La fabuleuse histoire de l'ecriture....
Ecriture Singhalaise
L'écriture cursive et son évolution
L'écriture cursive
Vers le début de l'Ancien Empire (autour de 2755 av. J.-C.), les Égyptiens avaient toutefois développé une écriture plus cursive qui remplaça les hiéroglyphes dans la très grande majorité des documents écrits à l'encre sur papyrus.
Ce type d'écriture est qualifié de hiératique (du grec hieratikos, «sacerdotal »).
Les Grecs l'avaient nommé ainsi parce que vers le VIIe siècle av. J.-C., il servait surtout à la transcription de textes religieux.
Pour tous les autres types de texte, on utilisait une écriture encore plus cursive et entrelacée qu'on appelait le démotique (du grec demotikos,
« populaire »).
L'écriture capitale latine
A la fin du VIIIe siècle avant JC., les Romains adoptent le système d'écriture grecque: Capitalis monumentalis , qui influencera toutes les autres écritures latines postérieures.
L'alphabet ne comporte alors que 23 lettres et sert surtout pour les inscriptions épigraphiques.
Entre le IIe et IIIe siècle apr J.-C., se développe la minuscule cursive que les romains utilisaient pour tous leurs écrits.
Les outils, style ou plume pointue, étaient utilisés sur des supports comme le papyrus, la cire, le bois ou l'argile.
La cursive est à l'origine de l'écriture onciale.
L'écriture mérovingienne
L'écriture mérovingienne ou précarolingienneest utilisée en France aux VIIe et VIIIe siècles.
Les scribes créent une nouvelle écriture claire et lisible fortement influencée par la minuscule cursive: la caroline minuscule qui prend une forme particulière selon les régions d'Europe de l'Ouest.
L'écriture gothique
Entre le XIIe et le XIIIe siècle se diffuse l'écriture gothiqueou lettre noire qui est une déformation de la minuscule caroline. On écrivait alors avec une plume à pointe coupée
L'écriture humaniste
Parallèlement à l'écriture gothique le XVe siècle voit le développement d'un style d'écriture dit humaniste utilisée pour des textes classiques.
Sa version ronde et cursive sert de modèle aux premiers imprimeurs italiens.
A la même époque, dans tout l'Occident, le parchemin est supplanté par le papier fabriqué alors avec des chiffons et autres matériaux de récupération.
Le papier, inventé par les Chinois au IIe siècle avait été introduit par les arabes en Europe vers le XIIe siècle.
En haut, écriture mérovingienne, en bas écriture caroline qui se distingue par sa lisibilité.
ECRITURE: méthode de communication avec autrui par le moyen de signes visuels arbitraires formant un système. L'écriture peut être réalisée à partir de systèmes limités ou complets, un système complet permettant d'exprimer sans ambiguïté tout concept susceptible d'être formulé par le langage.
Les premiers systèmes d’écriture
Les premiers systèmes d’écriture étaient de nature pictographique idéographique. Parmi eux, il y a le cunéiforme des anciens Babyloniens et Assyriens, les hiéroglyphes égyptiens, les idéogrammes chinois, également utilisés en japonais, et l’écriture hiéroglyphique des Mayas.
Ce qui transforme un système de ce type en alphabet ou en syllabaire, c’est l’emploi d’un pictogramme ou d’un idéogramme pour représenter un son, plutôt qu’un objet ou une idée.
L'écriture cunéiforme
Tablette cunéiforme,
Terre crue, fin du IVe millénaire,
Mésopotamie du Sud, Epoque d'Uruk III.
La plus ancienne écriture, l'écriture cunéiforme (signes en forme de coin), probablement inventée en Mésopotamie par les Sumériens, fut utilisée au Proche-Orient jusqu'au Ier millénaire av. J.-C.
Ce mode d'écriture utilisait des traits en forme de clou, inscrits principalement sur des tablettes d'argile, mais aussi sur des pierres, des métaux, de la cire ou d'autres matériaux.
Comportant à l’origine environ 1 400 symboles, elle est d’abord utilisée pour dresser des inventaires de biens et enregistrer des transactions sur des tablettes d’argile
Elle évoluera pendant plusieurs siècles puis disparaîtra avec l’apparition du papyrus.
Les hiéroglyphes
Les hiéroglyphes sont des caractères utilisés dans n'importe lequel des systèmes d'écriture comportant des caractères pictographiques, c'est-à-dire qui représentent des objets reconnaissables.
Les inscriptions hiéroglyphiques égyptiennes sont composées de deux types de signes de base : les idéogrammes (images représentant le sens du mot) et les phonogrammes (images représentant le ou les sons d'un mot).
Les Égyptiens utilisèrent les hiéroglyphes depuis l'époque du développement du système, vers 3200 av. J.-C., jusqu'à l'époque de l'Empire romain. La dernière inscription hiéroglyphique date de 394 apr. J.-C. La forme et le nombre des signes restèrent à peu près constants jusqu'à la période gréco-romaine (après 332 av. J.-C.), pendant laquelle le nombre de signes, en particulier celui des phonogrammes, augmenta beaucoup.
Les idéogrammes chinois
Comme d'autres écritures anciennes, le chinois écrit provient d'une symbolisation picturale. Il n'a évolué vers une représentation mot à mot de la langue que lorsque ses utilisateurs comprirent que certains termes trop abstraits pouvaient être indiqués par leur son, plutôt que par leur sens.
Toutefois, à l'inverse des autres systèmes d'écriture, qui ont tous évolué vers une représentation alphabétique — c'est-à-dire essentiellement phonétique — des mots, le chinois fonctionne encore autant de manière pictographique que phonétique.
En outre, la représentation des sons n'a pas suivi l'évolution de la langue parlée, et reflète toujours la prononciation d'il y a trois mille ans.
La langue chinoise écrite attribue un symbole ou un caractère distinctif unique pour chaque mot de vocabulaire. La connaissance de deux mille ou trois mille caractères est nécessaire à sa lecture.
Les écrits les plus anciens que l'on connaisse sont des oracles gravés sur des carapaces de tortue et des omoplates de bœuf, dus à des devins de cour de la dynastie des Shang, à partir du XIVe siècle av. J.-C.
On trouve également en chinois des pictogrammes à valeur phonétique, c'est-à-dire l'emprunt du pictogramme d'un mot concret pour indiquer un mot abstrait ayant une prononciation identique ou très proche.
Qin Shi Huangdi, premier souverain d'un empire chinois unifié, supprima de nombreuses transcriptions régionales pour imposer une écriture simplifiée et standardisée, appelée le « Petit Sceau ». Sous la dynastie Han (206 av. J.-C.-220 apr. J.-C.), le système se ramifia en divers styles : lishu, écriture des fonctionnaires, xingshu, écriture cursive, caoshu, écriture de brouillon, et kaishu, écriture régulière. Le chinois imprimé se conforme à l'écriture régulière. Les styles cursif et régulier ont introduit de nombreux caractères abrégés, employés aussi bien dans la calligraphie artistique que dans la correspondance commerciale ou privée, mais furent longtemps bannis des documents officiels. Devenue la norme en République populaire de Chine, l'impression des caractères abrégés reste proscrite à Taïwan.
L’écriture hiéroglyphique des Mayas
Les mayas écrivaient sur du papier fabriqué à partir de fibres végétales et utilisaient des pigments naturels pour l'encre ; ils gravaient également sur des stèles en pierre. Des codes de lois et des calendriers nous sont ainsi parvenus. L'écriture maya utilise à la fois des idéogrammes et des phonogrammes.
Les peuples mayas créèrent un système d'écriture hiéroglyphique pour consigner leur mythologie, leur histoire et leurs rites sous forme d'inscriptions sculptées et peintes sur des stèles, des linteaux et des escaliers, ou peintes dans des livres formés de feuilles de papier en fibres végétales recouvertes d'une pellicule de chaux. Quatre de ces manuscrits nous sont parvenus : le codex Dresdensis, conservé à Dresde, le Peresianus, à Paris, le Tro et le Cortesianus, à Madrid. Ces livres, utilisés comme calendriers divinatoires, traitaient de thèmes comme l'agriculture, le temps, la maladie, la chasse et l'astronomie.
Les origines nabatéennes de l’écriture arabe
LE DEVELOPPEMENT DE L’ECRITURE est chez les Arabes tardif du fait de leur état nomade qui favorisait surtout une culture orale. D’ailleurs, à la naissance de l’Islam, au début du VIIe siècle, le Coran fut d’abord diffusé par la tradition orale.
Inscription nabatéenne de Aslah de Pétra, Ier siècle avant .J-C
L’arabe appartient au groupe des écritures sémitiques consonnantiques ainsi appelées parce que de fait, seules les consonnes sont représentées. La plupart des spécialistes s’accordent aujourd’hui à penser, que l’écriture arabe dérive de l’écriture nabatéenne elle même d’origine araméenne. Les Nabatéens, installés sur les terres bibliques du royaume d’Edom en Arabie du Nord (actuelle Jordanie) vers le IVe siècle avant Jésus-Christ et dont la capitale était Pétra, parlait une langue araméenne et écrivait en araméen.
Inscription nabatéenne de la tombe du poète Imru’ al-Qays à Namarah (328)
Progressivement s’est développé une écriture cursive formelle spécifiquement nabatéenne qui se distinguait de l’araméen par la présence de ligatures. Ce développement s’est doublé d’une évolution dans la langue parlée par les Nabatéens avec l’introduction progressive de termes et de constructions grammaticales arabes. C’est ainsi que vers le 2e siècle après Jésus-Christ, les Nabatéens parlaient majoritairement arabe comme l’atteste l’origine arabe de leurs noms et ne conservaient l’araméen, dans une version arabisée, que comme langue officielle.
Agrandissement inscription précédente
L’écriture arabe est donc née aux alentours du VIe siècle de l’écriture cursive nabatéenne. Elle s’est progressivement répandue à l’époque de Mahomet à La Mecque puis à Médine. S’est ainsi développée la première écriture spécifiquement arabe, le Jazm, dont la raideur, l’angulosité et la proportion égale de ses lettres rappelle la graphie coufique. L’écriture Jazm devint bientôt celle de tous les Arabes et « assuma le statut de l’écriture sacrée que Dieu avait spécialement choisie pour transmettre à l’humanité son message divin. » (Safadi).
Ecriture cursive ancienne tirée d’une inscription datée de 677
Les premiers développements calligraphiques
L FAUT SOULIGNER le rôle central que le Coran a joué dans la formation de l’écriture arabe. Le besoin de consigner le Coran par écrit obligea précisément les Arabes à réformer leur écriture et à l’embellir, pour la rendre digne de la révélation divine. Omar, ami du Prophète et futur calife, pressa le premier calife Abu Bakr de mettre le Coran par écrit; ce travail fut réalisé par le secrétaire du Prophète Zayd ibn Thabit. Cette rédaction, codifiée sous le troisième calife Othman, fut copiée en cinq exemplaires qui furent expédiés dans les principales contrées de l’empire. Les copies ultérieures du Coran sont dérivées de ces premiers exemplaires, réalisés à l’époque en Jazm. À cette époque apparurent des variantes médinoises et mecquoises du Jazm, le Mail (écriture couchée), le Mashq (écriture allongée) et le Naskh (inscriptionnel); seules les deux dernières perdurèrent
Le successeur de Othman, le cousin de Mahomet et son beau-fils, Ali Ibn Ani Talib est considéré comme le premier maître de la calligraphie en développant un style particulier de coufique.
Écriture Mashq d’un Coran
Les Écritures Coufiques
L’écriture coufique est née à Kufah, dans la deuxième décennie de l’ère islamique. Grandement inspirée de l’écriture de la ville voisine de Hirah, al-Khatt al-Kufi (« écriture coufique » en arabe) est caractérisée par une graphie originale fondée sur son angulosité et ses formes carrées prononcées, faites de courts traits verticaux et de lignes horizontales prolongées. Contrastant avec ces verticales basses, les lignes horizontales sont allongées.
Parallèlement, l’écriture Mashq développa des caractéristiques individuelles et devint légèrement plus cursive, avec un profil vertical bas et des traits horizontaux allongés.
Inscription coufique omeyyade aux lettres triangulaires, dédicace d’un bassin construit pour le Calife Hisham
(724-743)
L’écriture coufique atteignit sa perfection dans la seconde moitié du VIIIe siècle et acquit de facto une prééminence qui dura plus de trois siècles: elle devint l’unique écriture employée pour la copie du Coran. L’austérité des origines, fut alors dépassée avec le développement de l’écriture coufique ornementale. Son élégance simple en fit une écriture très prisée pour des usages épigraphiques. Son développement se poursuivit jusqu’au XIIe siècle, date à laquelle l’écriture devint essentiellement décorative.
Coufique fleuri
Le Coufique oriental est une variante développée par les Perses à la fin du Xe siècle qui se distingue du Coufique traditionnel par ses longs déliés qui restent verticaux, avec des barbelures au sommet, et ses traits courts inclinés ou penchés vers la gauche, donnant ainsi un mouvement dynamique vers l’avant. La plus fameuse de ces écritures est l’écriture Qarmate dans laquelle les caractères du Coufique oriental sont intégrés à un fond richement enluminé, fait de motifs floraux et d’arabesques.
Ecriture qarmate
Réformes et codification de l’écriture arabe
OUR REPONDRE au besoin impérieux d’apprendre l’arabe aux nouvelles contrées conquises par les Musulmans, il s’avéra rapidement impérieux de conduire certaines réformes afin d’établir de manière définitive la pronociation correcte du Coran.
La réforme de l’écriture arabe
Abou al-Aswad al-Douali (?-688) fut le fondateur de la grammaire arabe et inventa le système de signes diacritiques qui consiste à placer de grands points colorés pour indiquer les éléments du discours arabe non représenté par des lettres.
Ce travail fut complété par le vice-roi omeyyade al-Hajjaj Ibn Yousouf al-Thaqafi, qui pour régler le problème de la différenciation des consonnes qui partageaient une forme identique, demanda à Nasr Ibn Asim et Yahya Ibn Yamour d’imaginer un système fondé sur l’usage de petits points noirs placés au-dessus et au-dessous du contour de la lettre par groupes de deux ou trois.
Le développement des écritures cursives
L’écriture arabe, depuis ses origines, s’est divisée en deux très larges catégories - le Moqawwar wa-Modawwar (incurvée et arrondie) et le Mabsot wa-Mostaqim (allongée et droite). Le Mashq et le Coufique appartiennent à la deuxième catégorie.
La catégorie incurvée et arrondie remonte à la première décennie de l’ère musulmane et certainement, plus anciennement encore, à la période pré-islamique. Longtemps, elle n’a servi que pour des usages profanes.
Sous les Omeyyades, les écritures Tomar, Jalili, Nisf et Tholoth furent ébauchées. Mais c’est le Jalil et le Tomar qui furent les écritures officielles des califes omeyyades. Les écritures Nisf et Tholoth dérivent directement du Jalil, écriture monumentale. Le degré de cursivité de ces dernières a la particularité d’augmenter à mesure que la taille des lettres diminue.
Bismillah en Tholoth
Ce fut le génie d’Abou Ali Ibn Moqlah (846-940), vizir des trois califes abassides al-Moqtadir (908-932), al-Qahir (932-934), al-Radi (934-940), et sa connaissance de la science géométrique qui introduisirent l’étape la plus importante dans le développement de la calligraphie arabe. Ibn Moqlah se fixa comme tâche de dessiner une écriture cursive qui soit à la fois belle et parfaitement proportionnée.
Il instaura un système global de règles calligraphiques de base, fondé sur le point en losange comme unité de mesure. Il redessina le contour géométrique des lettres et corrigea leur forme et leur taille au moyen du point, de l’Alef et du cercle. Il s’agit de faire un Alef qui est « calligraphié et mesuré avec la pensée », puis de dessiner un cercle dont le Alef est le diamètre. Chaque lettre a pour base ce cercle.
Alef et cercle étalon
Alef tracé d’après l’échelle des sept points en losange
Ce faisant, Ibn Moqlah a doté l’art calligraphique arabe de règles scientifiques précises, d’après laquelle chaque lettre, pourvue d’une discipline rigoureuse, est rattachée aux trois unités standards que sont le point, le Alef et le cercle. Cette méthode d’écriture, baptisée al-Khatt al-Mansob, fut perfectionnée par ses élèves dont le plus célèbre est Ibn al-Bawbab (?-1022). Pour comprendre l’importance d’Ibn Moqlah dans l’histoire de l’écriture arabe, il est possible de citer Abdullah Ibn al-Zariji, qui au Xe siècle remarquait: « Ibn Moqlah est un prophète dans l’art de la calligraphie. Son cadeau est comparable à l’inspiration des abeilles lorsqu’elles construisent les alvéoles. »
Progressivement, les écritures cursives, surtout le Tholoth, commencèrent à pouvoir rivaliser pour la copie du Coran avec les écritures coufiques.
Lettre ‘Ayn dans le système
de proportion
Les six écritures principales de la tradition classique
PARTIR DU NASKHI, le calligraphe Ibn Moqlah identifia six styles d’écriture :
LeTholoth
Le Tholoth, apparu au VIIe siècle, est une écriture statique et monumentale, essentiellement utilisée à des fins décoratives dans les manuscrits et les inscriptions. Elle a également été utilisée pour la copie des Corans, surtout pour les têtes de chapitre et les colophons. On la considère comme la plus importante des écritures ornementales.
Ecriture Tholoth
LeNaskhi
Le Naskhi, dont les origines remontent au VIIIe siècle, est apparue dans sa forme systématisée au IXe siècle. Considérée comme peu élégante, elle était surtout utilisée pour la correspondance ordinaire. Avec l’arrivée du papier, qui remplaça le parchemin, et grâce à Ibn al-bawbab qui en fit une écriture élégante, ce style gagna ses lettres de noblesse et servit d’écriture principale de Corans. À ce jour d’ailleurs, il y a plus de Corans copiés en Naskhi que dans toutes les autres écritures arabes réunies. Elle est presque toujours formée de courts traits horizontaux et de verticales d’égale hauteur au-dessus et au-dessous de la ligne médiane. Les courbes sont pleines et profondes, les jambages droits et verticaux, les mots bien espacés en général.
Ecriture Naskhi
LeMohaqqaq
Le Mohaqqaq était originellement une écriture dont les lettres étaient moins angulaires que le Coufique, avec des ligatures bien espacées; l’ensemble était « produit avec méticulosité » comme son nom l’indique. Avec la découverte du papier autour de 750, l’écriture acquit une certaine rondeur qui la rendit plus facile à tracer et devint l’écriture favorite des scribes. Modifiée par Ibn Moqlah, elle conserva ses déliés allongés sans presque de pleins ni d’enjolivures accusées sous les lignes. Cela en fit l’écriture favorite des Corans de grand format.
LeRayhani
Le Rayhani, né au IXe siècle a des liens de parenté certains avec le Naskhi et le Tholoth. Elle est caractérisée par la finesse de ses lettres, finesse accentuée parce que le traits et les fioritures des lettres se terminent en pointes aiguës, et que les signes diacritiques sont très fins et toujours appliqués à l’aide d’une plume différente, dotée d’une entaille beaucoup plus petite. Elle est également considérée comme la sœur du Mohaqqaq car, entre autre, le centre des boucles des lettres n’est jamais rempli. Néanmoins, à la différence du Mohaqqaq, il utilise pleinement les fioritures sublinéaires, comme le Tholoth. Le Rayhani fut surtout prisé pour les grands Corans par les Perses.
LeTawaqi
Le Tawaqi (signature) est issu de l’écriture Riyasi, que les califes abbassides utilisèrent pour signer leur nom et leur titre. Plus arrondie que le Tholoth, l’écriture Tawaqi est assez proche de l’écriture Riqa, mais s’en distingue par des lignes plus épaisses, des courbes plus arrondies, ce qui lui donne une apparence beaucoup plus lourde. Elle est également plus grande et plus élégante que le Riqa ce qui en fera une écriture utilisée pour les occasions importantes.
LeRiqa
L’écriture Riqa (petite feuille) provient à la fois du Naskhi et du Tholoth. La forme géométrique de ses lettres et particulièrement les fioritures des finales, ressemble beaucoup à celles du Tholoth, mais elle est bien plus petite et dotée de courbes plus arrondies et ses Alefs ne sont jamais écrits avec des barbelures. Le centre des boucles des lettres est invariablement rempli, les lignes horizontales sont très courtes et les ligatures structurées avec densité, les finales étant souvent attachées aux initiales. Son emploi fut réservé au courrier personnel et pour les livres profanes de moyen format. C’est aujourd’hui l’écriture manuscrite la plus employée dans le monde arabe.
Ecriture Riqa
LeTomar
Il est possible d’ajouter à ces six écritures principales, l’écriture Tomar qui aurait été conçue sous le premier calife omeyyade Moawiya (661-680). Ce dernier en fit une écriture royale et est à ce titre une des plus ancienne écritures arabes. Bien qu’elle ait gardé des caractères grands et lourds, elle perdit vers le Xe siècle, son aspect statique et angulaire.
Ecriture Tomar
« Allah est mon espérance »
Les écritures maghrébines et les développements tardifs
Les écritures maghrébines
Au Maghreb, l’Occident islamique, des formes spécifiques d’art furent développés; la calligraphie n’échappa pas à cette tendance. C’est ainsi, que le Coufique occidental se développa vers 670 à Kairouan. Ce Coufique est sensiblement plus arrondis que son homologue oriental et surtout fait preuve d’une plus grande cursivité grâce à ses courbes bien déterminées et ses demi-cercles presque parfaits.
De ce Coufique, nacquit le Maghribi, une écriture cursive qui surpasse en délicatesse les autres cursives orientales par la finesse de ses lignes, la liberté coulante de ses courbes ouvertes, la clarté et la rondeur de ses boucles et par-dessus tout, par les fioritures accusées sous les lignes qui lui confèrent une qualité unique d’intégration. Un autre aspect du Maghribi est que ses déliés se terminent invariablement par une légère courbe vers la gauche, en une fin assez émoussée, tandis que ses pleins ont une ligne effilée dont les courbes, tournées aussi vers la gauche, peuvent se prolonger jusqu’à l’aire du mot situé au-dessus.
Sourate IV, « Les femmes »
en Maghribi épais, Maroc, XIe siècle
On distingue quatre styles de Maghribi que sont le Qayrawani, l’Andalousi, le Fasi et le Soudani:
le Qayrawani dénote une légère ressemblance avec le Naskhi et a de très courts déliés. Une variante monumentale est utilisée dans les Corans.
l’Andalousi est plus compact et plus délicat que les autres styles. Originaire de Cordoue, il fusionna avec le Fasi lorsque les Arabes durent quitter le sol espagnol.
le Fasi (de Fez au Maroc) est de plus grande dimension que l’Andalousi et est moins décoré que ce dernier.
l’écriture Soudani a d’abord été créée à Tombouctou vers 1210 avant de se développer en Afrique sub-saharienne. Écriture favorite des peuples musulmans de cette région, ses lignes sont plus épaisses et ses lettres plus denses que le Maghribi issu du Fasi et de l’Andalousi.
Ecriture Andalousi
Les développements calligraphiques tardifs
L’effondrement de l’Islam arabe face aux invasions mongoles, la conversion des princes mongols à l’Islam, ont freiné le développement artistique mais ne l’ont pas stoppé. Certains princes mongols comme Timour et son fils ont été de grands mécènes. Tandis que plus à l’ouest, en Egypte, les Mamelouks se faisaient les champions de la continuité calligraphique.
En Perse, au XVIe siècle, l’écriture Taliq fut créée à partir d’une écriture ancienne cursive sans prétention. Dérivée du Riqa et du Tawqi, cette écriture sera très prisée des Persans, des Indiens et des Turcs.
Ecriture Taliq
L’écriture chinoise en Corée
C’EST SOUS L’IMPULSION DE LA PROPAGANDE BOUDHISTE que l’écriture chinoise fut introduite en Corée vers le fin du IVème siècle. Au VIIIème siècle, son emploi était déjà très répandu chez les lettrés et sera utilisée pour transcrire aussi bien les langues chinoise et que coréenne.
Toutefois l’usage de l’écriture idéographique chinoise pour transcrire le coréen, langue agglutinante à flexions, riche en désinences, n’était pas sans poser de nombreuses difficultés, car elle ne permettait pas de noter ces articulations du langage sans laquelle la phrase ne peut être comprise.
En 697, le lettré Sel Tchong assigna à un certain nombre de signes chinois un rôle phonétique tout en en modifiant légèrement la prononciation pour tenir compte des spécificité de la langue coréenne. Ainsi le mot ‘’ hou qui signifie « porte » en chinois devint le signe syllabique transcrivant le son ro. Ce système, dit du complément syllabique, permettait ainsi de transcrire à côté de l’idéogramme chinois, la désinence du mot coréen. Il connut un vif succès et survécut jusqu’à l’invasion japonaise en 1894.
Le roi Sejong
Le Hangul, une écriture scientifique
DEPUIS LA FIN DU XIIIE SIECLE, la Corée était un royaume vassal des empereurs mongols qui régnaient alors sur la Chine. Ces derniers au début du XIVe siècle, avaient été amenés à changer leur propre écriture au profit de l’alphabet galik, un compromis entre l’écriture tibétaine de type indien et l’écriture ouigour de type araméen.
Les Coréens furent touchés par ces soubresauts culturels avec un léger décalage (entre temps, les Mongols avaient été renversés en Chine par Hong-Wou, fondateur de la dynastie des Ming).
Un roi éclairé
Dans la première moitié du XVe siècle, régnait sur le royaume de Corée, le roi Sejong (1419-1451). Ce dernier était un monarque éclairé et cultivé. En 1434, il promulgua un décret dans lequel il demandait à son administration de rechercher « les hommes de savoir et de sophistication, qu’ils soient ou non de noble naissance, afin de les encourager à apprendre à lire au peuple, même aux femmes et aux filles. ».
Il envoya également des missions à Nankin et Pyolmun afin de chercher des conseils sur la possibilité d’introduire dans son royaume une écriture simplifiée. Ces missions ayant échoué, le roi avec l’assistance de lettrés de sa cour, inventa la nouvelle écriture (1443). En 1446, le roi Sejong promulgua un décret, Oje Hunmin Chongum, « La vraie prononciation enseignée au peuple » par lequel il introduisait la nouvelle écriture dite pân tchel. Elle suscita la dérision des lettrés de l’époque, attachés à l’écriture chinoise, et à travers elle au pouvoir que leur conférait sa maîtrise et qu’ils baptisèrent « écriture vernaculaire ».
Dans la préface de l’Hunmin Chongum, le roi Sejong explique clairement ses motivations:
« La langue coréenne étant différente de la langue chinoise, les caractères chinois ne la rendent pas suffisamment. C’est pourquoi, les gens du peuple désirent une chose et n’arrivent pas à exposer leurs sentiments: cela est fréquent. Emu de pitié, j’ai inventé vingt-huit caractères qui seront facilement appris de tous et serviront aux usages quotidiens. »
L’alphabet pân tchel
Il s’agissait à l’origine, d’un véritable alphabet de 28 signes comprenant voyelles et consonnes. Le pân tchel, par son principe même, est d’une grande simplicité qui témoigne de son caractère artificiel et de l’esprit scientifique de son créateur. C’est ainsi que l’adjonction d’un simple trait permet de former ‘KH’ à partir de ‘K’, ‘TH’ à partir de ‘T’ ou encore ‘PH’ à partir de ‘P’.
Originellement, le pân tchel devait servir à décomposer phonétiquement les idéogrammes chinois. Ce n’est qu’ultérieurement qu’il fut appliqué à la transcription de la langue coréenne elle-même. Pour ce faire, il fut légèrement modifié en créant des signes pour transcrire les sons qui n’existent pas dans la langue chinoise telle que ‘b’, ‘g’ ou encore ‘d’ en adjoignant un accent aux signes des sourdes correspondantes, ‘p’, ‘k’ et ‘t’. Par ailleurs, certains signes disparurent, les formes d’autres furent modifiés. C’est ainsi qu’on passa de 28 signes originels à 25 signes aujourd’hui, 14 consonnes et 11 voyelles.
Bloc imprimé ancien reprenant les explications du Roi Sejong et décrivant le Hangul et son équivalent en caractères chinois
Du Pân tchel au Hangul
LA SIMPLICITE QUI CARACTERISE LE PAN TCHELdes origines ne résista pas à l’usage qu’en firent les scribes coréens. Les conditions matérielles de la graphie y ont peut-être contribuées. Les Coréens écrivaient en effet de haut en bas, alignant les colonnes de droite à gauche. Pour gagner de la place et par souci de symétrie, ou peut-être par mimétisme avec les Chinois qui juxtaposent une clef phonétique à presque tous les idéogrammes, les scribes coréens firent figurer à côté de chaque consonne, la voyelle dont elle est pourvue. D’autre part, ils modifièrent la forme des deux caractères ainsi groupés de façon à faire approximativement rentrer le signe ainsi constitué dans un carré. Ils transformèrent ainsi de facto une écriture alphabétique en écriture syllabique.
Ce n’est qu’au début de ce siècle que le terme de Hangul, , « la grande écriture » sera introduit par Chu Shi-Gyong pour désigner l’écriture coréenne. Il apparut pour la première fois dans le nom d’un institut d’enseignement de la langue coréenne, le Han-gulmo puis repris dans le titre d’un livre paru en 1913, Han-gulpuri.
Alphabet coréen de 1446
Le Hangul au XXe siècle
C’était une époque sombre pour la Corée alors occupé par le Japon (1894-1945). Les autorités d’occupation essayèrent de substituer l’usage de leur langue ou à défaut des écritures japonaises et chinoises à celles, respectivement, du Coréen et du Hangul.
Par passion nationaliste et du fait de sa proximité avec la Chine, le régime dictatorial de Corée du Nord imposa sur son territoire l’usage systématique du Hangul, alors qu’en réaction, les Coréens du Sud continuèrent à faire cohabiter les deux systèmes. Aujourd’hui encore, les personnes cultivées en Corée du Sud, préfèrent écrire leur nom en idéogrammes chinois, même si l’usage du Hangul est maintenant généralisé dans les deux Corées.
Paradoxalement pour un pays aussi fermé qu’a pu l’être la Corée, le Hangul doit beaucoup à l’usage qu’en firent les missionnaires chrétiens qui virent dans ce système simple à enseigner un outil puissant au service de la diffusion de leurs idées. C’est ainsi qu’ils firent imprimer en Hangul de nombreux ouvrages : Nouveau Testament, grammaires, dictionnaires, etc.
Description de l’alphabet coréen
SUR LES 14 CONSONNES, 8 lettres peuvent être considérées comme les consonnes pivots ; chacune d'elle a un nom propre. Il s'agit du 'k' (kiök), 'n' (iün ou niün), 't' (tjigüt), 'l/r' (iül ou riül ou niül), 'm' (miom), 'p' (piop), 's' (piop) et 'ng' (ihäng). Ce dernier son est d'ailleurs assez proche d'une voyelle puisqu'il s'agit d'une nasale finale. A ces 8 lettres, il faut ajouter les lettres 'ch', 'h' et quatre consonnes utilisées uniquement avant une voyelle : 'kh', 'th', 'ph' et 'ch'.
Graphiquement, les cinq consonnes principales sont dérivés des formes des organes vocaux ( ), les 9 autres étant dessinés en adjoignant des traits ou en modifiant légèrement la forme des consonnes de base.
Les onze voyelles prennent place sous le nom de i entre les lettres 's' et 'ng' dans l'alphabet coréen. Il s'agit du 'a', 'ya', 'ö', 'yö', o, 'yo', 'u', 'yu', 'i-ü' et le 'a' court auxquels il faut ajouter les lettres 'ya', 'yö', 'yo' et 'yu' qui sont des variantes des lettres 'a', 'ö', 'o' et 'u'. Ces voyelles ont deux formes, une forme complète quand elles sont en position initiale et une forme abrégée quand elles sont le complément d'une consonne.
Graphiquement, trois des voyelles symbolisent les trois éléments de la philosophie orientale du Yin et du Yang : '.' symbolise les cieux, '' représente la terre et '' rappelle l'humanité. Les huit autres voyelles ne sont que des combinaisons des trois voyelles fondamentales: .
Le Hangul combine ensuite consonnes et voyelles pour constituer des syllabes au dessin parfaitement rationnel et logique comme : . La méthode de composition des mots est donc assez similaire à celle des kana japonais.
Alphabet coréen moderne
Le Hangul : un alphabet parfait ?
DE NOMBREUX SPECIALISTES CONSIDERENT LE HANGUL comme le plus parfait système d’écriture d’un point de vue scientifique. Ils justifient leur point de vue en notant la construction systématique du Hangul qui repose sur la forme des organes vocaux lorsqu’ils prononcent le son. Ainsi, le ‘T’ dans notre alphabet occidental représente un son qui n’a rien à voir avec la forme des organes vocaux. Son homologue coréen ‘’ représente la manière dont la langue touche le palais supérieur.
Une autre des caractéristiques les plus intéressantes du Hangul est sa facilité d’apprentissage et ce aussi bien pour des Coréens que pour des étrangers. Il y a une dizaine d’année, l’UNESCO a reconnu cette spécificité remarquable en instituant le prix de littérature du Roi Sejong qui honore les personnes qui ont contribué à l’éradication de l’illétrisme dans le monde. Grâce au Hangul, la Corée a ainsi un des plus bas taux d’illétrisme dans le monde.
Toutefois, ces points sont à nuancer. En effet, tous les sons de la langue coréenne ne sont pas retranscris dans le Hangul. Il n’existe ainsi pas de signes distincts pour exprimer les sons ‘g’, ‘b’, ‘d’ et ‘j’ qui existent pourtant en coréen et sont représentés par les lettres ‘k’, ‘p’, ‘t’ et ‘ch’.
Il n’en reste pas moins que le Hangul répond parfaitement à la fonction d’une écriture à savoir de retranscrire aisément, lisiblement et le plus fidèlement possible une langue. Les Coréens en sont bien conscients eux qui fêtent tous les 9 octobre le Hangul Day.
Ouvrage ancien
composé en Hangul
Inscription punique, Carthage
La diffusion de l’alphabet
C’EST A TYR, la grande cité maritime, que revient sans doute l’honneur d’avoir diffusé l’alphabet phénicien jusqu’à Carthage, en Sardaigne, et surtout en Grèce, comme le rappelle la légende grecque de Cadmos: les Phéniciens venus en Béotie avec Cadmos, fils d’Agenor, roi de Tyr, auraient enseigné les lettres phéniciennes.
Les colonies phéniciennes: Carthage
Dans un premier temps, cette écriture fut donc essentiellement diffusée dans les cités coloniales et les comptoirs commerciaux phéniciens de Grèce, de Chypre, d’Égypte, de Malte, de Sardaigne et d’Afrique du Nord, où elle se transforma légèrement. La variété de phénicienne appelée écriture punique se distingue de sa parente par son aspect moins sobre, des hampes de lettres qui tendent à s’allonger et à devenir plus sinueuses. Dans les derniers siècles de Carthage, elle n’est toutefois plus utilisée que dans les inscriptions monumentales. Par la suite, du fait de son utilisation limitée aux gravures sur pierre et sur métal, cette cursive se «monumentalisa» donnant naissance à une nouvelle écriture plus stylisée, baptisée néo-punique. Une des particularité les plus notables du néo-punique est l’emploi de matres lectionis. Passée une période de transition, la nouvelle écriture s’affirma définitivement après la destruction de Carthage en 146 av J-C surtout dans la Tripolitaine et en Afrique du Nord où elle survivra jusque vers le Ier siècle de notre ère.
Par ailleurs, diffusé d’abord à Chypre, l’alphabet phénicien devint pratiquement universel au VIIIe siècle, dans tout le bassin méditerranéen, quand il fut adopté par les Grecs, qui lui ajoutèrent les signes vocaliques, et dans le monde proche oriental où se répandait l’araméen.
différents alphabets
L’ancêtre des alphabets occidentaux
La révolution alphabétique
La véritable révolution que représente la création d’un alphabet en Canaan et en Phénicie, tient à ce que désormais les signes renvoient à des sons émis par la voix humaine dans un langage donné. Il ne s’agit plus de désignations conventionnelles, mais un travail phonétique progressif, scientifiquement établi, qui représente un effort d’abstraction remarquable. L’action de marcher, n’était ainsi plus exprimée par l’image ou la valeur symbolique de la marche, mais par l’écriture des lettres, qui une fois lues, donnaient le mot «marcher».
Comme précisé, l’alphabet phénicien ne comporte que des consonnes. C’est aux Grecs que l’on doit l’introduction dans l’alphabet des voyelles, lettres qui existaient pourtant dans la langue phénicienne. Mais dans la langue phénicienne, comme dans toutes les langues sémitiques, cette absence n’était pas rédhibitoire dans la mesure où les syllabes ne connaissaient pas de diphtongues. Surtout, les racines des mots avaient pour caractéristique de ne se composer que de consonnes. Ainsi la racine trilitère spr était utilisée pour décliner le concept d’écrire ou de conter. Selon la vocalisation, on savait si on devait lire écrivain, écrire, écrit, etc. Ainsi et plus généralement, tout Sémite qui entend prononcer un mot le décompose, par une gymnastique mentale instantanée, en une racine consonnantique et en une flexion vocalique. Considérée du point de vue sémitique, l’écriture phénicienne n’apparait donc pas si imparfaite. Avec son consonnatisme intégral, elle dégageait admirablement le squelette consonnantique du mot, les traits et points de séparation aidant encore à isoler chaque racine.
Le déchiffrement des écritures phéniciennes
Le déchiffrement d’une écriture alphabétique est toujours délicate. Alors qu’il est relativement aisé de découvrir le sens d’une écriture idéographique, il n’en est rien pour l’écriture alphabétique dans la mesure où on ignore la langue qu’il recouvre.
C’est à l’abbé Barthélémy, français de son état, que l’on doit le premier déchiffrement correct d’une inscription phénicienne; il s’agissait d’une petite inscription bilingue grecque et phénicienne provenant de Malte, dont le moulage, offert à Louis XVI qui le plaça à la Bibliothèque Mazarine, est actuellement conservée au musée du Louvre.
Le déchiffrement de l’alphabet ugaritique a été un travail collectif qui remonte à la fin des années 1920. Tout commence avec la découverte au nord de Lattaquié en Syrie des ruines de la cité phéncienne d’Ugarit sur le site de Ras Shamra. Les découvertes qui vont y furent faites bouleversèrent profondément l’histoire de la civilisation phénicienne et plus encore l’histoire de l’écriture.
La mission archéologique Schæffer et Chenet (1929) mit à jour une importante nécropole, découvrant de nombreuses tablettes couvertes de caractères cunéiformes d’un type jusqu’alors inconnu. Le nombre réduit de signe semblait laisser penser que cette écriture était de type alphabétique. En 1930, le savant allemand Hans Bauer réussit à établire la valeur phonétique d’une quinzaine de lettres. La même année, quelques mois plus tard, le français E.Dhorme complétait l’étude de Bauer, soulignait le caractère sémitique de la langue ougaritique et en 1931 publiait une première traduction des tablettes découvertes à Ras Shamra. Parallèlement, l’autre français Virolleaud complétait le travail de Dhorme. Ainsi, de lettre en lettre, on a fini par identifier les trente lettres de l’alphabet primitif d’Ugarit.
Les premiers travaux sur l’écriture pseudo-hiéroglyphique de Byblos sont quant à eux, l’œuvre de Maurice Dunand, rédigés en 1945.
Alphabetphenicien
L’alphabet de Byblos
L’ALPHABET D’UGARIT révèle un stade plus primitif que celui de Byblos de la langue sémitique, en voie à cette époque, de simplification. A partir du Xe siècle, l’alphabet semble définitivement constitué à Byblos, probablement, où le sarcophage d’Ahiram porte le premier texte cursif parfaitement clair, en phénicien classique.
L’influence égyptienne
En reprenant l’alphabet d’Ahiram pour en détailler l’origine des vingt-deux signes, il est possible de soutenir que huit d’entre eux dérivent de l’écriture hiératique égyptienne, à savoir les lettres aleph, daleth, lamed, mum, nun, tsadé, resch et schin. Parmi ces signes, le aleph dériverait d’un signe qui reproduisait en le simplifiant le dessin du faucon dans des hiéroglyphes classiques. L’origine égyptienne de ses lettres s’expliquent aisément si on se souvient que Byblos, comme les autres cités phéniciennes de la côte, était une cité sous suzeraineté égyptienne. Régulièrement, le pharaon y dépêchait des vaisseaux chargés de pacotille pour l’échanger contre du bois de cèdre du Liban. Le souverain de Byblos reconnaissait au pharaon une souveraineté théorique et prenait pour son compte, le titre de fils de Râ.
Un alphabet sans consonnes
L’alphabet phénicien archaïque s’était donc débarassé intégralement non seulement des idéogrammes, des déterminatifs mais également de toute trace de syllabisme. Il ne faisait aucun usage des matres lectionis, c’est à dire de certaines consonnes employées pour indiquer, en certains cas et de façon approximative, la vocalisation de la consonne précédente. C’est ce dernier fait qui fait dire à certains historiens, que l’alphabet phénicien n’est pas à proprement parlé un alphabet. Pour ces théoriciens, un alphabet doit en effet être une écriture analysant chaque mot en ses éléments phonétiques constitutifs, consonnes et voyelles, affectant un signe spécial à chacun de ses éléments, aussi bien aux voyelles qu’aux consonnes, permettant enfin à n’importe qui non seulement de reconnaitre un mot connu mais de reconnaître approximativement la prononciation d’un mot qu’il ne connait pas.
Inscription du sarcophage d'Ahiram
Quoiqu’il en soit, après avoir pris à l’époque d’Ahiram sa forme classique, l’écriture phénicienne connut ensuite une certaine évolution, sensible dans le tracé des signes. La taille des caractères s’uniformisait, les hampes tendaient à s’allonger... en bref, l’écriture devenait progressivement plus élégante, caractérisée par de longs traits verticaux légèrement obliques, des boucles minuscules et des lettres plates.
L’alphabet cunéiforme d’Ugarit
La question de l’alphabet refait surface quelques siècles plus tard à Ugarit, la grande cité phénicienne. Les tablettes cunéiformes que l’on y découvrit n’étaient pas transcrites dans l’écriture sumérienne traditionnelle. Il s’agit bien pourtant d’une écriture cunéiforme, en ce sens qu’elle était tracée en enfonçant la pointe d’un roseau taillé en biseau sur des tablettes d’argile fraîche. Chaque lettre résultait donc de l’impression d’un ou plusieurs «coins». Mais à cela se borne la ressemblance avec les écritures syllabiques dérivées de l’écriture sumérienne. L’alphabet d’Ugarit en diffère à la fois par la forme, simplifiée, presque stylisée, et le nombre (entre vingt-deux et trente signes) de ses caractères et surtout par le fait qu’il est - à une exception près - une écriture consonnantique, c’est à dire ne transcrivant pas les voyelles.
Abécédaire d'Ugarit
Musée National de Damas
Une écriture de chancellerie
Mis au point et utilisé à partir du XIVe siècle par les scribes de la chancellerie désireux de se doter d’un système graphique propre, ces signes, groupés entre eux pour composer des mots que séparaient de courts traits verticaux, tenaient vraisemblablement de l’écriture alphabétique proto-sinaïtique utilisée en Canaan. Ugarit, à l’époque, était en effet en relations diplomatiques et commerciales avec toutes les grandes puissances de l’époque (Égypte, Hatti, Babylone et Mitani) et constituait une véritable mini-tour de Babel. Mêlant ces influences étrangères à sa tradition locale, Ugarit établit, avec sa nouvelle écriture, une véritable transposition de l’alphabet cananéen en graphie cunéiforme.
La naissance d’un alphabet
Les textes d’Ugarit se répartissent en trois catégories: textes diplomatiques et traités, documents juridiques se rapportant essentiellement à des transactions commerciales et au droit privé et public et enfin textes littéraires d’inspiration religieuse.
Au cours du XIIIe siècle, alors que l’écriture cunéiforme alphabétique d’Ugarit commençait à se répandre dans les cités voisines, celle-ci vit décroître le nombre de signes qu’elle comprenait. Naquit ainsi un alphabet réduit de vingt-deux signes.
Extrait du colophon d'une tablette d'Ugarit. On peut y lire: « Le scribe El-melek, le shibonite élève d’Aten-perlen, chef des prêtres, chef des pasteurs, le scha’aite Niqmad, roi d’Ugarit suzerain de Yrgb, maître de Sermin»
écriture méroitique
Les écritures du Proche Orient avant l’alphabet
AU DEUXIEME MILLENAIRE, cohabitaient dans le Proche Orient antique, et donc en Phénicie, véritable carrefour de civilisations, différents systèmes scripturaux: le hiéroglyphique et le hiératique égyptien au Sud, le hiéroglyphique hittite au Nord, le cunéiforme sumérien à l’Est et le linéaire A et B crétois à l’Ouest.
L’écriture hiéroglyphique égyptienne
En Égypte, on utilisait un système qui comportait plusieurs centaines de pictogrammes, certains à valeur idéographique, d’autres à valeur idéographique et phonétique. Cette écriture était largement employée sur les monuments, aussi fut-elle appelée par les Grecs «hiéroglyphique», c’est à dire «écriture sacrée». Une forme cursive, utilisée exclusivement sur les papyrus, cohabitait avec elle, et fut baptisée «hiératique», c’est à dire, «sacerdotale».
Texte hiéroglyphique gravé
sur une stèle
L’écriture cunéiforme mésopotamienne
En Mésopotamie, on employait un système pictographique et syllabique simplifié dans lequel les signes n’avaient plus aucun rapport avec leur dessin d’origine. Les Mésopotamiens transcrivaient en effet leurs textes sur des tablettes d’argile qu’ils gravaient à l’aide d’un stylet. Leur écriture reposait donc sur un fin réseau de lignes en forme de clous ou de coins (du latin cuneus), d’où le terme d’écriture cunéiforme. Ce système scriptural, inventé par les Sumériens, comptait plusieurs centaines de signes. Au IIIe millénaire, les Akkadiens, peuple sémite, reprirent ce système scriptural, l’adaptèrent à leur langue et le popularisèrent sous ses formes assyriennes et babylonniennes. Il fut très utilisé dans le Proche Orient antique, du fait de l’usage du babylonien comme langue des relations internationales et de la culture.
Texte babylonien en cunéiforme
L’écriture pictographique hittite
Les Hittites, peuple indo-européen, utilisaient également un système pictographique, baptisé hiéroglyphique par analogie avec l’écriture égyptienne. Ecrite en boustrophédon, c’est à dire que l’écriture se lisait de droite à gauche puis de gauche à droite comme un bœuf labourant son champ (du grec bous, bœuf et stephein, tourner), l’écriture pictographique cohabitait dans le royaume hittite avec le cunéiforme.
Ecriture pictographique hittite
Les écritures crétoises
En Crète, existait une écriture essentiellement phonétique dans laquelle les signes isolés avaient une valeur syllabique. Constitué d’une centaine de signes, aujourd’hui non encore tous déchiffrés, le Linéaire A (XVIIe siècle av. J-C.) et le linéaire B (XIVe siècle av. J-C.) étaient utilisés dans les îles de la mer Egée.
Ecriture pictographique hittite
Les proto-alphabets cananéens
Vers 1800 avant J-C. apparurent dans le Sinaï central et à Byblos des signes pseudo-hiéroglyphiques, transcrivant un dialecte cananéen, mais sous une forme non spécifiquement alphabétique. Des tablettes retrouvée à Byblos, suggère l’existence d’une écriture essentiellement syllabique, car ne comportant guère plus de 120 signes, baptisés «pseudo-hiéroglyphes» représentant des animaux, des végétaux, des bâtiments et des dessins géométriques. S’inspirant d’avantage de l’écriture crétoise que de l’écriture égyptienne, ce système scriptural fut en usage jusqu’à la fin du XIIIe siècle av. J-C., c’est à dire jusqu’à l’affirmation de l’alphabet phénicien.
Inscriptions pseudo-hiéroglyphiques
de Byblos, la bien nommée
(en grec, livre se dit byblion)
C’est la ville du livre, son destin est inséparable de celui de l’écriture...
En Canaan, occupée par les Égyptiens, nacquit vers le XVe siècle avant notre ère, une écriture qui prit le nom de proto-sinaïtique, car on découvrit ses plus beaux spécimens dans des mines de turquoise égyptienne du désert du Sinaï. Son origine est à rechercher du côté de l’Égypte. L’écriture hiéroglyphique comprenait en effet vingt-cinq signes mono-consonnantiques différents qui associés constituaient un alphabet complet. Mais les Égyptiens, trop conservateurs, ne l’utilisèrent jamais comme tel. L’écriture inventée par les scribes cananéens, isolait ces signes et leur attribuait une valeur phonétique représentée plus ou moins schématiquement par ces signes. Elle constitue la première expérience probante de simplification alphabétique de l’écriture. Toutefois son destin nous est encore aujourd’hui inconnu.
Inscription proto-sinaïtique
Polémique
LA QUESTION de l’attribution de l’invention de l’alphabet aux Phéniciens est un point d’histoire qui a toujours été discuté. Tous les Anciens ne partageaient pas l’avis de Pline ou d’Hérodote, certains, comme Diodore de Sicile, rappelant l’opinion des Crétois sur la question, «eux [les Crétois] disent que les Phéniciens n’inventèrent pas, à l’origine, les lettres, mais qu’ils changèrent la forme des signes».
Il semble toutefois évident de dire que les Phéniciens jouèrent un rôle décisif dans l’histoire de l’alphabet, même si leur rôle effectif reste controversé. L’objet de ce bref essai est de mettre en lumière l’apport décisif attribué à cette peuplade sémitique de la côte méditerranéenne, à ce qui reste une des principales inventions de l’humanité: l’alphabet.
Le peuple phénicien a l’insigne honneur d’avoir inventé les lettres de l’alphabet.
Pline l’Ancien
Ces Phéniciens arrivés [en Grèce] avec Cadmos [...] introduisirent [...] l’alphabet que les Grecs, à ce que je crois, ne possédaient pas auparavant.
Hérodote
Inscription mortuaire de Tabnit, roi de Sidon (Vème siècle av. J-C.).
Qui étaient les Phéniciens ?
LA PHENICIE n’existe pas à proprement parler. On entend généralement par ce terme une région côtière s’étendant de Akko (Acre, Israël), au sud, jusqu’au delà d’Ugarit (Ras Shamra, Syrie), au nord. Les Phéniciens, dont le nom grec (phénix) signifierait le «peuple des palmiers», sont des Sémites apparentés aux Cananéens. Peuple venu vraisemblablement d’Arabie via la Mésopotamie, il s’est installé sur la côte méditerranéenne dès le IIIe millénaire.
Carrefour de civilisations
Ils sont soumis très tôt à de multiples influences: celle de l’Égypte, sensible à Byblos dès l’Ancien Empire et très forte au milieu du IIe millénaire, celle des Sémites de Mésopotamie (Araméens, Babyloniens), celle des États asiatiques du Nord (Hourrites, Mitanniens, Hittites) et enfin celle des peuples de la mer Égée (Crétois, Mycéniens). Pendant le IIe millénaire, Ugarit a été la seule grande cité indépendante phénicienne tandis que ses consœurs faisaient l’objet de la convoitise des Égyptiens et des Hittites, la mer étant dominée par les peuples grecs. Ses rois ont entretenu une abondante correspondance diplomatique, notamment avec l’Égyptien Aménophis IV (Akhenaton), le Babylonien Soupilouliouma et le Hittite Hattousil III.
L’apogée
Lorsque les grands empires orientaux commencèrent à tomber en décadence, menacés par les invasions des Peuples de la mer (les Philistins, qui donneront leur nom aux Palestiniens), les cités indépendantes phéniciennes prospérèrent et ce malgré la destruction d’Ugarit vers 1200 avant notre ère. L’apogée est comprise entre le Xe et le VIIIe siècle; la Phénicie comprenait alors trois groupes de villes, celui d’Arwad-Simrya (Syrie) au nord, celui de Byblos (Jbeil, Liban) - Bérytos (Beyrouth) Sidon (Saïda, Liban) au centre et celui de Tyr (Sour, Liban) au sud. Sous l’autorité de dynasties locales et en l’absence de péril extérieur, les métropoles se combattaient entre elles; c’est l’époque de la splendeur de Tyr et de Sidon, qui entretenaient des relations étroites avec leurs voisins.
La société phénicienne
Avant d’être des navigateurs et des commerçants, les Phéniciens furent des paysans soigneux et d’habiles artisans. Leur science de l’agriculture se transmit jusqu’aux Romains qui traduisirent leurs traités. L’exploitation des forêts fut la ressource principale et l’exportation de bois de cèdre, dura fort longtemps. Les artisans brodaient des étoffes magnifiques et étaient réputés pour la qualité de leur teinture pourpre. Commerçant avec les royaumes araméens de Syrie (Hama, Damas), les Phéniciens se tournèrent très tôt vers la mer. Avec une belle audace, ils firent le tour de la Méditerranée et fondèrent de nombreuses colonies dont la plus célèbre fut Carthage (814 av. J.-C.).
La fin de la civilisation phénicienne
Les Assyriens détruisirent ce fragile équilibre et asservirent les cités phéniciennes qui payaient tribu dès le VIIe siècle. En 678, Sidon est détruite et Tyr plusieurs fois assiégée. La Phénicie est ensuite disputée entre les Babyloniens de Nabuchodonosor et les Égyptiens, avant de devenir une satrapie de l’empire perse. Finalement, en 332, Alexandre le Grand s’emparait de Tyr, et depuis cette date, l’histoire phénicienne se confondait avec celle du monde hellénistique.
Maison Phénicienne