L'atoll de Bikini
le bikini, la première bombe an-atomique !
Ursula Andress "James bon contre Dr No" 1962
“Plus petit que le plus petit maillot du monde”
En 1946, s'inspirant du nom de l'atoll de Bikinioù eut lieu le premier essai nucléaire américain, un fabricant de maillots de bain français, Louis Réard, lance un maillot de bain "révolutionnaire" du même nom et dépose un brevet. Il s'inspire alors de la création d'un autre français, Jacques Heim, qui avait précédemment lancé "Atome", un maillot de bain au soutien-gorge drapé ou noué sur la poitrine et d’une culotte short souvent faite de volants.
Le bikini, lui, vendu dans une boîte d'allumettes, “Plus petit que le plus petit maillot du monde”, selon son créateur, avec son soutien-gorge constitué de deux triangles et sa mini culotte qui laisse les fesses et les hanches nues doit pouvoir passer dans une alliance pour prouver son authenticité. Le bikini est lancé avec le slogan "le bikini, la première bombe an-atomique !"
Aucun mannequin professionnel n’a accepté de participer aux essayages.Pour sa présentation le 5 juillet à la piscine Deligny, Réard trouve la parade en faisant appel à Micheline Bernardini, danseuse nue au Casino de Paris. Elle gagne dans l'opération une popularité instantanée. Elle recevra plus de 50 000 lettres de fans.
Micheline Bernardini 1946 présente le bikini à la piscine Deligny
Le lancement du Bikini créera un véritable raz de marée de protestations.Les autorités italiennes, espagnoles et belges l’interdisent, et en France le maire de Biarritz aura recours à un décret municipale pour le bannir. En 1947, on fonde même une association anti-bikini à Rio de Janeiro ! Pour la Vatican c'est une invention du diable, on verra une article de l' Osservatore
Romano affirmer que les chevaliers de l’Apocalypse apparaîtraient sans doute en bikini. Pour Madame Thorez, épouse du Secrétaire général du parti communiste, cette mode bourgeoise humilie la classe ouvrière car le prix du bikini correspond au tiers du salaire d'une dactylographe, "Tout le monde ne peut avoir un Réard", proclamait d'ailleurs la publicité. En 1950 la princesse Margaret défraie la chronique en bikini sur le yacht d'un magnat, aux abords de la Costa del Sol.
Les bikinis sont interdits au concours deMiss Monde .On craint que le maillot ne donne un avantage injuste aux concurrentes qui osent l'enfiler. Les magazines féminins allemands et français le mettent à l’index jusqu’à la fin desannées 50. "Nous savons que nos lectrices dénigrent le bikini, qui a transformé certaines côtes de nos régions en coulisses de comédies musicales et qui de plus n'embellit pas la femme", écrit encore Vogue en 1951.
Symbole d'émancipation pour les uns, de réification de la femme pour les autres,il s'adapte à tous les rôles. Hollywood saura l'exploiter à merveille. Les "bathing beauties" rentrent en scène avec Esther Williams, la pin-up de calendrier Betty Page , ou Marilyn Monroe qui pose en 1948 pour la marque de maillots Jantzen (ce qui n'empêchera pas l'Amérique puritaine de ne le tolérer sur les plages familiales qu'au début des années 1960).
Marilyn Monroe - Rita Hayworth 1948
Brgitte Bardot 1952 dans "Mariana, la fille sans voiles" - 1953 starlette à Cannes
Ce n’est que vers le milieu des années 1950 que le bikini refait vraiment surface. Adopté par les stars de cinéma,il devient synonyme de séduction et de sexappeal. Le bikini participe ainsi au façonnage de l'imaginaire fantasmatique du sex-symbol. En 1953, la reine d'Hollywood, Marilyn Monroe, s'affiche en bikini dans "Les hommes préfèrent les blondes" de Howard hawks, de l'autre côté de l'Atlantique une starlette surnommée BB, initiales de Brigitte Bardot, fait sensation sur la Croisette aux premiers jours du Festival de Cannes, en arborant un bikini. Il adopte des motifs et des matières insolites qui tentent de retenir l'attention : l'actrice Diana Dors fait une apparition au festival de Venise en 1955, vêtue d'un maillot de bain vison, tandis que Jane Mansfield affiche des maillots peau de bête.
Mais à l’époque, le bikini n’est porté que par des starlettes ou des pin up. En 1957, le bikini devient populaire en France grâce au film "Et Dieu créa la femme" avec Brigitte Bardot (qui avait déja tourné en 1952 "Marina la fille sans voiles" de Willy Rozier avec Howard Vernon ou elle faisait déja un abondant usage du bikini) dans lequel elle le portait en toile vichy. Beaucoup de jeunes filles françaises voulurent l'imiter. A l’été 1959, certains magazines féminins reviennent sur leur premier jugement et en ont font le "vêtement de la saison" (Vogue). La découverte d’un nouveau matériau, le lycra permet également le retour en force du bikini.
Au début des années 1960, on voit encore peu de bikinis dans les lieux publics.Le chanteur pop Brian Hyland chante "Itsy Bitsy Teenie Weenie Yellow Polka Dot Bikini", qui sera repris en France par Dalida et Richard Anthony."Itsy Bitsy petit bikini" est un tube et contribue certainement à relancer le produit tout en traduisant très bien l’esprit de l’époque : "Sur une plage il y avait une belle fille qui avait peur d'aller prendre son bain. Elle craignait de quitter sa cabine. Elle tremblait de montrer au voisin... Un, deux, trois, elle tremblait de montrer quoi ? Son petit itsi bitsi tini ouini tout petit petit bikini qu'elle mettait pour la première fois. Un itsi bitsi tini ouini tout petit petit bikini, un bikini rouge et jaune à p'tits pois. Un deux trois voilà ce qui arriva…" (paroles française d'André Salvet). Le sulfureux maillot commence à rentrer dans les moeurs malgré la désapprobation des parents.
Diana Dors au festival de Venise en 1955 en bikini en vison
Joans collins 1955 - une carte postale de 1960
En 1962, Ursula Andress fera faire un bond de géant, au maillot, grâce au film Dr No.Elle sort de l’eau habillée d’un deux-pièces blanc, un poignard accroché à une ceinture et deux coquillages dans les mains. Cette scène culte contribue autant à la célébrité du maillot de bain qu’à celle de l’actrice. Pour la petite histoire Le célèbre bikini porté par Ursula Andress dans le film James Bond contre Dr No a trouvé preneur pour 41 125 livres lors d'une vente aux enchères de Christie's à Londres, il a été acquis par Robert Earl, le co-fondateur des restaurants Planet Hollywood.
Au Brésil Le tube "Garota de Ipanema ", "La fille d'Ipanema",chanson en hommage à une jeune fille de 15 ans adepte du bikini, Helôísa Eneida Pinto, qui débute ensuite une carrière de mannequin et de reine de beauté, fait du bikini l'uniforme obligatoire sur les plages de Rio
En 1963 apparaissent les premiers monokinis, sur la plage de Pampelonne.A partir de 1964, c'est l'affrontement entre les "serviteurs" de la morale publique et de l'ordre et lesporteuses de monokini. En 1965, le monokini se répand un peu partout sur les plages de France et d'Europe.
La même année le magazine Marie Claire consacre le bikini avec un reportage réalisé pour la première fois en plein air,envoyant ses photographes aux Bahamas, à la Martinique - retour vers ces îles qu'évoquait le mot "Bikini". Cette année 1965 on voit aussi apparaître l'utiluisation publicitaire du monokini, le mannequin Tony Lee Shelley pose sur les rives du lac Michigan, seins nus, pour faire la promotion des produits coiffants Vidal Sassoon.
Si le nom de son inventeur est tombé dans l'oubli,la société Réard a fermé ses portes en 1988 , le bikini est devenu un nom générique pour désigner les maillots deux-pièces.
Heloisa Pinheiro, la fille d'Ipanema
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Louis Réard travaillant sur un de ses modèles
Le costume de bain
En France, jusqu'à la Première Guerre mondiale, la séparation des hommes et des femmes sur la plage reste une règle. En 1907, alors que les femmes se baignent dans des costumes de six pièces minimum, la championne olympique de natation Annette Kellerman est accusée d'outrage aux bonnes moeurs pour avoir adopté un une-pièce recouvrant pourtant tout le corps.
À partir de la Première Guerre mondiale, ce sont les dessous et non plus les vêtements de ville qui inspirent le costume de bain.
1943, aux États-Unis, en pleine économie de guerre, une mesure de restriction réduit de 10% le tissu destiné à la confection des maillots de bain féminins. Exit les jupes de bains. Il faut faire preuve de patriotisme, et sacrifiant un peu de dignité, offrir aux regards un peu de peau nue.
Vêtement le plus intime de la garde-robe exposée, qui diffère de la lingerie par le seul choix des matières, le maillot de bain reste le plus révélateur du rapport au corps féminin
Dans les années 30, un maillot de bain en laine tricotée pèse 360 grammes lorsqu’on l’enfile. Et plus de 3 kilos lorsqu’on ressort de l’eau !On est bien loin des maillots de bain des années 60, ne pèseront plus que 100 grammes secs, et moins du double mouillés. A l’origine de l’allégement des matières, la création, par DuPont de Nemours, d’un filament élastique de synthèse, connu sous son nom commercial de Lycra, qui permet aux femmes d’être à l’aise dans leurs gaines jusqu’alors bardées de caoutchouc, car il se détend en douceur avant de reprendre sa forme initiale.
L'Atoll de bikini
Le 30 avril 1946 les Etats-Unis procèdent à un premier essai à Bikini,Atoll de l'archipel des Marshall.Puis à un second au même endroit, le 24 juillet 1946. Bikini, devint ainsi un terrain d'expérimentation où se succédèrent 21 autres essais entre 1954 et 1958. Les retombés radioactives contaminèrent sérieusement Bikini, d'autres îles, et surout de nombreux pêcheurs japonais qui se trouvaient dans les parages. La population déplacée ne put revenir qu'en 1968. Le 23 septembre 1949 le 14 juillet l'URSS annonça à son tour qu'elle venait de procéder sur son territoire à un essai nucléaire.
Diana Dors
Diana Dors 1951
Cette pulpeuse star blonde, considérée comme la Marilyn Monroe anglaise,est à l’apogée de sa carrière dans les années cinquante. Dotée d’un sens de la publicité très développé, elle fait parler d’elle le plus souvent possible par des moyens aussi divers qu’une série de photos sexy en trois dimensions, une exhibition en bikini de fourrure au festival de Venise de 1955 ou encore des confessions "scandaleuses" sur sa vie privée
Diana Dors dévoile sa plastique avantageuse dans de nombreux films des années 1950-1960. Elle apparaît pour la première fois sur les écrans en 1946 dans Shop at Sly Corner (George King). Elle obtient quelques rôles consistants (The Weak and the wicked, J. Lee Thompson, 1953 ; L'Enfant à la licorne, Carol Reed, 1954; The Unholy wife (John Farrow, 1957) qui lui permettent d'introduire dans son jeu quelques nuances dont la critique ne la croyait pas capable. Après un bref passage par Hollywood, où elle ne réussit pas à percer, elle revient en Angleterre où elle trouve à s'employer dans des films de bonne facture : Deep end (Jerzy Skolimowski, 1970), Le Joueur de flûte (Jacques Demy, 1971), Steaming (Joseph Losey, 1983).
Georges Remi, dit Hergé (Etterbeek, 22 mai 1907 - Bruxelles, 3 mars 1983), était un auteur de bande dessinée belge francophone. Georges Remi est né à Etterbeek, une commune de l'agglomération bruxelloise, le 22 mai 1907. Ses parents, Alexis et Élisabeth Remi, appartiennent à la classe moyenne et vivent à Bruxelles. Ses quatre années d'école primaire coïncident avec la Première Guerre mondiale (1914-1918), alors que la ville est occupée par les Allemands. Le petit Georges montre déjà une grande affinité pour le dessin, les marges de ses cahiers sont remplies des aventures d'un petit garçon aux prises avec l'envahisseur allemand. Il entame en 1920 ses études secondaires au collège Saint-Boniface, un établissement archiépiscopal où les professeurs sont des abbés. Il entre dans la troupe scoute du collège, où il recevra le nom totémique de Renard curieux. Ses premiers dessins paraissent dans Jamais assez, le journal scout du collège, puis à partir de 1923, dans Le Boy-Scout belge, le mensuel des scouts de Belgique. Dès 1924, il signe ses illustrations du nom d'Hergé, formé phonétiquement de ses initiales RG.
En 1925, Hergé est engagé comme employé au service des abonnements au journal catholique (et politiquement très à droite) Le Vingtième Siècle. En 1926, il crée Totor, CP des Hannetons pour Le Boy-Scout belge. Ses parents tentent en vain de lui faire suivre des cours de dessin à l'école Saint-Luc. Il effectue ensuite son service militaire en 1926-1927, service durant lequel il continue d'écrire les aventures de Totor pour le Le Boy-Scout belge. À son retour au Vingtième siècle en 1927, son directeur, l'abbé Norbert Wallez, l'encourage à s'instruire et à se cultiver. Hergé effectue pour le journal des illustrations, des portraits, du lettrage, des photographies.
En 1928, Hergé est nommé rédacteur en chef du Petit Vingtième, le supplément jeunesse du Vingtième Siècle. Le premier numéro sort le 1er novembre. Il dessine avec un enthousiasme modéré Les Aventures de Flup, Nénesse, Poussette et Cochonnet, sur le scénario de Desmedt, un rédacteur sportif du journal... Il découvre dans le même temps les comics américains et leur système de bulles, qui permettent aux personnages d'exprimer leurs pensées ou de parler directement dans le dessin. C'est cette même année qu'il se fiance avec Germaine Kieckens, secrétaire de l'abbé Wallez.
Le 10 janvier 1929, dans le numéro onze du Petit Vingtième paraît le premier épisode de Tintin au pays des Soviets, sur commande directe de l'abbé Norbert Wallez : c'est le début des aventures de Tintin et Milou. Le reporter et son fidèle fox-terrier parcourront le monde pendant plus de cinquante ans. Le 23 janvier 1930, Quick et Flupke, les deux garnements de Bruxelles, font leur première apparition. Le jeudi 8 mai de la même année, Tintin et Milou font un retour triomphal à la Gare du Nord de Bruxelles : Le Petit Vingtième a engagé un figurant pour jouer le rôle de Tintin et publie un reportage relatant cette arrivée ; Tintin vient de terminer sa première aventure. Le 9 juillet 1931, fin des aventures de Tintin au Congo : Le Petit Vingtième organise à nouveau une mise en scène à la Gare du Nord, une foule énorme accueille Tintin.
En septembre, notre reporter repart pour le Nouveau Monde (Tintin en Amérique). Hergé commence un peu à se documenter, il lit en particulier un ouvrage sur l'histoire des Peaux-Rouges. Le 20 juillet 1932, Georges Remi épouse Germaine Kieckens. En 1934, Casterman, l'éditeur de Tournai, commence à publier les albums de Tintin (jusque là, ce sont les éditions du Petit Vingtième qui s'en chargeaient). Un album broché en couleurs d'Hergé paraît par ailleurs, qui restera sans suite : Popol et Virginie au pays des Lapinos.
Après les Cigares du pharaon, Hergé désire envoyer son héros en Chine. On le met en contact avec un jeune chinois, Tchang Tchong-jen, étudiant à l'Académie des Beaux-Arts de Bruxelles. Celui-ci pousse Hergé à s'informer et à se documenter sérieusement sur les pays que visite Tintin. Il le sensibilise à la situation en Chine. À travers le Lotus bleu, première aventure de Tintin dotée d'un scénario solide, Hergé prend position en faveur du peuple chinois, qui subit l'occupation japonaise. On est loin des premières aventures de Tintin, où Hergé ne faisait que refléter la mentalité de son époque et de son milieu : l'anticommunisme virulent (Tintin au pays des Soviets) et le colonialisme paternaliste (Tintin au Congo) ou l'anti-américanisme (Tintin en Amérique), très à la mode à l'époque. Pour Hergé, la bande dessinée devient de moins en moins un amusant passe-temps, et de plus en plus un travail très sérieux.
En 1935, l'hebdomadaire français Cœurs vaillants trouve que Tintin n'est pas forcément un bon modèle pour la jeunesse : pas de parents connus, il ne va pas à l'école, il ne travaille pas beaucoup... Hergé avait pourtant été contacté plusieurs années avant pour la parution de Tintin première manière dans Cœurs Vaillants, mais ce journal estimait une bande à base de seuls phylactères trop peu littéraire pour son public (les « histoires à ballons » comme on les nommait alors étaient considérées comme appauvrissant le vocabulaire des jeunes lecteurs compte tenu de leur absence de descriptions).
Il demanda donc des commentaires en dessous de chaque image, comme dans les œuvres du siècle précédent de Christophe. Hergé s'y essaya, et on peut parfois voir dans les expositions qui lui sont consacrées une partie de ces essais, mais au bout du compte considéra que ce style serait trop redondant et briserait de surcroît le rythme des scènes d'action. L'affaire était alors restée sans suite.
Le journal, qui a fini par s'ouvrir sur les « histoires à ballons », passe commande à Hergé d'une nouvelle série : Jo, Zette et Jocko. Trois histoires seront publiées sous forme de cinq albums.Entre 1935 et 1940, paraissent successivement L'Oreille cassée, L'Île noire (qui fait suite à un voyage d'Hergé en Grande-Bretagne), Le Sceptre d'Ottokar (le récit d'une Anschluss ratée) et Tintin au pays de l'or noir. Cette dernière histoire est interrompue par la mobilisation de Georges Remi, puis par l'invasion allemande de la Belgique. Le Vingtième Siècle et son supplément jeunesse disparaissent. La publication de L'Or noir ne reprendra que huit ans plus tard. Hergé trouvera en fin d'album une pirouette frustrante pour expliquer l'absence, tout au long de l'album, du capitaine Haddock, devenu entretemps un personnage incontournable des aventures de Tintin.
À partir de 1940, Hergé travaille pour le quotidien belge Le Soir, journal contrôlé par l'occupant. Les aventures de Tintin paraissent d'abord dans un supplément, Le Soir Jeunesse, puis, suite entre autres à des restrictions de papier, sous la forme de strips noir et blanc ; ce sera Le Crabe aux Pinces d'Or, marqué par l'apparition du Capitaine Haddock, puis L'Étoile Mystérieuse, Le Secret de la Licorne et Le Trésor de Rackham le Rouge (le récit sur deux volumes d'une fantastique course au trésor, menée avec l'aide d'un nouveau venu, le professeur Tournesol), et enfin Les 7 Boules de Cristal (une variante de la malédiction de la momie). C'est en 1943 qu'il rencontre Edgar Pierre Jacobs. Le futur créateur de Blake et Mortimer aide Hergé à refondre ses anciens albums, pour les coloriser et les faire tenir dans le cadre strict des soixante-deux pages (jusqu'ici, certaines des aventures de Tintin faisaient jusqu'à cent trente pages), en raison des restrictions dues à la guerre.
La parution des 7 Boules de Cristal sera interrompue le 3 septembre 1944. En quelques jours, Hergé est arrêté à quatre reprises, par la Sûreté de l'État, la police judiciaire, le Mouvement national belge et le Front de l'indépendance. Son domicile est perquisitionné. Tous les journalistes ayant participé à la rédaction d'un journal pendant l'Occupation se voient interdire provisoirement toute publication. Pendant cette période troublée, Hergé a écrit des récits d'évasion, évitant de faire référence à la situation politique internationale. On notera cependant que dans la première édition de L'Étoile Mystérieuse, l'expédition internationale à laquelle participe Tintin ne compte que des pays neutres ou membres de l'Axe, et que leur déloyal concurrent est sous pavillon américain et financé par un certain Blumenstein, nom à la fâcheuse - vu le contexte - connotation juive (le nom de Blumenstein sera dans des versions ultérieures remplacé par Bohlwinkel et le pavillon américain par celui d'un pays imaginaire). L'œuvre d'Hergé contient quelques dessins extrêmement douteux dans ce registre ; ils ont tous été corrigés par la suite, peut-être moins parce qu'ils auraient été attaqués que parce qu'Hergé avait sincèrement changé de point de vue. Il est à noter que c'est plutôt avant l'occupation que Hergé peut être désigné comme ayant été proche de Léon Degrelle et des rexistes. Pendant l'occupation de son pays, il se contentera de survivre, sans zèle particulier.
Dans une interview en 1973 il dira : « Je conviens que moi aussi j'ai cru que l'avenir de l'Occident pouvait dépendre de l'Ordre nouveau. Pour beaucoup, la démocratie s'était montrée décevante, et l'Ordre nouveau apportait un nouvel espoir. Au vu de tout ce qui s'est passé, c'était naturellement une grossière erreur d'avoir pu croire un instant à l'Ordre nouveau » (interview accordée au Haagse Post en mars 1973). Et la même année il analysera : « Ma naïveté à cette époque confinait à la bêtise, on peut même dire à l'imbécillité » (interview accordée au magazine flamand Elsevier).
Interdit de publication, Hergé poursuit la refonte de ses anciens albums. En 1946, il est contacté par un ancien résistant, Raymond Leblanc, qui lui propose de créer un journal. Le 26 septembre 1946 paraît le premier numéro de l'hebdomadaire Tintin. De nombreux dessinateurs viennent collaborer au magazine. Les aventures de Tintin se poursuivent: Le Temple du Soleil (qui poursuit l'intrigue des 7 Boules de Cristal), Au pays de l'or noir, Objectif Lune, On a marché sur la Lune. Hergé désirant être particulièrement rigoureux et voulant se documenter au maximum pour ces aventures lunaires, il fonde en 1950 les Studios Hergé. Ces studios compteront jusqu'à une dizaine de collaborateurs qui aideront Hergé dans sa tâche. Les aventures de Tintin continuent d'être publiées dans le journal du même nom : L'Affaire Tournesol, Coke en stock.
Une liaison a débuté en 1956 entre Georges Remi et Fanny Vlamynck, coloriste aux Studios. Son mariage avec Germaine se brise (le divorce ne sera prononcé qu'en 1960, et Georges ne se mariera avec Fanny qu'en 1977). De plus, Hergé est assailli par des cauchemars récurrents, où tout est blanc. Il consulte un psychanalyste suisse qui lui conseille d'arrêter de travailler. C'est pourtant à travers Tintin au Tibet, sans doute son album le plus sombre et le plus intense qu'Hergé exorcisera ses démons. C'est également à partir de 1960 qu'il découvre l'art contemporain, qui deviendra une passion chez lui.
Tintin devient un succès mondial. Les ventes d'albums s'envolent, il est traduit en un nombre toujours plus grand de langues, et il commence à intéresser les publicitaires. Tintin est adapté au cinéma, d'abord sous forme de films avec acteurs (Tintin et le mystère de la Toison d'Or en 1960, Tintin et les oranges bleues en 1964). C'est un jeune belge, Jean-Pierre Talbot, qui interprète le rôle de Tintin. Des dessins animés sont ensuite produits par les studios Belvision. On retiendra notamment une adaptation assez malheureuse du Temple du Soleil (1969), et une aventure sur un scénario original de Greg, Tintin et le Lac aux requins, réalisée par Raymond Leblanc en 1972. Simultanément, les parutions des aventures de Tintin s'espacent de plus en plus : Les Bijoux de la Castafiore en 1963, Vol 714 pour Sydney en 1968 et Tintin et les Picaros en 1976. Tintin est moins une priorité pour Hergé, qui se met à voyager: en 1971, il va pour la première fois aux États-Unis, puis il honore en 1973 une invitation faite trente-cinq ans plus tôt par le gouvernement du Kuomintang (pour le remercier de la prise de position en faveur du peuple chinois dans Le Lotus bleu) en se rendant à Taïwan.
En 1977, Hergé reçoit la médaille de vermeil de la Ville d'Angoulême. En 1978, il est promu au grade d'officier de l'Ordre de la Couronne, à Bruxelles. Il débute cette même année le travail sur un nouvel épisode de Tintin. En 1979, Andy Warhol réalise une série de quatre portraits d'Hergé. En 1980, Georges Remi tombe malade. Une leucémie sera diagnostiquée par la suite. Il est anémié et très faible. Le 18 mars 1981 ont lieu les retrouvailles entre Hergé et Tchang Tchong-jen, l'ami chinois qui avait inspiré le Lotus bleu et le personnage de Tchang, le seul qui aura pu tirer des larmes à Tintin (Tintin au Tibet).
Hergé s'éteint après une semaine de coma le 3 mars 1983 à la clinique Saint-Luc de Bruxelles. Tintin et l'Alph-Art, la dernière aventure du reporter, paraît sous sa forme inachevée en 1986 (une seconde version présentant des planches inédites sera publiée en 2004).