Un jour.... une histoire....

Un jour... une histoire... 02 mai 1832

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Un jour... une histoire... 02 mai 1832

 

2 mai 1832

Révélation de George Sand
 
 
 
 

Le 2 mai 1832, la critique littéraire salue la sortie à Paris d'un roman intitulé Indiana. Tiré à 750 exemplaires, il dresse la critique de la vie bourgeoise sous le règne de Louis-Philippe 1er. Son auteur est un inconnu du nom de George Sand.

 

Derrière ce pseudonyme se cache une jeune femme de 28 ans au parcours déjà rocambolesque.

 

 

Bâtardise

 

L'auteur est née le 1er juillet 1804 à Paris sous le nom d'Amantine Aurore Lucile Dupin. Ses parents sont un officier, Maurice Dupin de Francueil, et la fille d'un pauvre cabaretier, Sophie Laborde.

 

Son père a eu un fils naturel d'une servante et sa mère une fille d'un père inconnu. Ensemble, ils ont eu plusieurs enfants morts en bas âge et c'est seulement quelques mois avant la naissance de la future George Sand qu'ils ont décidé de se marier enfin.

 

Notons pour la petite histoire que la mère de Maurice Dupin, Marie-Aurore de Saxe, était elle-même une fille illégitime du maréchal Maurice de Saxe, le vainqueur de Fontenoy (1745), et d'une maîtresse de passage, l'actrice Marie Rinteau.

 

Le maréchal de Saxe, qui n'avait ni reconnu ni légué quoi que ce soit à la seule descendante qu'on lui connaisse (malgré d'innombrables maîtresses), étaitlui-même le fils naturel de l'Électeur de Saxe, l'illustre Frédéric-Auguste 1er Le Fort et de la comtesse Aurore de Königsmarck.

 

 

 

George Sand (1804-1876)

 

 

Passion(s)
 
 

Nantie de cette curieuse ascendance, l'enfant est baptisée sous les prénoms Amandine Aurore Lucie, à consonance plus catholique que ses prénoms d'origine (Amantine Aurore Lucile). Elle-même se fait plus simplement appeler Aurore. Elle passe une enfance heureuse au château de Nohant (Indre), château que sa grand-mère Aurore de Saxe avait acquis en 1793 après son veuvage d'avec le fermier général Dupin de Francueil.

 

Elle épouse à 18 ans le baron Dudevant dont elle se séparera en 1836 après une relation orageuse et de multiples liaisons. Un an après le mariage, en 1823, naît un garçon, Maurice. Cinq ans plus tard naît une fille, Solange, dont le père est supposé être Stéphane Ajasson de Grandsagne, jeune noble des environs de Nohant.

 

Le pseudonyme George Sand sous lequel Aurore accède à la célébrité littéraire rappelle par ailleurs Jules Sandeau, l'amant avec lequel elle a commencé à écrire.

 

George Sand écrit vite. Quatre jours lui suffisent par exemple pour écrire La Mare au diable, l'un de ses plus célèbres ouvrages. Mais elle prend ensuite son temps pour relire et corriger son texte.

 

Passionnée et volontiers exubérante, révolutionnaire et républicaine dans l'âme, elle mène en marge de ses travaux d'écriture maints combats politiques et des engagements féministes avant l'heure. Dès 1830, elle fait campagne à Nohant, dans l'Indre, en faveur d'un candidat républicain. Elle s'intéresse au catholicisme social de Lamennais sous l'influence de son ami Franz Liszt. Et en 1848, elle fonde une revue au titre éloquent et promis à un long avenir : La Cause du peuple !

 

Elle ne craint pas non plus de scandaliser les bonnes âmes en s'affichant en tenue d'homme ou avec un cigare. Cela ne l'empêche pas de bénéficier de l'amitié dévouée de Balzac, Flaubert, Hugo ou encore du peintre Delacroix.

 

 

Une ribambelle d'amants

 

Débordante de vitalité, George Sand eût fait le bonheur de notre presse à scandales du fait de ses nombreuses liaisons plus ou moins retentissantes avec des amants dont les plus célèbres sont Mérimée (décevant aux dires de la romancière), Musset et Chopin, sans parler de la comédienne Marie Dorval, la «chère aimée».

 

En juin 1833, auréolée du succès d'Indiana, elle rencontre chez son éditeur le poète romantique Alfred de Musset. En janvier 1834, le couple va filer le parfait amour à Venise. Mais les deux amants tombent malades, se disputent et George Sand séduit... leur médecin, Pietro Pagello. Musset s'en retourne seul à Paris. George Sand le rejoint en août 1834 et renoue avec lui pour quelques mois.

 

Musset présente Franz Liszt à George Sand et en 1837, la romancière accueille à Nohant le musicien et son amante, Marie d'Agoult. Liszt présente Chopin à son amie.

 

L'année suivante, en 1838, débute l'idylle de George Sand et Frédéric Chopin... La ribambelle ne s'interrompt qu'en 1850, avec le graveur Alexandre Manceau, dernier amant en titre de George Sand.

 

 

Après les journées révolutionnaires de 1848, George Sand se retire dans son château de Nohant, au coeur de cette campagne berrichonne qui lui a fourni la matière de ses meilleurs romans :La Mare au diable (1846), François le Champi(1847) ou encore La petite Fadette (1849).

 

Après le coup d'État de Louis-Napoléon Bonaparte et la fondation du Second Empire, en 1852, elle se tient à l'écart du pouvoir mais conserve l'estime de l'empereur, lui-même connu pour sa fibre sociale.

 

La «dame de Nohant» meurt dans la sérénité le 8 juin 1876. Passionnée, provocatrice, elle a créé un personnage inédit : la femme libérée.

Un jour... une histoire... 1er mai 1886

Publié à 08:48 par acoeuretacris Tags : un jour 1er mai
Un jour... une histoire... 1er mai 1886

 

 

1er mai 1886

Journée de 8 heures et Fête du Travail
 
 
 

Le 1er mai 1886, la pression syndicale permet à environ 200.000 travailleurs américains d'obtenir la journée de huit heures.

 

Le souvenir de cette journée amène les Européens, quelques années plus tard, à instituer une «journée internationale des travailleurs» ou «Fête des travailleurs». Cette journée est aujourd'hui plus volontiers appelée «Fête du Travail», bien que l'expression prête à confusion...

 

 

Une revendication nationale
 

Au cours du IVe congrès de l'American Federation of Labor, en 1884, les principaux syndicats ouvriers des États-Unis s'étaient donné deux ans pour imposer aux patrons une limitation de la journée de travail à huit heures. Ils avaient choisi de débuter leur action un 1er mai parce que beaucoup d'entreprises américaines entamaient ce jour-là leur année comptable.

 

Arrive le 1er mai 1886. Beaucoup de travailleurs obtiennent immédiatement satisfaction de leur employeur. Mais d'autres, moins chanceux, au nombre d'environ 340.000, doivent faire grève pour forcer leur employeur à céder.

 

Le 3 mai, une manifestation fait trois morts parmi les grévistes de la société McCormick Harvester, à Chicago. Une marche de protestation a lieu le lendemain et dans la soirée, tandis que la manifestation se disperse à Haymarket Square, il ne reste plus que 200 manifestants face à autant de policiers. C'est alors qu'une bombe explose devant les forces de l'ordre. Elle fait une quinzaine de morts dans les rangs de la police.

 

 

 

La révolte de Haymarket Square

(Chicago, 4 mai 1886)

 

 

Trois syndicalistes anarchistes sont jugés et condamnés à la prison à perpétuité. Cinq autres sont pendus le 11 novembre 1886 malgré des preuves incertaines.

 

 

Stèle vengeresse

 

Sur une stèle du cimetière de Waldheim, à Chicago, sont inscrites les dernières paroles de l'un des condamnés, Augustin Spies : «Le jour viendra où notre silence sera plus puissant que les voix que vous étranglez aujourd'hui»

 

 

Manifester pour la journée de 8 heures
 
 

Trois ans après le drame de Chicago, la IIe Internationale socialiste réunit à Paris son deuxième congrès. Celui-ci se tient au 42, rue Rochechouart, salle des Fantaisies parisiennes, pendant l'Exposition universelle qui commémore le centenaire de la Révolution française.

 

Les congressistes se donnent pour objectif la journée de huit heures (soit 48 heures hebdomadaires, le dimanche seul étant chômé). Jusque-là, il est habituel de travailler dix ou douze heures par jour (en 1848, en France, un décret réduisant à 10 heures la journée de travail n'a pas résisté plus de quelques mois à la pression patronale).

 

Le 20 juin 1889, sur une proposition de Raymond Lavigne, ils décident qu'il sera «organisé une grande manifestation à date fixe de manière que dans tous les pays et dans toutes les villes à la fois, le même jour convenu, les travailleurs mettent les pouvoirs publics en demeure de réduire légalement à huit heures la journée de travail et d'appliquer les autres résolutions du congrès. Attendu qu'une semblable manifestation a été déjà décidée pour le 1er mai 1890 par l'AFL, dans son congrès de décembre 1888 tenu à Saint Louis, cette date est adoptée pour la manifestation.»

 

Le 1er mai 1891, à Fourmies, une petite ville du nord de la France, la manifestation rituelle tourne au drame. La troupe équipée des nouveaux fusils Lebel et Chassepot tire à bout portant sur la foule pacifique des ouvriers. Elle fait dix morts dont 8 de moins de 21 ans. L'une des victimes, l'ouvrière Marie Blondeau, habillée de blanc et les bras couverts de fleurs, devient le symbole de cette journée.

 

 

 

1er mai, lithographie de Grandjouan pour l'Assiette au Beurre

(1906)

 

 

Les manifestations rituelles du 1er mai ne se cantonnent plus dès lors à la revendication de la journée de 8 heures. Elles deviennent l'occasion de revendications plus diverses. La Russie soviétique, sous l'autorité de Lénine, décide en 1920 de faire du 1er mai une journée chômée. Cette initiative est peu à peu imitée par d'autres pays... L'Allemagne nazie va encore plus loin ! Hitler, pour se rallier le monde ouvrier, fait, dès 1933, du 1er mai une journée chômée et payée. La France l'imitera sous l'Occupation, en... 1941.

 

 

Le 1er mai en France

 

En France, dès 1890, les manifestants du 1er mai ont pris l'habitude de défiler en portant à la boutonnière un triangle rouge. Celui-ci symbolise la division de la journée en trois parties égales : travail, sommeil, loisirs.

 

Le triangle est quelques années plus tard remplacé par la fleur d'églantine. En 1907, à Paris, le muguet, symbole du printemps en Île-de-France, remplace cette dernière. Le brin de muguet est porté à la boutonnière avec un ruban rouge.

 

Le 23 avril 1919, le Sénat français ratifie la journée de huit heures et fait du 1er mai suivant, à titre exceptionnel, une journée chômée.

 

Les manifestations du 1er mai 1936 prennent une résonance particulière car elles surviennent deux jours avant le deuxième tour des élections législatives qui vont consacrer la victoire du Front populaire et porter à la tête du gouvernement français le leader socialiste Léon Blum.

 

 

 

Les sydicats français réunis pour le défilé

du 1er mai 1936 (archives nationales)

 

 

C'est pendant l'occupation allemande, le 24 avril 1941, que le 1er mai est officiellement désigné comme la Fête du Travail et de la Concorde sociale et devient chômé. Cette mesure est destinée à rallier les ouvriers au régime de Vichy. Son initiative revient à René Belin. Il s'agit d'un ancien dirigeant de l'aile socialiste de la CGT (Confédération Générale du Travail) qui est devenu secrétaire d'État au Travail dans le gouvernement du maréchal Pétain.

 

À cette occasion, la radio officielle ne manque pas de préciser que le 1er mai coïncide avec la fête du saint patron du Maréchal, Saint Philippe (aujourd'hui, ce dernier est fêté le 3 mai) !

 

En avril 1947, la mesure est reprise par le gouvernement issu de la Libération qui fait du 1er mai un jour férié et payé... mais pas pour autant une fête légale. Autrement dit, le 1er mai n'est toujours pas désigné officiellement comme Fête du Travail. Cette appellation n'est que coutumière.....

 
 

Un jour... une histoire... 30 avril 1598

Publié à 11:06 par acoeuretacris Tags : un jour 30 avril
Un jour... une histoire... 30 avril 1598

 

Henri IV

 

Arrivé le soir du 13 avril 1598 à Nantes, le roi Henri IV signe le 30 avril suivant un ensemble de textes connus dans l'Histoire sous le nom d'«Édit de Nantes».

 

Ce texte marque la fin des guerres de religion entre catholiques et protestants français. Il vise à «l'établissement d'une bonne paix et tranquille repos» selon les propres mots du roi. C'est la première fois qu'est officialisée dans un même État, en Europe, la coexistence de protestants et de catholiques.

 

Un Édit de pacification et de tolérance
 

L'Édit de Nantes demeure, dans la mémoire collective, le symbole de la tolérance entre des confessions autrefois rivales et désormais prêtes à accepter la religion de l'adversaire... Déjà dans les années précédentes, au plus fort des guerres de religion, des municipalités françaises avaient conclu des «édits de pacification» entre leurs concitoyens des deux confessions ; c'est ainsi que l'on pouvait vivre en paix dans ces villes tandis que l'on s'étripait dans les villes voisines !

 

Certains historiens ont placé l'Édit de Nantes aux origines de la laïcité française. S'il met un terme aux guerres civiles qui ont ensanglanté la France pendant près de trois décennies, cet édit de pacification ne fait qu'établir une coexistence entre la majorité catholique et la minorité protestante, disciple de Jean Calvin. Dans le préambule de l'Édit, le roi Henri IV défend d'ailleurs l'idée d'unité religieuse du royaume : encore impossible, elle est remise à plus tard.

 

Ce qu'on appelle l'Édit de Nantes est en fait un ensemble de quatre textes : l'Édit général (signé le 30 avril 1598), les articles secrets et particuliers (30 avril ou 2 mai 1598), le brevet des pasteurs (3 avril 1598) et le brevet des garnisons (30 avril 1598).

 

À ces textes, il faut ajouter l'Édit signé par Henri IV à Fontainebleau le 15 avril 1599, pour le royaume de Navarre (royaume en fait limité au Béarn), car Henri IV, ne l'oublions pas, est roi de Navarre avant que d'être roi de France. Les deux couronnes ne seront réunies que sous le règne de son fils Louis XIII. En attendant, il faut une législation spécifique pour le Béarn, où, à la différence de la France, les protestants tiennent le haut du pavé depuis les mesures prises en leur faveur par Jeanne d'Albret, mère d'Henri IV.

 

Tous ces textes sont le fruit d'une longue négociation entre les protestants et leur ancien chef, Henri IV... Ils sont signés en catimini et tenus secrets pendant de longs mois, jusqu'à leur ratification par les Parlements, tant est grande la crainte du roi qu'ils ne soient rejetés par l'opinion.

 

Celle-ci, sur le moment, est beaucoup plus sensible à la conclusion de la paix avec les Espagnols, par le traité de Vervins.

 

 

De la guerre à la coexistence pacifique
 
 

Henri IV, successeur légitime de son cousin Henri III, a abjuré définitivement la religion réformée en 1593 et ainsi pu obtenir de se faire sacrer à Chartres en 1594. Mais l'année suivante, il a dû déclarer la guerre aux Espagnols, qui, après avoir soutenu les Ligueurs, catholiques intransigeants, avaient pris goût à l'occupation de la France.

 

Soucieux de consolider la paix, à l'intérieur comme à l'extérieur, le roi envoie dans un premier temps auprès du pape Clément VIII deux plénipotentiaires ecclésiastiques, Jacques du Perron et l'abbé d'Ossat, pour le convaincre de donner son absolution au roi en échange de l'acceptation par celui-ci des décisions du concile de Trente et du rétablissement du catholicisme dans ses droits au Béarn.

 

Henri IV négocie par ailleurs avec les représentants des protestants, assemblés à Saumur au printemps 1596, les termes d'un nouveau et définitif Édit de tolérance, après ceux dont les guerres de religion ont été émaillés.

 

Le roi, qui a appris à connaître et estimer les réformés du temps où il combattait à leurs côtés, comprend mieux que quiconque la vanité de l'unité religieuse et la nécessité de poser les bases d'une nouvelle coexistence confessionnelle sous l'égide d'un même roi.

 

Mais voilà que le 11 mars 1597, les Espagnols s'emparent par traîtrise de la ville d'Amiens, dont les bourgeois avaient refusé la protection de l'armée royale. Face au danger, Henri IV demande du renfort aux réformés. Ces derniers se font désirer, croyant par là obtenir des conditions plus favorables à la conclusion du futur édit. Le roi ne cède pas. Les réformés comprennent le danger que leur attitude fait courir au royaume et se résignent à signer enfin un accord.

 

 

Les termes de l'Édit
 
 

L'Édit général, avec 92 articles généraux et 56 articles particuliers, dits «secrets», est en premier lieu un texte de pacification. Celle-ci passe par une amnistie générale, autrement dit l'oubli de toutes les offenses (le mot amnistie dérive d'une racine grecque qui signifie oubli).

 

L'article I énonce : «Premièrement, que la mémoire de toutes choses passées d'une part et d'autre, depuis le commencement du mois de mars 1585 jusqu'à notre avènement à la couronne et durant les autres troubles précédents et à leur occasion, demeurera éteinte et assoupie, comme de chose non advenue. Et ne sera loisible ni permis à nos procureurs généraux, ni autres personnes quelconques, publiques ni privées, en quelque temps, ni pour quelque occasion que ce soit, en faire mention, procès ou poursuite en aucunes cours ou juridictions que ce soit».

 

Concernant la coexistence religieuse entre catholiques et protestants, l'Édit reprend pour l'essentiel des dispositions contenues dans les édits de paix de religion antérieurs : édit d'Amboise, 1563 ; édit de Saint-Germain, 1570 ; édit de Poitiers, 1577.

 

Il rétablit le culte catholique dans l'ensemble du royaume. Il octroie par ailleurs six «libertés» à la minorité protestante, laquelle représente moins de 10% des vingt millions de Français :
- selon certaines conditions, des lieux de culte particuliers dans une ville par bailliage (sauf Paris),
- l'admission des protestants dans les écoles,
- le droit pour eux d'exercer des fonctions publiques,
- le droit de tenir des assemblées,
- le droit de tenir une centaine de places de sûreté, dont La Rochelle, pendant huit ans,
- des tribunaux spéciaux où sont jugées en appel les affaires où les protestants sont partie prenante : les Chambres de l'Édit ou Chambres mi-parties.

 

 

Des textes difficiles à passer
 
 

Reste le plus difficile : faire enregistrer les textes par les parlementaires, farouchement opposés aux protestants. Le roi reçoit les parlementaires et déclare les recevoir non en roi mais «vêtu comme un père de famille, en pourpoint, pour parler à ses enfants». Derrière la bonhomie se cache la fermeté car il ajoute : «Je couperai la racine à toutes factions, à toutes prédications séditieuses, et je ferai raccourcir tous ceux qui les susciteront !» ...

 

Le 25 février 1599, l'Édit général et les articles particuliers sont donc enregistrés par le Parlement de Paris. Celui-ci modifie sur plusieurs points le texte qui peut ainsi entrer en application. Les sept parlements de province enregistrent l'Édit dans les mois qui suivent.

 

Mal accepté par ses contemporains et bien que solennellement déclaré «perpétuel et irrévocable», l'Édit de Nantes sera progressivement écorné tout au long du siècle suivant, jusqu'à sa révocation complète par le roi Louis XIV, petit-fils d'Henri IV, en 1685, moins d'un siècle après sa signature. L'Édit de Nantes sera révoqué par son petit-fils, Louis XIV, moins d'un siècle plus tard, pour le plus grand dommage du royaume...

 

 

 

 

 

 

Un jour... une histoire... 29 avril 1945

Publié à 09:34 par acoeuretacris Tags : un jour 29 avril
Un jour... une histoire... 29 avril 1945

 

 

29 avril 1945

 
Les Françaises votent pour la première fois
 
 
 
Le 29 avril 1945, tandis que la guerre contre l'Allemagne touche à sa fin, les élections municipales donnent l'occasion aux Françaises de voter pour la première fois de leur Histoire.
 
 
 
L'exception française
 

Le vote des Françaises résulte d'une ordonnance du 21 avril 1944 prise par le Gouvernement provisoire du général de Gaulle, à Alger : «Les femmes sont électrices et éligibles dans les mêmes conditions que les hommes». Il n'était que temps... En effet, les Françaises sont parmi les dernières femmes du monde occidental à acquérir le droit de voter et celui de se faire élire.

 

Aux premiers temps de la démocratie française, au XIXe siècle, le droit de vote était réservé aux propriétaires de sexe masculin. On considérait que les femmes, les domestiques et les pauvres, du fait de leur dépendance économique, n'étaient pas en situation d'exercer un choix libre.

 

Les militaires étaient aussi exclus du droit de vote mais pour d'autres raisons (on ne souhaitait pas qu'ils prennent parti dans les luttes politiques) et l'armée avait gagné le surnom de«Grande Muette». C'est seulement le 17 août 1945 - soit quelques mois après les femmes - qu'ils ont obtenu le droit de vote...

 

 

Des«suffragettes» très combatives
 

On rencontre les premiers votes féminins de l'Histoire en Corse, au temps où l'île était sous souveraineté gênoise : les femmes votent en effet au XVIe siècle dans les assemblées locales et leur droit est confirmé par la Constitution de Pascal Paoli, en 1755,... puis aboli après l'annexion française.

 

Les premières femmes à obtenir pour de bon le droit de vote sont les habitantes du territoire américain du Wyoming, en 1869, suivies par les Néo-Zélandaises en 1893, les Australiennes en 1902, les Finlandaises en 1906, enfin les Norvégiennes en 1913.

 

 

 

Les Suffragettes à Londres

(Le Petit Journal 1908)

 

 

En Grande-Bretagne, les revendications féministes prennent un tour spectaculaire avec la création du mouvement des «suffragettes» par Emeline Pankhurst (45 ans), en 1903. Le 21 juin 1908, elles sont 250.000 à manifester à Hyde Park, à Londres.

 

Les manifestations se font violentes. C'est ainsi qu'une certaine Emily Wilding Davison se jette sous les sabots du cheval du roi George V au derby d'Epson, en 1913, et meurt de ses blessures !

 

Il faudra attendre la fin de la Première Guerre mondiale pour que les «suffragettes» obtiennent enfin une demi-victoire, le 28 décembre 1918, avec l'octroi du droit de vote aux femmes de plus de... 30 ans.

 

C'est le début d'un mouvement d'émancipation mondial enclenché par le rôle actif qu'ont joué les femmes dans la vie sociale pendant la Grande Guerre. Comme les hommes combattaient dans les tranchées, les femmes ont dû les remplacer aux champs, dans les usines et dans les bureaux. Elles ont témoigné aussi de leur patriotisme comme infirmières et aides-soignantes dans les hôpitaux de campagne. Tout cela mérite récompense...

 

Le 15 juillet 1919, le pape Benoît XV lui-même se prononce en faveur du droit de vote des femmes. Aux États-Unis, la ratification du XIXe Amendement à la Constitution, le 26 août 1920, étend le droit de vote à l'ensemble des femmes du pays. Les Turques elles-mêmes obtiennent le droit de vote en 1934 à l'initiative du dictateur Moustafa Kémal (ce qui ne prête guère à conséquence dans ce régime très autoritaire !)

 

 

Lente émancipation des Françaises
 

En France, après la Grande Guerre, la Chambre des députés vote à plusieurs reprises en faveur du vote féminin. Mais ses propositions sont six fois repoussées par le Sénat. Les motifs des opposants tiennent à des préjugés personnels et à la crainte que les femmes ne renforcent le camp conservateur. La gauche radicale et socialiste craint en particulier que les femmes ne renforcent le camp clérical et ne se soumettent aux injonctions des curés !

 

Cependant, les Françaises n'attendent pas le droit de vote pour accéder à des fonctions gouvernementales. Trois d'entre elles obtiennent un sous-secrétariat d'État dans le gouvernement constitué par Léon Blum, en 1936, après la victoire du Front Populaire : Cécile Brunschvicg, Suzanne Lacore, Irène Joliot-Curie.

 

Il faut attendre les soubresauts de la Libération de 1945 pour qu'enfin les Françaises obtiennent le droit de vote. Des femmes sont dès lors régulièrement présentes dans les gouvernements. Mais la féminisation de la représentation parlementaire se fait attendre. Le nombre d'élues à l'Assemblée nationale stagne aux environs de 30 (5% des députés) jusqu'en 1997, date à laquelle il passe à 59 grâce à un effort particulier du Parti socialiste.

 

 

Masculinité etcumuldes mandats

 

La raison principale du faible nombre de femmes parmi les élus, en France, tient à la professionnalisation des fonctions politiques, elle-même liée au cumul des mandats.

 

Le cumul des mandats permet à un petit nombre de personnes d'accaparer les fonctions politiques. Il tend de lui-même à se renforcer. Entre deux candidats dont l'un a déjà un ou plusieurs mandats électoraux et l'autre n'en a aucun, les électeurs sont enclins à choisir le premier car ils le connaissent mieux et sont sensibles à son influence politique et à ses réseaux de débiteurs.

 

Les «cumulards» se justifient en arguant qu'en joignant un mandat national (député ou sénateur) à un mandat local (maire ou conseiller général), ils ont plus de poids pour défendre les intérêts de leurs administrés auprès de l'administration centrale. Argument oiseux, car un élu qui cumule un mandat de maire et un mandat de député est moins disponible que si l'une et l'autre mandat relèvent d'un élu à plein temps, le second faisant avancer à Paris les dossiers du premier.

 

Pour cumuler les mandats et avoir une chance raisonnable de faire une belle carrière, il faut se lancer tôt et se consacrer à plein à la politique. À ce jeu, les hommes sont avantagés dans la mesure où ils ne sont pas tiraillés par les contraintes familiales. C'est pourquoi on compte parmi les élus français une écrasante majorité d'hommes avec seulement un très léger infléchissement de tendance en dépit des lois en faveur de la féminisation de la classe politique.

 

Les futurs «cumulards» doivent être libérés des contingences matérielles pour prendre le risque de se consacrer à plein temps à la politique. Aussi appartiennent-ils en nette majorité à la haute fonction publique. C'est que les fonctionnaires français bénéficient en effet du privilège de retrouver leur emploi au terme de leur campagne électorale, en cas d'échec, ou au terme de leur mandat.

 

La classe politique française se singularise donc par sa masculinité et son appartenance majoritaire à la haute fonction publique, très loin d'une quelconque parité sociale. Lors de sa conférence de presse du 14 juillet 1997, le président de la République alors en fonction, Jacques Chirac, a relevé cette singularité. «L'élu français type est un haut fonctionnaire mâle !» a-t-il constaté à cette occasion. «Et issu de la bourgeoisie blanche,» aurait-il pu ajouter.

 

Ce n'est pas une fatalité... La démocratie britannique interdit aux fonctionnaires de se présenter à des élections pour éviter tout conflit d'intêrêt entre les fonctions de représentation du peuple et l'appartenance à un corps au service de ce même peuple. Les fonctionnaires britanniques désireux de se faire élire doivent au préalable sacrifier leur garantie d'emploi !

Un jour... une histoire... 28 avril 1789

Publié à 10:22 par acoeuretacris Tags : un jour 28 avril
Un jour... une histoire... 28 avril 1789

 

28 avril 1789

Mutinerie à bord du Bounty
 
 
 

Le 28 avril 1789, une mutinerie se produit à bord du Bounty.

 

Ainsi débute l'une des plus romanesques tragédies de la marine. Elle illustre la dureté avec laquelle l'Angleterre de cette époque exerce son règne sur les mers («Britain rules over seas»).

 

 

Une mission pacifique
 

Deux ans plus tôt, en décembre 1787, le navire a quitté le port anglais de Spithead avec quarante-quatre hommes d'équipage en vue de gagner Tahiti, dans le Pacifique, puis les Antilles. Il s'agit d'un navire charbonnier à trois mâts, gréé carré, la Bethya, qui a été réaménagé et rebaptisé Bounty (Générosité) pour l'occasion.

 

L'objectif du voyage est de cueillir des plants d'arbres à pain à Tahiti et de les amener à la Jamaïque, où les Britanniques comptent les cultiver en vue de nourrir à bon compte les esclaves des plantations.

 

La mission a été confiée à un lieutenant de 33 ans, William Bligh. Il a déjà effectué plusieurs voyages transatlantiques et participé au deuxième voyage du grand explorateur James Cook. Pour les besoins de la mission, le capitaine (c'est son titre à bord) recrute des marins volontaires de préférence à des repris de justice ou à des hommes raflés de force dans les ports selon une triste pratique (la «presse») alors courante dans la marine britannique.

 

 

Premiers nuages
 

Le quatrième officier, Fletcher Christian, a déjà accompli trois traversées avec William Bligh. Celui-ci, peu après le départ, offrira à son ami la fonction de quartier-maître (son second sur le navire) en ignorant la nomination officielle par l'Amirauté de John Fryer. Ce sera la première cause de dissension à bord...

 

Le navire prend la route de l'ouest en vue de contourner le continent américain par le cap Horn. Mais plusieurs semaines de tempêtes convainquent le capitaine de changer d'itinéraire et il prend la route du cap de Bonne Espérance, au sud de l'Afrique. Là, nouveau désappointement, l'absence de vent oblige l'équipage à remorquer le navire à la rame !

 

Les dures conditions de la traversée et les manquements à la discipline conduisent le capitaine à brutaliser l'équipage. Enfin, après dix mois de dure traversée, le Bounty arrive à Tahiti où il est chaleureusement accueilli par les habitants et surtout les habitantes.

 

 

Le charme fatal des Tahitiennes
 

Le départ de Tahiti, après quelques semaines passées à cueillir les fameux plants d'arbres à pain, n'en est que plus pénible. Sitôt en haute mer, William Bligh restaure la discipline habituelle aux navires britanniques. Mais celle-ci n'est plus guère supportée par les marins volontaires. Elle suscite la révolte d'une partie d'entre eux, avec le soutien de Fletcher Christian, nostalgique des belles Tahitiennes. C'est ainsi que le capitaine Bligh et dix-huit fidèles sont abandonnés sur une chaloupe de 5 mètres en plein océan Pacifique.

 

 

 

Les Mutins du Bounty (tableau de Robert Dodd)

 

 

Au prix d'une très sévère discipline et grâce à un rationnement extrême de la nourriture, ils réussissent à rejoindre l'île de Timor après un périple de 5.000 kilomètres. William Bligh n'a rien de plus pressé que d'affréter une goélette et de regagner Londres en vue de réclamer un châtiment exemplaire pour les mutins.

 

Ces derniers, quant à eux, se sont empressés de jeter à la mer les plants d'arbres à pain et sont revenus à Tahiti. Ils ont aidé le roi Pomaré 1er à asseoir son autorité sur l'île.

 

Pour échapper à la traque de la justice anglaise, quelques mutins, dont Fletcher Christian, décident de quitter l'île paradisiaque. Ils réembarquent sur le Bounty en compagnie de belles Tahitiennes, de six Tahitiens et d'un serviteur noir.

 

Leprojet des mutins est de refaire leur vie sur Pitcairn, un îlot inhabité et improprement situé sur les cartes, donc difficile à trouver sauf par hasard. Fletcher Christian a soin de faire brûler le navire sitôt sur l'île.

 

Mais l'idylle tourne au cauchemar. Les mutins de Pitcairn massacrent les Tahitiens mâles puis, l'un d'eux ayant fabriqué un alambic de fortune, ils se mettent à l'alcool et commencent à s'entretuer.

 

 

Épilogue
 

Lorsque des Américains redécouvrent l'îlot de Pitcairn en 1808 il ne reste qu'un survivant. Celui-ci, surnommé John Adams, a eu la satisfaction de combler sa solitude au milieu d'une dizaine de Tahitiennes et d'une vingtaine d'enfants !

 

Ayant récupéré une Bible et un livre de prières dans les débris du Bounty, il a entrepris consciencieusement d'éduquer la jeune génération. L'ancien mutin est mort en 1829 à 65 ans en chef respecté de la petite communauté métisse. Celle-ci compte encore quelques dizaines de personnes qui vivent pieusement et cultivent le souvenir du Bounty.

 

Quant aux mutins restés à Tahiti, ils ont été retrouvés par le capitaine Edwards, commandant la frégate Pandora, accompagné par Thomas Hayward, qui avait été enseigne sur le Bounty et les connaissait donc. Livrés à la justice anglaise par le roi Pomaré, ils passent à Londres devant une cour martiale présidée par Lord Hood. Trois seulement sont condamnés à mort et pendus... Le récit de leur tragédie émeut l'opinion britannique et oblige l'Amirauté à humaniser la discipline à bord de ses navires. Grâce à eux, les marins seront désormais plus humainement traités.

 

William Bligh, promu du grade de lieutenant à celui de capitaine, sera surnommé «Bounty's Bastard». Nommé gouverneur des Nouvelles-Galles du Sud, en Australie, il tente de remettre dans le droit chemin le New South Wales Corp, un corps militaire qui s'est arrogé le monopole des boissons alcoolisées. Il s'ensuit la «rébellion du rhum» en 1808. Son chef, le Major George Johnston, destitue Bligh et le fait emprisonner ! Mais il est lui-même arrêté et condamné par un tribunal londonien deux ans plus tard. Libéré, Bligh s'établit à Londres où il meurt d'un cancer en 1817, avec le grade de vice-amiral.

 

 

Entre fiction et réalité
 

Mark Twain a écrit une nouvelle sur la tragédie du Bounty et les studios d'Hollywood n'ont pas manqué de s'en emparer pour brosser en 1935 une épopée romanesque à souhait, Les mutinés du Bounty, avec Clark Gable dans le rôle de Fletcher Christian.

 

D'autres films ont suivi avec, dans le rôle du héros, Marlon Brando (l'acteur épousa sa partenaire tahitienne et s'établit sur un îlot voisin !), et plus tard Mel Gibson.

 

 

Un jour... une histoire... 27 avril 1848

Publié à 13:56 par acoeuretacris Tags : un jour 27 avril
Un jour... une histoire... 27 avril 1848

27 avril 1848

Abolition de l'esclavage en France
 
 

Le 27 avril 1848, le gouvernement de la République française publie les décrets d'abolition immédiate de l'esclavage dans les colonies françaises. Sont concernées essentiellement les vieilles colonies héritées de l'Ancien Régime, dont l'économie encore sur les grandes plantations sucrières.

 

 
Le long parcours des abolitionnistes

En 1537, peu après son introduction dans les colonies des Amériques, l'esclavage avait été condamné par le pape Paul III mais les injonctions pontificales n'avaient pas eu plus de succès chez les planteurs d'Amérique qu'elles n'en ont aujourd'hui en matière de morale. C'est qu'à la Renaissance, la papauté ne pouvait déjà plus, comme au Moyen Âge, faire fléchir les dirigeants chrétiens en agitant la menace de l'excommunication.

Sous la Révolution française, les députés de la Convention abolissent l'esclavage une première fois pour calmer la révolte des esclaves dans les colonies des Antilles et empêcher l'Angleterre de s'en emparer. Mais Napoléon Bonaparte revient sur cette mesure et légalise l'esclavage le 20 mai 1802.

Les Anglais, sous la pression des sociétés philanthropiques d'inspiration chrétienne, se montrent plus résolus. Ils abolissent la traite atlantique en 1807 et l'esclavage en 1833.

Les libéraux et philanthropes français sont tout aussi disposés que leurs homologues d'outre-Manche à éradiquer cette institution indigne mais ils en sont régulièrement empêchés par les groupes de pression des riches planteurs. Il est significatif qu'à Mayotte, sultanat musulman tombé sous protectorat français en 1841 et où n'existe aucun planteur européen, le gouvernement abolisse l'esclavage dès le 9 décembre 1846, sous le règne de Louis-Philippe 1er.

 

Enfin, la victoire

Il faut attendre la Révolution de Février pour qu'enfin, dans l'effervescence républicaine, les abolitionnistes puissent contourner l'opposition des planteurs.

Ledécret d'abolition est rédigé par Victor Schoelcher (44 ans). Ce riche philanthrope libéral et républicain, héritier d'une fabrique de porcelaine, est sous-secrétaire d'État à la Marine dans le gouvernement provisoire. Il a souhaité ce modeste ministère parce que de lui dépendent les colonies et, donc, la législation relative aux esclaves !

 

Victor Schoelcher (musée de Fessenheim)

 

Victor Schoelcher lui-même est sous la tutelle du ministre de la Marine, le grand physicien et astronome François Arago (62 ans). Celui-ci appartient à l'extrême-gauche républicaine et dès 1840 s'est fait l'écho à la Chambre des députés des revendications sociales. Il soutient à fond son subordonné dans son combat pour l'abolition.

Tirant parti des bonnes dispositions des députés dans les premiers mois qui suivent l'avènement de la République, Victor Schoelcher et François Arago libèrent par décret 250.000 esclaves noirs ou métis aux Antilles, à la Réunion comme à Saint-Louis du Sénégal.

 

Une application précipitée

Le décret, qui prévoit l'abolition dans un délai de deux mois, arrive dans les colonies quatre à cinq semaines plus tard. Mais sur place, les gouvernants des colonies et les planteurs ont en général pris les devants. La plupart des Blancs ont compris depuis longtemps que l'abolition était devenue inéluctable et s'y étaient préparés en multipliant les affranchissements..

À leur manière, les esclaves ont aussi accéléré le mouvement. À Saint-Pierre, en Martinique, une insurrection a éclaté le 22 mai 1848, avant qu'ait été connue l'existence du décret. Même chose en Guadeloupe où le gouverneur abolit l'esclavage dès le 27 mai 1848 pour éteindre l'insurrection.

 

Abolition de l'esclavage à la Réunion le 20 décembre 1848

(musée des arts africains - paris)

 

En Guyane, la liberté entre en application le 10 août 1848 conformément au délai prévu. À la Réunion, plus éloignée de la métropole, il prend officiellement effet le 20 décembre 1848 mais dans les faits, à cette date, l'esclavage n'existe déjà plus dans l'île.

Les planteurs reçoivent une indemnité forfaitaire conformément au décret de Schoelcher. Ils tentent aussi de reprendre la main en sanctionnant le «vagabondage» dans les îles à sucre : c'est une façon d'obliger les anciens esclaves à souscrire des contrats de travail.

Ils contournent aussi l'interdiction de l'esclavage en faisant venir des «travailleurs sous contrat» de la Chine du sud ou du Tamil Nadu (Inde du Sud). Il s'agit d'un nouvel esclavage qui ne dit pas son nom comme celui que pratiquent à grande échelle en ce début du XXIe siècle les émirats du Golfe Persique. Les descendants de ces travailleurs représentent aujourd'hui un quart ou un tiers de la population de la Réunion et 15% environ de celle de la Guadeloupe.

L'abolition dément les sombres prophéties des planteurs. Elle se traduit par un regain de l'activité économique dans les colonies.

Victor Schoelcher va militer avec moins de succès contre la peine de mort. Exilé en Angleterre sous le Second Empire, il est élu député de la Martinique à l'avènement de la République puis devient sénateur inamovible jusqu'à sa mort, le 26 décembre 1893.

Un jour... une histoire... 26 avril 1248

Publié à 09:48 par acoeuretacris Tags : un jour 26 avril
Un jour... une histoire... 26 avril 1248

 

La Sainte Chapelle

 

26 avril 1248

 
Consécration de la Sainte-Chapelle
 
 
Le 26 avril 1248 a lieu la consécration de la Sainte-Chapelle dans l'île de la Cité, à Paris. Le monument, chef-d'oeuvre de l'art gothique, a été construit en six ans sur ordre du roi Louis IX, futur Saint Louis, pour abriter ce que l'on pensait être la couronne d'épines portée par le Christ lors de la crucifixion.
 
 
 
 
Une affaire de prestige
 
 
 
En 1239, le roi de France avait déboursé 135.000 livres pour acheter à son cousin, l'empereur latin de Byzance, Baudouin II, cette couronne d'épines et d'autres reliques de la Passion du Christ (le manteau, la pierre du Sépulcre, la Sainte Lance, le Saint Sang....!).

 

Il vaut la peine de comparer ce montant au coût de construction de la Sainte-Chapelle, de l'ordre de 40.000 livres seulement, pour se rendre compte de ce que pouvait signifier le commerce des reliques au Moyen Âge.

 

 

 

Chapelle haute de la Sainte Chapelle

 

 

Pour le futur Saint Louis, l'achat des précieuses reliques et la construction de la Sainte-Chapelle sont certes affaire de piété. Elles sont aussi le fruit d'une habile politique visant à faire de Paris une cité comparable, en prestige et en sainteté, à Rome et Jérusalem.

 

Le succès de l'opération rejaillit sur la dynastie capétienne qui apparaît comme le fer de lance de la chrétienté occidentale. Il rejaillit aussi sur la France, le plus riche et le plus peuplé des États européens de cette époque, également le plus développé dans les domaines intellectuels et artistiques.

 

 

Chefd'oeuvre de l'art gothique

 

Véritable châsse de lumière, la Sainte-Chapelle marque l'apogée de l'art gothique, ou art français, né un siècle plus tôt avec la consécration de Saint-Denis par Suger.

 

 

 

La salle basse de la sainte Chapelle

 

 

La Sainte-Chapelle est construite selon le plan traditionnel des chapelles castrales, avec une nef (ou vaisseau) unique. Elle comporte deux niveaux : une chapelle basse affectée à la domesticité et dédiée à la Vierge, et surtout une chapelle haute illuminée par de hauts vitraux colorés, réservée au roi et à sa cour et dédiée à la Sainte Croix.

 

Dans cette chapelle haute, une châsse de trois mètres de haut réalisée par les meilleurs orfèvres parisiens abritait les reliques acquises par le roi.

 

 

L'architecte Pierre de Montreuil

 

Selon un manuscrit du XVIe siècle conservé à la Bibliothèque Nationale, l'architecte de la Sainte-Chapelle serait le célèbre Pierre de Montreuil. Né à Montreuil-sous-bois, à l'est de la capitale, il aurait débuté comme maçon à Saint-Denis avant de devenir le maître d'oeuvre de la Sainte-Chapelle et surtout de Notre-Dame de Paris.

 

Il a l'insigne honneur d'être enterré avec sa femme dans une chapelle de la cathédrale dédiée à la Vierge. Ce fait atteste que les églises médiévales étaient l'oeuvre de grands architectes reconnus et honorés comme il se doit par leurs concitoyens.

 

 

Heurs et malheurs

 

Sous la Révolution jacobine, en 1793-1794, la Sainte-Chapelle est gravement endommagée : disparition du jubé, des stalles et du mobilier, destruction de la flèche, martelage des tympans sculptés au-dessus des portes, dispersion des reliques... Une restauration à grande échelle est heureusement entreprise en 1846, avec le retour en vogue de l'art gothique. En 1871, pendant la Semaine sanglante qui met fin à l'insurrection de la Commune, l'édifice échappe de peu à l'incendie qui ravage le Palais de Justice voisin.

 

 

La flèche de la Sainte Chapelle

 

 

La Sainte-Chapelle se trouve aujourd'hui enclose dans le Palais de Justice, reconstruit après la Commune en style néogothique. Si une partie des reliques ont disparu, la couronne d'épines a heureusement subsisté ; elle est à l'abri dans le Trésor de Notre-Dame de Paris et, une fois par an, revient à la Sainte-Chapelle pour y être vénérée.

 

 

Saintes Chapelles à la chaîne

 

Dix édifices sur le modèle de la Sainte-Chapelle de l'île de la Cité ont été construits en France jusqu'au XVIe siècle, soit par un roi (c'est le cas de Charles V à Vincennes), soit des princes de sang royal, Valois ou Bourbons.

 

Les uns et les autres souhaitaient de la sorte s'inscrire dans la lignée du saint roi et rehausser le prestige de leur résidence. Six de ces copies subsistent, à Vincennes, Riom, Châteaudun, Aigueperse, Champigny-sur-Veude et Vic-le-Comte. Notons que le terme «Sainte-Chapelle» ne date que du XVIe siècle ; au Moyen Âge, on parle plutôt de chapelle privée, autrement dit de chapelle tenant lieu de paroisse pour le maître du lieu...

 

 

Un jour... une histoire... 24 avril 1617

Publié à 07:13 par acoeuretacris Tags : un jour 24 avril
Un jour... une histoire... 24 avril 1617

 

24 avril 1617 : Assassinat de Concini

 

Concino Concini, alias «Conchine» (prononciation à la française de Concini), est un intrigant italien qui a épousé la soeur de lait de la reine-mère Marie de Médicis, Leonora Dori, dite la Galigaï. La régente lui a remis le gouvernement du royaume et l'a fait marquis d'Ancre et même maréchal et amiral sans qu'il ait jamais combattu ni commandé de navire. Au grand mécontentement de la cour, ce clan pille sans vergogne le Trésor cependant que Marie de Médicis s'adonne sans limites à sa passion des bijoux et de l'astrologie. Le favori commet aussi l'erreur de rudoyer le jeune Louis XIII.

Le 24 avril 1617, celui-ci le fait assassiner avec le concours de son ami Albert de Luynes. «Merci, grand merci à vous ! À cette heure, je suis roi !» s'exclame le souverain (17 ans) à l'adresse des assassins. La ville d'Ancre, en Picardie, est aussitôt rebaptisée Albert en l'honneur du nouveau favori (la rivière qui la traverse a conservé le nom d'Ancre).

Par ce «coup de majesté», Louis XIII affirme son autorité. Mais il a aussi la mauvaise idée d'écarter Armand du Plessis de Richelieu, conseiller efficace de sa mère, au profit de l'inepte duc de Luynes. Il se ravisera sept ans plus tard...

Un jour... une histoire... 23 avril

Publié à 20:25 par acoeuretacris Tags : un jour 23 avril
Un jour... une histoire... 23 avril

 

Don Quichotte

 

23 avril 1616

Shakespeare et Cervantès au paradis des poètes

 

William Shakespeare et Miguel de Cervantès sont morts le 23 avril 1616 (ou peut-être le 22, les chroniques étant imprécises à ce propos).

 

Ne croyons pas pour autant qu'ils sont morts le même jour ! L'Angleterre, réticente aux innovations du continent, vivait encore avec le calendrier julien tandis que l'Espagne avait de longue date adopté le grégorien. De sorte que Cervantès a devancé Shakespeare de onze jours au paradis...

 

Ces deux géants de la littérature lèguent à l'humanité des personnages plus vrais que nature. Ils ont nom Don Quichotte et Hamlet, Sancho Pança et Othello, Rossinante et Falstaff, Dulcinée et Juliette...

 

 

Un auteur universel
 

William Shakespeare naît à Stratford-upon-Avon dans la famille d'un riche commerçant. D'après la tradition, il est baptisé le 26 avril 1564 dans l'Église de la Sainte Trinité. C'est dans la même ville qu'il finit sa vie entouré d'honneurs avant d'y être inhumé à l'âge de 52 ans. C'est encore à Stratford qu'il se marie à 18 ans avec une jeune femme illettrée de 8 ans son aînée, Ann Hathaway. Le couple aura trois enfants.

 

 

William Shakespeare

(Par Richard Burbabge)

Cinq ans plus tard, William part à Londres où il peut écrire sous la protection du comte de Southampton auquel il dédie son premier recueil de poèmes, Vénus et Adonis.

 

La troupe de Shakespeare se produit d'abord dans le nouveau théâtre du Globe, sur la rive droite de la Tamise, puis, après 1608, dans la salle des Black Friars.

 

Le poète et dramaturge anglais se montre excellent connaisseur de la nature aussi bien que des hommes (il cite pas moins de 108 plantes dans Roméo et Juliette). Il fréquente les tavernes avec la même aisance que les châteaux. Ses succès théâtraux et ses qualités d'investisseur lui permettent de jouir à Stratford-upon-Avon d'un coquet patrimoine.

 

Shakespeare est le plus fécond de tous les artistes qui s'épanouirent à Londres, à la fin du XVIe siècle, sous le règne brillant et agité d'Elizabeth 1ère. Christopher Marlowe, qui aurait pu rivaliser avec lui, fut prématurément tué dans une taverne.

 

Shakespeare n'en demeure pas moins très mystérieux. On ne connaît qu'un mot écrit de sa main. C'est son nom. Cette précieuse relique est conservée au British Museum. On a longtemps aussi imaginé ses traits d'après le portrait dit de Chandos (en haut à gauche), hélas réalisé après sa mort.

 

 

William Shakespeare

(Cobbe, portrait réalisé en 1610)

 

En mars 2009, le professeur Stanley Wells a authentifié le portrait dit Cobbe comme étant celui du poète. Ce tableau réalisé en 1609, de son vivant, serait donc plus près de la réalité que le précédent. Tant mieux car il nous révèle un homme du monde, tout à fait séduisant, à mille lieues du poète exalté et sombre que donne à imaginer la lecture de ses oeuvres.

 

Le film Shakespeare in Love (1998) tire parti des obscurités de la biographie de Shakespeare pour en tirer une piquante intrigue et, par la même occasion, dresser le portrait de cette époque pleine de bruit et de fureur.

 

 

Soldatde fortune
 
 

Né en 1547 à Alcalá de Henares, en Castille, Miguel de Cervantès est aussi représentatif de l'Espagne de Philippe II que Shakespeare de l'Angleterre élizabéthaine... Mais il est vraisemblable qu'il ignorait tout de son contemporain.

 

Fils d'un chirurgien couvert de dettes et d'une juive convertie, il se révèle un aventurier à l'image de son héros et des conquistadors qui conquirent l'Amérique et firent la gloire de l'Espagne. Après des études en Castille et en Andalousie, il est engagé à 22 ans par le cardinal Acquaviva, légat pontifical. Il l'accompagne à Rome puis rejoint la Sainte Ligue pour participer à la bataille de Lépante contre les Ottomans. Il perd dans la bataille la main gauche («pour la gloire de la droite», dira-t-il plus tard), ce qui lui vaudra d'être parfois qualifié : «Manchot de Lépante» !

 

 

Miguel de Cervantès

 

Mais ses ennuis ne font que commencer. Il est plus tard capturé par les Barbaresques et emmené comme esclave à Alger. Il y reste pendant 5 ans. Le 19 septembre 1580, son maître Hassan Pacha s'apprête à prendre la mer pour Constantinople lorsque son captif est racheté in extremis par les pères Trinitaires pour 500 écus.

 

Cervantès se marie et s'établit à Séville où il est nommé commissaire aux approvisionnements des galères du roi Philippe II qui prépare la Grande Armada en vue d'envahir l'Angleterre. Ses aventures nourrissent ses premiers ouvrages. Il fait jouer plusieurs pièces aujourd'hui perdues et publie Galatée (1585). Mais il n'est pas au bout de ses peines. Jalousies et affaires douteuses lui valent plusieurs emprisonnements.

 

Cervantès attend l'âge canonique de 57 ans pour publier la première partie de Don Quichotte ! C'est seulement alors que s'affirme sa maîtrise de l'écriture.

 

Mis en vente à 1200 exemplaires dans les boutiques de Madrid le 16 janvier 1605, le roman recueille immédiatement un immense succès. Son succès à l'étranger bénéficie du très grand prestige dont jouit alors la langue castillane dans toutes les cours européennes peu ou prou liées à la dynastie des Habsbourg.

 

La deuxième partie de Don Quichotte est publiée en 1625, après la mort de l'écrivain, et la popularité de son héros ne se dément pas. Tous les Espagnols connaissent au moins la première phrase du roman : «En un lugar de la Mancha cuyo nombre no quiero acordarme...». -

 

Les deux visages de l'Espagne

 

Notons que Cervantès, l'écrivain blasé et moqueur, est contemporain du peintre d'origine crétoise Domenikos Theokopoulos (1541-1614). Surnommé El Greco (Le Grec) dans son pays d'adoption, celui-ci exprime mieux qu'aucun autre l'âme mystique religieuse de l'Espagne, qui a mené la Reconquista (la croisade contre les Maures de Grenade) et se lance avec la même ardeur dans la Contre-Réforme catholique.

 

 

Un jour... une histoire... 22 avril

Publié à 07:49 par acoeuretacris Tags : un jour 22 avril
Un jour... une histoire... 22 avril

 

22 avril 1637

L'insurrection des Croquants
 
 
 
 Les dernières années du règne de Louis XIII sont marquées par des révoltes anti-fiscales, dont la plus célèbre est celle des Croquants (surnom méprisant donné aux paysans), en 1637 (d'autres révoltes de Croquants, moins importantes, avaient déjà secoué la France dès le règne d'Henri IV, père de Louis XIII).
 
 
 
 
Misères du Grand Siècle

Exaspérée par la création de nouvelles taxes et la présence de troupes dans les campagnes, auxquelles une ordonnance contraint de fournir des rations de blé, une partie de la population du Périgord se soulève donc le 22 avril 1637.

Dirigés par un gentilhomme, La Mothe-La-Forest, les insurgés s'attaquent aux collecteurs d'impôts et forment une armée de quelque 8000 hommes. La rébellion s'étend, atteint le Haut-Quercy, entre Lot et Dordogne. 3.000 hommes de l'armée royale sont obligés d'abandonner la surveillance de la frontière espagnole pour venir mater le soulèvement, au prix d'un millier de victimes. Les chefs des Croquants sont condamnés à mort, au bannissement ou aux galères mais la masse des paysans et villageois est traitée avec plus de mansuétude. Le Premier ministre, le cardinal de Richelieu, accorde une large amnistie, ayant besoin de toutes ses forces pour combattre l'Espagne.

Selon l'historien Yves-Marie Bercé, la révolte des Croquants constitue «la plus grande crise d'insurrections populaires de la monarchie», même si elle a été moins meurtrière que la Grande Jacquerie de 1358. Les années 1636 et 1637 sont également marquées par des manifestations en Bretagne, où la rumeur courait que la gabelle allait être introduite, et des soulèvements dans le Poitou.

 

Révoltes des champs, révoltes des villes

Deux ans plus tard, en juin 1639, la décision d'introduire la gabelle en Normandie alors que de nombreux paysans vivent de la production de sel autour du Mont Saint-Michel, provoque la révolte des Nu-pieds. Ils réclament la suppression de tous les impôts établis après la mort d'Henri IV. À Rouen, les commerçants s'insurgent contre la création d'une taxe sur les étoffes teintes. Le soulèvement est écrasé avec plus de dureté que celui des Croquants.

Dans un contexte de montée de l'absolutisme, la centralisation administrative et la mise en place d'une fiscalité homogène s'imposent dans la douleur. On est à l'époque où, ému par la grande misère du peuple, Saint Vincent de Paul fonde les Filles de la Charité, un ordre au service des malades et des enfants trouvés (1634).