Edouard Philippe veut instaurer la réforme des retraites « sans brutalité » Le premier ministre s’est dit ouvert à un compromis sur l’entrée en vigueur de la réforme, estimant qu’on « ne change pas un contrat social brutalement ».
Le Monde avec AFP et Reuters Publié aujourd’hui à 14h54, mis à jour à 15h59
Une réforme des retraites « sans brutalité ». Le gouvernement français ne transigera pas sur l’instauration d’un système universel de retraites, en supprimant notamment les régimes spéciaux, mais est prêt à négocier sur les mécanismes de transition des 42 régimes existants, a déclaré Edouard Philippe mercredi 27 novembre. Le premier ministre s’est dit notamment ouvert à un compromis quant à l’entrée en vigueur de la réforme (théoriquement dès la génération née en 1963), entre « une transition immédiate et brutale » et la « clause du grand-père » qui renverrait l’application de la réforme aux nouveaux entrants sur le marché du travail à compter de l’échéance de 2025. « Entre ces deux extrêmes, on doit pouvoir trouver le bon curseur », a-t-il insisté.
« On ne change pas un contrat social brutalement », a-t-il admis. Les discussions avec les syndicats et le patronat « vont encore se poursuivre un peu sous le pilotage du haut-commissaire » aux retraites, Jean-Paul Delevoye, et « devraient s’achever aux alentours des 9 ou 10 décembre », a déclaré M. Philippe à l’issue du conseil des ministres. « Le dialogue social se poursuit », a assuré M. Philippe, qui a énuméré les pistes de compromis possibles : droits familiaux, emploi des seniors, pénibilité, cumul emploi-retraite ou « garanties » pour certains fonctionnaires, comme les enseignants. « On nous a suffisamment reproché la verticalité pour que nous assumions de prendre le temps de discuter », a-t-il insisté, alors que l’opposition accuse l’exécutif de manier volontairement le flou sur son projet.
Le premier ministre a cependant réassuré la volonté du gouvernement d’aller au bout de cette réforme. Sinon, « ce qui se produirait, nous le savons tous : nous demanderions à nos enfants de payer, c’est totalement injuste, je m’y refuse », a-t-il déclaré. M. Philippe a aussi évoqué la possibilité de travailler plus longtemps : « Je crois que nos compatriotes savent que dans tous les autres pays un allongement progressif de la durée du travail se met en place, et c’est un élément sur lequel travailler. »
En attendant, « certains exprimeront leur opposition dans la rue le 5 décembre », premier jour d’une grève reconductible soutenue par la plupart des syndicats et des partis d’opposition. Cette manifestation, qui s’annonce massive, rassemblera des employés de la SNCF, de la RATP (les transports en commun d’Île-de-France), du transport routier, des hôpitaux, d’EDF, de l’éducation nationale, mais aussi des « gilets jaunes » et des étudiants. Tout en affirmant son « respect pour le droit de grève (et) pour le droit de manifester », M. Philippe a assuré que « le gouvernement mettra tout en œuvre pour accompagner au mieux les Français qui veulent et qui doivent travailler ».
A l’approche de cette date fatidique, l’exécutif enchaîne les réunions : après un déjeuner à l’Elysée et une réunion de la majorité mardi, un nouveau rendez-vous « de calage » est prévu vendredi à Matignon, selon une source gouvernementale. L’ensemble des ministres participera ensuite à un séminaire dimanche afin de « caler la feuille de route » et « fixer le calendrier au-delà du 5 décembre », mais aussi « revoir le plan pour limiter au maximum l’impact de la grève », en particulier dans les transports.
Dons de corps à la science : un charnier au coeur de Paris
Des milliers de corps étaient livrés à la pourriture et aux rongeurs en raison de la vétusté des lieux, ou vendus à des entreprises privées, selon L'Express.
Par Le Figaro
Publié il y a 46 min
Les révélations font froid dans le dos : en plein coeur de Paris, à la prestigieuse faculté de médecine Paris-Descartes, le Centre du don des corps (CDC) s'est transformé en véritable charnier pendant «des décennies», et ce au moins jusqu'en 2018, révèle une enquête de L'Express mardi 26 novembre.
Des milliers de corps «démembrés» étaient livrés à la pourriture, aux vers et aux rongeurs, en raison de la vétusté des lieux : chambres froides non hermétiques, absence de ventilation et pannes à répétition. Mais un autre scandale s'ajoute au scandale : des corps ou des «pièces anatomiques» - membres ou organes - ont été monnayés, en violation de toutes les règles d'éthiques à des entreprises privées. Un ancien directeur du CDC évoque en outre un «trafic» auprès de chirurgiens désireux de faire des recherches.
Mouches, vers, putréfaction Selon L'Express, le Pr Richard Douard, président du CDC de 2014 en 2017, aurait alerté Frédéric Dardel, président de Paris Descartes et aujourd'hui conseiller de la ministre de la recherche, Frédérique vidal, un document de 27 pages avec photographies à l’appui, et ce fin 2016.
Face à «l'inertie des pouvoirs publics», Richard Douard démissionne en octobre 2017. Sa démission est suivie de celle de Xavier de Bonnaventure, chargé d'enseignement en droit public et alors membre du comité d'éthique du CDC, puis de celle du Pr Brigitte Mauroy, urologue à Lille et présidente dudit comité d'éthique.
Des travaux de rénovation de 8 millions d'euros sont alors votés, mais ils ne seront effectifs qu'au premier trimestre... 2020. Depuis, un «grand nettoyage» (sic) aurait eu lieu avec des incinérations massives. Certains corps n'auront alors jamais servi à la science.
Mais selon L'Express, les dysfonctionnements auraient perdurés par la suite au CDC, et ce jusqu'à très récemment. Outre les graves problèmes éthiques liés au respect dus aux morts, la vétusté des lieux a ainsi posé la question des conditions de travail déplorables des médecins.
Commerce et trafic de corps humain Mais le scandale ne s'arrête donc pas là. En violation de toutes les règles d’éthique, les « pièces anatomiques », membres ou organes, sont monnayées à des industriels, laboratoires ou entreprises privées, par exemple pour faire des crash tests de voiture, selon Alex Kahn, ex-président de Paris-Descartes.
Un corps entier pouvait ainsi être vendu 900 euros, un membre 400 euros. Une tarification votée en 2011 par le conseil d'administration de l'université. Frédéric Dardel, interrogé par L'Express, défend cette vente de dépouilles votée sous sa présidence : «Les corps représentent un coût marginal, il est normal que ceux qui les utilisent payent». Selon un audit de KPMG, les organismes privés auraient ainsi contribué à 75% du chiffre d'affaire du CDC en 2013.
Les chirurgiens, professeurs d'université parisiens désireux d'élaborer des recherches, doivent également payer pour avoir accès aux corps. Certains repartent alors chez eux avec des «pièces anatomiques» dans leur sac. « Oui, il y avait du trafic, confie à L'Express le Pr Guy Vallancien, directeur du CDC de 2014 à 2018. «Les préparateurs revendaient des pièces le samedi matin à des chirurgiens, qui les emportaient», dit-il.
Le Pr Bertrand Ludes, qui a pris les rennes du CDC à l'automne 2018, certifie vouloir mettre fin aux démembrements des corps, instaurer la prise en charge financière des dissections par l'université, et résilier les partenariats avec les entreprise privées.
Mercredi 27 novembre, scandalisé par ces révélations, un syndicat de médecins, l'Union française pour une médecine libre (UFML) a annoncé, auprès de Franceinfo, son intention de porter plainte.
Les agriculteurs bloquent partiellement les Champs-Elysées Plus d’un millier d’agriculteurs roulent sur Paris avec leurs tracteurs afin d’interpeller l’exécutif et la grande distribution, alors que commencent les négociations commerciales qui fixent les prix pour un an.
Le Monde avec AFP Publié aujourd’hui à 08h47, mis à jour à 12h34
Sur l’avenue des Champs-Elysée, dans la matinée de mercredi 27 novembre. PHILIPPE LOPEZ / AFP
Une fois parvenus dans la capitale avec leurs tracteurs et après avoir bloqué le boulevard périphérique, des centaines d’agriculteurs sont arrivés sur les Champs-Elysées pour faire pression sur les négociations commerciales avec la grande distribution.
Ils sont déjà plus de 200 à proximité de l’Arc de triomphe, où ils ont déversé du foin devant le restaurant Le Fouquet’s et bloquent en partie l’avenue. Un important dispositif de sécurité était en place depuis le petit matin dans ce secteur proche du palais de l’Elysée. D’autres groupes sont toujours en route pour l’avenue.
« Je soutiens leur colère et leur manifestation, je comprends leur ras-le-bol », a déclaré le ministre de l’agriculture, Didier Guillaume, au micro d’Europe 1 mercredi matin. « On les aide dans toute la transition agroécologique. il y en a assez de ce dénigrement. »
L’arrivée du millier de tracteurs par les axes autour de la capitale n’a finalement pas provoqué plus de bouchons que d’habitude, selon le site d’information du trafic autoroutier francilien Sytadin.
« On est pris dans un effet ciseau »
Mathieu Garnotel, qui exploite 130 hectares dans la Marne, est venu avec une vingtaine d’autres agriculteurs rejoindre les convois parisiens, mercredi matin à Coutevroult, en Seine-et-Marne, près du péage sur l’A4.
« Actuellement, dans la Marne, un exploitant sur trois est à zéro ou en déficit, et l’année précédente nos revenus avaient baissé de 75 % par rapport à la moyenne 2010-2014, à cause de la chute des prix, de la suppression des quotas [sucriers] et de l’augmentation des charges (matériel et intrants plus chers, augmentation de la redevance pour pollution diffuse et de la taxe sur l’azote), on est pris dans un effet ciseau. »
« Mon salaire a baissé de 40 % en cinq ans », explique Guillaume Moret, 49 ans, agriculteur du Val-d’Oise, en route depuis Roissy, dans le nord de Paris. « On se demande combien de temps on va pouvoir tenir, et si on sera là demain. » « Les citoyens, dit-il, ne cherchent pas à comprendre ce qu’il se passe, ils veulent qu’on produise sans pesticides, mais eux ne s’interdisent pas cette consommation. »
« Dans mon groupe, nous sommes 15 agriculteurs, soit 30 % des effectifs de mon syndicat local du Val-d’Oise, a-t-il ajouté, ce qui est énorme comme mobilisation chez nous. »
« C’est la première fois que je monte à Paris en tracteur », témoigne à l’Agence France-Presse (AFP) Alix Heurtaut, agricultrice près d’Etampes (Essonne), qui s’est jointe à un groupe de 25 autres tracteurs. « Ça se passe bien, nous recevons beaucoup de signes de soutien des automobilistes, ça fait plaisir de voir des gens qui ne sont pas contre nous. »
La loi dite Egalim, issue des Etats généraux de l’alimentation et mise en place en début d’année, était censée ramener du revenu aux exploitants en rééquilibrant les relations commerciales, mais jusqu’ici les agriculteurs disent ne pas vraiment voir de différence.
Sur la route de Paris, mercredi 27 novembre. PASCAL ROSSIGNOL / REUTERS D’autres blocages autour de Lyon
Les manifestants veulent donc mettre la pression sur la grande distribution et ses fournisseurs, alors que viennent de commencer les négociations commerciales annuelles qui fixent les prix pour un an. « Nous voulons que les distributeurs jouent le jeu et ne fassent pas comme a fait Lidl il y a dix jours, du steak haché à 6,75 euros le kilo, ce qui est un profond scandale », a expliqué à l’Agence France-Presse Christiane Lambert, présidente de la Fédération nationale des syndicats d’exploitants agricoles (FNSEA), principal syndicat agricole qui appelle, avec les Jeunes agriculteurs (JA), à la mobilisation de mercredi.
En Rhône-Alpes, la préfecture a annoncé que les agriculteurs avaient bloqué partiellement trois autoroutes (A466, A6 et A47) autour de Lyon. Benoît Claret, le président de la FDSEA Ardèche, est venu pour protester contre « un double discours, un double langage qui fait que notre agriculture est malmenée par la société alors qu’elle est de plus en plus vertueuse ».
« Nous voulons que le gouvernement prenne ses responsabilités en nous accompagnant dans les négociations commerciales », qui ont jusqu’ici échoué à redresser les prix fixés aux agriculteurs, a-t-il expliqué.
Nathan Cocquempot (avec AFP)