wan, le fils que l’empereur a eu de sa première femme, ont une liaison depuis trois ans. Wan se sent coupable de cette liaison et entretient une seconde relation secrète avec Jiang Chan, la fille du médecin impérial. Il souhaite s’échapper du palais, qu’il n’a jamais quitté, et voir le monde réel avec Chan.
Le prince Jai, le deuxième fils et l'aîné de l’impératrice, a dirigé l’armée de l’empereur Ping aux frontières du royaume pendant trois ans. Le palais a préparé une cérémonie d’accueil grandiose pour le retour du prince à la veille de la Fête du double neuf, mais l’empereur annule celle-ci au dernier moment pour rencontrer son fils dans une auberge voisine où Jai a reçu instruction de l’attendre. Là, l’empereur provoque son fils en duel comme un acte de domination, après quoi il avertit Jai de ne jamais répéter une erreur passée, non précisée, insistant sur le fait que tout ce que Jai reçoit provient de la volonté de l’empereur et que toute tentative d’obtenir quelque chose de l’empereur par la force est vouée à l’échec.
Lorsque l’empereur revient au palais, il apprend que le médecin impérial a servi à l’impératrice un poison spécial avec son traitement depuis dix jours, ainsi qu’il l’a ordonné. Le poison fera perdre la raison à l’impératrice et la tuera d’ici un mois. Lors d’une réunion familiale, l’empereur insiste pour que l’impératrice finisse le traitement qu’elle avait laissé plus tôt dans la journée. L’impératrice refuse jusqu’à ce que l’empereur force ses fils à la prier de prendre le traitement. Plus tard, une femme masquée informe l’impératrice que le traitement contient en fait du poison, comme elle l'avait soupçonné. La femme commence à partir, mais est distraite par Wan, qui la fait saisir et emmener devant l’empereur. L’empereur la reconnaît comme sa première femme, ayant échappé à la prison et à l’exécution à son insu vingt-cinq ans plus tôt. Elle est maintenant la femme du médecin impérial et la mère de Chan, qui ne sait rien de son passé. L’empereur promeut le médecin au poste de gouverneur pour l’éloigner du palais. En route vers son nouveau poste, le médecin séjourne à l’auberge où le prince Jai avait attendu le bon plaisir de l’empereur, et le prince Wan s’y précipite à cheval pour voir Chan une dernière fois. Là, il découvre que l’impératrice a chargé son eunuque de faire broder et livrer dix mille écharpes décorées de chrysanthèmes au général Wu, de leur propre armée. Wan est saisi d’un soupçon et se prépare en hâte à retourner au palais alors qu'il est encore dans la chambre de Chan où il est découvert par la mère de Chan, qui exige avec véhémence et sans explication que Wan parte immédiatement, ce qu’il fait sans un mot. Le médecin s’assoit pour une explication en tête-à-tête avec sa femme et Chan en profite pour s’élancer à la poursuite du prince Wan, dont elle pense qu’il court un grand danger.
Dans l’intervalle, l’impératrice parle à Jai du poison et lui demande son aide dans le complot contre l’empereur. Jai hésite, mais promet finalement d’aider sa mère. L’impératrice continue à broder fiévreusement des chrysanthèmes pour la Fête des chrysanthèmes qui arrive. À son retour au palais, Wan conçoit des soupçons sur les intentions de l’impératrice. Leur relation a déjà souffert de son sentiment de culpabilité à lui et de sa jalousie à elle envers Chan. Wan rejoint l'impératrice et s'ensuit une altercation : Phoenix lui montre une robe brodée d'un chrysanthème, qu'il refuse de porter le soir de la fête des chrysanthèmes, ils déchirent la robe. Wan exige de savoir si cela fait partie d’un complot. Lorsqu’elle reconnaît le complot, il s’écrie que le pays entier supposerait qu’il en était le cerveau et que, quelle qu'en soit l’issue, il serait un homme mort. L’impératrice lui dit alors que tel était son projet. Wan se poignarde, mais survit grâce à l’intervention immédiate des médecins de la cour. Quand l’empereur lui rend visite, il lui divulgue le complot de l’impératrice.
Avant que la discussion en tête à tête entre le médecin et sa femme ait pu commencer, des assassins vêtus de noir envoyés par l’empereur fondent sur l’auberge, armés de poignards falciformes et de longues cordes attachées à des grappins. Ils massacrent tous les occupants, puis ils tuent le médecin. Des soldats vêtus de rouge, loyaux à l’impératrice, arrêtent les assassins et permettent à la femme du médecin de s’échapper. Elle s’enfuit au palais, où la fête des chrysanthèmes va commencer. L’impératrice révèle à la famille royale et à Chan qu’elle est la première femme de l’empereur et la mère de Wan. Rendue folle par son amour incestueux pour Wan, Chan s’enfuit dans la cour, poursuivie par sa mère. Les assassins au service de l’empereur tuent les deux femmes et sont tués à leur tour par les gardes rouges de l’impératrice. Plus tard, une vaste armée de soldats aux armures dorées envahit le palais, tuant les gardes du corps impériaux et les courtisans à mesure de leur approche. Avec Jai à leur tête, ils descendent sur le palais avec des chrysanthèmes brodés sur leurs écharpes.
Dans le palais, Yu, le plus jeune prince, poignarde son frère Wan dans le dos à la surprise générale. Il crie qu’il a été témoin du complot de sa famille et en a conclu qu’il devait prendre le trône. Soutenu par plusieurs soldats, il demande à son père d’abdiquer. Les assassins de l’empereur tuent les soldats, puis l’empereur tue son fils Yu en le frappant avec sa lourde ceinture en or. Dehors, une armée supérieure en nombre aux habits d’argent fortifie le palais avec des lances, des arcs, et une muraille mobile massive. Ils abattent les 10 000 soldats dorés, mais épargnent Jai. Celui-ci mène quelque temps un combat déterminé et solitaire contre toute l’armée, tuant plus de 50 soldats, avant que l’impératrice en larmes lui fasse signe et qu’il se soumette. Des serviteurs emportent les cadavres et restaurent les décorations avec une précision mécanique. La fête commence comme s’il ne s’était rien passé.
Ce qui reste de la famille s’assied à la table de fête. L’empereur révèle qu’il connaissait le complot dirigé contre lui depuis que Wan l’en avait informé, et rappelle à Jai son avertissement précédent de ne pas prendre ce qui ne lui a pas été donné, pensant que Jai convoitait le trône. Avec cette idée en tête, il lui dit aussi qu’il avait déjà décidé de remplacer Wan par Jai comme prince héritier, afin de souligner le caractère superflu de l’acte de Jai. Jai admet qu’il savait que son combat était futile, mais il l’a fait pour sa mère et non pour le trône. En réponse, l’empereur déclare qu’il épargnera à Jai la peine prévue pour les rébellions princières, à savoir l’écartèlement entre cinq chevaux, si, dorénavant, il sert personnellement à sa mère son traitement empoisonné. Jai s’agenouille devant sa mère et s’excuse, puis se suicide avec une épée. Le sang éclabousse le contenu de la table alors que l’empereur se penche pour prendre un peu de nourriture. Il s’arrête, le visage inexpressif. L’impératrice, devenue vraiment folle, renverse le plateau portant le traitement empoisonné. Le liquide se répand sur la table, ronge les dorures et le film s’achève.
Commentaires
Le titre français du film est ambigu. La Cité interdite de Pékin ne fut construite que quatre siècles après la date de l'intrigue, sous le règne de Yongle, le troisième empereur Ming. Le palais impérial de la dynastie Tang se situait dans la capitale Chang'an (ancienne Xi'an) était déjà alors dénommé « Cité interdite » car cette résidence était très protégée (Cf. José Frèches, Il était une fois la Chine. 4500 ans d'histoire). Mais seule celle de Pékin est encore intacte.
Le titre chinois 满城尽带黄金甲 (Hanyu pinyin : Mǎnchéng Jìndài Huángjīnjiǎ) peut se traduire par « La cité entièrement parée d'armures d'or ». Mais en réalité, il s'agit du dernier vers du poème "不第后赋菊" de Huang Chao (黃巢), chef à l'origine d'une révolte vers la fin de la dynastie Tang (300 poèmes des Tang). Le sens original est "La cité est entièrement parée de chrysanthèmes jaunes pareils à des armures d'or". L'histoire est d'ailleurs censée se dérouler vers cette période, et de différentes scènes font référence à ce dernier vers1. Le titre anglais Curse of the Golden Flowers, littéralement "La Malédiction des fleurs jaunes", est d'ailleurs très proche du titre original.
Le synopsis étant une adaptation d'une intrigue écrite dans les années 1930, il ne s'embarrasse pas non plus d'une rigueur historique :
Les très longs faux ongles que porte l'impératrice incarnée par Gong Li ne deviendront populaires que sous les Ming, quelques siècles plus tard.
Bien que la plupart des personnages du film, aussi bien principaux que secondaires, portent des vêtements ou des armures dorées, l'or était en fait une couleur à usage exclusif de l'empereur, excluant également sa famille proche. Toute personne bravant l'interdiction pouvait être passible de la peine de mort.
Les acteurs portent des armures de plates. Pourtant, il est peu probable que ce type d'armures ait pu être utilisé tout au long de l'histoire chinoise. Bien que populaires en Occident à partir du xve siècle, les armures de plates n'étaient pas utilisées en Chine. On leur préférait les cottes de mailles ou les armures d'écailles.
Les inexactitudes historiques, en revanche, laissent place à un lyrisme particulier, avec des images que d'aucuns pourraient qualifier de baroques et d'agressives, et une bande son oppressante et bruyante, le tout dans le dessein probable de mettre le spectateur mal à l'aise dans un univers où règnent l'ordre et le paraître.
Jay Chou a enregistré la chanson 菊花台 (hanyu pinyin : Júhuā tái, Terrasses de chrysanthèmes), sortie avec son album Still Fantasy pour accompagner le film. Le titre fait évidemment référence aux cours intérieures du palais, complètement remplies de chrysanthèmes à l'occasion de la fête.
Le film rapporta 76 millions de dollars au box office.
Fiche technique
Titre original : Man cheng jin dai huang jin jia
Titre français : La Cité interdite
Titre anglais : Curse of the Golden Flower
Réalisation : Zhang Yimou
Scénario : Zhang Yimou, Bian Zhihong et Wu Nan, adapté de L'Orage (雷雨) de Cao Yu
Décors : Tingxiao Huo
Costumes : Chung Man Yee
Photographie : Zhao Xiaoding
Montage : Long Cheng
Animation : Ian Cross, Chris Hill, Inga Millers
Musique : Shigeru Umebayashi
Production : Zhang Yimou, William Kong et Weiping Zhang
Sociétés de production : Beijing New Picture Film Co, EDKO Film, Elite Group Enterprises, Film Partner International, Standard Chartered Bank
Budget : environ 45 millions de dollars US
Pays d'origine : Drapeau de la République populaire de Chine Chine
Format : Couleur - son Dolby SR + Dolby SR-DTS & SDDS - 2.35 : 1 Cinémascope - 35 mm
Genres : historique, aventure, drame, action
Durée : 114 minutes
Dates de sortie :
États-Unis : 22 décembre 2006
France : 14 mars 2007
Royaume-Uni : 13 avril 2007
Distribution
Chow Yun-fat (VF : François Dunoyer) : l'empereur Ping
Gong Li (VF : Barbara Kelsch) : l'impératrice Phoenix
Jay Chou (VF : Adrien Antoine) : le prince Jai
Liu Ye (VF : Thomas Roditi) : le prince héritier Wan
Qin Junjie (VF : Juan Llorca) : le prince Cheng
Man Li (VF : Julie Turin) : Chan, la fille du médecin impérial
Ni Dahong (VF : Vincent Grass) : le médecin impérial
Chen Jin (VF : Anne Jolivet) : l'épouse du médecin impérial
Autour du film
Avec un budget avoisinant les 45 millions de dollars, La Cité interdite a détenu le record du film le plus cher du cinéma chinois, dépassant ainsi Wu ji, la légende des cavaliers du vent de Chen Kaige et Hero, déjà réalisé par Zhang Yimou. Depuis, John Woo a réalisé Les Trois Royaumes avec un budget de 87 millions de dollars.
Distinctions
Nomination aux Oscars 2006 dans la catégorie Meilleurs costumes
Treize nominations aux Hong Kong Film Awards 2007
Nomination aux Art Directors Guild dans la catégorie Excellence in Production Design Award
Nomination aux Costume Designers Guild Awards dans la catégorie Excellence in Costume Design for Film - Period
Nomination aux Image Awards dans la catégorie Outstanding Independent for Foreign Film
Nomination aux Motion Picture Sound Editors(USA) dans la catégorie Best Sound Editing for Sound Effects and Foley in a Foreign Film
Nomination au Grand Prix de l'Union de la critique de cinéma
Deux nominations aux Satellite Awards : dans les catégoriesBest Cinematography et Best Costume Design
Box-office
Chine : 8,1 millions d'entrées
EUR OBS(36) : 1 850 583
USA : 962 300
Corée du Sud : 954 387
Total (non exhaustif) : 11,96 millions d'entrées.
Jean-Pierre Mocky lors d'une session photo, le 15 novembre 2016. (JOEL SAGET / AFP)
franceinfo CulturefranceinfoFrance Télévisions
Mis à jour le 08/08/2019 | 18:03
publié le 08/08/2019 | 17:00
Le réalisateur français hors normes Jean-Pierre Mocky est mort à 86 ans
Enfant terrible du cinéma français, Jean-Pierre Mocky a réalisé plus d'une soixantaine de films.
Un "solitaire entourés de copains", c'est ainsi que se définissait Jean-Pierre Mocky. Auteur et réalisateur de quelque 66 longs métrages entre 1959 et 2017, le cinéaste est mort jeudi 8 août, annonce sa famille. "Jean-Pierre Mocky est mort chez lui cet après-midi à 15 heures", a indiqué son gendre Jerôme Pierrat.
De son vrai nom Jean-Pierre Mokiejewski, il tenait une place à part dans le cinéma français. Il œuvra également à la télévision en réalisant des téléfilms, dont deux séries de 2007 à 2013. Son film le plus emblématique restera A mort l'arbitre, sorti en 1984. Connu pour ne pas avoir la langue dans sa poche, certaines de ses interventions médiatiques ont suscité la polémique.
Il avait commencé comme comédien en 1942 et poursuivit sa carrière d'acteur régulièrement jusqu’en 2017. Il dirigea également les plus grands noms du cinéma français : Bourvil, Michel Serrault, Jean Poiret, Francis Blanche, Michel Galabru…
Stagiaire chez Fellini et Visconti Né en 1933 à Nice, d'une famille polonaise, Jean-Pierre Mocky arrive à Paris à la Libération où il gagne sa vie comme chauffeur de taxi et plagiste l'été à l'Hôtel Carlton de Cannes. En 1942, il obtient un poste de figurant dans Les visiteurs du soir de Marcel Carné. Il enchaîne ensuite plusieurs petits rôles jusqu'au film Le Paradis des pilotes perdus (1949) de Georges Lampin, son premier rôle d'envergure. Il part ensuite en Italie où il joue dans Les Vaincusde Michelangelo Antonioni. Il fait des stages auprès de Frederico Fellini et Luchino Visconti. "Mon ami Federico [Fellini], dont j'avais été le porteur de sandwichs sur La Strada, a fini sa vie seul, malade, dans son appartement de Rome, à 73 ans. Voilà pourquoi le cinéma me rendait heureux, à l'imparfait", confiait-il à Télérama.
A son retour en France, il passe derrière la caméra. "Je suis un comédien qui est devenu metteur en scène parce qu’il n’avait pas de rôle", raconte-t-il à Libération en 2015. Il est l'auteur de l'adaptation du livre d'Hervé Bazin, La Tête contre les murs (1959), réalisé par Georges Franju, avec Anouk Aimée, Paul Meurisse et Pierre Brasseur à l'affiche mais le film ne rencontre pas le succès escompté. Dans la foulée, Jean-Pierre Mocky réalise son premier film, Les Dragueurs (1959), où Charles Aznavour (Joseph) et Jacques Charrier (Freddy) incarnent deux coureurs de jupons. Ce premier film obtient un certain succès. A l'âge de 26 ans, il est déjà vu comme un réalisateur
RAPPORT DU GIEC
Alimentation et climat, l'humanité à l'heure des choix
jeu. 8 août 2019 à 11:05 • AFP
Nourrir correctement les milliards de Terriens ou lutter contre le réchauffement climatique ? Pour ne pas être un jour confronté à ce dilemme, il est indispensable de repenser l'usage des terres et nos habitudes alimentaires, avertit jeudi le Giec.
« Les terres doivent permettre de cultiver notre nourriture, fournir la biodiversité et l'eau douce, donner du travail à des milliards de personnes et capturer des milliards de tonnes de carbone », explique Piers Forster, professeur sur le changement climatique à l'université de Leeds. (©Pixabay)
Les experts de l'ONU sur le climat plaident pour des actions « à court terme » contre la dégradation des sols, le gaspillage alimentaire ou les émissions de gaz à effet de serre du secteur agricole, dans un rapport spécial présenté à Genève.
Les délégations des 195 pays membres du Giec ont examiné pendant cinq jours ce rapport dont l'intitulé complet est : « le changement climatique, la désertification, la dégradation des sols, la gestion durable des terres, la sécurité alimentaire et les flux de gaz à effet de serre dans les écosystèmes terrestres ». En clair : comment le réchauffement climatique affecte les terres consacrées aux cultures, à l'élevage ou encore les forêts, et par ricochet la sécurité alimentaire, mais aussi comment les pratiques agricoles ou la déforestation modifient le climat.
Le « résumé à l'intention des décideurs politiques » de ce rapport de 1 200 pages, négocié ligne par ligne, était dévoilé lors d'une conférence de presse à partir de 8 h GMT. Ses principales conclusions ? « Notre utilisation des terres (...) n'est pas soutenable et contribue au changement climatique », a souligné sa co-présidente Valérie Masson-Delmotte, pour qui le rapport met « l'accent sur l'importance d'agir dès maintenant ».
Marge étroite
« Les terres sont sous une pression croissante des activités humaines » et « le changement climatique est une pression supplémentaire », a insisté la climatologue française lors d'une conférence téléphonique. Le temps est compté, alors que le réchauffement des terres émergées atteint déjà 1,53°C, le double de la hausse globale (océans compris), selon le rapport. « Dès 2°C de réchauffement global, nous pourrions nous retrouver avec des crises alimentaires d'origine climatique plus sévères et plus nombreuses », a prévenu l'un des auteurs, Jean-François Soussana, lors de cette conférence téléphonique.
La marge est étroite si l'on veut à la fois contenir le réchauffement climatique et ses effets dévastateurs sur les terres, et nourrir convenablement une population qui pourrait dépasser 11 milliards d'individus à la fin du siècle. « Nous devons changer substantiellement la façon dont nous utilisons nos terres », lance Piers Forster, professeur sur le changement climatique à l'université de Leeds. « Nous devons penser de manière beaucoup plus approfondie à la façon dont nous allons utiliser chaque hectare. Les terres doivent permettre de cultiver notre nourriture, fournir la biodiversité et l'eau douce, donner du travail à des milliards de personnes et capturer des milliards de tonnes de carbone », résume-t-il.
Changer les habitudes alimentaires
Le Giec a élaboré différents scénarios pour limiter le réchauffement à 1,5°C ou bien en dessous de 2°C par rapport à la période pré-industrielle. Ils incluent des mesures d'atténuation basées sur les terres et des changements d'usage, combinant boisement, reboisement, une déforestation réduite et des bioénergies. Les scénarios nécessitant d'importantes conversions de terres (reboisement pour capturer du CO2, champs dédiés aux bioénergies...) pour lutter contre le réchauffement pourraient avoir « des effets secondaires indésirables » - désertification, dégradation des terres, sécurité alimentaire... - avertit le rapport.
« Les bons choix en matière de terres sont fondamentaux pour s'attaquer à la crise climatique », constate Stephen Cornelius, du WWF, observateur lors des négociations.
Pour le Giec, outre les indispensables réductions de gaz à effet de serre, des solutions existent du côté du système alimentaire et des habitudes de consommation, car les changer ne nécessite pas de consommer plus d'espaces. Actuellement, de « 25 à 30 % de la production totale de nourriture est gaspillée », souligne le rapport, alors qu'environ 820 millions de personnes souffrent de la faim. Si dans les régions pauvres, l'apport en protéines animales est parfois insuffisant, dans les pays riches, il dépasse les recommandations nutritionnelles de l'Organisation mondiale pour la santé. Deux milliards d'adultes sont en surpoids ou obèses et « 25 à 30 % de la production totale de nourriture est gaspillée ». Il faut « éliminer le gaspillage alimentaire et réduire la consommation de viande », insiste l'ONG Climate Action Network.
Ce travail est le deuxième d'une série de trois « rapports spéciaux » du Giec, après celui sur la possibilité de contenir le réchauffement à 1,5°C, l'an dernier, et avant celui sur les océans et la cryosphère (banquise, glaciers, calottes polaires) attendu fin septembre, au moment où l'ONU organisera un sommet sur le climat à New York.
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