La campagne de Lorraine désigne l'ensemble des opérations militaires qui se sont déroulées en Lorraine, pendant l'hiver 1944-1945, à la fin de la Seconde Guerre mondiale.
Pour désigner l'ensemble de ces opérations militaires dans le nord-est de la France, l'armée américaine distingue officiellement deux campagnes, la campagne "Northen France" (France du Nord) et la campagne "Rhineland" (Rhénanie). La première phase de la « Campagne de Lorraine » commence le 1er septembre 1944 et se termine le 18 décembre 1944. Cette première phase de la campagne, menée par la IIIe armée américaine, s'est terminée par la victoire des Alliés dans les secteurs de Nancy, Lunéville, Épinal, Saint-Dié, Thionville, Sarrebourg et Metz. La seconde phase de la « Campagne de Lorraine » concerne la libération des territoires mosellans encore occupés après le 18 décembre 1944. L'ensemble du territoire ne sera libéré qu'en mars 1945 par la VIIe armée américaine
Chronologie de la campagne
Sur le plan opérationnel, la « campagne de Lorraine » concerne la bataille de Metz, celle de Nancy, les combats dans les Vosges, la progression en Moselle jusqu'à la frontière franco-allemande de 1939 et les combats de janvier à mars 1945.
Elle peut se décomposer en trois étapes.
Progression vers la Moselle
Devant Metz, la IIIe armée US menaçait gravement les défenses du Reich, et en particulier la ligne Siegfried, à moins de 60 kilomètres. Espérant gagner du temps pour renforcer cette ligne fortifiée, l'OKW décida de freiner la progression de Patton en renforçant les points stratégiques de ce front. La Moselstellung, une ligne fortifiée de forts construits pendant l’annexion de 1871 dans la vallée de la Moselle entre Metz et Thionville, constituait un excellent point d'appui pour les troupes allemandes. Le secteur relevait alors de la Ire armée allemande. Le 27 août 1944, la défense de Metz fut confiée au général Walter Krause et la ville fut déclarée forteresse du Reich six jours plus tard. Pour l'OKW, arrêter Patton était une priorité. Le haut-commandement n’hésita pas à affecter de nouvelles troupes sur le secteur, comme la 17e SS-Panzergrenadier-Division
Blocage devant Metz
La IIIe armée, manquant d'essence, fut incapable de prendre rapidement à la fois Nancy et Metz, à la différence des actions qui avaient caractérisé l'avance rapide de Patton à travers la France. Après l'engagement d'Arracourt, la libération de Nancy et le combat de Mairy, la IIIe armée américaine fut stoppée par les défenses de Metz. Jusqu'au 12 octobre 1944 et le début de l'assaut sur Metz, une météo exceptionnellement pluvieuse gêna en outre les opérations militaires. Ces problèmes logistiques, combinés à la combativité des troupes allemandes et à une bonne utilisation des défenses de Metz, retarda la chute de la ville jusqu'à la fin de novembre 1944.
Progression vers la ligne Siegfried
Après la chute de Metz, la IIIe armée lança une offensive pour atteindre la ligne Siegfried. L'attaque sur la Sarre était en cours quand les Allemands lancèrent l'offensive des Ardennes. Les opérations sur la Sarre furent stoppées, la IIIe armée déplaçant ses troupes vers le nord pour contre-attaquer sur le flanc sud de l'offensive en Belgique et au Luxembourg. Ce changement d'objectif marqua la fin de la première phase de la campagne de Lorraine. Les combats reprirent avec la VIIe armée américaine du général Patch. Après l'offensive allemande de janvier 1945, très meurtrière, les combats se poursuivirent dans les secteurs de Forbach et Bitche jusqu'en mars 1945.
Forces en présence
Première phase (août 1944 - décembre 1944)
Front en Lorraine, le 5 septembre 1944
Les forces américaines sont supérieures en nombre et en équipements aux forces allemandes, malgré les problèmes logistiques dus à l'allongement des lignes de ravitaillement entre la Normandie et la Lorraine. Les forces américaines disposent surtout d'une supériorité aérienne écrasante, supériorité qui lui permettra de surmonter les difficultés rencontrées entre la Meuse et le Rhin. Le 1er septembre 1944, la ligne de front en Lorraine voit s'opposer : Forces américaines de la IIIe armée américaine
XXe corps d'armée du Major General Walton H. Walker (région de Verdun)
XIIe corps d'armée du Major General Manton S. Eddy (région de Toul-Pont-à-Mousson)
XVe corps d'armée du Major General Haislip (région de Chaumont)
Unités américaines du XXe corps d'armée :
3e groupement de cavalerie (Drury, puis Polk), XXe corps d'armée
7e Armored Division (division blindée): (Lindsey H Sylvester), XXe corps d'armée
10e Armored Division, XXe corps d'armée
5e Infantry Division, XXe corps d'armée
90e Infantry Division, XXe corps d'armée
95e Infantry Division, XXe corps d'armée
Artillery Corps, XXe corps d'armée
Unités américaines du XIIe corps d'armée :
Unités américaines du XVe corps d'armée :
Forces allemandes de la Ire armée allemande
LXXXII. Armeekorps (82e corps d'armée) du General der Artillerie Johann Sinnhuber (entre Longwy et Arnaville, face au XXe corps US)
XLVII. Panzerkorps (47e corps d'armée) du General der Panzertruppen Hans Freiherr von Funck puis Heinrich Freiherr von Lüttwitz (entre Arnaville et Lunéville, face au XIIe corps US))
Unités de blindés allemandes :
Éléments de la 21e Panzerdivision du LXVIe corps d'armée (secteur de Charmes - Epinal)
Éléments de la 11e Panzerdivision (secteur Château-Salins - Sarreguemines)
106e Panzer-Brigade Feldherrnhalle (secteur de Briey - St-Privat puis Pont-à-Mousson - Château-Salins)
111e Panzer Brigade (secteur Epinal - Lunéville - Château-Salins)
112e Panzer Brigade (secteur Epinal - Lunéville)
113e Panzer Brigade de Seckendorff (secteur Lunéville - Château-Salins)
3e Panzergrenadier Division du XLVII. Panzerkorps: 8e Panzer Grenadier Regiment et la 103e Panzer-Abteilung du 47e corps d'armée (secteur d'Arnaville - Pont-à-Mousson)
15e Panzergrenadier Division du XLVII. Panzerkorps: 115e Panzer Grenadier Regiment du 47e corps d'armée (secteur d'Arnaville - Pont-à-Mousson)
17e Panzergrenadier Division: 37e Panzer Grenadier Regiment du LXXXII. Armeekorps (secteur de Metz)
Divisions d'infanterie allemande :
19e Infanterie Division (secteur de Pont-à-Mousson)
48e Infanterie Division du LXXXII. Armeekorps (secteur de Longwy - Thionville)
416e Infanterie Division du LXXXII. Armeekorps (secteur Metz - Sarreguemines)
462e Infanterie Division du LXXXII. Armeekorps, sous les ordres de Krause (secteur de Metz)
559e Volksgrenadier Division du LXXXII. Armeekorps (secteur de Thionville - Metz)
553e Volksgrenadier Division du XLVII. Panzerkorps (secteur de Pont-à-Mousson - Nancy)
36e Volksgrenadier Division du LXXXII. Armeekorps (secteur de Saint-Avold)
Les pertes estimées à ce moment de la campagne furent de 35 000 hommes pour les Américains et entre 50 et 75 000 hommes pour les Allemands. Du 1er septembre 1944 au 18 décembre 1944, la Troisième armée de Patton a perdu 105 blindés légers, 298 blindés moyens, 1080 véhicules légers et 34 pièces d'artillerie (> 75 mm). Les dégâts infligés aux moyens de transport et à l'artillerie allemande par la Troisième armée et le XIXe Tactical Air Command ont été très largement supérieurs à ceux infligés à la Troisième armée
Deuxième phase (décembre 1944 - mars 1945)
En décembre 1944, la situation change avec le départ de la IIIe armée américaine et la reprise des combats par la VIIe armée américaine. Côté allemand, la Ire armée allemande assure toujours la défense du Reich dans ce secteur du front. La ligne de front se confond maintenant avec la Ligne Siegfried. C'est dans ces conditions qu'eut lieu l'opération Nordwind, du 1er au 25 janvier 1945, dans le nord de la Lorraine et de l'Alsace. L'objectif de l'offensive était double. L'OKW voulait d'une part soulager les troupes allemandes engagées dans la bataille des Ardennes, en mobilisant des forces alliées dans le nord-est de la France. D'autre part, il voulait détruire la 7e armée américaine qui menaçait toujours la ligne Siegfried. Le Groupe d'armées G du général Johannes Blaskowitz attaque avec 4 corps d'armée, le LXXXII. Armeekorps, le XIII. SS-Armeekorps, le LXXXX. Armeekorps et le LXXXIX. Armeekorps. Le Heeresgruppe sera renforcé par le Volks-Artillerie-Korps 410, les 7e et 20e Volks-Werfer-Brigaden, la Schwere Panzerjäger Abteilung 653, la Mörser-Batterie 428 et les Panzer-Flamm-Kompanien 352 et 353. À la fin du mois de janvier, l'offensive, stoppée par les troupes alliées, fut abandonnée. Malgré l'échec de l'offensive, les Américains n'exploitent pas la situation. Ils campent sur leurs positions en Lorraine jusqu'au déclenchement de l'opération Undertone le 15 mars 1945. La 100e Infantry Division prend Bitche le 16 mars 1945, mettant ainsi un terme à la Campagne de Lorraine
Forces américaines de la VIIe armée
XXIe corps d'armée de Milburn (région de Sarreguemines)
XVe corps d'armée de Haislip (région de Forbach - Wingen-sur-Moder)
VIe corps d'armée de Brooks (région de Saverne - Haguenau)
Forces allemandes de la Ire armée
LXXXII. Armeekorps sous les ordres du General der Infanterie Walter Hörnlein (région de Sarrelouis-Forbach)
416. Infanterie-Division
719. Infanterie-Division
347. Infanterie-Division
XIIIe SS-Armeekorps10 sous les ordres du SS-Gruppenführer Max Simon (région de Sarreguemines - Rohrbach-lès-Bitche)9
19. Infanterie-Division
36. Infanterie-Division
17. SS-Panzer-Grenadier-Division
21. SS-Panzer-Division (en réserve)
25. Panzer-Grenadier-Division (en réserve)
LXXXX. Armeekorps sous les ordres du General der Flieger Erich Petersen (région de Bitche)
257. Infanterie-Division
559. Infanterie-Division
LXXXIX. Armeekorps sous les ordres du General der Infanterie Gustav Höhne (région de Éguelshardt-Philippsbourg-Wissembourg)
361. Infanterie-Division
245. Infanterie-Division
256. Infanterie-Division
6. Gebirgs-Division (en réserve)
Alors que les actes homosexuels entre hommes avaient toujours été passibles de poursuites pénales dans la plupart des régions allemandes, l'homosexualité féminine n'était pas réprimée. Cela s'explique en grande partie par la place subalterne qu'occupaient les femmes dans l'Etat et la société allemande. A la différence des homosexuels masculins, les lesbiennes n'étaient généralement pas considérées comme une menace sociale ou politique. Même après 1933 et l'arrivée au pouvoir des nazis, la plupart des lesbiennes allemandes purent mener une vie relativement tranquille, généralement sans être inquiétées par la police.
Dans les limites du rôle subalterne qui était assigné aux femmes dans l'Allemagne impériale, les lesbiennes participèrent au mouvement d'émancipation homosexuelle qui vit le jour en Allemagne à partir des années 1890. L'adhésion des femmes à des organisations politiques fut interdite jusqu'en 1908 et découragée après la levée partielle de ces restrictions, c'est pourquoi les lesbiennes préféraient se retrouver de façon plus informelle dans des bars ou des clubs. Cette tendance coïncida avec un assouplissement de la morale sexuelle après la Première Guerre mondiale en Allemagne. La République de Weimar apporta de nouvelles libertés tant sur le plan social que sur le plan politique et pour la plupart des homosexuels des deux sexes, cette époque se caractérisa par une relative ouverture.
Berlin ainsi que d'autres grandes villes du pays devinrent des centres de la vie homosexuelle allemande. A Berlin, des clubs comme le "Dorian Gray" et le "Tanzpalaste Zauberflöte" contribuèrent à la création d'un réseau social lesbien, permettant aux lesbiennes urbaines de vivre plus librement que celles des zones rurales. L'assouplissement de la censure permit l'apparition de nombreuses publications lesbiennes, parmi lesquelles les revues Frauenliebe (Amour féminin) et Die Freundin (L'amie).
Les conservateurs politiques et les traditionnalistes critiquèrent durement cette ouverture. La résurgence du conservatisme politique dans les dernières années de la République de Weimar déboucha sur une nouvelle série de mesures répressives contre les homosexuels. En 1928, la police décida ainsi d'interdire Die Freundin et d'autres journaux lesbiens en application de la loi de protection de la jeunesse contre les publications obscènes. De nombreux conservateurs demandèrent la pénalisation des actes homosexuels. Des polémistes tels que Erhard Eberhard écrivirent des pamphlets contre les homosexuels, les féministes, les républicains et les Juifs, autant de groupes qui étaient souvent associés par les conservateurs à une conspiration visant à détruire l'Allemagne. Ces pamphlets dénonçaient notamment le mouvement pour les droits de la femme, l'accusant d'être en fait une organisation visant à convertir les femmes allemandes à l'homosexualité.
Avec l'accession au pouvoir des nazis en 1933, cette réaction conservatrice laissa la place à la répression d'Etat. Les nazis considéraient que les femmes étaient non seulement inférieures aux hommes, mais également par nature dépendantes d'eux. Par conséquent, les lesbiennes représentaient à leurs yeux une menace moindre que les homosexuels hommes. Les nazis considéraient les femmes comme des êtres passifs, en particulier dans le domaine sexuel, des êtres ayant besoin des hommes pour exister pleinement et avoir une vie sexuelle. De nombreux nazis craignaient également que l'affection sociale plus explicite entre femmes n'estompe la ligne de démarcation entre l'amitié et l'homosexualité, rendant plus difficile l'identification des "vraies" lesbiennes. Enfin, les nazis ne voyaient pas dans l'amour lesbien un problème pour l'Etat ou la société car ils considéraient que les lesbiennes pouvaient quand même remplir la fonction première de la femme allemande, à savoir être mère du plus grand nombre possible d'enfants "aryens". Chaque femme, indépendamment de sa sexualité, pouvait servir l'Etat nazi comme épouse et comme mère.
Les nazis n'en persécutèrent pas moins les lesbiennes, mais moins sévèrement que les hommes homosexuels. Peu après la nomination d'Hitler comme chancelier, la police fit systématiquement des descentes dans les bars et clubs homosexuels pour les fermer. Les lesbiennes furent ainsi obligées de se rencontrer clandestinement. Les nazis instaurèrent un climat de crainte en encourageant les descentes de police et les dénonciations contre les lesbiennes. Nombreuses furent celles qui durent cesser de fréquenter leur cercle d'amies, et dans certains cas furent forcées d'aller vivre dans d'autres villes pour retrouver l'anonymat. D'autres recherchèrent même la protection du mariage, contractant des mariages blancs avec des amis homosexuels.
Même si la police considérait les lesbiennes comme des "éléments asociaux" — autrement dit comme des personnes qui ne se conformaient pas aux normes nazies et étaient donc susceptibles d'être arrêtées et envoyées dans les camps de concentration —, peu d'entre elles furent emprisonnées au seul motif de leur sexualité. Les nazis ne rangeaient pas les lesbiennes dans la catégorie des détenus homosexuels, seuls les homosexuels hommes devaient porter le triangle rose. Bien que les arrestations de lesbiennes par la police aient été relativement rares, la menace de persécutions n'en faisait pas moins qu'il leur était dangereux de vivre leur identité au grand jour.
Les lesbiennes subirent également la politique de discrimination nazie envers les femmes en général. Considérant que la fonction première des femmes était de servir comme épouses et comme mères, les nazis leur fermèrent les carrières professionnelles les plus prestigieuses. Paradoxalement toutefois, le besoin de main-d'œuvre lié à l'effort de réarmement et à la guerre eut pour effet d'augmenter le nombre de femmes qui travaillaient, même si elles étaient reléguées en général dans des emplois mal payés. Les bas salaires accordés aux femmes affectèrent de façon particulière les lesbiennes, car elles étaient en général célibataires et ne pouvaient donc pas compter sur le salaire de leur mari. Les difficultés économiques, venant s'ajouter aux pressions sociales croissantes et à la peur d'être arrêtées, eurent pour effet de leur rendre la vie difficile sous le régime nazi, même si les actes sexuels entre femmes n'y étaient pas officiellement illégaux.
Même si de nombreuses lesbiennes souffrirent sous le Troisième Reich, elles ne firent pas l'objet de persécutions systématiques de la part des nazis. Celles qui acceptèrent de mener une vie discrète et de passer inaperçues, se mariant avec des amis ou essayant en quelque manière de se conformer en apparence aux attentes de la société, ne furent pas inquiétées et survécurent.
Le triangle noir était dans l’univers concentrationnaire nazi, le symbole utilisé pour marquer les prisonniers des camps qui étaient considérés par ce régime comme « socialement inadaptés » (Asozial en allemand). Il est à rapprocher du triangle rose, que portaient dans les camps les hommes homosexuels condamnés au titre du paragraphe 175 du code pénal allemand.
Catégorisation
Catégorie au nom très flou, elle regroupait divers sous-groupes d'individus que les nazis avaient, dans leur obsession de la catégorisation, du mal à délimiter. C’est-à-dire toutes les personnes qui, pour une raison ou une autre, se trouvaient en marge de la société ou qui menaient leur vie contrairement aux valeurs idéologiques nazies, comme les nomades, les chômeurs de longue durée, les vagabonds, les marginaux, les alcooliques, les drogués et certains malades mentaux, mais aussi les femmes homosexuelles, les prostituées, les proxénètes ou encore les femmes ayant eu recours à l'avortement.
Parmi les groupes considérés comme asociaux et « socialement inadaptés » sont nommés en premier lieu les Tsiganes.
L'appareil légal allemand ne comportait pas de délit de lesbianisme, le paragraphe 175 du code pénal concernant uniquement les relations sexuelles entre hommes. Il était donc impossible de condamner pénalement une femme pour ce motif dans ce pays. Selon l'United States Holocaust Memorial Museum, « même après l’avènement des nazis au pouvoir en 1933, la plupart des lesbiennes allemandes purent mener une vie relativement tranquille, sans être persécutées par la police ». Le mémorial fait état cependant d'un « climat de crainte ».
Il était toutefois possible de condamner ou de déporter une femme homosexuelle sous un autre prétexte. À l'inverse, le code pénal autrichien comportait un article réprimant et condamnant spécifiquement les relations entre femmes – cet article resta en vigueur à la suite de l'Anschluss, en 1938. Pendant cette période, de nombreuses femmes sont arrêtées, condamnées et détenues dans des prisons ou des camps de concentration au titre de cet article
Symbole
Le triangle noir est également évoqué dans la problématique mémorielle de la persécution de l'homosexualité féminine. Le triangle noir est devenu, pour certaines femmes, un symbole de revendication et de lutte contre les répressions et les discriminations qui leur sont infligées en raison de leur homosexualité.
Bibliographie
(de) Wolfgang Ayaß, „Asoziale“ im Nationalsozialismus. Klett-Cotta, Stuttgart 1995,
(de) Klaus Scherer, „Asozial“ im Dritten Reich. Die vergessenen Verfolgten. Votum-Verlag, Münster 1990, .
Régis Schlagdenhauffen, Les lesbiennes sont-elles des victimes du nazisme ? Analyse d'une controverse mémorielle, Revue d'Allemagne, tome 42, no 4, 2010.
Le triangle rouge est un insigne de diverses significations
Revendication ouvrière
Le triangle de cuir rouge a été adopté le 1er mai 1890 à Paris au cours des luttes ouvrières pour que le manifestant puisse se distinguer de l'homme de la rue. L'insigne symbolise la revendication ouvrière de la journée de huit heures de travail maximum, ce qui réservait 8 heures de sommeil et 8 heures de loisir. L'inscription « 1er Mai, 8 heures de travail » était cousue sur le triangle pour la manifestation
Marquage des déportés opposants et prisonniers politiques des nazis
La notion de triangle rouge renvoie lors de la Seconde Guerre mondiale (1939-1945) au système de marquage des déportés dans les camps de concentration nazis.
Au cours de ce conflit, les nazis enferment, déportent ou exterminent leurs opposants politiques directs et certains individus qui refusent ou ne correspondent pas à leurs « valeurs », comme les Juifs, Tziganes, homosexuels, Témoins de Jéhovah, etc. Pour les différencier, la SS a l'idée de leur faire porter des signes distinctifs, et dans ce système, le triangle rouge était la marque des individus politiquement opposés au Troisième Reich : communistes, résistants, objecteurs de conscience, etc. Dans certains cas, le triangle rouge pouvait être surchargé par la première lettre du pays d'origine (en allemand) du déporté : par exemple le « F » correspondait à la France (Frankreich) et le « S » à Espagne (Spanien).
Le triangle rouge aujourd'hui
Depuis la fin de la guerre, le triangle rouge est devenu le symbole de la résistance aux idées d'extrême droite, notamment en Belgique. Il est aussi le logo du réseau Ras l'front. Une épinglette représentant le triangle de tissu nazi est produite par l'ASBL « Les Territoires de la Mémoire ».
Lors de la campagne pour l'élection présidentielle française de 2017, le candidat Jean-Luc Mélenchon porte le triangle rouge, qui lui a été offert par un syndicaliste de la Fédération générale du travail de Belgique. Au lendemain du premier tour, l'écrivain Didier Daeninckx reproche à Jean-Luc Mélenchon de ne pas donner de consigne de vote entre Marine Le Pen et Emmanuel Macron en vue du second tour (le choix du vote étant laissé aux militants de sa formation lors d'une consultation interne. On notera toutefois que Jean-Luc Mélenchon a toujours indiqué qu'aucune voix d'insoumis ne devait aller à Marine Le Pen), et lui demande de ne plus arborer le triangle rouge
Le triangle rose (en allemand : Rosa Winkel) était dans l'univers concentrationnaire nazi le symbole utilisé pour « marquer » les homosexuels masculins. Pouvant être de taille supérieure aux autres triangles marquant d'autres catégories de détenus, ce symbole de persécution, de discrimination, a été repris par la communauté homosexuelle comme symbole identitaire. Act Up, entre autres, s'en est servi dans un contexte différent : celui de l'épidémie du sida.
Historique
En Allemagne nazie, la déportation des homosexuels masculins répondait non pas à une logique de persécution systématique (comme ce fut le cas notamment pour les populations juives ou roms), mais s'inscrivait dans une logique de répression des « indésirables » (asociaux, criminels…) ou des personnes considérées comme dangereuses par le régime en raison de leurs convictions (opposants politiques, Témoins de Jéhovah…). Étaient généralement déportés les homosexuels condamnés pénalement deux fois, dont une fois au moins au titre du paragraphe 175.
La déportation des lesbiennes est moins bien documentée et connue. À cela plusieurs raisons : tout d'abord, et contrairement aux homosexuels de sexe masculin, aucun texte en Allemagne nazie ne condamnait les actes sexuels entre femmes. La classification concentrationnaire ne comportait d'ailleurs pas non plus de triangle de couleur spécifique pour stigmatiser les seules lesbiennes. Les lesbiennes qui furent déportées l'ont été pour d'autres motifs, principalement la judaïté. Les cas recensés sont très rares, et on ne connait pas non plus de personnes pour lesquelles le lesbianisme fut explicitement invoqué comme unique motif de déportation. On a pu penser que les lesbiennes furent déportées comme « asociales » (catégorie comprenant entre autres les réfractaires au travail, les marginaux, des avorteuses, etc.) et donc porteuses du triangle noir. Là aussi, il n'existe pas de cas avéré répertorié à ce jour.
Les chiffres les plus fiables à ce jour ont été donnés par le sociologue allemand Rüdiger Lautmann (en), qui estime le chiffre des déportés homosexuels dans les camps de concentration entre 10 000 à 15 000, dont environ 53 % ont été tués.
Débats et reconnaissance
Le mur du souvenir au camp de concentration de Natzweiler-Struthof avec la plaque à la mémoire de la déportation homosexuelle.
La commémoration de la déportation homosexuelle est assez récente. Elle est le fait d'historiens ou encore d'associations identitaires. En France, les Flamands roses ou Le Mémorial de la Déportation Homosexuelle sont des associations qui ont impulsé cette dynamique de mémoire.
En France, une polémique éclate en 2012, quand dans le cadre d'une interview, Christian Vanneste qualifie de « légende » la déportation de personnes homosexuelles en France lors de la Seconde Guerre mondiale : « en dehors des trois départements annexés [à l'Allemagne], il n'y a pas eu de déportation homosexuelle en France ». Alors qu'il est violemment attaqué dans la presse et par plusieurs associations LGBT, l'historien Serge Klarsfeld confirme qu'il n'y a pas eu en France de politique de déportation des homosexuels, hormis en Alsace-Moselle, région allemande à cette période. Les données les plus récentes des historiens montrent en effet que l'homosexualité n'est mentionnée dans les motifs de l'arrestation que pour 62 Français emprisonnés ou déportés, sur lesquels seulement 7 ou 8 l'ont été hors du Reich ou de la zone annexée, et parmi eux, 6 déportés l'ont été sous le motif principal de déportés politiques. La justice confirme à plusieurs reprises que les propos incriminés, conformes à la vérité historique, ne peuvent pas constituer un négationnisme, et ne tombent donc pas sous le coup de sanctions pénales.
À l'heure actuelle, c'est principalement l'association Les « Oublié(e)s » de la Mémoire qui œuvre pour la connaissance et la reconnaissance de cette mémoire en France. Elle a notamment obtenu en février 2008 qu'une rue de Toulouse porte le nom de Pierre Seel, seul Français à avoir obtenu le titre de déporté à la suite de la répression de l'homosexualité par le régime nazi en Alsace annexée. Il faut cependant noter que Pierre Seel n'a jamais porté le triangle rose et n'était pas détenu en camp de concentration. Après une longue bataille personnelle, les autorités françaises l'ont assimilé à un déporté politique - comme la majorité des autres internés du camp de redressement de Schirmeck où il fut prisonnier de mai à novembre 1941. Son homosexualité avait néanmoins été l'élément déclenchant de son arrestation par les nazis. Ce sont aussi Les « Oublié(e)s » de la Mémoire qui ont soutenu le projet visant à faire apposer à Mulhouse une plaque honorant sa mémoire ainsi que celle d'autres anonymes de cette ville, arrêtés et déportés pour motif d'homosexualité. Enfin, c'est à l'initiative de cette même association que, le 25 septembre 2010, une plaque dédiée « À la mémoire des victimes de la barbarie nazie, déportées pour motif d'homosexualité » a été inaugurée en Alsace, sur le site de l'ancien camp de concentration de Natzweiler-Struthof : c'était une nouvelle étape dans la reconnaissance de la déportation pour ce motif, à partir d'un territoire français annexé par l'Allemagne nazie.
Ailleurs dans le monde, des plaques ou monuments rappellent la déportation des homosexuels par les nazis. On peut citer les villes d'Amsterdam, Tel Aviv, Berlin, Bologne, La Haye, Francfort, Cologne, Anchorage, Sydney, San Francisco et Montevideo. De même, des plaques ont été apposées sur les sites d'anciens camps de concentration, notamment : Mauthausen, Neuengamme, Dachau, Sachsenhausen, Ravensbrück et Buchenwald.
Le dernier survivant connu de cette déportation était Rudolf Brazda8 qui fut déporté près de trois ans à Buchenwald, faisant suite à deux condamnations au titre du paragraphe 175. Il est mort le 3 août 2011 à l'âge de 98 ans.
Cinématographie
Bent, de Sean Mathias, 1997.
Paragraph 175 de Rob Epstein et Jeffrey Freidmann, Ours d'or du meilleur documentaire à la Berlinale 2002.
Un amour à taire, de Christian Faure, 2005.
Il Rosa Nudo, Italie, 2013, est un travail de cinéma expérimental réalisé par Giovanni Coda inspiré de la biographie de Pierre Seel.
Musique
L'étoile rose, chanson écrite et composée par Philippe Marlu, enregistrée sur le 45 Tours du duo Bal Perdu (avec Mélécass en face B), puis reprise par Casse-Pipe (figurant sur leur premier album). L'étoile y remplace le triangle pour rappeler le fait que les « anciens combattants ont toujours refusé le statut de déportés [aux homosexuels] au même titre que les Tziganes »
L'Ange aux Cheveux Roses, chanson de Michel Berger extrait de l'album Différences (1985). Le chanteur fait référence à l'apparition des visages androgynes, qui assument leur originalité, malgré la montée de l'extrême droite et du néo-nazisme. La périphrase de « l'Ange aux cheveux roses » évoque évidemment le triangle rose.
Bibliographie
Heinz Heger (trad. Alain Chouchan, préf. Jean Le Bitoux), Les hommes au triangle rose [« Die Manner mit dem rosa Winkel »], Béziers (Hérault, H & O, 2006, 179 p.
Jean-Luc Schwab et Rudolf Brazda, Rudolf Brazda : itinéraire d'un triangle rose, Paris, Massot, 2010, 253 p.
Jean, Les oubliés de la mémoire : la persécution des homosexuels en Europe au temps du nazisme, Paris, Hachette littératures, coll. « Histoire », 2002, 304 p.
Pierre Seel et Jean Le Bitoux, Moi, Pierre Seel, déporté homosexuel, Paris, Calmann-Lévy, 1994, 198 p.
Pierre Seel et Hervé Joseph Lebrun, De Pierre et de Seel : dialogue et photographies, 2 octobre 2000, CreateSpace, 2010, 100 p.
André Sarcq, La guenille, Arles, Actes Sud, coll. « Un endroit où aller » (no 4), 1995, 35 p.
Régis Schlagdenhauffen (préf. Annette Wieviorka), Triangle rose la persécution nazie des homosexuels et sa mémoire, Paris, Éd. Autrement, coll. « Mutations / sexes en tous genres » (no 264), 2011, 308 p.
Miroslav Dragan, Milorad Vicanović-Maza, Christian Lerolle, Triangle rose, Éditions Quadrants, 2011. (Bande dessinée)
Marc Devirnoy, Les ondes de la tourmente : roman historique, Villeneuve-la-Garenne, Mémoire collective éd, 2011, 187 p.
Le Char Renault AMR 33 ou automitrailleuse de reconnaissance Renault modèle 1933 ou AMR 33 est un char léger français développé pendant l'entre-deux-guerres et utilisé pendant la Seconde Guerre mondiale.
Développé par Renault dès 1932, ce modèle a été commandé en 1933 par la cavalerie française. Un total de 123 aurait été construit jusqu'en 1935. L'AMR 33 était légèrement armée et blindée. Elle était très rapide pour l'époque, mais s'est avérée mécaniquement peu fiable, en particulier à cause de ses éléments de suspension qui étaient trop faibles. Elle a donc été remplacée par un type amélioré, l'AMR 35.
Bien que son nom puisse suggérer le contraire, l'AMR 33 n'était pas un véhicule éclaireur et la plupart du temps n'était pas équipée d'un poste de radio. L'AMR 33 était destinée à former une grande masse de chars légers, précédant les types de taille moyenne dans la bataille. En réalité, elles n'ont jamais servi en tant que tel ; lorsque suffisamment de chars moyens ont été produits pour former des divisions blindées, l'AMR 33 avait déjà été remplacée par l'AMR 35 et a été limitée aux divisions de cavalerie, puis, en 1940, pour les divisions de cavalerie légère à fournir un appui de feu aux divisions motorisées, à l'infanterie et à la cavalerie à pied. Dans la bataille de France de 1940, les AMR 33 ont été rapidement détruites. Certains véhicules ont été réquisitionnés par l'Allemagne, pendant la guerre.
Le Renault R 35 (R35 ou R-35 selon les sources) était un char d'assaut français de la Seconde Guerre mondiale.
Le char R35 possédait un blindage avant de 43 mm, ce qui était considérable pour l'époque, mais son canon de 37 mm datait de la Première Guerre mondiale et son équipage ne comptait que deux personnes (le conducteur et le chef de char, « un homme à tout faire » devant identifier et tirer sur l'objectif, approvisionner la pièce et guider le conducteur).
Il était doté d'un moteur de 85 chevaux à essence qui pouvait l'amener à une vitesse de pointe de 20 km/h et son autonomie était limitée à 140 km.
Son utilisation tactique s'est révélée déficiente ; au lieu d'engager l'ennemi en grande formation blindée, les attaques étaient menées avec un petit nombre de blindés, en accompagnement de l'infanterie.
L'armement peu puissant et un équipage insuffisant conduisirent les R-35 Renault, utilisés de manière inefficace, à subir de sérieux revers et de nombreuses pertes lors de la bataille de France en mai-juin 1940.
Les engins blindés en service à l'époque nécessitent un entretien important. Le R-35 se révélera un matériel très résistant du point de vue mécanique. Il répond correctement au travail demandé mais le train de roulement est défectueux, le R-40 réglant en grande partie ce problème.
Il nécessite un graissage tous les 300 km, une vidange du moteur toutes les 30 heures et de la boîte de vitesses tous les 2 000 km.
L'engin étant compact, ses organes mécaniques sont difficiles d'accès ce qui gêne la maintenance. Il faut 35 heures pour changer le moteur, 16 heures pour l'embrayage et 14 heures pour la boîte de vitesses
Le programme d'armement de 1926 introduit le concept de char d'accompagnement, un engin léger, peu coûteux, facile à produire, déployé en combinaison avec de l'infanterie pour lui apporter protection et appui-feu. Ce rôle revient donc au Renault FT, vétéran de la Grande guerre, auquel il convient de trouver un remplaçant. Renault propose au tournant des années 1930 un char de 14 tonnes, le D1. Mais ce dernier est finalement jugé plus adéquat dans le rôle de char de bataille, et verra de fait son armement et son blindage améliorés pour donner naissance au D2, un char moyen de 20 tonnes.
En 1933, la firme Hotchkiss prend les devants pour proposer un concept de char d'accompagnement plus léger et meilleur marché, en optant pour des sections de châssis coulées dans des moules puis boulonnées ensemble. Cette initiative pousse le Conseil Consultatif de l'Armement à émettre, en août de la même année, de nouvelles spécifications pour un engin de 6 tonnes blindé à 30 mm dans toutes les directions. Plusieurs sociétés développent des prototypes, dont APX et FCM. La firme Renault parvient à présenter avant Hotchkiss, le 20 décembre 1934, un prototype désigné Renault ZM.
Au printemps 1935, le blindage est porté à 40 mm afin de répondre aux nouvelles exigences émises en matière de protection, et le châssis est doté d'une tourelle APX R qui recevra un canon de 37 mm SA18 et une mitrailleuse coaxiale MAC 31 de 7,5 mm. Alors que les essais menés sur le ZM ne sont pas terminés et que le design définitif du futur modèle de série n'est pas encore fixé, le prototype de Renault est retenu au détriment de son principal concurrent, Hotchkiss. Une commande de 300 unités est passée le 29 avril 1935. Les premiers exemplaires de série sont livrés le 4 juin 1936, et entament une nouvelle campagne d'essais, qui révèleront les faiblesses du système de suspension. Son comportement en tout-terrain et sa capacité de franchissement ne sont pas satisfaisants. Il sera même envisagé de systèmes lance-fascine, c'est-à-dire de l'équiper de fagots de bois dans l'objectif de combler les irrégularités du terrain
Seconde Guerre mondiale
Les chars R35 sont répartis lors de la mobilisation en BCC - bataillons de chars de combat - mais reste sous le commandement de l'infanterie, empêchant la création d'une véritable force blindée à part entière. Les chars de combat seront donc éparpillés sur la ligne de front. C'est en l'occurrence cette situation qui amena à la célèbre citation : « la seule différence est que les allemands ont fait 3 paquets de 1 000 chars et nous 1 000 paquets de 3 ». Cette phrase n'est qu'une image, il ne faut en aucun cas y voir une réalité comptable. Il faut également enlever le mythe de la supériorité mécanique allemande, les franco-britannique possédant en effet plus de chars que l'armée allemande, de plus considérés de nos jours comme meilleurs que les chars allemands. Le blindage des R35 rendait ces chars invulnérables au canons antichars de 37 mm allemands au-delà de 300 m.
La peur des mines
C'est à la suite de l'offensive sans envergure en Sarre que l'état-major français prend conscience du danger représenté par les mines allemandes. Un projet de char démineur est alors lancé en urgence en avril 1940. Quatre solutions différentes montées sur le châssis du R35 - dont un dispositif à rouleaux largables, un à masses percutantes, un rouleau à disques multiples et un dérivé de soc de charrue - sont présentées sur différents types de terrain du 2 au 5 avril. Ces terrains sont minés avec des Tellermines fabriquées par la France mais très semblables aux mines antichars allemandes à l'exception près du remplacement de l'explosif par de la fumigérite. La solution retenue est le châssis de R35 équipé d'un rouleau à disques multiples proposé par AMX. Cette solution n'est pas idéale mais l'urgence de la situation pousse l'état-major à en commander 130 exemplaires. À noter qu'aucun ne pourra être fabriqué avant l'armistice
Conception et production
origine : concours du char de 6 t du 2 août 1933
essais du prototype : août 1934
adoption par l'armée française : 25 juin 1936
années de construction : 1936-1940
réception par l'armée française : à compter de mai 1936
production totale (au 1er mai 1940) : environ 1 460 chars, et au 22 juin : 1 540.
statut industriel en 1939 : programme de guerre (type R40 avec suspension AMX à compter de mai 1940)
constructeurs : Renault pour les organes mécaniques et AMX pour le montage
Les nazis avaient développé un système de symboles d'étiquetage des prisonniers permettant d'identifier la cause de leur incarcération. Dans certains camps, le traitement variait selon le marquage porté par les détenus.
- Marquage pour les prisonniers politiques de la compagnie disciplinaire.
- Marquage pour les Juifs asociaux.
- Marquage pour les apatrides juifs.
- Marquage pour les prisonniers politiques juifs.
- Marquage pour les Juifs. (Étoile de David)
- Marquage pour les Juifs « honte de la race »
- Marquage pour les prisonniers « asociaux », tels que les Tsiganes, les vagabonds, les alcooliques, les prostituées, les lesbiennes, les handicapés, les malades mentaux
- Marquage pour les apatrides (notamment, les républicains espagnols déchus de leur nationalité par Franco).
- Marquage pour les criminels de droit commun.
- Marquage pour les prisonniers formés au travail.
- Marquage pour les homosexuels allemands. Ce signe n'a cependant pas été systématiquement utilisé : il n'apparaît qu'en 1937, après la vague la plus massive d'internements des homosexuels, et une partie des internés au titre du paragraphe 175 pénalisant l'homosexualité masculine se sont vu attribuer un autre marquage (triangle bleu, rouge ou noir) en fonction de leur « parcours » judiciaire
- Marquage pour les Témoins de Jéhovah.
- Marquage pour les prisonniers politiques allemands, les résistants et les autres prisonniers politiques, en grande partie les communistes. La première lettre du nom allemand du pays d'origine était ajoutée.
- Marquage pour les prisonniers politiques français.
- Marquage pour les prisonniers politiques espagnols.
- Marquage pour les Tsiganes dans certains camps.
Le Lebensborn e. V. (Lebensborn eingetragener Verein, en français « Association enregistrée Lebensborn ») était une association de l'Allemagne nationale-socialiste, patronnée par l'État et gérée par la SS, dont le but était d'accélérer la création et le développement d'une race aryenne parfaitement pure et dominante. Le terme « Lebensborn » est un néologisme formé à partir de « Leben » (« vie ») et « Born » (« fontaine », en allemand ancien). Le journaliste, écrivain et cinéaste Marc Hillel l'a traduit en français par « Fontaines de vie ».
Le programme de création des Lebensborns vit le jour à l'initiative de Heinrich Himmler le 12 décembre 1935 dans le cadre de la politique d'eugénisme et de promotion des naissances. Il s'agissait à l'origine de foyers et de crèches, les pères, en grande majorité des SS, étaient invités à concevoir au moins quatre enfants avec leur épouse légitime. Par ailleurs, au dire du journaliste d'investigation Boris Thiolay, auteur d'un ouvrage sur le sujet, la SS transforma également certains de ces centres en lieux de rencontre plus ou moins furtive où des femmes considérées comme « aryennes » pouvaient concevoir des enfants avec des SS inconnus, puis accoucher anonymement dans le plus grand secret et remettre leur nouveau-né à la SS en vue de constituer l'élite du futur « Empire de mille ans ». Durant la Seconde Guerre mondiale, plusieurs dizaines de milliers d'enfants, dont les caractéristiques physiques correspondaient au « type aryen », furent arrachés à leurs parents dans les pays conquis pour être placés dans ces centres.
L'existence de ces maternités et de ces crèches fut longtemps considérée comme une simple légende donnant lieu à une grande puissance fantasmatique, certains y voyant des haras humains, d'autres des bordels SS, jusqu'à ce que Georg Lilienthal (de), un jeune historien spécialiste de la médecine SS, y consacre sa thèse en 1985
Histoire
En vertu du concept de « pureté raciale » inscrit dans les principes fondateurs du nazisme et du rétablissement de la polygamie germanique, Heinrich Himmler ouvrit le premier établissement à Steinhöring, près d'Ebersberg, en Haute-Bavière, le 15 août 1936, inaugurant la maternité Hochland, maison-mère du Lebensborn. Ce centre comportait trente lits pour les mères et cinquante-cinq berceaux pour les enfants à naître. Leur nombre fut doublé en 1940.
Le service du Lebensborn était placé sous l'égide du général SS Sollmann. La « pureté de la race aryenne » répondait à plusieurs critères, qui déterminaient l'appartenance à une typologie aryenne qui comportait plusieurs niveaux de « pureté ». Le niveau le plus élevé était celui des pays nordiques. Chacun des niveaux de pureté était supposé indiquer les qualités de ses membres : attachement à la patrie, attachement au Führer, attachement au pays.
Avant la Seconde Guerre mondiale, une dizaine d'établissements furent créés en Allemagne — 8 000 enfants y naquirent —, puis deux en Autriche. Après le déclenchement de la guerre, la fascination des nazis pour la « race aryenne nordique » les conduisit à ouvrir une dizaine de centres en Norvège recueillant des krigsbarn, « enfants de la guerre ». On estime à entre 9 000 et 12 000 le nombre d'enfants nés dans ces centres selon certaines sources
D'autres centres furent ouverts en Pologne, au Danemark, en Belgique, au Luxembourg, aux Pays-Bas et en France. Ces centres étaient de taille et de nature variable, du simple bureau administratif à l'institution. Au total furent dénombrés :
dix centres en Allemagne,
de neuf à quinze centres en Norvège,
trois centres en Autriche,
trois centres en Pologne,
deux centres au Danemark,
un centre aux Pays-Bas,
un centre en Belgique (voir section « La Maternité des Ardennes » ci-après),
un centre au Luxembourg (situé à Bofferdange, section de la commune de Lorentzweiler),
un centre en France (de février à août 1944, Bois Larris à Lamorlaye, commune du département de l'Oise).
Rôle
L'objectif affiché du Lebensborn était de permettre à des femmes, mariées ou célibataires, de « race pure », de donner naissance à des enfants dont les pères appartenaient à l'élite raciale, notamment des membres de la SS. Beaucoup de ces Lebensborns étaient consacrés à l'éducation des enfants nés de l'union de soldats allemands et de femmes des pays occupés.
Le Lebensborn se chargeait de la germanisation d'orphelins issus de ces couples mixtes, mais aussi par la suite d'enfants arrachés à leurs parents en provenance de Norvège, de Pologne et de Tchécoslovaquie. Ainsi, plus de 200 000 enfants furent emmenés en Allemagne et confiés à des familles allemandes sélectionnées.
En Pologne, plusieurs dizaines de milliers d'enfants dits « racialement valables » (parmi les 2 millions d'enfants soustraits à leurs parents) auraient été littéralement enlevés pour être germanisés. La proportion d'enfants arrachés à leurs véritables parents aurait ainsi atteint un cinquième des effectifs des Lebensborns
La maternité des Ardennes
De novembre 1942 à septembre 1944 fut ouverte l'institution du château de Wégimont, aujourd'hui domaine provincial de Wégimont dans la province de Liège, en Belgique. Les Allemands la baptisèrent « maternité des Ardennes ».
Celle-ci accueillit des femmes belges convaincues par les thèses nazies, mais aussi quelques Néerlandaises et Françaises du Nord. La contribution masculine était assurée par des soldats des régiments belges nazis, comme la Légion Wallonie, ou leurs homologues flamands, ainsi que des SS stationnés en Belgique
Il reste peu de documents sur cette affaire et la population locale évoque rarement ces faits. Il semble néanmoins que ce centre ne fonctionna jamais véritablement ainsi que les Allemands l'auraient voulu, notamment du fait des réticences du personnel belge qui y travaillait Les habitants d'Olne, questionnés sur le Lebensborn de Wégimont, distant seulement de trois kilomètres, ignoraient tout de l'institution et ce n'est que longtemps après la guerre qu'ils apprirent ce dont il s'agissait
Femmes allemandes portant des bébés dans un Lebensborn durant la Seconde Guerre mondiale© Keystone-France / Contributeur/Getty Images
Nazisme : comment ils ont formaté la jeunesse
Par Léo Pajon - Publié le 13/06/2016 à 12h00 - Mis à jour le 13/06/2016 Pour asseoir leur "Reich de mille ans", les nazis ont sélectionné et mis au pas des millions d’enfants. Un tri impitoyable pour ceux qui ne répondaient pas à leurs critères.
Mitraillette au poing, les soldats de la 86e division d’infanterie de l’armée américaine progressent dans les rues de Steinhöring, un gros bourg bavarois situé à une quarantaine de kilomètres à l’est de Munich. Ce 3 mai 1945, la présence de SS y a été signalée. Par petits commandos, les GI quadrillent le village, fouillent les habitations une à une. Un détachement d’une dizaine d’hommes pénètre dans une imposante bâtisse de trois étages, à la façade blanche et aux balcons abondamment fleuris. Les fantassins envahissent les couloirs. L’un d’eux pousse la porte d’une chambre… et se fige : la pièce est remplie de très jeunes enfants, abandonnés à eux-mêmes – certains sont nus. Tous semblent affamés et désorientés. Les GI ne sont pas au bout de leurs surprises. La vaste demeure rassemble plus de 300 bambins, des nouveau-nés, jusqu’à des garçons et des fillettes de 6 ans. Au milieu de ce chaos errent quelques mères hagardes, des femmes enceintes et une petite équipe d’infirmières. Les Américains ne le savent pas encore, mais ils viennent de pénétrer dans la première Lebensborn (littéralement «Source de vie») conçue par les SS. Dans ces pouponnières, imaginées par le Reichsführer Heinrich Himmler en 1936, étaient élevés des enfants de «type aryen», amenés à constituer l’élite du futur empire nazi.
Au XIXe siècle, les cadres politiques prussiens faisaient déjà des jeunes une priorité, comme le rappelle l’historien Gilbert Krebs dans son ouvrage Etat et société sous le IIIe Reich (éd. Presses Sorbonne Nouvelle). Ministres et responsables politiques de l’époque répétaient en substance ce slogan : «Qui tient la jeunesse maîtrise l’avenir. » La vision des nazis est beaucoup plus radicale. Il ne s’agit pas uniquement de former les petites têtes blondes pour assurer le développement du pays. Ils veulent aussi sélectionner des enfants de «race pure» qui deviendront plus tard les cadres dirigeants du Reich ou ses loyaux serviteurs.
Hitler veut une jeunesse allemande «dure comme l’acier»
Ce projet apparaît dans les écrits d’Adolf Hitler. Dans Mein Kampf, rédigé vers 1924, le leader nationaliste souhaite que le régime totalitaire qu’il appelle de ses vœux intervienne sur les natalités en opérant un tri parmi les géniteurs. Cet Etat raciste, écrit le futur Führer, «devra prendre soin que seul l’individu sain procrée des enfants.» Pour lui, une personne handicapée n’a pas de valeur sociale et doit donc s’abstenir d’avoir une descendance. Dans son Zweites Buch (Deuxième livre), écrit en 1928 mais non publié de son vivant, Hitler est encore plus précis. Il y célèbre la cité guerrière grecque de Sparte, où les bébés difformes, malades ou de mauvaise constitution étaient jetés dans un ravin. Cette pratique, estime-t-il, est «beaucoup plus décente et mille fois plus humaine que de préserver, comme nous le faisons aujourd’hui, des sujets pathologiques.»
Le leader nazi pose aussi les bases – rudimentaires – de ce que serait l’éducation idéale sous sa dictature. Il préconise de se débarrasser d’un système hérité des Lumières, qui met au cœur de l’enseignement des valeurs intellectuelles et humanistes, et qui fait de l’enfance une période protégée. Il insiste sur la nécessité de consacrer plus de temps au sport : «Il ne devrait pas se passer de jour où le jeune homme ne se livre, au moins une heure matin et soir, à des exercices physiques.» La préférence d’Hitler va à la boxe qui, selon lui, «exige des décisions rapides comme l’éclair et donne au corps la souplesse et la trempe de l’acier.» Les sports de combat ont aussi l’avantage de donner aux jeunes Allemands une inébranlable confiance en eux-mêmes. Car le système d’éducation et de culture, selon Hitler, doit les convaincre qu’ils sont supérieurs aux autres peuples. Les enfants et les adolescents ont un autre intérêt aux yeux des nazis. Ils composent une masse manipulable, prompte à s’enflammer pour les idéaux radicaux. Ils sont aussi plus facilement mobilisables que leurs parents pour renverser l’ordre existant.
Ce projet dément et meurtrier de sélection et d’endoctrinement des plus jeunes va être mis en pratique quelques mois après l’arrivée au pouvoir des nazis. Le 14 juillet 1933, une loi entérine le programme eugéniste du nouveau gouvernement pour favoriser la naissance d’enfants au sang «pur». «La jeunesse allemande doit être rapide comme un lévrier, solide comme du cuir et dure comme de l’acier», annonce Hitler dans un discours la même année. Les nazis stérilisent massivement des patients atteints de maladies héréditaires ou congénitales. Une étude menée par l’historienne allemande Gisela Bock évoque quelque 400 000 stérilisations en Allemagne et dans ses territoires annexés entre 1934 et 1945.
C’est aussi dans ce cadre qu’apparaissent les Lebensborn. Le journaliste d’investigation Boris Thiolay a consacré un ouvrage au sujet (Lebensborn : la fabrique des enfants parfaits, éditions Flammarion), dans lequel il retrace le destin d’enfants nés dans des institutions belge et française. Car les Lebensborn ont essaimé en Europe. Dix établissements sont créés en Allemagne et neuf en Norvège, le berceau supposé de la «race nordique», présentant des cheveux blonds, yeux bleus, nez droit, crâne allongé (dolichocéphalie)… Trois sont également installés en Pologne, deux en Autriche, un au Danemark, un aux Pays-Bas, un en Belgique ou encore un au Luxembourg. C’est un manoir de l’Oise, à Lamorlay, en forêt de Chantilly, qui abrita l’unique Lebensborn créée par les nazis en France (le site existe toujours et est devenu un centre de la Croix-Rouge en 1980). «En incitant des êtres soi-disant supérieurs à procréer, explique Boris Thiolay, les nazis pensent fonder une Herrenrasse, une “race des seigneurs”, amenée à régner sur le monde dans un Reich, qui, pensent-ils, doit durer 1 000 ans.»
Des moyens importants sont investis dans cet abominable projet. Etablis dans de luxueuses bâtisses à la campagne, les Lebensborn ne manquent jamais de nourriture, même au plus fort de la guerre. Des patrouilles de SS les surveillent en permanence. Et les jeunes mères sont suivies par le meilleur personnel médical. Les parents candidats à l’inscription de leur future progéniture doivent passer devant des examinateurs qui s’assurent de la «pureté» de leurs origines et pratiquent sur eux des tests anthropométriques pour s’assurer qu’ils correspondent aux canons de beauté aryens.
Concrètement, les pères, en grande majorité des SS, sont invités à concevoir au moins quatre enfants avec leur épouse légitime. Ils ont aussi reçu l’ordre secret, émanant d’Himmler, de faire des enfants hors mariage avec d’autres femmes. «Les habitants voisins des Lebensborn voyaient défiler des berlines et en sortir des officiers avec des jeunes femmes, poursuit Boris Thiolay. Il y avait de quoi fantasmer ! La plupart des gens pensaient qu’il s’agissait de sortes de bordels pour les cadres du régime. Ce n’était évidemment pas du tout le cas.»
Quelque 20 000 enfants grandissent dans ces maternités haut de gamme. Les bébés qui ont le malheur de présenter un handicap subissent ce que les nazis appellent un «traitement spécial» : ils sont euthanasiés. Cette politique d’extermination ne concerne pas que les Lebensborn. Au total, de 1938 à la fin de la guerre, ce sont entre 5 000 et 8 000 nourrissons présentant des malformations qui sont envoyés dans des Kinderfachabteilung, des unités pédiatriques spéciales. Le personnel leur administre alors des médicaments toxiques à haute dose (phénobarbital, scopolamine…) ou les prive de nourriture pour leur ôter la vie.
Un autre volet de cette politique de sélection se met en place au début des années 1940. Sous la houlette d’Himmler, une nouvelle fois, des enfants correspondant aux critères raciaux nazis sont kidnappés dans les régions occupées de l’Est. En Russie, en Biélorussie, en Ukraine, en Tchécoslovaquie, en Yougoslavie, et surtout en Pologne, des centaines de milliers de jeunes, principalement âgés de 2 à 6 ans, mais aussi jusqu’à des adolescents de 16 ans, sont généralement d’abord repérés par des infirmières dévouées au régime. Accompagnées de SS, elles arrachent les enfants à leurs familles puis les conduisent en Autriche ou en Allemagne. Là, les plus «purs» sont adoptés, les autres envoyés au front ou contraints au travail forcé. On estime aujourd’hui qu’en ce qui concerne la Pologne, où plus de 200 000 jeunes ont été raflés, moins de 15 % ont retrouvé leurs véritables parents à la fin de la guerre.
95 % des adolescents passent par les Jeunesses hitlériennes
Les enfants qui échappent à la machine à trier meurtrière des nazis sont ensuite encadrés pour devenir de dévoués serviteurs du Reich. Comme le note l’historien Gilbert Krebs, l’endoctrinement supplante l’enseignement de l’école, le catéchisme des Eglises et l’éducation des parents. Ses principes rigoureux sont anti-intellectuels et donnent la priorité au développement des capacités physiques. Ils prônent la foi dans le Führer et placent les intérêts de la communauté au-dessus de celle de l’individu.
L’embrigadement des jeunes couvre toute l’enfance et l’adolescence. Il a pour but de former de bonnes mères de famille et des troupes serviles. Les fillettes, à partir de 6 ans et jusqu’à 10 ans, peuvent adhérer aux Küken («Poussins»). Entre 10 et 18 ans, elles s’inscrivent dans deux autres organisations, le Jungmädelbund (Ligue des jeunes filles) puis le Bund Deutscher Mädel (Ligue des jeunes Allemandes). En ce qui concerne les garçons, ils entrent dans les Hitlerjugend (Jeunesses hitlériennes) dès l’âge de 10 ans pour une durée de huit ans. «Ensuite, nous ne les rendons surtout pas à leurs géniteurs, explique Hitler lors d’un discours devant les dignitaires nazis, en 1938. Nous les faisons entrer dans le Parti, le Front du Travail, la SA ou la SS.» Ce traitement doit transformer les jeunes en nationaux-socialistes convaincus. Pour ceux qui conserveraient en eux des «traces de conscience de classe ou de morgue sociale», Hitler prévoit que «la Wehrmacht se chargera pendant deux ans de les en guérir. Ils ne retrouveront plus la liberté de toute leur vie».
Alors qu’elles comptaient 100 000 membres en 1932, les Jeunesses hitlériennes rassemblent 8,7 millions d’adolescents et de jeunes adultes au début de 1939, soit près de 95 % des garçons allemands. En uniformes – chemises brunes, culottes noires –, les Hitlerjugend apprennent la discipline, font beaucoup de sport et subissent l’endoctrinement de leurs moniteurs. L’hygiène corporelle et le sens du sacrifice occupent une place prépondérante dans cette idéologie. Le premier des «dix commandements de la santé» qu’ils doivent respecter est rédigé ainsi : «Ton corps appartient à la nation, ton devoir est de veiller sur toi-même.» Défilés au pas, parfois avec des armes, pratique du vol en planeur, de la motocyclette, du tir... Aucun des ces jeunes ne se rendit compte que tout cela était une préparation à la vie militaire.
Au cours de la guerre, les jeunes sont chargés de missions de plus en plus nombreuses et dangereuses. D’abord limitée à la propagande, l’aide aux moissons ou à des collectes diverses (argent, vêtements…), leur action s’étend bientôt à l’encadrement des plus petits envoyés à la campagne pour les protéger des bombardements, l’aide à la défense passive ou à la défense anti-aérienne. A partir de 1944, ils participent au Volkssturm («Tempête du peuple»), les milices populaires qui aident la Wehrmacht à défendre le Reich. Ces nouvelles recrues fanatisées ont un impact faible sur l’issue des combats, mais surprennent par leur folle témérité. Près de 4 500 Hitlerjugend (sur les 5 000 jeunes défenseurs engagés) perdent la vie en tentant de repousser l’attaque des Alliés à l’ouest de Berlin. Leur sacrifice ne fait que retarder l’inévitable encerclement de la ville.
Fascinés, embrigadés, sacrifiés, les enfants allemands disparaissent par milliers lors de la Seconde Guerre mondiale. Certains périssent dans les décombres des villes bombardées, d’autre meurent de froid et de faim lors de leur fuite sur les routes de l’exode. Les survivants perdent parfois leur maison, des membres de leur famille… Ceux que Hitler, dans sa folie, imaginait dominer le monde finirent souvent traumatisés, incapables même de témoigner de l’expérience terrible qu’ils avaient vécue.