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Date de création : 27.11.2008
Dernière mise à jour :
08.02.2013
5848 articles
10 juin 1794
Par le décret du 22 prairial An II (10 juin 1794), l'assemblée de la Convention réduit les procès révolutionnaires à une simple formalité.
L'assemblée parisienne avait mis «la Terreur à l'ordre du jour»le 5 septembre 1793 mais la répression, les arrestations arbitraires et la peur de la guillotine n'avaient pas suffi à faire reculer les menaces qui pesaient sur la Révolution française et la République.
Celles-ci étaient tout à la fois menacées par l'opposition royaliste, les catholiques restés fidèles à leur foi et les gouvernements étrangers qui craignaient les velléités expansionnistes des armées françaises.
Devant la Convention, Maximilien de Robespierre, qui préside en dictateur le Comité de Salut Public, autrement dit le gouvernement du pays, justifie la Terreur avec des mots terribles : «La Terreur n'est pas autre chose que la justice prompte, sévère, inflexible !» Il convainc les députés de voter le décret du 22 prairial. C'est le début de la Grande Terreur à Paris comme dans les départements où les représentants en mission répriment les menées anti-révolutionnaires avec plus ou moins de zèle.
Les noyades de nantes,
par le conventionnel Carrier en 1793
(gravure de Duplessis-Berteaux)
Au total, la chasse aux suspects par la Convention montagnarde et le Comité de Salut Public vont faire environ 40.000 victimes dans l'ensemble du pays, du 5 septembre 1793 à la chute de Robespierre, le 27 juillet 1794. 17.000 victimes sont guillotinées et les autres tuées de diverses façons (fusillades, noyades,...).
Malgré ces excès, la France se reprend à espérer. À l'intérieur, les révoltes sont étouffées, Vendée mise à part. Lyon et Toulon se soumettent et, aux frontières, les armées reprennent vigueur... La victoire de Fleurus écarte le danger d'invasion.
À l'été 1794, la sécurité de la France semble enfin assurée. Beaucoup de députés de la Convention aspirent désormais à profiter tranquillement de leur pouvoir ainsi que de leurs richesses (souvent mal acquises). Ils ont le sentiment que les principaux buts de la Révolution ont été atteints et se réjouissent des perspectives de conquête ouvertes par la victoire des armes. L'abolition des privilèges de naissance est irréversible, les «frontières naturelles» sont à portée de main et la séparation de l'Église et de l'État est entrée dans les faits.
Les députés s'impatientent devant le régime de Terreur sur lequel s'appuie Robespierre et qui constitue une menace perpétuelle au-dessus de leurs têtes. Ils reprochent par ailleurs à l'Incorruptible d'avoir instauré la Fête de l'Être suprême et de préparer ainsi le retour de la religion. Ils s'inquiètent aussi de ses tractations secrètes avec l'Angleterre, en prélude à un accord de paix qu'ils jugent prématuré. Fin juillet 1794, après sept semaines de folie meurtrière, le temps de la Grande Terreur... et celui de Robespierre leur semble révolu.
Le Laki aujourd'hui
8 juin 1783
La quantité de sulfates dans l'air connaît un pic dramatique et tous les êtres vivants en sont affectés : 80% des moutons islandais périssent dans l'année, la famine tue un cinquième de la population de l'île, ramenant celle-ci à 40.000 habitants.
Mais les problèmes ne se limitent pas à l'Islande : poussé par les vents, le nuage volcanique atteint l'Europe continentale dans les jours et les semaines qui suivent.
On en constate même les effets en Asie et en Amérique du nord ! Affolée par le brouillard dense, qui prend parfois une couleur sang, et les pluies de cendre, la population panique et recourt aux superstitions pour prévenir la catastrophe.
L'étude des registres paroissiaux montre aujourd'hui qu'il y avait de quoi paniquer : la surmortalité dans les mois qui suivent est de l'ordre d'un tiers. Les éruptions, car il s'agit plus d'une série d'éruptions que d'une seule éruption, s'atténuent en octobre, avant de cesser en février 1784.
Lorsque l'effet immédiat s'estompe, les conséquences à moyen terme prennent le relais. Elles sont d'autant plus graves qu'une autre gigantesque éruption a lieu au Japon du 9 mai au 5 août 1783. Très mortifère elle aussi, elle contribue vraisemblablement à perturber le climat.
Après avoir élevé la température dans les premiers jours, les nuages volcaniques, en empêchant le rayonnement solaire de toucher la terre, provoquent un hiver exceptionnellement froid en Europe. La Seine est totalement gelée le 1er février 1784. Et lorsqu'intervient la fonte des neiges, les rivières sortent de leur lit à travers tout le continent : de Caen à Prague, les inondations sont catastrophiques. À Paris, elles durent un mois et demi. Partout, les autorités doivent intervenir pour secourir les malheureux.
Il est difficile de mesurer avec certitude les dégâts provoqués par ces éruptions : on évalue à plusieurs dizaines de milliers le nombre de morts en Europe. Si on peut mettre l'activité du Laki en relation avec les phénomènes climatiques extrêmes de 1783-1784, on est moins certain de son impact sur les années qui suivent : caractérisées par un «mini-dérèglement climatique», elles alternent sécheresses et grands froids, récoltes exceptionnelles et disettes.
De là à attribuer au volcan islandais le déclenchement de la Révolution, comme le proposent certains, il y a un pas qu'on se gardera de franchir : dans d'autres pays, les mêmes phénomènes n'entraînent pas les mêmes effets.
7 juin 1520
Les rois de France et d'Angleterre se rencontrent du 7 au 24 juin 1520 entre Ardres et Guînes, deux petites villes proches de Calais, respectivement française et anglaise.
L'entrevue se déroule dans un camp de toile d'un luxe inouï, aménagé en quelques semaines par 6.000 artisans. François 1er, dans le désir d'épater son hôte, s'est offert une tente de drap d'or doublé de velours bleu. D'où son surnom de «Camp du Drap d'Or».
Le camp deu drap d'or (détatil)
par Friedrich Bouterwerk, d'après Hans Holbein
L'année précédente, le roi de France François 1er (25 ans) a eu la déception de voir Charles de Habsbourg (20 ans) élu à la tête du Saint Empire romain germanique sous le nom de Charles Quint.
François 1er, qui s'était étourdiment endetté pour faire avancer (en vain) sa propre candidature à la tête de l'empire, en garde rancune à son jeune rival, d'autant que celui-ci a comme lui des visées sur la riche Italie...
Le roi de France envisage donc de nouer une coalition avec l'autre grand souverain d'Europe occidentale, Henri VIII Tudor (28 ans) et, dans cette perspective, lui propose la rencontre de «Camp du Drap d'Or».
Une fanfaronnade de trop
Les deux souverains sont alors au faîte de leur gloire. L'un et l'autre sont des gentilshommes de la Renaissance, cultivés, charmeurs et sportifs.
Henri VIII n'aime pas beaucoup François 1er et le trouve arrogant. Mais son conseiller, le douteux cardinal Wolsey, qui touche de l'argent de tous les côtés, le convainc d'accepter la rencontre... D'autre part, comme François 1er lui doit deux millions d'écus, le roi d'Angleterre tient personnellement à le ménager en attendant de récupérer sa créance.
Pendant trois semaines, la vie de cour va étaler toutes ses séductions au milieu des tournois et des fêtes. C'est une première dans l'Histoire de l'Europe.
Le camp deu drap d'or (détatil)
par Friedrich Bouterwerk, d'après Hans Holbein
Mais à l'occasion des festivités, François 1er heurte inutilement la fierté d'Henri VIII par un excès de fanfaronnade : à l'Anglais, obèse, qui lui propose de lutter, le vainqueur de Marignan ne se le fait pas dire deux fois et, pour plaire à l'assistance féminine, fait chuter sans façon Henri...
Un traité d'alliance est néanmoins négocié par le cardinal Wolsey et les ministres français Bonneval et Duprat. Il prévoit le mariage d'Henri, fils aîné de François 1er, avec Marie Tudor, fille d'Henri VIII. Il prévoit aussi que la France cessera de soutenir les Écossais dans leur guerre contre les Anglais.
En définitive, du fait de l'irritation anglaise, le mariage n'aura jamais lieu et les festivités s'achèveront sur un échec diplomatique, creusant un peu plus la dette du roi de France.
Retour à la guerre
Deux semaines à peine après les embrassades du Camp du Drap d'Or, Henri VIII rencontre Charles Quint à Gravelines (à côté de Dunkerque), dans des conditions autrement plus modestes.
Avec l'empereur, qui est le neveu de sa femme Catherine d'Aragon (la première d'une longue série), le roi d'Angleterre signe le 14 juillet 1520 un traité secret contre le roi de France !
Le camp deu drap d'or (détatil)
par Friedrich Bouterwerk, d'après Hans Holbein
François 1er va devoir affronter une coalition regroupant Charles Quint, Henri VIII et le pape. Tout cela s'achèvera par la défaite des armées françaises et la capture du roi de France à Pavie, près de Milan, le 24 février 1525.
La Tête de Pompée présentée à César - Lagrenée
(Varsovie, Musée national)
6 juin 48 avant JC
La victoire de Pharsale est l'aboutissement d'un longue traque. Jules César, fort du prestige acquis par la conquête des Gaules, a, dans un premier temps, poursuivi et dispersé les troupes restées fidèles à Pompée dans son proconsulat d'Espagne. Ensuite seulement, il a décidé de traverser la mer Adriatique pour en finir avec celui-ci.
En janvier de l'an 48 avant JC, César passe d'Italie en Grèce où il est rejoint par ses troupes et son fidèle lieutenant Antoine, chef de la cavalerie. Il peut, enfin, aller au-devant de Pompée.
Pompée
Ce dernier est défait à Pharsale malgré une supériorité numérique écrasante. Il aligne en effet 45.000 fantassins et 7.000 cavaliers face aux 22.000 fantassins et 1.000 cavaliers de César.
Après la bataille, Pompée, en fuite, se réfugie en Égypte où il est assassiné sur ordre du jeune pharaon Ptolémée XII Philopator (13 ans) qui croit ainsi s'attirer les grâces du vainqueur.
César arrive à son tour en Égypte. Il fait mine de s'offusquer de l'exécution du grand Pompée et lui accorde des funérailles solennelles. Il réprime enfin une révolte à Alexandrie et fait déposer le jeune pharaon mais se rend aux charmes de sa soeur, la reine Cléopâtre.
Là-dessus, iI soumet Pharnace II, roi du Pont (la région de l'actuel détroit du Bosphore) à Zéla en 47 avant JC.
La défaite et la mort de Pompée font espérer aux Romains la fin des guerres civiles. Le vainqueur est nommé par les comices romaines dictateur pour un an (et non plus seulement onze jours). Il est aussi fait consul pour cinq ans. C'est un premier pas vers le pouvoir absolu.
Mais la paix n'est pas encore assurée. S'arrêtant à peine à Rome, César passe en Afrique et écrase une armée de partisans de Pompée à Thapsus en février de l'an 46 avant JC. Cela lui vaut de voir sa dictature et son consulat étendus à dix ans.
La dernière bataille de cette interminable guerre civile a lieu à Munda, près de Cordoue, en Espagne, le 17 mars de l'an 45 avant JC. Elle voit la défaite de la dernière armée pompéienne, bien que celle-ci, forte d'environ 10.000 hommes, se soit battue avec l'énergie du désespoir. Un fils du grand Pompée, Sextus Pompée, arrive à s'échapper.
Fort de quatre triomphes (un de plus que Pompée le Grand !), César obtient dès lors la dictature à vie ainsi que les pouvoirs d'un tribun et ceux d'un censeur, avec le titre de préfet des moeurs... Il a partie gagnée contre ses adversaires et devrait pouvoir se reposer sur ses lauriers... Toujours généreux, il n'oublie pas de distribuer toutes sortes de prébendes pour s'assurer ce que l'on appelle ouvertement une clientèle.
César entreprend des réformes civiles, étend le bénéfice de la citoyenneté à de nouvelles catégories d'habitants et limite de moitié les bénéficiaires des distributions gratuites de blé. Il établit ses vétérans dans les régions dépeuplées d'Italie, unifie les constitutions municipales des villes de province sur le modèle de Rome... Il porte de 600 à 900 le nombre de sénateurs en élevant à cette dignité beaucoup de provinciaux, en particulier des Gaulois ! Il réforme même le calendrier, fait commencer l'année en janvier et... donne son propre nom au septième mois (juillet, qui nous vient de Julius). Il s'essaye enfin à une politique de réconciliation nationale après cinquante ans de guerre civile.
Pendant les cinq années qui courent de la traversée du Rubicon à son assassinat, César transforme ainsi le gouvernement de la cité en celui d'un grand État méditerranéen sans rien changer à la forme des institutions. C'est la fin de la République sénatoriale et le début de ce que l'on appellera plus tard l'Empire.
Portrait du Pape Clément V
Cathédrale Saint-Bertrand-de-Comminges
5 juin 1305
La crise débute le 8 septembre 1303 avec l'«attentat» d'Anagni : le pape Boniface VIII, en délicatesse avec le roi de France Philippe IV le Bel, a une violente dispute avec le représentant de celui-ci, Guillaume de Nogaret. Sous le coup de l'émotion, il meurt quelques semaines après. Il est le dernier pape à avoir rêvé d'une suprématie du Saint-Siège sur les dynasties d'Occident.
Son successeur Benoît XI est élu le 22 octobre 1303 dans une atmosphère détestable. Il annule la plupart des mesures de nature à vexer le puissant roi de France avant de mourir lui-même le 7 juillet 1304 d'une... indigestion de figues.
Le conclave se réunit donc à Pérouse pour une nouvelle élection. Pendant onze mois ont lieu de pénibles tractations entre le parti français, conduit par la famille romaine des Colonna, et le parti du défunt Boniface VIII, conduit par les Caetani.
On décide finalement de choisir le pape à l'extérieur du Sacré Collège des cardinaux et l'unanimité ou presque se fait sur le nom de Bertrand de Got, prélat diplomate et juriste éminent, resté neutre dans la querelle entre le roi Philippe le Bel et le pape Boniface VIII.
Bertrand de Got est né en Aquitaine, au sud de Bordeaux. Il a été évêque de Comminges puis, à seulement 29 ans, archevêque de Bordeaux. Quand son élection lui est confirmée, lors d'une tournée pastorale, il s'en réjouit modérément et prend tout son temps avant d'accepter la sentence et de choisir le nom de Clément V.
Couronnement du pape Clément V
(miniature de la chronique Villani/the Granger collection NYC)
Le nouveau pape renonce à se rendre à Rome par crainte des intrigues locales et choisit en définitive de se faire couronner à Lyon, en terre française, le 1er novembre.
Clément V fait son possible pour se concilier les bonnes grâces du puissant Philippe le Bel mais repousse sa demande d'ouvrir le procès posthume de Boniface VIII. En 1307, il a un entretien avec le roi capétien où il est question en particulier du sort des Templiers. Philippe le Bel veut abattre cet ordre, influent et riche, de moines-chevaliers. C'est chose faite le vendredi 13 octobre 1307 sans que le pape ait pu s'y opposer.
Comme il n'est toujours pas en mesure de s'établir à Rome et veut suivre de près le procès des Templiers, Clément V décide en 1309 de s'établir «provisoirement» dans un couvent de dominicains en Avignon, sur des terres d'Empire. Celles-ci seront vendues à son troisième successeur Clément VI par la reine Jeanne 1ère de Naples, par ailleurs comtesse de Provence, qui a beaucoup à se faire pardonner...
Même «provisoire», cet établissement aux limites du royaume de France traduit l'abaissement de la papauté depuis l'époque où Innocent III, un siècle plus tôt, prétendait soumettre les rois à son autorité.
Avignon, nouveau siège de la papauté
Après la mort de Clément V le 20 avril 1314, ses successeurs demeureront en Avignon jusqu'en 1376 et au-delà.
Le 17 janvier 1377, cédant aux prières de Sainte Catherine de Sienne et faisant fi des lamentations de son entourage, attaché au Palais des Papes et à son luxe, le pape Grégoire XI, met fin à la «captivité d'Avignon» et réinstalle le Saint-Siège à Rome. La monarchie capétienne, affaiblie par la guerre de Cent Ans, n'est plus assez forte pour le retenir.
Après sa mort, le 27 mars 1378, le peuple romain impose au conclave le choix d'un pape italien, l'archevêque de Bari, qui prend le nom d'Urbain VI. Mais le nouveau souverain pontife se fait vite des ennemis par son tempérament brutal et imprévisible. Treize cardinaux français élisent en conséquence le 20 septembre 1378 leur propre pape, qui prend le nom de Clément VII... et reprend le chemin d'Avignon. Ce Grand Schisme d'Occident, qui va perdurer jusqu'en 1417, va troubler l'Église mais faire le bonheur des Provençaux.
La présence du Saint-Siège pendant plus d'un siècle vaudra un rayonnement inattendu à cette enclave pontificale constituée de la cité d'Avignon et du Comtat Venaissin voisin, cédé au Saint-Siège par Philippe III le Hardi en 1274. De 5.000 ou 6.000 habitants au début du XIVe siècle, la population d'Avignon va s'élever jusqu'à 40.000 un demi-siècle plus tard (à la même époque, la principale ville d'Europe est Paris avec 300.000 habitants).
Le Palais des Papes à Avignon
L'afflux sur les terres du pape, à Carpentras et Avignon, des juifs expulsés par le roi de France va notablement contribuer à leur prospérité.
Sous la Révolution française, Avignon et le Comtat Venaissin seront annexés par la France. Réunis à la principauté d'Orange et à quelques seigneuries du comté de Provence, ils formeront le département du Vaucluse.
Châteaux clémentins
Le château de Roquetaillade en Gironde
Le souvenir de Clément V se perpétue dans sa région d'origine à travers de nombreux châteaux qu'il a généreusement offerts aux membres de sa famille. Celui de Roquetaillade, en Gironde (photo ci-dessus), appartient toujours à la descendance d'un neveu de Bertrand de Got. Il a été restauré au XIXe siècle par Viollet-le-Duc.
2 juin 1793
Le 2 juin 1793, 80.000 Parisiens en colère assiègent l'assemblée de la Convention. Il s'agit essentiellement de gardes nationaux en armes.
Ils réclament la destitution et l'arrestation des députés girondins, que l'on appelle ainsi parce que plusieurs sont originaires du département de la Gironde. Groupés autour de Brissot et Vergniaud, ils sont de leur vivant plus connus sous le nom de Brissotins.
Leur crime ? Après la victoire de Valmy (20 septembre 1792) et l'instauration de la République, les Girondins, adeptes d'un pouvoir décentralisé, auraient souhaiter arrêter le cours de la Révolution.
Mais au printemps 1793, une succession de défaites militaires ranime la crainte de l'invasion. Les Vendéens se soulèvent de leur côté pour échapper à la levée en masse. La disette et l'inflation réapparaissent de plus belle.
Au contraire des Girondins, les députés de la Montagne (ainsi appelés parce qu'ils siègent en haut de l'Assemblée) préconisent des mesures draconiennes. Robespierre, leur chef, craint qu'une interruption du processus révolutionnaire n'entraîne une restauration la monarchie.
Les Montagnards font voter une loi sur le cours forcé de l'assignat et ils obtiennent le lancement d'un «emprunt forcé» sur les riches. Ils créent aussi un Tribunal révolutionnaire et un Comité de Salut public.
Les Montagnards bénéficient du soutien des sans-culottes parisiens, de la Commune de Paris et du club des Jacobins, ainsi que des bourgeois enrichis par la vente des biens nationaux. Leurs mesures extrêmes leur rallient aussi le mouvement parisien des Enragés de Jacques Roux.
Les Girondins, bien que tenant les rênes du gouvernement, sont acculés par les groupes de pression parisiens et impuissants à mobiliser leurs propres partisans, pour la plupart en province.
Ils tentent de faire mettre en accusation Jean-Paul Marat, un agitateur populaire qui sait mieux que quiconque manoeuvrer les sans-culottes des sections parisiennes.
Marat par Joseph Boze (Paris, musée Carnavalet)
De façon prévisible, celui-ci est acquitté par le Tribunal révolutionnaire qu'il a lui-même fondé. Il fait un retour triomphal à l'assemblée le 24 avril 1793.
Les Girondins mettent alors sur pied, à la Convention, une Commission des Douze chargée d'enquêter sur des pétitions contre eux-mêmes, qui circulent dans les sections parisiennes de sans-culottes.
Les Montagnards tentent une première fois, le 31 mai, d'organiser une insurrection populaire autour de l'Assemblée pour abattre leurs rivaux. Mais l'insurrection n'aboutit qu'à la suppression de la Commission des Douze.
L'insurrection du 2 juin, préparée avec soin par Marat, met en branle les sections parisiennes de sans-culottes et la garde nationale qui encerclent l'assemblée. Comme les députés sortent pour adjurer les manifestants de rentrer dans leurs sections, le sans-culotte Hanriot, à la tête de la garde nationale, menace de faire tirer les canonniers sur eux.
Les sans-culottes menacent les députés girondins le 31 mai 1793
(musée Carnavalet - Paris)
Penauds, les élus s'inclinent. Ils reprennent place dans les travées de l'assemblée et votent la mise en état d'arrestation de 29 des leurs, ainsi que l'exige l'insurrection parisienne. Les Girondins, arrêtés et retenus à leur domicile, s'enfuient et tentent sans succès de soulever les provinces. Mais la plupart seront rattrappés et guillotinés.
Les Montagnards ayant enfin les mains libres, ce sera pendant 13 mois la Terreur, voire la Grande Terreur, sous la dictature du Comité de Salut public, un gouvernement de sept membres dirigé avec autorité par Maximilien de Robespierre.
Liu Bang
1er juin 195 avant JC
Le 1er juin de l'an 195 avant JC, l'empereur Liu Bang (nom de règne : Gaozu) meurt en pleine gloire dans son palais de Chang'an (aujourd'hui Xi'an, dans le Shaanxi, sur les bords de la rivière Wei).
Aventurier originaire d'un village des environs de Nankin, de son vrai nom Liu Bang, il a pris le pouvoir huit ans plus tôt en profitant des désordres consécutifs à la mort du Premier Empereur, Qin Shi Huangdi, celui-là même qui a construit la Grande Muraille et nous a légué un splendide tombeau gardé par une armée en terre cuite. Il demeure comme l'un des meilleurs souverains qu'ait eue la Chine.
La fin de la dynastie Qin
Meneur d'hommes, aimant l'alcool et les femmes, ce fils de paysan devient officier de police dans une circonscription rurale, sous le règne du Premier Empereur.
Après la mort de celui-ci, le voilà en charge de convoyer une colonne de prisonniers. Se payant d'audace, il libère ceux-ci et se met à leur tête. Aspergeant de sang son tambour, il prend le rouge pour emblème et, très vite, avec son armée improvisée, se taille un fief dans sa région natale.
Il se met sous les ordres d'un prince de l'ancienne aristocratie, Xiang Yu, aussi brutal et retors que lui est généreux et habile. Les deux associés volent de victoire en victoire et atteignent en février 206 la capitale impériale, Xianyang.
Le pâle héritier du Premier Empereur, un dénommé Zi Yin, leur fait sa soumission et Xiang Yu s'empresse de le faire exécuter ainsi que tout son entourage. Ses soldats mettent à sac la capitale, y compris la riche bibliothèque du Premier Empereur. Le mausolée de celui-ci est également profané !
Xiang Yu et Liu Bang s'octroient chacun une principauté mais très vite en viennent à s'affronter. Leur guerre va durer cinq longues années. Liu Bang a pris soin d'occuper la haute vallée de la Wei, berceau de la précédente dynastie. Il en fortifie les cols d'accès, bénéficiant ainsi d'un refuge inexpugnable. Il s'attache partout les populations par son humanité, à la différence de son rival qui sème partout la désolation.
Un bouillon fraternel
L'historien René Grousset rapporte, entre autres anecdotes, que Xiang Yu s'est emparé du père de Liu Bang. Il menace celui-ci, s'il ne se soumet pas, de le mettre à bouillir et d'en boire le bouillon, selon une sympathique coutume héritée de la Chine féodale !
À cette menace, Liu Bang répond sans se démonter que «Xiang Yu et lui sont deux anciens frères d'armes et, à ce titre, son père est devenu le sien ; s'il veut absolument le faire bouillir, qu'il ne manque pas de lui réserver une tasse de bouillon ! » Décontenancé, Xiang Yu élargit son prisonnier.
Acculé malgré d'ultimes prouesses guerrières, Xiang Yu se tranche la gorge.
Liu Bang, le fils de paysan, se retrouve en moins de cinq ans sans rival. Empereur ! Il restaure l'oeuvre de Qin Shi Huangdi et rétablit l'ordre dans le pays. Mais à la différence de son illustre prédécesseur, il redouble d'habileté dans le maniement des hommes. Ainsi ménage-t-il les lettrés confucéens, sans leur épargner ses sarcasmes. Il récompense aussi les chefs qui l'ont aidé à prendre le pouvoir en leur octroyant des fiefs mais les leur enlève sous un prétexte ou un autre de sorte que les guerriers se transforment en inoffensive noblesse de cour.
Gaozu érige une nouvelle capitale impériale à une quinzaine de kilomètres de l'ancienne Xianyang, à Chang'an, et poursuit la guerre contre les ennemis de l'extérieur, notamment les Huns. En 200 avant JC, comme il est cerné par ceux-ci, il fait envoyer à leur roi le portrait d'une beauté chinoise. Séduit, le barbare laisse l'empereur se retirer et, deux ans plus tard, reçoit en guise de cadeau l'une des plus jolies filles de son harem, «perdrix chinoise» livrée à l'«oiseau sauvage du nord» !
Comme l'empereur tient les médecins en aussi peu d'estime que les lettrés, il néglige de faire soigner une blessure de guerre. Cela lui vaut de mourir prématurément à 52 ans.
Son habileté et la simplicité de ses manières vont permettre à Gaozu et à ses descendants de se succéder sur le trône chinois presque sans interruption pendant quatre siècles, jusqu'en 220 après JC. Le plus prestigieux de ces souverains est Wudi, dont le long règne s'étire de 140 à 87 avant JC.
La dynastie fondée par Gaozu est connue sous le nom de Han. Les Chinois lui conservent une reconnaissance éternelle et continuent de s'en réclamer. Aujourd'hui encore, ils se dénomment officiellement «fils des Han» ou tout simplement «Han».
Remarquable parallèle : à la même époque que les Han, dans le bassin méditerranéen, une république de soldats laboureurs, Rome, abattait une oligarchie commerçante, Carthage, et fondait un empire dont se réclament encore les Européens.
31 mai 1902
Le 31 mai 1902, à Vereeniging, à la pointe sud de l'Afrique, un traité met fin à une guerre de 30 mois entre les Boers et les Anglais. Il s'agit de la plus dure guerre coloniale qu'aient eu à soutenir les Anglais. Et c'était face à des paysans d'origine européenne !
LesBoers (d'un mot hollandais qui signifie paysans et se prononce bour) sont en effet les descendants des Hollandais et Français qui se sont installés autour du cap de Bonne Espérance au XVIIe siècle. Ils se nomment aussi Afrikaners (Africains, dans leur langue, l'afrikaans, dérivée du hollandais). Rudes et solidaires, ils veulent par-dessus tout préserver leurs coutumes et leur religion calviniste.
Vingt ans après que les Anglais eurent annexé l'ancienne colonie hollandaise du Cap (1814), les paysans Boers qui y étaient établis choisirent d'émigrer vers le nord pour leur échapper et préserver envers tout leur mode de vie, leur culture et leur foi. Mais, ce faisant, ils rencontrèrent sur leur chemin les Zoulous et il s'ensuivit des guerres incessantes.
Sur les territoires enlevés aux Zoulous, les Boers fondent d'abord la république du Natal mais, en 1843, les Anglais s'empressent de leur enlever cette possession maritime, stratégique à leurs yeux. Les Boers, sans se décourager, s'engagent vers l'intérieur du continent et fondent la République duTransvaalet l'État libre d'Orange. Ils se croient désormais à l'abri des Britanniques. Ces micro-États comptent à leur fondation respectivement 25.000 et 10.000 habitants blancs.
Londres annexe malgré tout le Transvaal le 12 avril 1877, ce qui vaut aux Anglais le douloureux privilège d'en découdre avec les Zoulous avant d'être expulsés de la petite république au terme d'une première guerre, en 1880, et d'une victoire des Boers à Majuba.
La découverte de l'or en 1886 sur les plateaux du Witwatersrand, en plein coeur des domaines boers, attire bientôt des immigrants de toutes origines et excite la convoitise des Anglais. Une ville minière naît à la vitesse d'un champignon : Johannesbourg. Elle ne tardera pas à devenir la métropole économique de l'Afrique du Sud.
À l'affût d'un prétexte pour en finir avec les Boers, le premier ministre de la province du Cap, Cecil Rhodes, dénonce les traitements discriminatoires que subissent les Anglais et les autres étrangers (Uitlanders en afrikaans) installés au Transvaal.
Cecil Rhodes, né en 1853, débarqué en Afrique du Sud pour raisons de santé, a fait fortune en rachetant les parcelles de petits chercheurs de diamants. Député du Cap puis premier ministre de la colonie, il rêve de constituer une Afrique britannique du Caire au Cap ! Après l'éviction des Anglais du Transvaal, il a pris sa revanche en contournant les républiques boers par le nord. Il a imposé le protectorat britannique au Bechuanaland (aujourd'hui le Botswana) et fondé deux colonies dans le bassin du Zambèze, appelées en toute modestie Rhodésie du Sud (aujourd'hui Zimbabwe) et Rhodésie du Nord (aujourd'hui Zambie).
Il ne lui reste qu'à lever l'obstacle du Transvaal ! En 1895, son ami Jameson tente avec 400 hommes, à partir de Mafeking, un raid sur Johannesbourg en vue de soulever les Uitlanders. C'est un échec retentissant. Jameson est capturé et Rhodes contraint à la démission. Les Boers ne sont pas sortis d'affaire pour autant...
Le Premier ministre britannique Joseph Chamberlain multiplie les menaces à l'encontre du vieux président Paul Kruger, un paysan obtus et laid mais farouchement déterminé à préserver l'indépendance du Transvaal. Il finit par lui adresser un ultimatum. Le 11 octobre 1899, c'est pour de bon la guerre. L'État libre d'Orange fait cause commune avec le Transvaal.
Les Boers, mûs par leur foi, vont résister avec une exceptionnelle énergie, alignant un total d'environ 50.000 hommes, y compris les vétérans et les adolescents. Face à eux, les Anglais vont mettre en ligne un total de 448.000 hommes !
Le siège de Ladysmith par les Boers en 1899 (gravure de Sylvester Reisacher)
Les Boers suppléent à leur infériorité numérique par la mobilité. Ils multiplient des actions de commando (le mot lui-même est un néologisme d'origine afrikaans forgé à cette occasion). Leur combat suscite une vague d'enthousiasme dans toute l'Europe continentale où l'on savoure les difficultés de la principale puissance mondiale de l'époque, qui plus est face à une poignée de paysans d'origine européenne.
En janvier 1900, le général anglais Horatio Kitchener, qui s'est déjà illustré au Soudan, prend le commandement du corps expéditionnaire aux côtés du vieux général lord Roberts, qui a perdu dans la guerre son fils unique.
Kitchener reprend Kimberley le 15 février 1900 et oblige à la reddition les 6.000 partisans du général Cronje. Il impose enfin la levée du siège de Mafeking que défend le général Baden-Powell, le futur fondateur du mouvement scout. Le 5 juin, il fait une entrée triomphale à Johannesbourg. Mais les indestructibles Boers, réduits à 17.000 combattants, entament une guerre de guérilla sous la conduite de deux jeunes et brillants généraux appelés à un grand avenir, Louis Botha et Jan Smuts. Pendant ce temps, Paul Kruger fait la tournée des capitales européennes en quête d'une aide qui ne viendra pas. Kitchener réplique par la tactique de la terre brûlée.
Le général Boer Pietr Joubert et son état-major en 1899
La guerre et les camps
Contre les Boers, le général Kitchener fait usage d'une invention récente, le fil de fer barbelé, pour aménager des camps de concentration (les Espagnols, quelques années plus tôt, à Cuba, avaient créé les premiers camps de l'Histoire de l'humanité).
Le président Paul Kruger
Les barbelés permettent d'emprisonner un grand nombre de personnes à moindres frais et avec une surveillance réduite. 200.000 Boers (hommes, femmes et enfants) sont de la sorte internés dans des conditions lamentables et l'on compte à certaines périodes un décès sur dix parmi les internés. Les Boers évaluent à près de 30.000 le nombre de victimes des camps.
Dénoncée par l'Anglaise Emily Hobhouse, vilipendée par l'opinion internationale et surtout britannique, l'armée de Sa Majesté renoncera ultérieurement à ces pratiques.
Les Anglais soumettent enfin les Boers au prix d'une victoire à la Pyrrhus.
La plus grande guerre coloniale de l'ère moderne, qui a opposé deux peuples d'origine européenne, se solde par 7.000 morts sur un total de 100.000 combattants boers (non compris les victimes civiles des camps de concentration) et par... 22.000 morts dans les troupes britanniques, pas moins de 500.000 hommes ayant été engagés par Londres dans le conflit !
Le Transvaal et l'État d'Orange renoncent à leur indépendance ; les uitlanders obtiennent les droits civiques, mais la langue des Boers, l'afrikaans, conserve droit de cité et Londres s'engage à réparer les dommages de guerre. Pour la première fois, l'impérialisme britannique s'est heurté à une authentique résistance populaire. À quelques mois de sa mort, le 22 janvier 1901, la reine Victoria peut percevoir les premières fissures de l'Empire le plus vaste qui fut jamais.
Signature du traité anglo-boer à Melrose house Vereeniging)
le 31 mai 1902
Huit ans jour pour jour après le traité de Vereeniging, le 31 mai 1910, l'Afrique du Sud devient un dominion autonome à structure fédérale : l'Union Sud-Africaine. Le nouvel État scelle la réconciliation des deux ennemis... sur le dos des populations noires, aborigènes et métisses. Le premier Premier ministre est le général boer Louis Botha. Dans son gouvernement figure en bonne place un autre général boer Jan Smuts.
29 mai 1453
Le 29 mai 1453 figure traditionnellement parmi les dates-clés de l'Histoire occidentale. Ce jour-là, Constantinople tombe aux mains du sultan ottoman Mehmet II (ou Mahomet II).
La cité, vestige de l'empire romain d'Orient et de l'empire byzantin, son avatar, était l'ultime dépositaire de l'Antiquité classique. Elle faisait aussi office de rempart de la chrétienté face à la poussée de l'islam. Sa chute, bien qu'attendue et prévisible, provoque l'émoi dans toute la chrétienté. Elle consacre l'avènement d'une nouvelle ère historique.
La prestigieuse capitale de l'empire byzantin avait déjà subi deux sièges par des flottes musulmanes. C'était aux premiers siècles de l'islam. Le premier siège avait duré cinq ans, de 673 à 677 ; le second un an «seulement», en 717.
À chaque fois, les assiégeants - des Arabes - avaient été repoussés grâce à une arme secrète dont disposaient les Byzantins : le feu grégeois (ou grec). Il s'agit d'un mélange mystérieux de salpêtre, bitume, soufre.... qui a la particularité de brûler même sur l'eau. Propulsé en direction des navires ennemis, il permettait d'incendier ceux-ci à coup sûr. Malgré cet atout, les Byzantins perdirent au fil des siècles leur supériorité en matière d'armement.
D'un siècle l'autre, ils eurent aussi à affronter des adversaires d'autres origines : Bulgares et Avars venus du bassin danubien, croisés francs, Normands, Vénitiens et Génois venus d'Occident....
La chute de la «nouvelle Rome» devient inéluctable lorsque de nouveaux envahisseurs venus d'Asie, les Turcs ottomans, traversent le détroit du Bosphore. Ils s'emparent de la plus grande partie de la péninsule des Balkans et installent leur capitale à Andrinople, à un jet de pierre au nord de Constantinople. Celle-ci se trouve dès lors presque complètement isolée au milieu des territoires ottomans. Elle ne peut d'autre part guère compter sur le soutien des Occidentaux...
Dès le XIVe siècle, les victoires des Turcs à Kossovo et Nicopolis sur les armées coalisées des chrétiens permettent de croire à la chute imminente de Constantinople. Mais la défaite des Turcs à Angora(aujourd'hui Ankara, en Turquie), face à Tamerlan, diffère d'un demi-siècle l'échéance fatale.
Au milieu du XVe siècle, réduite à moins de 100.000 habitants et dépourvue d'arrière-pays, la ville de l'empereur Constantin 1er n'est plus que l'ombre d'elle-même. C'est un petit État en relation avec les marchés de l'Extrême-Orient pour le plus grand bénéfice des marchands de Venise et de Gênes qui s'approvisionnent en soieries chinoises.
Le siège de Constantinople
Cette illustration tirée d'un manuscrit français de 1455 montre le siège de Constantinople avec, à gauche, la Corne d'Or, et au fond, de gauche à droite, le détroit du Bosphore et la mer de Marmara.
En 1451, à Andrinople, capitale de l'empire ottoman, Mehmet II succède à son père Mourad II à la tête de l'empire ottoman. Né d'une mère esclave, probablement chrétienne, le nouveau sultan, à peine âgé de 19 ans, décide d'en finir avec Constantinople.
Il adresse en juillet 1452 une déclaration de guerre à l'empereur byzantin. Deux mois plus tard, il entame les hostilités, testant la résistance des murailles de Constantinople avec 50.000 hommes.
Les murailles de Constantinople
Le siège commence en avril 1453 avec150.000 hommes, y compris 6 à 10.000 janissaires, et une flotte puissante.
Le basileus (empereur en grec) Constantin XI Dragasès (50 ans) ne dispose pour sa défense que de 7.000 soldats grecs et d'un détachement d'environ 700 Génois sous le commandement de Giovanni Giustiniani Longo, ainsi que d'une quarantaine de navires. Il se fie aux puissantes fortifications héritées du passé pour résister aux Turcs en attendant d'hypothétiques secours.
Constantin XI envoie des émissaires en Occident. Le brigantin qui porte ces émissaires déguisés en Turcs se faufile avec audace parmi les navires ennemis et finit par atteindre Venise.
La Sérénissime République arme aussitôt dix puissants navires pour secourir ses anciens alliés... Mais l'absence de vent... et le peu d'empressement des Vénitiens ne permettront pas à cette flotte d'arriver à temps pour sauver Constantinople.
Devant le triple cercle de murailles de la ville, Mehmet II fait appel à toutes les ressources de l'artillerie. Il dispose de pas moins de 25 à 50 grosses bombardes (canons primitifs) et de plusieurs centaines de plus petites qui vont projeter sans trêve des pierres et des boulets sur les murailles pendant plusieurs semaines d'affilée.
Les canons de Mehmet II face aux murailles de Constantinople
Il dispose aussi d'une bombarde d'exception, surnommée «la Royale» qui, montée sur un impressionnant château de bois et manoeuvrée par un millier d'hommes, tire sur la cité des pierres pesant jusqu'à 1500 livres ...
Cette bombarde est l'oeuvre d'un Hongrois du nom d'Orban qui s'est mis au service du sultan contre argent. Mais les Grecs arrivent à incendier le château grâce à des flèches enflammées, rendant la machine inopérante.
L'immense flotte du sultan fait par ailleurs le siège de la ville par le Bosphore et la mer de Marmara. Mais elle ne peut entrer dans le chenal de la Corne d'Or, qui ferme la ville par l'Est, car celui-ci est protégé par une chaîne qui en interdit l'accès.
En désespoir de cause, Mehmet II fait aménager sur la colline de Galata, de la rive du Bosphore à la rive de la Corne d'Or, une glissière en bois de 4,5 kilomètres. Des milliers d'hommes vont hisser le long de cette glissière pas moins de 72 birèmes (galères à deux rangs de rames). Arrivés au point culminant, les navires descendent d'eux-mêmes sur la glissière jusqu'au bord de la Corne d'Or.
Au prix de ce mémorable exploit, encore commémoré de nos jours par des fêtes et des reconstitutions, les navires turcs arrivent à contourner la chaîne et à s'introduire dans la Corne d'Or avec marins et soldats, Constantinople se trouve complètement assiégée et réduite à l'impuissance.
Sexe des anges et querelles byzantines
On raconte qu'au palais de l'empereur, les prêtres orthodoxes et les courtisans continuaient de se disputer à propos du sexe des anges tandis que les Turcs faisaient le siège de Constantinople et s'apprêtaient à dévaster la ville. Il ne s'agit que d'une légende sans fondement historique mais on lui doit l'expression de «querelles byzantines» pour désigner des disputes disproportionnées par rapport à leur enjeu.
Les médisances concernant Byzance remontent au XVIIIe siècle. En ce siècle dit des «Lumières», les hommes de lettres occidentaux, tel Voltaire, se sont pris de dégoût pour Byzance, qu'ils jugeaient médiévale, décadente et trop chrétienne. Il reste encore bien des traces de cette mauvaise réputation dans nos livres d'Histoire et nos propres commentaires...
Le 28 mai, les hérauts du sultan annoncent la bataille décisive.
Toute la ville prie cependant que dans le camp turc, des religieux musulmans excitent les soldats en vue du combat. Arrive l'aube fatale où des dizaines de milliers d'hommes ivres d'impatience entrent dans la ville. Dans la basilique Sainte-Sophie, l'empereur grec meurt avec courage, les armes à la main, au milieu de ses derniers soldats. Dès la mi-journée, le sultan peut faire son entrée dans la ville.
Les combats ont fait au moins 4.000 morts. Selon la tradition de l'époque, les vainqueurs s'offrent le droit de piller la ville, de violer et de tuer à qui mieux mieux pendant les trois jours qui suivent sa chute. Tous les habitants survivants (25.000), attachés deux par deux, sortent de la ville et sont réduits en esclavage.
Le sultan Mehmet II, qui songe à faire de Constantinople sa propre capitale et veut lui conserver sa grandeur, veille à ce que les pillages ne s'éternisent pas. Il fait venir des immigrants de tout l'empire pour rendre à la cité sa splendeur antique. Il peut enfin déplacer sa capitale de la ville voisine d'Andrinople à Constantinople, bientôt rebaptisée Istamboul.
Celle-ci atteindra son apogée sous le règne de Soliman le Magnifique... Notons que jusqu'à la fin de l'empire ottoman, elle conservera une population majoritairement chrétienne.
Avec la chute de Contantinople entre les mains des Turcs ottomans, c'en est fini du dernier vestige de l'empire romain et de l'empire byzantin qui a succédé à l'empire romain d'Orient. Les historiens datent de cet événement la fin de la longue période historique appelée faute de mieux Moyen Âge. La Renaissance qui lui succède doit beaucoup aux savants et artistes byzantins qui, réfugiés en Italie, ont contribué à la redécouverte de la culture antique par les Occidentaux.
Aux franges orientales de l'Europe, le grand-duc de Moscovie revendique l'héritage religieux de Byzance et prétend faire de sa capitale, Moscou, la «troisième Rome». En France s'achève la guerre de Cent Ans, dernier conflit de type féodal.
Comme les liaisons commerciales entre l'Occident et la Chine, qui bénéficiaient de la protection des Byzantins, se sont interrompues, de hardis Portugais scrutent l'océan en quête d'une voie maritime de remplacement. L'heure de Vasco de Gama et de Christophe Colomb approche.
Le Caravage
8 mai 1606
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Né en 1571 à Caravaggio, en Lombardie, sous le nom de Michelangelo Merisi, le jeune homme se rend dans la Rome de la Contre-Réforme catholique, éprise de maniérisme et de baroque. Il manifeste son talent dans des oeuvres profanes ou mythologiques, dans des natures mortes de fruits, des portraits d'hommes des rues, de truands ou de joueurs semblables à lui.
Grâce au clair-obscur (ciaroscuro), une technique inventée un peu plus tôt par Léonard de Vinci, le peintre donne aux visages un relief théâtral. Nul ne maîtrise comme lui la lumière ni ne rend avec autant de force l'expression des visages et des attitudes.
Ses commanditaires, grands personnages du Saint Siège ou de l'aristocratie locale, lui pardonnent volontiers ses beuveries, son goût pour les jeunes garçons et ses frasques jusqu'au duel fatal qui l'oblige à quitter la Rome des papes.
David tenant la tête de Goliath, par Caravage
(1606, huile sur bois, Musée historique, Vienne)
Celui que l'on surnomme désormais Le Caravage (Il Caravaggio), d'après son lieu de naissance, renonce dès lors aux peintures profanes. Il ne va plus peindre que des sujets religieux, dans des tonalités sombres et avec une violence d'expression extrême qui nous renvoie à la dure réalité de la condition humaine, comme ci-dessus David tenant la tête de Goliath (1605).
Le peintre, âgé de 35 ans, se rend d'abord à Naples où l'a précédé sa réputation. Mais il n'y reste que quelques mois avant de s'embarquer en juin 1607 pour l'île de Malte, que gouverne un ordre de moines-chevaliers.
Le grand-maître de l'ordre, Alof de Wignacourt, qui admire le peintre, l'accueille avec faste, peu soucieux de son mauvais caractère et de ses crimes passés. Il lui commande son portrait, aujourd'hui au musée du Louvre à Paris, ainsi que d'autres peintures, telle la Décollation de saint Jean Baptiste, aujourd'hui dans la crypte de la cathédrale de La Valette, capitale de Malte.
Le 14 juillet 1608, Le Caravage est fait chevalier de «grâce magistrale» par son protecteur mais cela ne le rend pas plus affable pour autant. Quelques semaines plus tard, il se bagarre à l'épée et au pistolet avec d'autres chevaliers.
Enfermé au fort San Angelo, il s'en évade grâce à des complices et gagne la Sicile à bord de la barque d'un pêcheur. Là, comme précédemment, il est accueilli avec bienveillance, cette fois par des religieux franciscains.
Salomé avec la tête de Saint Jean Baptiste
(Palacio Real Madrid, 1606)
Il peint pour eux Le Reniement de saint Pierre et d'autres chefs-d'oeuvre mais garde la nostalgie de Rome. Après quelques nouvelles bagarres qui le laissent défiguré, il embarque sur un bateau en direction de Rome.
Il débarque à Porto Ercole cependant que le bateau poursuit sa route avec ses effets personnels. Le peintre n'atteindra jamais Rome où il comptait gagner le pardon du pape. Il meurt le 18 juillet 1610, sans doute victime d'une fièvre maligne.