Origines de la profession
Au Moyen Âge, pour s'occuper des lépreux, des prostituées et divers « pseudo-soignants » étaient mis à contribution. Ce sont les ordres religieux féminins et masculins qui organisèrent les soins aux malades selon des critères en lien avec la charité et l'amour de Dieu. Le soin est alors une activité « sacrée » bénévole et n'a qu'une valeur culturelle. Celle ou celui qui le pratique est pris en charge par la structure religieuse. Les religieuses soignent à domicile et dans les hôpitaux. Il faudra attendre la laïcisation et l'émergence d'infirmières et d'infirmiers laïques et la Première Guerre mondiale pour que se mette en place un mouvement vers la constitution d'un nouveau groupe social.
Les écoles d’infirmières sont créées à la fin
du xixe siècle (1836 en Allemagne, 1859 en Suisse, 1860 à Londres, 1878 à Paris. En France, est créé en 1922 un « brevet de capacité d’infirmier professionnel », transformé en 1938 en « diplôme d’infirmier hospitalier » et seulement en 1951 en diplôme d’État infirmier. Il faut ensuite attendre la loi du 31 mai 1978 pour voir apparaître une définition de l’infirmier avec un rôle propre, qui sera défini dans le décret du 12 mai 1981. Nouvelle pause dans le processus de professionnalisation jusqu’à la publication des règles professionnelles le 16 février 1993. Puis encore une traversée du désert jusqu’à la loi du 21 décembre 2006 portant création d’un ordre national des infirmiers (ses décrets d’application sont parus au JO du 14 avril 2007, mais il manque encore les arrêtés pour la constitution de l’ordre infirmier).
Jusqu'au début des années 1960, le recrutement s'effectue par des catégories très diverses qui sont antagonistes : infirmiers de la Croix-Rouge, religieuses, infirmiers sortant de l'école. Après mai 1968, la profession se libérera des concepts d'obéissance, de soumission et de charité. Depuis la fin, en 1992, de la formation spécifique d'infirmier en psychiatrie, il n'existe en France qu'un seul diplôme d'infirmier le diplôme d'État d'infirmier.
Désormais, le cursus d'études en soins infirmiers se déroule dans les I.F.S.I. (institut de formation en soins infirmiers), en partenariat avec l'université et sur une durée de trois ans, ce qui permet aux étudiants d'accéder au grade de licence (BAC +3) depuis 2009. Ce partenariat avec l'université s'inscrit pleinement dans la logique d'universitarisation de la filière infirmière et toutes les spécialisations infirmières sont en cours de ré-ingénierie. C'est le cas par exemple des infirmiers anesthésistes qui ont obtenu le grade master. Les infirmiers et infirmières puéricultrices, de bloc opératoire et les cadres de santé sont eux aussi en cours de réflexion s'agissant de l'évolution de leurs formations respectives.
Époque moderne
Le rapport de l'Odis L'état social de la France - 2004 propose une grille d'analyse des infirmiers sur la base des modèles de l'intelligence sociale. Des socio-profils sont définis sur la base du croisement de leur conscience de leur mission, la perception de leur contexte et leurs pratiques personnelles. Cette grille est utile aussi bien aux infirmiers pour mieux se comprendre et mieux comprendre leur environnement social et professionnel, qu'aux dirigeants hospitaliers pour analyser et développer leurs ressources humaines et organisationnelles.
L'accès à cette profession est réglementé. L'entrée de la formation ne se fait plus par concours depuis 2019, mais par la plateforme Parcoursup selon le dossier de l'élève (notes, appréciation, parcours professionnel, lettre de motivation) .
La formation actuelle se déroule sur trois ans, qui, d'après la réforme de LMD de 2009 donne au futur infirmier le statut d'étudiant infirmier ou ESI (étudiant en soins infirmiers) et le cursus infirmier s'inscrit dans un cycle universitaire dont la :
1re année qui est répartie en deux semestres
s1 : CM 231 h + TD 234 h + S 175 h + TPG 60 h
s2 : CM 126 h + TD 183 h + S 350 h + TPG 41 h
2e Année en 2 semestres
s3 : CM 118 h + TD 177 h + S 350 h + TPG 55 h
s4 : CM 109 h + TD 187 h + S 350 h + TPG 54 h
3e année en 2 semestres
s5 : CM 116 h + TD 184 h + S 350 h + TPG 50 h
s6 : CM 50 h + TD 85 h + S 525 h + TPG 40 h
Les enseignements lors de la licence sont principalements organisées de la manière suivante :
CM (Cours Magistraux) : obligatoires ou non ;
TD (Travaux Dirigés) : présence obligatoire ;
S (Stages), basés sur 35 h/semaine dont quatre obligatoires :
Stage en lieu de vie ou service sanitaire,
Stage en Psychiatrie,
Stage en Long Séjour (LS) : stage au sein d'EHPAD (établissement d'hébergement pour personne âgée dépendante), institut spécialisé dans la gériatrie, dans les SSR (soins de suite et de réadaptation), etc.
Stage en Cours Séjour (CS), aussi appelé stage de courte durée (CD) : stage au sein d'infrastructures hospitaliers spécialisé dans des domaines tels que la médecine (cardiologie, pneumologie, etc.), la chirurgie (médecine chirurgie obstétrique, ORL, traumatologie, etc.), la pédiatrie, les urgences, etc.
TPG : temps personnel guidé.
La validation des UE (unités d'enseignement) se fait par :
présence supérieure à 80 % en cours sur les CMO, TP, TD par UE (et non plus par semestre, réforme LMD ayant lieu l'été 2011)
travaux de groupe, travaux individuels et partiels répartis en 30 ECTS par semestre donc 180 ECTS au total de la formation pour la validation du diplôme d'État (DE) ;
la validation du stage se fait par la présence supérieure à 80 % sur la totalité du stage et par la validation des compétences demandées d'avoir acquis à un certain niveau de formation comme la C3 relative à accompagner une personne dans la réalisation de ses soins quotidiens en fin de stage 2…
le DE sera attribué à toute personne présentant plus de 160 ECTS, par la validation de son portefolio (outil pédagogique qui recense la validation des 10 compétences en stage et actes infirmiers) et la validation du TFE travaux de fin d'étude qui est à élaborer dès le S3,
cela débouchant sur un grade de licence et un diplôme d'État d'infirmier. Les infirmiers diplômés d'État peuvent ensuite se spécialiser (sur concours) :
infirmier anesthésiste (durée de la spécialisation : 24 mois) ;
infirmier de bloc opératoire (durée de la spécialisation : 18 mois) ;
infirmier puériculteur (durée de la spécialisation : 12 mois) ;
cadre de santé (durée de la spécialisation : 11 mois).
L'intégration à ces cursus de spécialisation se fait sur concours d'entrée. Pour les spécialisations d'infirmier anesthésiste et d'infirmier de bloc opératoire, il est nécessaire de justifier de deux années d'expérience minimum en tant qu'infirmier. La spécialisation de puériculteur est accessible dans la continuité de l'école d'infirmiers. La spécialisation de cadre de santé est accessible après 4 années d'exercice en tant qu'infirmier.
D'autres spécialisations sont possibles mais, contrairement à celles ci-dessus, elles ne font pas l'objet d'un diplôme d'État :
infirmier hygiéniste ;
infirmier stomathérapeute ;
infirmier spécialiste clinique ;
infirmier spécialiste en plaies et cicatrisation ;
infirmier en santé publique ;
infirmier du travail (après une licence professionnelle ou un diplôme universitaire).
Les infirmiers peuvent intégrer un service de santé et de secours médical des sapeurs-pompiers (SSSM ou 3SM) et devenir infirmier sapeur-pompier (ISP). Ils peuvent aussi rejoindre le service de santé des armées.
Des possibilités de diplômes universitaires remplacent l'ancien système de spécialisation dans le cadre de l'intégration de la formation infirmière dans le cursus L.M.D. (Licence - Master - Doctorat). Il existe un Master à Paris, l’objectif du Master est de donner aux étudiants les fondamentaux en soins cliniques infirmiers leur permettant d’accéder au Master 2 spécialisé. Le Master 2 est à Marseille.
Spécialité 1 : infirmière de pratiques avancées en cancérologie en sciences infirmières ;
spécialité 2 : infirmière de pratiques avancées en gérontologie ;
spécialité 3 : infirmière coordinatrice de parcours complexes de soins.
Depuis 2011, un Master en sciences cliniques en soins infirmiers a vu le jour à la faculté de Saint Quentin en Yvelines en collaboration avec Sainte Anne formation. Il comporte trois spécialités en Master 2 :
spécialité 1 : soins palliatifs et douleur ;
spécialité 2 : psychiatrie ;
spécialité 3 : maladies chroniques et dépendance.
Les infirmiers sont fréquemment en contact direct avec la souffrance et la mort (sources de stress et de risques psychosociaux), et avec des patients porteurs de germes de maladies contagieuses, ce qui les expose plus que la moyenne au risque infectieux (risque atténué, mais non entièrement éliminé par la vaccination et le respect des bonnes pratiques de soins et de gestion des déchets médicaux à risque).
Notamment dans les services d'urgence, de nuit, en contexte de sous-effectif et/ou de dépersonnalisation de la relation au patient, en psychogériatrie ou en période de crise sanitaire (ex : Ebola, SARS, MERS, H1N1 et récemment COVID-19) ou quand les conditions de travail sont dégradées, l'épuisement professionnel (fatigue physique, nerveuse et morale) et la dépression sont également des risques liés au métier, pouvant aussi se traduire par une dégradation des relations avec le conjoint, les enfants, les amis, etc. Ces crises psychologiques peuvent aussi influencer les responsabilités personnelles et familiales des infirmières et nuire à l’exercice de leurs fonctions parentales. En janvier 2020, l'OMS a déclaré « urgence de santé publique de portée internationale (USPPI) » la pandémie de COVID-19 et reconnu que les infirmières jouent un rôle important dans la lutte contre le nouveau coronavirus. Elles ont été soumises à de grandes tensions psychologiques et à un stress au travail, ce qui justifie des mesures pour protéger leur bien-être psychologique et physique. Selon Liu et al. (2020), plus que les autres personnels médicaux, les infirmières éprouvent des niveaux plus élevés d'anxiété et de dépression dans la prise en charge des patients COVID-19 et ont à faire face à plus de difficultés dans l'accomplissement de leurs tâches professionnelles et de leurs responsabilités familiales et quotidiennes et Roy (2020) ajoute que dans ce type de contexte, elles peuvent aussi être victimes de stress post-traumatique, risques qui doivent être pris en compte par les gestionnaires des systèmes de santé et les comités de crise hospitaliers.
Ces risques contribuent au fait que beaucoup quittent prématurément la profession

En France
En France, les études en soins infirmiers se déroulent dans les I.F.S.I. (instituts de formation en soins infirmiers) et en partenariat avec l'université. Ce cursus, accessible après l'obtention du baccalauréat, permet aux étudiants d'obtenir au terme de trois années d'études le diplôme d’État d'infirmier et le grade de licence (BAC +3). La personne ainsi diplômée est dite Infirmier(ère) Diplômé(e) d'Etat (IDE). En Belgique cependant, il faut 4 ans pour devenir Bachelier(e) en soins infirmiers (en Haute École - enseignement supérieur non universitaire) et 3 ans et demi pour devenir infirmière brevetée (enseignement secondaire supérieur complémentaire). En France, l'ensemble des soins infirmiers est régi par le code de la santé publique. Le code de la santé publique permet aux infirmiers d'exercer ses missions et ses compétences dans le cadre de la prescription médicale et dans le cadre de son rôle propre, ce dernier lui attribuant une autonomie décisionnelle. Il dispose par ailleurs d'un droit de prescription bien délimité (prescription des dispositifs médicaux, des substituts nicotiniques, renouvellement des contraceptifs oraux, vaccin contre la COVID-19...). La profession d'infirmier possède son ordre professionnel (Ordre national des infirmiers) et dispose depuis novembre 2016 de son propre Code de Déontologie.
En France, il existe quatre spécialisations infirmières accessibles avec le diplôme d’État d'infirmier : infirmier anesthésiste, infirmier de bloc opératoire, infirmier puériculteur et depuis peu, infirmier en pratique avancée. Par ailleurs, l'infirmier peut également évoluer vers des fonctions d'encadrement, de management ou d'enseignement en devenant cadre de santé ou encore directeur des soins.
Le diplôme d’État d'infirmier permet au professionnel d'avoir accès à de nombreuses formations continues tout au long de sa carrière pour se spécialiser dans un domaine bien spécifique (diplôme universitaire en plaies et cicatrisation, diplôme universitaire de prise en charge de la douleur, etc.).
Une fois diplômé, le professionnel bénéficie de conditions relativement favorables en matière d'emploi. Dans les cinq premières années d'exercice, le taux de chômage est l'un des plus faibles de toutes les formations de même niveau : 0,7 %. 49 % des infirmiers nouvellement diplômés exercent au sein du service public. En début de carrière, à l'hôpital, le revenu mensuel moyen est de 1 450 euros. L'évolution de carrière est faible : avec 20 ans d'ancienneté un infirmier hospitalier culmine à 2 400 euros de salaire net. Lors du mouvement infirmier de 1988, les revendications portaient sur la reconnaissance de l’identité professionnelle et l’équivalence universitaire à « bac + 3 » et c'est ainsi qu'est née la coordination infirmière. En France, la profession d'infirmier s'articule autour de deux pôles : le rôle propre et le rôle médico-délégué.
Par ailleurs, l'infirmier dispose également depuis 2007 et dans la limite de ses compétences, d'un droit de prescription de dispositifs médicaux (sondes urinaires, sondes d'alimentation, pansements, matelas anti-escarre...), d'un droit de renouveler la prescription de contraceptifs oraux, d'administrer sous certaines conditions le vaccin antigrippal à ses patients (Arrêté du 29 août 2008) ou encore de prescrire les substituts nicotiniques.
Rôle propre
L'article R.4311-3 du code de santé publique dispose que : « relèvent du rôle propre de l'infirmier ou de l'infirmière les soins liés aux fonctions d'entretien et de continuité de la vie et visant à compenser partiellement ou totalement un manque ou une diminution d'autonomie d'une personne ou d'un groupe de personnes. Dans ce cadre, l'infirmier a compétence pour prendre les initiatives et accomplir les soins qu'il juge nécessaires »7. Le rôle propre permet ainsi à l'infirmier d'agir en totale autonomie, sans avoir besoin de prescription médicale préalable. La liste exhaustive des actes et activités relevant du rôle propre figure dans les articles R.4311-5, R.4311-5-1 et R.4311-6 du Code de la Santé Publique (actes professionnels).
Dans ce cadre, l'infirmier a une fonction d'observation et de dialogue avec le patient, pour identifier les problèmes et poser des diagnostics infirmiers, afin de pouvoir mettre en œuvre les moyens nécessaires pour une prise en charge adaptée. Il en va ainsi de la surveillance clinique des complications spécifiques à une pathologie ou un traitement mais aussi, de manière plus générale, le dépistage de situation de maltraitance ou de violence. Il assure en collaboration avec l'aide-soignant les soins d'hygiène, les soins fondamentaux, de confort et de sécurité du patient, il s'assure en outre de la bonne compréhension par le patient des explications données par le médecin mais aussi, dans le respect du secret professionnel, de l'information de sa famille ou de son entourage. Il accompagne le patient tout au long de son hospitalisation ou de ses soins pour lui permettre de maintenir le plus haut niveau d'autonomie possible, mais aussi d'intimité, et de dignité.
Rôle sur prescription
La prescription médicale est le seul lien existant entre le médecin et l'infirmier. Il est chargé de la mise en application des prescriptions médicales, de vérifier les dates de péremption8 et de la surveillance des effets secondaires ou complications qui pourraient en découler. Il n'est cependant pas qu'un simple exécutant, il doit en permanence faire le lien entre ses connaissances et les ordonnances faites par les médecins. En effet, il lui serait reproché d'avoir appliqué une prescription absurde ou dangereuse. Il doit donc savoir interpeller le praticien lorsqu'il identifie une erreur ou en tout cas une prescription atypique, afin d'en obtenir confirmation et un éclairage.
Ici aussi, une liste exhaustive des actes et activités mis en œuvre sur prescription médicale est fixée par le Code de la Santé Publique, dans les articles R.4311-7 et R.4311-9.
Cela constitue une des difficultés majeures de la profession. L'infirmier doit en effet être en mesure de comprendre toutes les prescriptions, afin de savoir identifier non seulement les erreurs mais aussi la spécificité de chacune d'entre elles, pour en déterminer les risques et donc les surveillances ad hoc. Pour cela l'infirmier peut faire appel aux connaissances acquises lors de sa formation initiale, mais aussi par le biais d'une formation professionnelle continue.
Dans certains pays, la pratique infirmière a évolué au niveau de la prescription. En effet, l’Australie, le Canada, la Finlande, l’Irlande, la Nouvelle-Zélande, la Norvège, l’Afrique du Sud, la Suède, les Pays-Bas, le Royaume-Uni et les États-Unis d’Amérique ont mis en place la prescription infirmière. Cela permet donc aux infirmières de prescrire de nombreux traitements et soins. Ce nouveau rôle a pour conséquence de diminuer le temps de consultations des médecins et d'augmenter l'autonomie des infirmières